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6e Episode : La bannière du Lion - Darth Nico - 16-01-2009

CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE

<span style="color:orange">Les 5 Rônins : 6ème Episode</span><!--/sizec-->
Boeuf et Tigre 401



La bannière du Lion<!--/sizec-->


Samurai

Il faisait grand vent, et un grand vent d'hiver glacial, sur les hauteurs du palais. La Cité du Cri Perdu était engourdie de sommeil et de froid.
C'était le petit matin et le capitaine Otomo Jukeï faisait le tour des remparts, suivi de deux gardes du corps.
La nuit était à peine éclaircie par de timides lueurs à l'est.
Il se mit à pleuvoir. Un serviteur s'approcha avec une ombrelle. Jukeï resta appuyé sur les remparts un moment, à contempler la ville grise, frileuse. Quelques marchands dans les rues lourdes de neige. Des lumières dans les auberges.
Le capitaine se décida à rentrer, quand il entendit gronder l'orage dans les cieux assombris.
A l'intérieur, il faisait une tiédeur agréable. Le gouverneur avait fait mettre des décorations car, puisqu'on passait la majeure partie de l'hiver à l'intérieur, il fallait bien combattre la morosité. Et en particulier la morosité que Jukeï portait sur le visage !
Il arriva dans la salle principale, où le Gouverneur Ikoma Mondô s'attablait pour son repas du matin. Un serviteur lui passait une serviette autour du cou et on lui présentait ses baguettes.
- Ah, Jukeï-san ! Déjà trempé à cette heure-ci ! Alors qu'il fait un temps à ne pas mettre un chien dehors !
Les serviteurs apportaient une soupe brûlante et du riz.
- Que vous arrive-t-il, Jukeï ? N'avez-vous pas réussi ce que vous veniez faire ici ?
Il n'y avait que les deux hommes, et les serviteurs qui faisaient des allées et venues.
- Vous vouliez chasser les rônins, vous les avez chassés...
Le Gouverneur disait cela sans animosité. Il avait fait confiance à ce "clan du Loup" pour protéger son quartier marchand, et les rônins s'étaient bien acquittés de cette tâche. Mais il n'allait pas non pleurer leur départ.
- Du reste, je me demande à quoi bon, car ces rônins iront ailleurs...
Jukeï enrageait.
- A côté de cela, ajoutait le Gouverneur, on me rapporte la destruction d'un temple près d'ici. L'ordre du Lotus Blanc.
Mondô finit sa soupe :
- Non que ça me soucie non plus, car ce n'était qu'une bande de frénétiques adeptes de la douleur. Je n'ai jamais cru à la sainteté de ces gens-là. Les Matsu verront ce qu'il convient de faire, car le Lotus Blanc était sur leurs terres.
- Vous pourriez aussi mentionner la disparition de ce... Lotus Noir...
- Ah oui, vous avez raison. Des marchands, hein ?... Enfin, de drôles de marchands, à ce qu'on m'a rapporté. Le genre conspirateurs. Si vous me passez l'expression, je crois que le clan du Loup leur a botté le derrière !
Mondô sourit. Il était dur avec le capitaine mais ce dernier l'avait cherché : depuis des semaines, il s'était ingéré dans ses affaires ; il avait presque pris sa place. Aujourd'hui, on en voyait les conséquences.
Jukeï, lui, ne comprenait pas que le Gouverneur puisse prendre tout ça à la légère !
Mais pour lui, cela ne changeait pas grand'chose, c'était vrai. Des rônins en moins, quelques marchands morts, des moines tués en-dehors de sa Cité... Des broutilles...

Mais voilà : Tange Sazen s'était échappé !
Jukeï en devenait malade : il avait passé l'hiver presque entier dans cette ville stupide parce qu'il savait que Sazen y viendrait, et le rônin lui avait filé entre les doigts. A cause de ce Gouverneur, trop tolérant envers les rônins et qui l'avait freiné pour aller fouiller le quartier marchand !

C'était à peine si Mondô avait entendu parler de Tange Sazen. Et pour le peu qu'il en parlait, il s'en fichait comme d'une guigne.
- Vous savez, Jukeï-san, c'est tout à votre honneur de pourchasser sans relâche, en plein hiver, des ennemis du Gozoku. Ceci dit, c'est peut-être accorder beaucoup d'importance à une bande de misérables, qui n'ont aucune place dans l'ordre céleste et qui ne se tenaient pas trop mal...

Le capitaine finit son repas en vitesse et remercia. Il avait hâte de quitter cette Cité !

Samurai

- Ces provisions ont été réunies à votre intention par Rintaro...
Fujio était là, avec plusieurs serviteurs, les bras chargés de sacs de riz, de légumes et de poissons séchés.
- Merci, Fujio. Tu remercieras Patron-san.
C'était dans une vilaine auberge des faubourgs de la Cité du Cri Perdu. Mamoru et Yojiro avaient été envoyés par le clan du Loup. Les deux rônins prirent les sacs sur eux et s'en allèrent rapidement, avant que le jour ne soit levé.
A l'orée du bois près du temple du sud-est de la ville, ils retrouvèrent le clan du Loup, qui s'était installé dans une clairière.
La BEC déposa les provisions :
- Nous ne mourrons pas de faim tout de suite.
Manji les remercia. Yojiro et Mamoru s'assirent autour du feu, avec la douzaine d'autres samuraï qui composaient encore le quatrième repaire. On avalait un repas léger avant le départ.
Juro traçait au sol, sur la neige, un plan grossier :
- La Cité est ici. Je propose de partir vers le troisième repaire, au sud-est, dans ce vallon...
- Je suis d'accord avec toi, Juro, dit Manji, que c'est la meilleure chose à faire. Mais comme je te l'ai dit, nous ne pourrons pas te suivre.
Juro soupira.
- J'ai eu tort de vous monter la tête avec Sazen. J'aurais dû tenir ma langue...
- Il n'y a pas que ce que tu nous as dit, Juro. Il y a aussi cette liste.

On ignorait où était parti Sazen après que Katon avait réussi à le faire sortir de la ville. Il avait laissé une indication : une chambre en ville, où résidait une fille qu'il disait connaître. C'était dans le quartier des tanneurs de peau. Cette fille était hébergée par une famille misérable, en échange de quoi elle faisait le ménage et la cuisine.
Elle s'attendait à la visite des rônins. Les etas s'étaient prudemment écartés quand les Loups, tout enferraillés, certains blessés, étaient entrés chez eux.
Elle se nommait Shinoko. Elle se faisait appeler par les etas la "sans-visage". C'était vrai que son visage avait été plongé dans l'eau bouillante. Elle en avait réchappé mais depuis, elle était méconnaissable. Elle était repoussante à voir, malgré sa voix de petite fille timide. Elle dit que c'était la faute de Sazen si elle s'était retrouvée dans cet état.

Le vieux rônin était passé par la Cité des Apparences, où elle travaillait pour un des plus gros souteneurs de la ville. Elle avait été obligée d'aider Sazen, qui était pourchassé par les Grues. Le rônin, apprenant le sort qui avait été réservé à Shinoko, l'avait emmenée avec elle.
- Pourquoi Sazen, demanda Juro, était-il là-bas, à la Cité des Apparences ?
- Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est qu'il était pourchassé, pour avoir tué deux samuraï. Je suis venue ici avec lui. Il m'a dit de me cacher là. Il y a deux jours, il est venu me dire qu'il partait et que je ne devais pas le suivre. Que je devais partir avec vous.
- Oui, tu vas venir avec nous, dit Juro. Nous ne sommes pas pourchassés autant que Sazen. Nous partons dans un repaire où personne ne viendra nous gêner.
- Avant, il m'a dit que je devais remettre ce papier à "Manji".
- Il a bien dit "Manji" ?
- Oui...

Juro avait emmené Shinoko avec elle, au campement près du temple et avait transmis le papier au chef de son clan.
Sur ce papier, une liste de noms, dont certains barrés à l'encre rouge.
<strike>Daidoji Kazu
Matsu Norio
Kakita Hotta
Hida Toshio
Shiba Takeru
Akodo Isoshi
Asahina Minden et Daidoji Haronobu
Kitsu Moriare</strike>
Matsu Kokatsu
Asahina Bakin
Mirumoto Robun
Shiba Anzaï
Otomo Jukeï

Manji et Katon l'examinèrent :
- La liste des conjurés qui ont détruit le dojo de Sazen, dit Manji. Avec le nom de Jukeï en dernier.
- Il a barré les noms de ceux qu'il a tués...
- Shinoko, tu nous a dit que Sazen a tué deux samuraï à la Cité des Apparences ?
Shinoko était près du feu et mangeait un maigre bol de riz.
- C'est ce qu'on disait oui.
- Donc ces deux samuraï, ce sont les Grues, là : Asahina Minden et Daidoji Haronobu.
- Le prochain sur la liste est Matsu Kokatsu, dit Katon.
- Tu connais des noms sur cette liste, toi ? A part le dernier, ils ne me disent rien.
- J'ai entendu parler de ce nom-là : Kitsu Moriare. Un grand astrologue, reconnu pour sa dévotion au culte des Ancêtres. Un des plus sages shugenja Lion. Je sais dans quelle Cité il habitait.
- Sazen l'aurait assassiné, malgré toute sa sagesse, soupira Manji.
- Malgré toute sa sagesse, ce Kitsu Moriare a participé à la destruction du dojo de Sazen...
- Il faut savoir qui est ce Matsu Kokatsu. Vraisemblablement, Sazen va aller le trouver.
- Vous avez dit quel nom ?
Juro s'approchait :
- Kokatsu vous avez dit ?
- Oui, c'est bien ça : Matsu Kokatsu.
- Vous n'en avez pas entendu parler ? C'est un des plus féroces généraux de sa famille. Depuis des mois, il fait le siège de la Cité des Apparences. Il y a passé l'été, et même pendant cet hiver, il n'a pas levé son campement. On ne sait pas s'il tiendra jusqu'au printemps...
- Bon, alors Sazen doit être en chemin pour la Cité des Apparences, dit Manji.
- Il prendrait de sacrés risques en retournant là-bas, dit Juro. Mais je pense que c'est quelqu'un qui n'a plus rien à perdre.
- C'est pourquoi nous irons le retrouver là-bas, dit Manji.
- Comment ?

Le chef du clan du Loup s'était adressé à ses hommes : puisque chacun était libre parmi la "meute", ceux qui le voudraient partiraient avec Juro au troisième repaire. Les autres suivraient Manji à la Cité des Apparences.
Ce fut vite décidé : les compagnons de route "historiques" de Manji le suivirent. Katon, Maya, Mamoru, Yojiro ainsi que Yatsume furent avec lui. Les autres partaient avec Juro.
Les deux groupes se saluèrent :
- Tu sais ce que j'en pense, Manji, dit Juro. C'est de la folie. Mais enfin. Si un jour, le shinsen-gumi est dans tes pattes, essaie de nous rejoindre et tu seras en sécurité chez nous. Essaie de les semer avant d'arrivée chez nous, quand même...

Un vilain brouillard se formait quand les deux groupes partirent dans des directions opposées, semblables à des fantômes, condamnés à hanter les chemins pour longtemps encore.

A suivre...Samurai


6e Episode : La bannière du Lion - Darth Nico - 17-01-2009

CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE

Le groupe de Manji partit vers le nord-ouest, au travers des terres de la famille Matsu. On entrait dans le mois du Tigre. L'hiver était encore rigoureux. On ne percevait aucun signe du printemps à venir.
De loin, nos rônins pouvaient passer pour une bande de pillards. C'est pourquoi ils évitèrent tant qu'ils purent les grands villages. Ils demandèrent l'hospitalité dans des hameaux isolés, pour éviter de donner l'alarme aux Matsu.

Après des jours de marche sur des chemins boueux, sur lesquels ils ne croisèrent pas dix personnes, ils arrivèrent en vue d'une route impériale, qui menait directement à la Cité de la Croisée des Chemins.
Pour la première fois depuis une semaine, nos héros dormirent sous le toit d'une auberge. Ils avaient presque épuisé les provisions laissées par Rintaro. Il leur restait encore assez de pièces pour se payer quelques nuits à l'auberge. Ils en profitèrent pour avaler un copieux repas. Mamoru et Yojiro se jetèrent dessus, affamés et payèrent la tournée de sake.
- Au fond, demanda Yatsume, que reproche-t-on à Sazen ?
Manji finit sa bouchée de riz et expliqua :
- C'est plus compliqué que ça n'en a l'air. Au départ, une histoire de cocufiage... Des victimes d'un senseï coureur de jupons se liguent contre lui pour le défier en duel. Ils arrivent chez. Ils sont quatorze (comme on l'a appris avec la liste). Ils le défient un par un. Sazen tue les premiers, mais finit par être vaincu. Il en ressort mutilé. De plus, sans doute qu'Otomo Jukeï prononce sa dégradation au rang de rônin.
"Sur ce, vient la version de Juro : il y aurait plus qu'une histoire de coucheries... L'affaire serait plus politique, disons. Sazen et ses élèves ont mis au point dans leur dojo une technique secrète de combat. Peut-être que le Gozoku veut s'en emparer. On envoie Jukeï, qui lance un ultimatum à Sazen : sa technique ou le deshonneur. Sazen refuse...
"Ce qui est sûr, maintenant, c'est que le vieux rônin a l'intention de retrouver tous ceux qui l'ont défié et contre qui il ne s'est pas encore battu. Il a déjà commencé, par exemple avec les deux cousins du clan de la Grue. Et aujourd'hui, il a l'intention de continuer, en retrouvant le général Matsu Kokatsu.
- D'ailleurs, dit Katon, Sazen est passé par cette ville. La Cité de la Croisée des Chemins. Et il a tué le shugenja Kitsu Moriare. Je vais me renseigner sur cette affaire.
- Nous ne pourrons pas faire étape trop longtemps, prévint Manji.

Les rônins prirent leur chambre ; il ne leur fallut pas longtemps pour tomber dans un lourd sommeil. Le lendemain, Yojiro et Mamoru descendaient l'escalier en baillant à s'en décrocher la mâchoire.
Tout le monde avait les muscles endoloris par les marches forcées qu'il avait fallu s'imposer toute une semaine durant.

Katon mit la journée à profit pour se renseigner sur le passage de Tange Sazen. Quelques verres payés dans des tavernes louches lui apprirent l'essentiel : le sage Kitsu Moriare était la bonne âme de la ville. C'était un sage, un guérisseur, un homme investi de la force et de la sérénité de mille ancêtres. Les samuraï le consultaient quand ils avaient une décision difficile à prendre.
Et une fois par mois, il consacrait une journée à recevoir, sur la grand'place de la ville, les gens du peuple. Il faisait installer une tente et du matin jusqu'au soir, des gens faisaient la queue pour venir lui parler.
Sazen avait profité de cette journée pour approcher le noble shugenja. Il s'était glissé au milieu des gens. Une fois dans la tente, il avait menacé Moriare de mort, disait-on. Il avait réussi à s'enfuir dans les rues de la ville, et à quitter la Cité.
- Mais a-t-il tué à ce moment-là le shugenja ?
- On sait que Kitsu Moriare est mort ce jour-là, expliquait un garde du quartier des menuisiers. Il a dû être blessé par ce tueur, et mourir après.
- Où a-t-on retrouvé Moriare-sama ?
- Dans la rue.
- Le jour-même ?
- Le lendemain, en fait, je crois.
- Et Sazen était encore en ville ? Il s'est sans doute enfui aussitôt, non ?
- Ecoute, je ne sais pas trop. Et puis, si j'ai un conseil à te donner, rônin, c'est d'éviter de poser trop de questions à ce sujet. Sazen a tué le noble shugenja, voilà tout.
- Je te remercie.
Katon lui glissa une pièce et lui repaya un verre. Si ce garde pouvait oublier un peu cette conversation !...

Notre shugenja avait de plus en plus de suspicions. Cette affaire sentait le coup monté à plein nez. Dans la tente, Sazen aurait eu tout le temps de tuer Moriare. Ensuite, il aurait été inconscient de revenir en ville, exprès le lendemain, pour l'assassiner, alors qu'il devait avoir les Matsu après lui !
Cela ne tenait pas debout.

Sur la liste, Kitsu Moriare venait après les deux cousins de la Cité des Apparences. Cela ne prouvait pas que les Grues avaient été tués avant Moriare, mais tout de même... Dans ce cas-là, Sazen avait déjà été signalé comme criminel. Les Grues avaient beau être en guerre contre les Lions, ils n'auraient pas hésité à signaler qu'un rônin assassin courait les routes.
Donc, vraisemblablement, Sazen, lorsqu'il rencontrait Moriare, se savait déjà traqué.
Et il venait quand même dans cette grande ville !
Était-il à ce point soucieux de son honneur qu'il tente un coup pareil, au risque de se faire trucider par la première patrouille venue ?... Ce n'était pas inconcevable... Mais cela ne correspondait pas trop à ce que Katon avait vu de Sazen. Il n'aurait pas dit que c'était quelqu'un de deshonorable, une basse crapule, non. Mais il n'avait pas l'attitude de quelqu'un qui mourrait pour son honneur.
D'ailleurs, il ne fallait pas se voiler la face : ce n'était jamais dit explicitement, parce qu'on ne parle pas de ce genre de choses entre rônins, mais Sazen venait probablement du clan du Scorpion !
Un senseï Bayushi, à coup sûr !
Un Lion, un Grue, un Phénix aurait pu risquer sa vie pour son honneur.
Pas un Scorpion. Il avait nécessairement une autre idée derrière la tête.

Etait-il concevable que le Gozoku envoie un capitaine du shinsen-gumi, et treize autres samuraï pour s'emparer du secret d'une technique de sabre ?...

Samurai

Katon continua sa tournée des auberges. Il n'apprit plus rien ce jour-là. Il se retrouva plus tard dans les grands jardins qu'on appelait les Allées des Ancêtres.
Il y avait des parties réservées à chaque caste. L'endroit était presque désert si bien que Katon osa s'aventurer dans les allées des samuraï. Les chemins en pierre passaient près de nombreux petits autels aux esprits des morts. Les arbres grelottaient et les buissons grêles frissonnaient.
La pratique magique des Lions était centrée autour des Ancêtres, et non des Fortunes. On pouvait sentir leurs esprits voyager sur ces chemins, cachés dans un courant d'air, abrités entre les vieilles pierres humides sous la neige.
Katon marchait en silence, la tête basse.
Il entendit des pas derrière et une voix :
- Vous êtes bien Katon, n'est-ce pas ?
Il se retourna : ce n'était pas un Ancêtre qui lui parlait mais un samuraï bien vivant. Bien en chair, de bonnes joues, du même âge que Katon, il portait un somptueux kimono de la famille Kitsu, avec des feuilles d'or et d'argent.
- Les esprits ne nous trompent pas : ils m'ont averti que vous passeriez par ici. Mon nom est Kitsu Jô.
- Enchanté de vous connaître. Je m'appelle bien Katon.
- Marchons, voulez-vous... Approchons-nous du sanctuaire des Esprits...

Ils avancèrent sur un chemin qui longeait un ruisseau aux pierres plates. Ils passèrent un pont et arrivèrent sur une petite île où des papiers votifs, accrochés aux branches dénudées, claquaient dans le vent.
- Le sanctuaire des Esprits est l'endroit où les Ancêtres apparaissent le plus volontiers. Moi qui ai reçu la bénédiction de pouvoir leur parler, je viens quotidiennement ici, pour entendre ce qu'ils ont à me dire.
- Et que vous ont-ils dit récemment ?
- Ils m'ont parlé de vous, Katon... Voyez-vous, dans cette ville, je suis désormais le prêtre du culte des morts. C'est à moi de dire aux vivants ce que les morts veulent. Or, je ne m'attendais pas à devoir assumer si tôt cette charge. En réalité, je ne m'attendais pas à la mort si subite de mon supérieur, Kitsu Moriare...
- Je vois, dit Katon. Savez-vous ce qui lui est arrivé ?
- Il a été assassiné par un criminel, Tange Sazen.
- Si vous le permettez, Jô-sama, je vous dirai que je n'en suis pas si certain.
- Moi non plus, Katon, sinon je n'aurai pas demandé à vous parler. Si je vous ai invité à venir ici, c'est parce cet endroit est sacré : il est protégé par des runes de silence. Rien de ce que nous disons ne pourra sortir d'ici. Et généralement, sourit Jô, concernant les secrets, les Ancêtres restent muets comme leurs tombes...
- Je ne vois pas pourquoi Sazen aurait assassiné Moriare !
- Mais moi non plus, voyez-vous... D'ailleurs, quand Sazen est ressorti de la tête de mon maître, ce dernier, quoi qu'un peu secoué (et on le comprend) ne portait aucune trace de blessure. Ensuite, je sais de sources sûres que Sazen a quitté la ville, précipitamment. Il n'est pas revenu. Et ce n'est que le lendemain que mon maître a été trouvé mort, dans la rue. D'aucuns prétendent que Sazen lui aurait inoculé un poison...
- Je pense que vous savez pourquoi Sazen est venu voir votre maître...
- Oui, soupira Jô. Pour cette vilaine histoire de dojô. Ce n'était pas le genre de mon maître d'accepter si facilement une requête du Gozoku, mais Otomo Jukeï avait souhaité sa présence dans l'expédition. Pour se concilier les Ancêtres je suppose... C'était la première fois que mon maître quittait notre Cité, et il n'a pas aimé du tout... Tout ce sang, ces impuretés...
- Ils sont arrivés à quatorze chez Sazen, Jô-sama ! Ce n'étais pas un duel d'honneur, c'était une exécution en règle !
- Quoi qu'il en soit, je crains que mon maître ne se soit trouvé mêlé à des gens bien peu honorables.
- Que voulez-vous dire ?
- Ho, je ne parle pas que de ce Jukeï. Je crains de devoir dire que, depuis longtemps, mon maître était lié à certaines personnalités influentes du Gozoku...
- Je croyais les Lions plus distants que cela du "gouvernement du peuple".
- Officiellement, mon maître l'était, comme nous tous, Lions, qui désapprouvons cette usurpation caractérisée du pouvoir ! Mais il faut bien dire qu'en privé, il avait la plus grande admiration pour ces gens-là. Au point qu'il ne pouvait rien refuser à un capitaine du shinsen-gumi comme Otomo Jukeï...
- Où voulez-vous en venir ?
- Katon, écoutez-moi bien, car il me pèse de devoir le dire. Mais je crains que mon maître n'ait été lié à de drôles de gens. Il m'arrivait de l'entendre converser le soir, alors qu'il était seul. Une fois, ô rien qu'une fois (les Ancêtres me pardonnent !wink, je me suis aventuré dans sa chambre alors qu'il était sorti... J'y ai vu une drôle de pierre... Intrigué, je me suis promis de retourner voir. J'en ai hélas eu l'occasion, après sa mort. Je suis retourné dans sa chambre et, avec l'aide des Fortunes, j'ai retrouvé la pierre, cachée dans le double-fond d'un coffret.
Katon connaissait ce sort, appelé la Lumière du Seigneur Lune, qui permettait de découvrir n'importe quel objet caché dans une pièce.
- La voici...
Katon l'examina : c'était un diamant, mais qui, sur les bords, était à l'état de charbon. Il s'effritait même facilement. C'était étrange : Katon avait toujours entendu dire que le diamant était indestructible. Et voilà que celui-ci partait en poussière.
- Étrange, n'est-ce pas ?... J'ai examiné cette pierre : il me semble qu'elle ne recèle aucun esprit magique. Ce n'est qu'un diamant ordinaire.
- Un diamant ordinaire ne peut pas s'abîmer ainsi.
- Je n'en sais pas plus, Katon. Ce que m'ont dit les Ancêtres, c'est que vous êtes à la recherche de Sazen. Et moi, je ne crois pas que ce soit lui qui ait assassiné mon maître.
- Qui alors ?... Des "amis" de votre maître, qui se seraient débarrassés de lui ?
- Si seulement nous savions ce que Sazen venait dire à mon maître...
- Sazen, nous le retrouverons, croyez-moi.

Les deux shugenja repassèrent le pont de l'île du sanctuaire et se quittèrent à la sortie des jardins. Katon, gelé, se hâta de retourner à l'auberge où ses amis l'attendaient.

A suivre...Samurai


6e Episode : La bannière du Lion - Darth Nico - 18-01-2009

CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Katon ne raconta pas sa rencontre avec Kitsu Jô. Il se contenta de dire qu'on pouvait avoir de sérieux doutes sur la culpabilité de Sazen.
- Resterait à savoir, dit Manji, s'il est également innocent de la mort des deux cousins de la Cité des Apparences.
- Allons demander à Matsu Kokatsu, dit Yojiro. Si ça se trouve, il a déjà pris la ville d'assaut.

Il fallut reprendre la route après cette brève étape. La BEC avait racheté des vivres. En se rationnant, nos héros auraient assez pour arriver à la Cité des Apparences.

Il leur fallut trois jours de marche loin des grandes routes pour atteindre la frontière nord-est du clan du Lion. Ils avaient dû prendre quelques détours pour éviter de marcher directement dans cette direction car elle portait malheur.
Ils virent d'autres groupes de rônins qui faisaient route vers Toshi Ranbo (la Cité des Apparences). C'est ainsi que nos héros apprirent que le général Matsu Kokatsu n'avait pas retiré son siège pendant l'hiver : il campait toujours près des murailles, sur le pied de guerre pour attaquer dès la fonte des neiges.
- Si vous cherchez quelqu'un à qui vendre votre lame, leur dit-on, Kokatsu est votre homme ! Et même si vous ne voulez pas vous battre : si vous restez dans la région, ses rabatteurs finiront par vous enrôler de force !

Nos héros s'arrêtèrent en vue du camp retranché bâti par l'armée de Kokatsu. En pleine journée, il y régnait une agitation fébrile. Les Matsu effectuaient des manoeuvres ; des rônins creusaient des tranchées et travaillaient aux palissades.
La fière Cité des Apparences était drapé dans le brouillard et ses hautes murailles étendaient une ombre orgueilleuse sur le camp du Lion.
- Il nous faut trouver un moyen de parler à Kokatsu, dit Manji. Il faut que nous sachions ce qu'il sait de Sazen.
- Le problème, c'est que si nous y allons, dit Yatsume, on ne nous laissera pas repartir...
- C'est vrai, dit Katon. Sauf...
- Sauf si..., dit Manji.
Les regards se tournèrent vers Maya. C'était la seule à ne pas être samuraï. Elle était moine et, qui plus est, une Ize-Zumi. Ce qui voulait dire que des Lions ne seraient pas autrement surpris de la voir arriver de nulle part pour parler à leur général. C'était une habitude chez les Dragons, surtout les Togashi, de se présenter sans prévenir.
- Donc, Maya, dit Manji, nous comptons sur toi !

On lui expliqua en détail ce qu'on attendait d'elle, ce qu'elle devait dire... et surtout ce qu'elle ne devait pas dire !
- Sois polie, ne le regarde pas dans les yeux. Dis que ce sont tes Ancêtres qui t'envoient et que c'est une question d'honneur. Et ensuite, dis que tu dois repartir très vite et que la bénédiction des Dragons est sur lui...
Maya sentait une terrible responsabilité lui tomber sur les épaules.
- Nous comptons sur toi, dit Katon.
- Ouais, ajouta Mamoru, c'est pas le moment de foirer !
- Bon, j'y vais, dit l'Ize-Zumi.
Elle partit vers l'entrée du camp. Nos héros la regardèrent et prièrent les Fortunes.
- Je ne sais pas si nous avons fait le bon choix, dit Manji, crispé.
- C'était notre seul choix, nota Katon.
Yojiro, habitué aux infiltrations discrètes, s'approcha plus près. Il entendait indistinctement les deux gardes. Maya arriva près d'eux. Légère et court vêtue, elle attira aussitôt leur attention. Maya commençait à leur parler.
- Tu entends ce qu'elle leur dit ? demanda Mamoru, qui était resté en arrière.
Yojiro fit signe à ses compagnons de se taire : Maya parlait, et parlait...
- Mais qu'est-ce qu'elle leur raconte ? demandait Yatsume.
Yojiro faisait des signes inquiets : elle racontait n'importe quoi !
- Pas claire ton histoire, dit un des gardes, tu vas nous suivre, ma mignonne !
Yojiro revint en courant vers son groupe :
- Je n'ai pas tout entendu mais je crois bien qu'elle s'est emmêlée les pinceaux ! Elle a tout ce qu'elle devait dire dans le désordre !... Et ils la prennent pour un émissaire de Sazen ou quelque chose comme ça !
Nos héros se prirent la tête dans les mains, désespérés.Corbeau
- C'est sûr qu'elle va aller voir Kokatsu, dit Yojiro. Mais ils ne vont pas la laisser repartir de sitôt !
- D'accord, soupira Manji. Rappelez-moi quel était notre plan de secours.
Les autres répondirent en chœur :
- Il n'y en avait pas.
- Parfait...
Nos héros se consultèrent du regard ; puis Manji formula la conclusion qui s'imposait :
- Il faut qu'on y aille.

Samurai

- Vous les rônins là, beuglait un sergent Matsu, par là-bas pour signer!
- D'accord, chef.
Manji et Katon étaient arrivés les premiers. Mamoru, Yatsume et Yojiro se présentèrent ensuite. Les deux groupes furent affectés chacun à un guntaï différent.
On leur donna des armures à peu près correctes et on les envoya à la soupe.
- Nous sommes dans la place, dit Katon, mais tout reste à faire...
- J'ai l'impression que Maya n'est toujours pas ressortie de la tente du général, dit Manji.
- Le gros Lion doit se dire qu'il n'a pas perdu sa journée !

La BEC et Yatsume faisaient la queue pour avoir leur bol de bouillon de légumes. Yojiro soupirait :
- A cause de cette demeurée de Maya, nous voilà enrôlés dans la guerre des Lions ! Par les Ancêtres, ce n'est pas ici que j'aimerais mourir...
- Du calme, dit Yatsume. D'ici le printemps, nous aurons le temps de monter un plan d'évasion.

Yatsume non plus n'était pas enchantée de mettre son yari au service des Matsu. Par le passé, ils étaient des ennemis de son clan !

Les deux guntaï manœuvraient dans des sections voisines du camp. Au bout de deux jours, ils eurent repérés les moments où ils pouvaient se voir et se faire passer des messages par signe. En attendant, ils reprenaient l'entraînement !
Kokatsu exigeait une discipline parfaite dans ses rangs et ne supportait pas le ramollissement !
- Engagez-vous, qu'y disaient, rengagez-vous... grognait Mamoru.
La BEC était affectée à une patrouille autour du camp, à marcher dans la boue en cadence. Ils croisaient régulièrement la patrouille de Katon et Manji, qui tournait dans l'autre sens !
Ils se faisaient des petits signes d'encouragement. Ils remerciaient Maya pour chaque heure passée à préparer la guerre de Kokatsu !

Mais Maya, au fait, que devenait-elle ?
Comme on pouvait s'en douter, elle plut immédiatement à Matsu Kokatsu. Ce dernier était avant tout un militaire, pas un séducteur, mais il savait apprécier la chair féminine. Quand il vit cette Ize-Zumi appétissante, qui tenait un discours incompréhensible, il remercia ses Ancêtres de lui envoyer un peu de distraction au milieu de ces épuisantes journées de préparation.
Maya bafouillait sur Sazen, des complices, Jukeï...
- Je ne comprends rien à ce que tu dis, trancha le vigoureux Kokatsu. Mais tu as l'air d'en savoir beaucoup sur mon passé, toi... Tu m'as tout l'air d'être une espionne !
A ces mots, les lieutenants de Kokatsu saisirent Maya mais Kokatsu leur fit signe de la relâcher et de sortir.
- Je vais m'entretenir avec elle. Nous verrons bien ce qu'elle veut nous dire.
Les lieutenants sortirent de la tente en ricanant, égrillards.

Une fois seul à seul avec Maya, Kokatsu la regarda dans les yeux et dit :
- Je suis Matsu. Je vais donc aller à l'essentiel : qui es-tu ? Qui t'envoie ? Parle et tu ressortiras d'ici saine et sauve.
- Je vous l'ai dit, se plaignit Maya. Je viens vous dire que Sazen est après vous !
- Tu es un ange gardien, si je comprends bien. Tu es descendue du ciel pour me protéger ?
- Je viens vous dire qu'il faut faire attention.
- Ce rônin éclopé, je le verrai approcher à cent lis à la ronde ! Il ne pourra même pas pénétrer dans mon camp !... Ensuite, puisque tu connais Otomo Jukeï, semble-t-il, tu seras ravie : il arrivera dans trois jours ! Oui, tu vas pouvoir lui parler !... D'ailleurs, sa visite n'est pas pour me réjouir : je n'aime pas qu'on vienne me déranger quand je prépare la guerre. Mais c'est ainsi : ces gens du Gozoku n'ont aucun respect pour les traditions... Bref, pour le moment, tu peux aller. Je ne vais pas te garder ici, tu me distrais. Tu resteras à l'écart, avec les domestiques, car si mes soldats te voient, ce sera le printemps avant l'heure !... Va !

Maya obéit et fut emmenée par un soldat chez les cuisinières.
Yojiro et Mamoru la virent sortir du camp. Elle les aperçut également. A ce moment, la BEC n'eut qu'une crainte : que cette éternelle gaffeuse ne les salue devant tout le monde !
Mais elle eut la présence d'esprit de se retenir.
- Il faut s'approcher d'elle, dit Yatsume. Elle est aux cuisines. Donc au prochain repas, il faudra lui parler.
- Vu, dit Yojiro. Je vais prévenir Manji.
Les deux rônins se croisèrent à la tente de réparation des armures.
- Voilà du fil pour tes épaulières, disait le chargé de l'intendance. Mais maintenant, tâche de garder ton armure en bon état ! Tu es dans l'armée des Lions, ici, pas chez les pouilleux !
Manji fit signe à Yojiro qu'ils se recroiseraient le lendemain, même endroit, même heure.

Le soir, c'est Mamoru qui put approcher brièvement Maya :
- Il approche, murmura-t-elle. Il sera bientôt là.
- Qui ça ?
- Jukeï...
- Quoi ?... Mais quand ?
- Dans trois jours.
- D'accord.
Un caporal aperçut le grand rônin :
- Toi là, viens chercher ta ration ou tu resteras le ventre vide ce soir !
D'autres rônins tapèrent du coude Mamoru :
- Alors, mignonne, la petite cuisinière... Dommage qu'"ils" ne l'aient pas mise dans la tente du fond...
Et le lendemain, à la tente de réparation, Yojiro transmit le message : Jukeï serait là dans deux jours.
Manji retrouva Katon :
- C'est une catastrophe. Jukeï est forcément après Sazen. Il sait qu'il sera ici ou à la Cité des Apparences.
- Et il est après nous ! Et il n'aura aucun mal à nous faire arrêter. Kokatsu ne défendra pas quelques rônins recrutés hâtivement.
- Il est clair, dit Katon, que nous devons avoir décampé d'ici avant deux jours. Tu as une idée ?
- Nous avons cette après-midi pour trouver un moyen d'évasion. Et demain, il faudra agir, sans quoi nous sommes perdus. J'ai dans l'idée que Jukeï doit galoper à brides abattues ! Il serait capable d'arriver en avance.
- S'évader, d'accord, mais pour aller où ? Nous serons signalés comme déserteurs.
Manji regarda la plaine rase qui séparait le camp de Toshi Ranbo :
- Les murs de la Cité ne sont pas si loin. De nuit...
- Tu veux entrer dans une ville en état de siège ?
- Nous inventerons quelque chose. Que nous fuyons les rangs des Lions.
- Ils nous abattront sur place !
- Le plus urgent, c'est de sortir, dit Manji. Ensuite, nous verrons bien où nous irons.
- Entendu. Alors, au travail !

Katon fit passer le mot qu'il fallait trouver une faille dans la garde du camp.

A suivre...Samurai


6e Episode : La bannière du Lion - Darth Nico - 18-01-2009

CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

A l'armée, on ne fait pas grand-chose, mais on le fait tôt !
C'était particulièrement vrai chez les Lions, où les premiers exercices commençaient avant l'aube. Il y avait ensuite pour les rônins diverses corvées, dont on ne comprenait pas toujours la finalité : creuser des trous, en boucher d'autres, et utiliser la terre prise des trous pour en reboucher d'autres...
L'idéal était d'occuper tout le monde en permanence, car, selon Kokatsu, l'oisiveté était mère de tous les vices.
- Et encore merci à Maya pour ces corvées, disait Yojiro, alors qu'il crachait dans ses mains avant de commencer à pelleter un nouveau trou.
Pendant ce temps, l'Ize-Zumi coupait des carottes et des navets. Manji et Katon ramassaient du petit bois ; Yatsume et Mamoru portaient des pierres. Et tout le monde chantait pendant ces corvées :
- C'est pas de la soupe, c'est du rata ! C'est pas de la merde, mais ça viendra !...
La chaude ambiance de la vie de caserne !

Manji finissait de ligoter un dernier fagot de bois. Il le chargea sur ses épaules et glissa à Katon :
- Je sais ce que nous allons faire. Avec tout ce bois, tu n'auras pas de mal à mettre le feu au camp...
- Sûr que non ! dit Katon.
- Alors tenons-nous prêts !

L'équipe du bois croisa l'équipe des pierres et c'est ainsi que l'ordre fut transmis d'un groupe à l'autre. Yojiro revenait avec sa pelle sur l'épaule et au passage, fit signe à Maya, qui épluchait des pommes, que c'était pour le soir.

La nuit tombée, Manji et Katon sortirent se mettre prêt du feu. Ils s'étaient portés volontaire pour une ronde de nuit.
- Pas chaud, les gars, hein ?...
- Non, pour sûr, cracha un rônin.
- Espérons que ça se réchauffe un peu, fit Manji en fixant Katon.
- On va prier pour !

Alors que tout le monde ronflait dans la tente de la BEC, Yojiro et Mamoru s'éclipsèrent en douceur. Yatsume sortit de la tente des femmes et retrouva Maya. Ils aperçurent Katon, près du feu, accompagné de Manji.
Le shugenja partit en sifflotant, comme pour satisfaire un besoin dans les buissons. Il alluma un petit feu dans la paume de sa main et promena ses doigts négligemment sur les herbes. La neige fondait, les flammes finissaient par prendre. Le shugenja revint, des flammèches se promenant dans les herbes. Il sourit à Manji et claqua des doigts : les flammèches se transformèrent en flammes dévorantes !
- Alerte, alerte ! cria Manji.
Yojiro arrivait, avec un seau :
- J'ai repéré une sortie peu gardée ! Et les soldats de là-bas vont rappliquer avec des seaux !
Katon fit un geste vers les flammes : elles grandirent encore et prirent plus loin.
- Là-bas, un second foyer ! criait Mamoru.
Katon courut à l'autre bout du camp en portant un seau. Il fit semblant de jeter de l'eau et alluma un nouveau départ.
- Par là aussi !
- Je les ai vus ! cria Manji. Des Grues ! Ils lancent des flèches enflammées !
Un sergent sonnait la cloche. Le camp se réveilla comme une fourmilière : on organisait les chaînes de seau, et des patrouilles partaient traquer les saboteurs Grues.
Une tente prenait feu et partait en torche, tandis que ses occupants se précipitaient au-dehors.
- Là-bas, dit Manji, là-bas !... J'en ai vu trois !
- C'est bien gentil tout ça, souffla Katon, mais nous ne savons pas par où nous partons !
Nos héros se rapprochaient de la sortie non gardée. Ils n'allaient pas être les seuls à tenter de sortir ce soir-là. Déjà, d'autres rônins tentaient de déserter.
- Joignons-nous à une patrouille de repérage, dit Yojiro. Nous en profiterons à ce moment-là !
Kokatsu était sorti, ses capitaines autour de lui. On l'entendait hurler, au milieu de l'agitation folle du camp :
- Tout le monde en armes ! Regroupements par guntaï !
Les capitaines et les sergents transmirent les ordres.
- Que se passe-t-il ? dit Manji.
- On attaque ! On passe à l'attaque !
- Quoi ?
- Le général Kokatsu ordonne l'attaque !
Il faisait encore nuit noire !
Les capitaines passaient dans les rangs :
- En ordre ! Nous devons être prêts à l'aube !
Le camp fut bouclé d'un coup, avec nos héros à l'intérieur !
Et en un tournemain, ils se retrouvèrent dans leurs unités, armés de pied en cap. La discipline chez les Matsu n'était pas une légende. En une heure, l'armée était en ordre de bataille !
Alors que l'aube pointait à peine, Matsu Kokatsu passait à poney devant ses troupes :
- Soldats ! Les Grues nous ont défiés ! Ils ont rompu la trêve sacrée de l'hiver ! Ils veulent la guerre dès maintenant, nous allons leur donner !
Un grand "hourrah" monta des troupes. Attaquer avant la fin de l'hiver, c'était du jamais vu ou presque dans l'Empire !
- Moi, Matsu Kokatsu, ne veut plus supporter que ces murailles nous défient, que ces Grues nous narguent depuis leur beau palais ! Je vais redonner cette Cité à notre clan, car elle lui appartient de plein droit !
Les troupes étaient galvanisées, prêtes à déchaîner leur fureur.
En tête, les Quêteurs de Morts formèrent leur guntaï, avec les rônins juste derrière.

Alors que le soleil passait la ligne de l'est, l'armée de Kokatsu marchait sur Toshi Ranbo.
- Je me demande si on n'y est pas allé un peu fort ! dit Manji.
- Peut-être pas, rit Katon. Regarde plutôt !
Il faisait presque clair : on voyait une troupe s'approcher du général : les couleurs des Otomo. C'était bien Jukeï !
Il gesticulait, furieux et, visiblement, Kokatsu lui expliquait qu'il n'avait pas le temps pour lui, puisqu'il avait une Cité à prendre !
Kokatsu demanda à Jukeï de reculer et la marée jaune des samuraï à crinière se mit en marche !
Les troupes d'archers se déployaient, de même que les machines de guerre.
Dans la Cité, ce devait être une belle surprise !

Jukeï et ses hommes avaient reculé pour ne pas être emportés par le flot de l'armée, et contemplaient ce spectacle, ahuris. Le capitaine n'en revenait pas !
C'est alors que, l'espace d'une seconde, parmi les centaines de rônins, il aperçut nos héros ! Eux !...
Et alors, il sut que c'était eux ! Que c'était leur faute !
Mais aller expliquer ça à un général Matsu furieux !
Le vent se levait sur la plaine, emportant de grands rouleaux de poussière illuminée par les premiers éclats de Dame Soleil !
Le soleil bleuissait et le jour éclatait à l'horizon, tandis que les tambours de guerre faisaient retentir leur grondement.
Kokatsu agitait ses éventails et ses capitaines répercutaient les ordres.
Dans le désordre, on voyait arriver en face une troupe de Daidoji, pris de courts par cette attaque éclair.
- Taillez-moi ça en pièces !
Les Matsu hurlèrent en chœur et se jetèrent sur leurs ennemis jurés. Les Quêteurs de Morts provoquaient le premier choc, se sacrifiant avant que les rônins n'arrivent, puis les samuraï Matsu. Les Daidoji furent écrasés en quelques minutes et proprement piétinés !
L'aurore était encore là que les Matsu arrivaient au pied des murailles, sous un déluge de flèches, et fixaient les échelles.
- Je me demande pourquoi, disait Kokatsu, je n'ai pas ordonné ça plus tôt !
Les samuraï montaient à l'assaut des murailles. Complètement pris au dépourvu, les Grues n'avaient que de faibles défenses sur leurs créneaux. Bientôt, des Quêteurs de Morts arrivaient sur les remparts ! Ce fut un massacre !

En bas, une troupe nmbreuse de Daidoji tentait une prise à revers de Kokatsu. A leur tête, le général de la garnison de la ville !
- Je te croyais en train de chier dans ton froc, gronda Kokatsu. Mais tu oses sortir !
Le groupe de nos héros dut faire face aux terribles Daidoji, qui s'étaient ressaisi et tranchaient à vif dans les rangs Matsu.
Les Lions tombaient comme des mouches, pendant que leurs frères d'armes se heurtaient à la résistance des Grues à l'intérieur de la ville.
Et il sortait d'autres Grues, qui allaient finir de prendre en tenaille les troupes de Kokatsu.
Le général se dit alors que sa manœuvre avait été précipitée, et qu'il allait regretter son audace.

C'était sans compter sur nos héros... Ceux-ci tenaient bon face aux Daidoji. Soudain, une percée se fit et ils s'y précipitèrent ensemble. Au milieu de la houle des combats, Manji distingua soudain le porteur de la bannière ennemie ! Il se jeta sur lui, l'abattit raide et s'empara du drapeau ; un ennemi voulut l'en empêcher mais Manji le repoussa d'un coup de hampe dans le menton !
Manji recula, protégé par la BEC et Katon, pendant que Mamoru assurait les arrières.
Manji, soudain, ne savait plus quoi faire de sa prise, qui l'empêchait de se battre et le déséquilibrait. Il se sentit bête et maladroit, alors que ses amis redoublaient de rage pour contenir les Daidoji suffoqués de s'être fait voler leur bannière ! Manji aurait voulu transmettre son encombrant cadeau mais il entendit :
- Garde-la ! protège-la !... Recule !
Manji se retourna : c'était Kokatsu en personne qui lui hurlait dessus !
- Recule !
Manji partit vers les lignes arrières, alors qu'on lui ouvrait un chemin dans son dos et que ses amis le protégeaient à l'avant.
Désespérés, les Daidoji tentèrent un assaut pour reprendre le drapeau : mais devant se trouvaient Katon et son sabre enflammé, Yojiro et son sabre ancestral, Mamoru et son tetsubo, Yatsume et son yari ! C'était trop !
Un capitaine de Kokatsu s'approcha de Manji :
- Donne !
Manji alllait lui passer la hampe quand cet officier reçut une flèche en plein œil et s'écroula. Manji monta sur un talus et planta le drapeau à l'envers.
- Han !
Un immense cri de joie et de rage s'éleva des Matsu. D'un coup, l'armée Lion se reforma devant nos héros.
Épuisé, appuyé à sa hampe chérie, Manji rit de bon cœur.
Déshonores, les Grues reculèrent et plusieurs s'empalèrent sans attendre sur leurs sabres. Bientôt, les portes de la ville s'ouvrirent. Les Daidoji agitaient le drapeau de la reddition.
- Sans rire, demanda Mamoru à Katon, vous aviez prévu, ça ?
- Bien sûr !
Manji ne lâchait plus la bannière !
- Bon alors, dit Yojiro en une phrase appelée à rester dans les annales de l'histoire, ce drapeau, tu leur rend ou bien on se torche avec ?...
Les quelques rônins encore en vie éclatèrent de rire.

Samurai

Au coucher du soleil, les Grues quittaient la Cité, la queue entre les jambes.Honte
Kokatsu avait pris ses aises dans la grande salle du palais du Gouverneur. Il avait fait venir nos héros pour les féliciter. Il avait à ses côtés Maya, pas fâché d'avoir de la compagnie pour fêter sa victoire le soir même (Maya qui avait suivi la bataille depuis le bataillon des cuisines).
Entrait alors à ce moment-là Otomo Jukeï :
- Général Kokatsu ! Félicitations pour ta victoire !
- Merci à toi, capitaine !
- Maintenant, j'exige que tu me livres ces hommes !
Il désignait nos héros...
- Eux !
Kokatsu partit d'un bon gros rire franc.
- Eux !...
- Ce sont des criminels !
- Des criminels !... Ils viennent de s'emparer du drapeau ennemi !
- C'est bien triste pour les Grues.
- Ce sont des héros, capitaine !
Kokatsu toussait de rire.
- Maintenant, Jukeï-san, tu voudras bien m'excuser, mais je dois aller parader au balcon du palais. La foule en liesse m'accueille !
- Ordre du Gozoku, général !
- Capitaine, peut-être que les Daidoji se montraient dociles devant tes ordres mais depuis ce matin, la Cité des Apparences appartient à mon clan. Si tu n'as pas d'ordres officiels te donnant le droit de séjourner ici, je te prierai de te retirer dans tes appartements et de partir demain à la première heure !
Rouge de honte et de colère, Jukeï siffla :
- Tu me payeras ça, général !
- A propos, Jukeï-san, je t'annonce que les héros du jour seront décorés, et que je vais les accueillir dans ma famille !
Jukeï en avait le souffle coupé :
- Tu veux... tu veux... donner... le nom de Matsu, à ces...
Le capitaine préféra se retirer tant qu'il pouvait sortir la tête pas trop basse !
Nos héros étaient hilares. La déconfiture de Jukeï ! Ils attendaient cela depuis si longtemps.
- C'est exact, reprit Kokatsu. En tant que héros de cette bataille, vous pouvez prétendre au nom de Matsu. Vous vous êtes battus comme de vrais Lions ! Dans vos yeux la mort, vous êtes des Matsu !...

Ahuris, nos héros mirent un peu de temps à redescendre sur terre. Ils allaient rejoindre la famille Matsu, redevenir des samuraï de clan ! Retrouver leur honneur, la gloire, une terre, une famille, un daimyo !
Et devant eux, les Matsu en chœur clamèrent la devise de leur famille :


Dans mon épée, le courage,
Dans mes cheveux, le vent,
Dans mes yeux, la mort,
je suis MATSU !




SamuraiFORCE ET HONNEUR, SAMURAÏ !<!--sizec--><!--/sizec-->Samurai



6e Episode : La bannière du Lion - Gaeriel - 18-01-2009

qui vont péter la gueule aux gruesbiggrin


6e Episode : La bannière du Lion - sdm - 19-01-2009

Hmmm comment c'était trop bon de foutre la haine à Jukeibave


Dis-moi Gronico tu gardais des textes en stock ou t'es shooté à la redbull cette semaine pour en écrire autantlol


6e Episode : La bannière du Lion - Gaeriel - 19-01-2009

je pense qu'il a retrouvé son efficacité d'antan, et ce serait bien d'ailleurs de la mettre à profit pour terminer les, au bas mot, 100 pages Word qu'il te reste pour finir le SWbiggrin


6e Episode : La bannière du Lion - Philou - 19-01-2009

' Wrote:Dis-moi Gronico tu gardais des textes en stock ou t'es shooté à la redbull cette semaine pour en écrire autantlol
Gros Nico est prof, et ça se voit:jmekiffe:


6e Episode : La bannière du Lion - Darth Nico - 19-01-2009

Gros Nico est prof et malade toute cette semaine...Tired

D'ailleurs, aujourd'hui ça va pas mieux ; va falloir que je retourne chez le médecin.Tired²


6e Episode : La bannière du Lion - Philou - 19-01-2009

' Wrote:Gros Nico est prof et malade toute cette semaine...Tired

D'ailleurs, aujourd'hui ça va pas mieux ; va falloir que je retourne chez le médecin.Tired²

Le final fight et la série B, un traitement de qualité pour un prof:jmekiffe:( Que je tiens de Jean Marcel Rax)