Quote:Le seul référent commun à tous les samurai à mon sens, c'est le fait qu'ils servent

Maintenant, servir pour un Asahina, un Kuni, un Hida, un Matsu, un Daidoji, un Kakita, ça signifie servir différemment car servir à la fois des intérets et des valeurs spécifiques qui elles sont censées faire partie intégrante de l'Empire

De même que si l'éthique du samurai-guerrier est prévalente, il est évident que la plupart des shugenja (Isawa et Asahina notamment) ou des courtisans bien qu'étant des samurai ne vivent pas tellement cette éthique mais privilégient d'autres aspects de l'image idéale et stéréotypique du samurai (peu de Matsu, de Hida ou de Moto se lancent dans la calligraphie, la poésie, l'étiquette…)

L'honneur, et les vertus des samurai, sont une forme d'idéal synthétique, point

Plutôt que de reprendre le concept développé autrefois dans le Guide de Survie du Maitre ou l'on détaillait pour chaque clan majeur ce que telle vertu ou telle faute rapportait/coutait en honneur, je préfère personellement une position plus souple et plus individualisée

Il y a pour moi perte d'honneur soit si :
- le pj agit en contradiction avec les valeurs de son école/de sa famille
- il agit à l'encontre de ce que l'on attend d'un samurai, selon sa position sociale (on attend d'un daimyo qu'il commande mais aussi qu'il protège, alors qu'on attend de son soldat qu'il combatte et qu'il obéisse)

Je n'ai pas créé de table, parce que je n'en ai pas besoin. Si on a un souci, on prend 5 minutes, on en discute calmement et on le règle. Sinon, tout doit couler le plus naturellement possible. A partir du moment ou on considère que telle chose est déshonorante pour tout le monde (comme d'utiliser une compétence dévalorisante), alors dés la création du personnage, je rappelle au joueur ma vision de son école/sa famille : s'il y a exception en la matière par exemple (les Mantes et les armes paysannes sont l'exemple type, ou les ronin et les compétences dévalorisantes).

Ensuite, comme je le rappelle parfois, l'Honneur est un indice, pas une stat. D'ailleurs, quand on veut s'en servir comme stat (style en faisant un Jet d'Honneur), c'est assez risqué en soi. Ca ne me dérange pas qu'un pj ait un score minable en honneur mais j'essaye d'encourager les joueurs à se montrer plus malins : l'honneur est un barème et plus un samurai agit afin d'être honorable et respectueux des vertus, plus je fournis d'opportunité que les autres s'en rendent compte alors que l'hypocrite qui fait semblant d'être honorable n'aura rien d'autre que ce qu'il obtiendra par ses propres moyens.

Et non, ça n'amène pas les joueurs à incarner des paladins. Parce que les paladins auxquels on demande de sacrifier leurs propres enfants pour le clan, de mentir pour leur seigneur, de tuer un innocent parce que personne ne veut que le vrai coupable soit publiquement disgracié, ça court pas les rues…

Le tout n'est pas de gérer l'Honneur en termes numérique mais de s'en servir afin d'aider le joueur à mieux positionner son personnage, son évolution, ses réactions (ou absences de réactions…) dans le cas de dilemmes moraux ou éthiques. Souvent, je ne dis rien sur le moment quand un samurai fait qqchose de déshonorant… et j'attends l'occasion de le mettre devant les conséquences de ses actes. Et à ce moment là, lorsque pour le joueur comme pour son personnage il est indéniable que la vérité est enfin évidente, alors l'Honneur chute en conséquence.

J'essaye d'intégrer l'honneur dans le flux continu de la campagne qui ne repose pas tant sur un concept ou une trame que sur une approche que je résumerai ainsi : la Loi des Conséquences

De la même manière que celui qui cherche le pouvoir à travers la maho finira par en payer le prix, tous les autres chemins ont leurs embuches, leurs conséquences et si certaines sont prévisibles (voire même attendues socialement), d'autres le sont moins.

Le tout est d'arriver à montrer au joueur que si tel événement se produit, c'est parce que c'est lui qui a initié l'impulsion d'origine. Même si l'événement n'a aucune importance, même s'il ne dure que dix secondes, ou le temps d'une phrase

J'y arrive rarement mais mon dieu, quand j'y arrive, c'est apprécié par tout le monde.

C'est tellement plus vivant comme cela, lorsque les règles aident à couler dans le sens de la rivière que nous batissons ensemble et pas à se prendre le chou pour deux chiffres.

Penombre Wrote:hé bien, lorsque j'ai pré-testé Kyuden Ikoma à ma table, un des joueurs qui incarnait Kakita Ryu, duelliste de son état et pnj apparaissant dans ma nouvelle campagne a eu un petit couac question honneur. Je l'avais détaillé par ailleurs sur la Voie mais comme je sais plus ou j'ai mis la référence, je ressors le truc. Ca vaut ce que ça vaut mais c'est comme cela que j'aime procéder :

* les circonstances
- Ryu apprend qu'une samurai-ko, Mirumoto Ryoko, accuse un ambassadeur du Renard de lui avoir fait des avances. Il sait que son "ami" Kakita Tetsuo également duelliste mais dont il a eu la preuve du manque flagrant d'honneur va certainement défier la jeune femme en se faisant champion de l'ambassadeur (qui n'a aucun bushi avec lui), ce qui lui permettra a) d'écraser une Mirumoto et b) de se la péter en Gloire

c'est ce que soupçonne Ryu et de fait, il a entièrement raison

alors, partant d'un bon sentiment, il se dit que la jeune femme a probablement raison mais que s'il laisse son ami se proposer comme champion à sa place, il va la trucider

il décide donc de se proposer comme champion de l'ambassadeur histoire de défaire (sans la tuer), la samurai ko, ce qui de son point de vue est une bonne chose puisqu'il va épargner la vie de la fille tout en montrant la supériorité de l'école Kakita sur celle des Mirumoto

le duel a lieu et il brise le poignet de son adversaire qui doit déclarer forfait, présenter ses plates excuses et manque de peu terminer en seppuku... sauf que le supérieur de la jeune femme juge plus avisé de la laisser mariner sur les conséquences de son impétuosité

et notre vaillant Ryu s'en va, pas mécontent de lui

il oublie qu'il a non seulement défié une femme qui avait certainement raison d'accuser celui dont il s'est fait le champion mais qu'en plus il l'a fait en partant du principe qu'elle serait forcément vaincue par son "ami" qui la tuerait et qu'il voulait également assurer la suprématie de son école sur celle de la samurai-ko. En clair, il a laissé son orgueil de duelliste et son manque de respect envers une femme membre de l'école traditionellement opposée à la sienne prendre le pas sur le reste et il s'est fait délibérément le champion d'un menteur pour humilier une femme dont il soupçonnait qu'elle était dans son bon droit

le joueur avait décrit Ryu comme un duelliste par l'esprit, se voulant digne héritier de l'honorable Kakita et l'avait affublé du désavantage Idéaliste

donc voilà les faits...
moi, derrière le paravent, je dis rien, on passe à la suite, les évènements s'enchainent
et puis durant les séances qui suivent, Ryu fait un cauchemar a répétition, toujours le même ou il rencontre à nouveau la jeune femme près d'un arbre blanc aux feuillage de sang (un mauvais présage d'après le Guide du Maitre) et son rève s'arrète au moment ou ils vont s'affronter alors qu'il est convaincu que cette fois il va perdre

le temps passe... et le joueur fait comme si de rien n'était, son perso aussi d'ailleurs

un jour, Ryu arrive devant un arbre blanc aux feuilles de sang et lorsqu'il se retourne pour voir si elle est là, son adversaire arrive également

Et là, je dis au joueur "pour ce combat uniquement, tu es frappé du Désavantage : Némésis, tu ne peux donc utiliser ton Vide contre elle"

dur pour un Kakita rang 2 pas vrai ?

ils s'affrontent et cette fois, c'est elle qui le défait

alors, le joueur me regarde, les autres le regardent, je lui dis
"tu te rends compte que tu l'avais insultée lors de votre première rencontre. Si Ryu avait été à sa place et qu'elle se serait faite champion d'un menteur pour soit disant l'épargner, tu en aurais pensé quoi ?"

et il a donc assumé les conséquences de son acte : il a perdu son duel mais il s'en est sorti vivant. Elle lui a juste rendu la monnaie de sa pièce

sauf qu'à ce moment là, Ryu a compris a quel point il s'était montré présomptueux et indigne du nom de Kakita qui lui respectait ses adversaires et ne les affrontait pas par orgueil ou par condescendance

alors il a pris ses 5 points d'honneur dans les dents, avec un point de plus parce qu'il était Idéaliste et lui et son adversaire se sont séparés en froid mais tous deux parfaitement au fait de ce qui s'était passé

et le joueur n'a pas bronché

d'un acte anodin, j'ai réussi à faire un truc à la fois "mystique " (il a vaincu en défendant un menteur, il est défait en défendant son propre honneur) et "éthique" si j'ose dire

est ce que ça veut dire que ça marche toujours comme ça ?

non, ça serait trop beau pas vrai ?

est ce que ça veut dire que tous mes joueurs sont comme ça ?
non, ça aussi ça serait trop beau

mais quand un joueur a la "bonne" mentalité c'est à dire qu'il vient pour jouer sans marcher sur les pieds des autres ou faire ses caprices, le jeu aussi restrictif soit-il n'a pas d'importance. Il ne s'agit pas de "bon" mj ou de "bon" joueur mais de savoir pourquoi on est là tout simplement

je préfère un gars qui ne sait pas faire deux phrases mais qui joue son perso et qui respecte les autres autour de la table qu'un beau parleur soit-disant champion du roleplay qui va emmerder le monde plus qu'autre chose (je caricature)

quand je ne tombe pas sur ce genre de cas, alors mon job c'est de les aider à mieux vivre leur persos et leur groupe, rien de plus

quand j'ai affaire à un narcissique, mon job est moins marrant mais ça consiste à lui dire qu'il n'a rien à faire là s'il ne joue que pour lui-même sans respect pour personne d'autre

s'il ne comprend pas, je gère quand même jusqu'au moment ou je le mets dehors

en 22 ans de jdr, je l'ai fait deux fois... et trois fois des joueurs sont partis d'eux-mêmes sans que ça arrète les autres ce qui en dit long sur à quel point ils leur manquaient...

on peut rester amis ou potes sans forcément partager tous nos loisirs et ceux qui ne peuvent pas comprendre cela feraient bien de digérer ce qui leur arrive dans le jeu de rôle parce que dans la vie ça sera bien pire...

et ça marche très bien, parce que je ne "choisis" pas mes joueurs mais que je ne force personne à rester jouer à une table ou je maitrise. Je n'attends rien d'eux si ce n'est de foutre la paix aux autres joueurs même si leurs persos se font des crasses et de ne pas faire de l'anti-jeu. Lorsque je vois se pointer un psychopathe, je lui dis d'entrée qu'il n'a rien à faire là et au revoir. Je pense qu'on peut être ouvert et accueillant sans forcément avoir à se forcer à accepter des gens dont on sait pertinemment qu'ils ont autre chose en tête que venir jouer. S'ils veulent se défouler, ou se confier ou autre chose, on peut le faire avant, ou après ou indépendamment des parties mais quand on vient pour jouer ensemble, on fait tous un effort ou je plie bagages et je jette tout le monde dehors, point

je ne pense pas être un mj exceptionnel ou avoir des joueurs exceptionnels, simplement nous sommes la plupart du temps d'accord pour que chacun fasse un tout petit peu d'efforts pour que tout le monde s'éclate davantage

mes joueurs, toutes campagnes confondues, ont jusqu'à 12 ans de moins que moi ou 2 ans de plus, ça n'est pas une question d'âge non plus

simplement, il faut arriver à savoir ce que les autres attendent, s'il viennent pour partager une histoire à plusieurs, c'est du jeu de rôles. Peu importe si c'est de la baston, de l'intrigue, du dialogue, c'est une histoire à plusieurs

s'ils viennent pour se la péter, ou emmerder le monde, ou montrer qu'ils peuvent être chiants comme pas deux, ou parce qu'ils s'emmerdent depuis que leur copine les a largué, on ne joue pas. Ou à la limite on se fait un one-shot spécial défoule

tant qu'on ne mélange pas les genres, tout se passe plutôt bien.

et si c'est faire preuve d'intégrisme ou d'étroitesse d'esprit que de penser ainsi, tant pis

Bushido Wrote:Gi : la juste décision dans l'équanimité, la juste attitude, la vérité. Quand nous devons mourir, nous mourons. Rectitude.