24-06-2003, 05:59 PM
VII°/ La bibliothèque de l’Inquisition
El Daoud partit à vive allure vers la bibliothèque de la nécropole, où étaient conservés les précieux manuscrits nécessaire à la fabrication de la nouvelle aiguille.
La nécropole était en fait le centre de l’île où Khelin, Bellerophon et El Daoud avaient débarqué. Elle était cerné d’un haut et solide mur d’enceinte, de pierres noires. L’espace ainsi cerné avait la forme d’un ovale de deux kilomètres de long sur huit cent mètres de large. Il y avait d’abord le cimetière, dont la population venait de subir une chute drastique, puis un long chemin, qui menait au bâtiment principal, à savoir la tour de Zegmor. Il s’agissait d’un imposant donjon, au sommet duquel claquaient des oriflammes aux couleurs de l’Inquisition, sous un ciel de nuit glacé, qui ne conservait rien de sa rougeur du jour. Dans ce donjon étaient entreposées on ne sait trop quelles dépouilles de guerriers obscurs, gardées par on ne sait trop quelles créatures meurtrières. Non loin du donjon, plusieurs bâtisses de petites tailles, reliées à hauteur du toit par des ponts d’acier, qui cernaient l’entrée d’un souterrain, menant vers d’insondables profondeurs. Des soldats gardaient ces bâtisses. Enfin, à l’écart, la bibliothèque, sorte d’église démoniaque, construite au sommet d’un tumulus, cernée de piliers en haut desquels de grosses pierres d’améthyste brillaient sinistrement.
El Daoud passa loin des bâtisses qui gardaient le souterrain. Il ne fit pas d’efforts particuliers pour dissimuler sa présence : difficile de l’ignorer maintenant qu’il avait déclenché une bataille rangée dans le cimetière ! Il marchait sur un chemin embourbé, et regardait les constructions alentours, qui semblaient toutes menacées de retourner dans une boue informe, si la mer proche, dont on entendait le ronflement, n’engloutissait pas la petite île avant cela.
El Daoud prit le temps d’apaiser les passions féroces suscitées par le combat. A l’abri derrière des bâtiments abandonnés, envahis par les ronces, il se mit dans la position du lotus, en lévitation à quelques mètres du sol. Il sentait les émotions des soldats tapis dans leurs baraquements : ils tremblaient de peur à l’idée que celui qui avait pu passer le cimetière soit maintenant près d’eux.
Redevenu plus serein, El Daoud poursuivit son chemin vers le tumulus. Les piliers aux améthystes s’alignaient le long du chemin qui montait vers la bibliothèque, puis entouraient le bâtiment. Il en irradiait une aura de Force, maléfique bien sûr. A mesure qu’El Daoud approchait, ils se mettaient à briller plus fort, puis brûlèrent de flammes pourpres, qui ondulèrent dans l’espace silencieux de la nécropole. Notre héros se concentra un instant, puis reprit sa marche à une allure prudente. Il absorbait les rayonnements obscurs dégagés par les améthystes. Ces pierres créaient une zone de turbulence importante dans la Force, à cause de l’aura lumineuse d’El Daoud qui troublait le champ, comme un aimant.
S’il avait relâché son pouvoir, les pierres magiques l’auraient sans doute brusquement rejeté hors du tumulus, ou même frappé de quelque pouvoir destructeur.
Il arriva devant la porte de la bibliothèque. Les pylônes améthystes irradiaient leurs ondes néfastes, mais El Daoud leur résistait grâce à ses pouvoirs de méditation. Sans se laisser troubler par les pylônes améthystes, il sortit divers amulettes imprégnées du pouvoir de la Force. Il les passa autour du coup, respira encore profondément, puis ouvrit la porte de bronze qui donnait l’accès à la redoutable bibliothèque.
Le vent se levait alors qu’El Daoud pénétrait dans le lugubre bâtiment. La porte se referma en grinçant, claqua, et ce fut l’obscurité. El Daoud alluma à nouveau une torche : il se trouvait maintenant dans un vestibule poussiéreux, avec des murs décorés de bas reliefs de créatures difformes, qui composait un cortège du même goût que les occupants du cimetière. Au plafond, des visages hideux, qui se fondaient les uns dans les autres, se dédoublaient, se différenciaient, dans des rictus de douleur et des grimaces abominables. El Daoud ne sentait aucune présence dans le bâtiment. Cette antre était déserte. Des statues d’humanoïdes animaux, immobiles, gardaient les lieux, y jetant leur regard sans vie. On se serait cru dans le boudoir d’un démon.
El Daoud monta prudemment un large escalier en colimaçon, qui le mena à un couloir à l’étage. Deux rangées de momies se tenaient, figées, sur les murs. Il y en avait une dizaine de chaque côté, avant d’arriver à une porte ornée de signes cabalistiques. El Daoud s’approcha d’une des momies : comme ses consœurs, elle portait deux sceptres croisés, ainsi qu’une couronne de marbre rouge à veines blanches et des colliers d’or vieilli. Le sage remarqua que les bandelettes de ces gardiennes étaient noircies d’une écriture, qui devait courir sur toute leur longueur. De quoi pouvait parler ces inscriptions en pattes de mouches ? El Daoud n’avait pas le temps de s’en préoccuper. Les momies étaient seules gardiennes du savoir inscrit sur leur peau, pour l’au-delà.
El Daoud s’approcha de la porte du fond : d’une main, il serra une amulette, de l’autre, il traça, du bout de sa torche, des signes dans l’air. Plusieurs runes luisirent, écarlates, comme des tiges se remplissant de sang, puis la porte s’ouvrit, dans le seul bruit du frottement contre le bois usé de la pièce derrière.
Il s’agissait bien de la bibliothèque de Zegmor. Il fallait faire vite. Trop de temps déjà s’était écoulé. El Daoud se concentra : ses amis Khelin et Bellerophon étaient bien en vie. Ils éprouvaient de l’anxiété, de la peur, étaient animés de courage. Ils devaient affronter les troupes impériales. Mais de la nécropole, on entendait pas le bruit des affrontements.
El Daoud s’empressa d’allumer plusieurs lampadaires disposés près des tables. Il put obtenir une lumière suffisante pour commencer ses recherches. Les rayons de livres avaient bien six mètres de hauteur. Ils cernaient toute la pièce, ainsi que d’autres pièces adjacentes, sans compter des rayonnages, dans des traverses, à l’étage d’au-dessus. El Daoud sortit plusieurs parchemins de son sac, les déroula sur une table, puis les étudia attentivement, à la lumière incertaine des flammes vacillantes. Il parcourut plusieurs étagères rapidement, sortit nombre de parchemins de leurs rouleaux, à la hâte. Il recoupa les informations données par divers ouvrages cabalistiques. Des années de recherches laborieuses, à travers la galaxie et cent cultures étranges, allaient enfin aboutir !…
Les dernières indications pour forger l’Aiguille Bleu se nichaient dans une de ses bibliothèques. Il fallait trouver comment manipuler la Force pour la contenir dans le métal, et découvrir les méthodes d’un dizaine d’autres manipulations sur les différents états de la matière. El Daoud sortit de lourds grimoires, alourdies par la poussière, rongés de moisissure, parcourut des pages jaunies, déchiffra des écritures qui étaient lettres mortes depuis longtemps. Du doigt, il suivit, lignes après lignes, des indications ésotériques. Il déchira soigneusement des pages, qu’il plia dans des rouleaux ; il compulsa d’autres énormes ouvrages, le tout dans une fébrilité croissante. Il avait les réponses tant recherchées au bout des doigts !
Il semble dans ses moments-là que les livres soient comme des langues, dont on dit qu’elles brûlent, car elles portent les mots recherchés à leur bout. Révéler les formules, on aurait dit que les lèvres des livres en brûlait d’envie ! El Daoud tendit la main vers plusieurs lampadaires, dont la luminosité augmenta soudain. Des centaines de pages furent secouées pour la première fois depuis des siècles, des poussières, des morceaux de papier moisies s’envolèrent dans la pièce, sortant d’une immobilité immémoriale. El Daoud sortait ces vieilleries de leur pétrification.
Il découpa encore rapidement des pages, qu’il plia ou roula maladroitement, impaTIEnt de les lire, mais pressé par la nécessité d’échapper à l’Empire. Ces pages lui brûlaient les doigts ! Un tremblement le prenait irrésistiblement.
Qui sait s’il ne pourrait pas trouver encore plus que ce qu’il venait chercher ?… Qui sait ?… Qui sait ?… Après avoir tant risqué sa vie à pénétrer dans cette nécropole, pourquoi ne pas en profiter pour exhumer plus de savoir oublié ? Cette connaissance serait utile pour la suite ! Hé, la bibliothèque du Grand Inquisiteur Impérial ! Elle devait en receler des mystères !
El Daoud chercha à se contrôler. Il agrippa des deux mains plusieurs parchemins, les froissa nerveusement, en déchira plusieurs en morceaux, tâchant de résister à l’appel de ces milliers d’ouvrages, qui frétillaient comme des papillons en âge, impaTIEnts de sortir de leurs promiscuité.
Il regarda autour de lui, entendait l’appel de ces milliers de pages délaissées. Mais il fallait être raisonnable.
Mais au fond… quel gâchis de ne pas en emporter plus !… Mais comment choisir ? Pourquoi pas au hasard ? Qui sait, d’ailleurs, s’il ne tomberait pas ainsi sur quelques descriptions importantes d’anciens pouvoirs oubliés ? Les Siths avaient tant exploré les recoins de la Force… El Daoud se jeta avec un appétit glouton sur plusieurs ouvrages aux reliures de cuivre et d’or, cadenassés et verrouillés. Grâce à plusieurs talismans, il neutralisa les runes qui empêchaient qu’on ouvrît les ouvrages, puis se remit à déchiffrer fébrilement, dans une excitation croissante.
VIII°/ La tentation de la déchéance
Les doigts d'El Daoud s’agitaient, tournaient les pages, son regard courait follement le long des lignes. Absorbé dans sa lecture, il ne prenait pas garde à l’imposante créature qui l’observait sans se cacher, depuis le seuil de la bibliothèque… Il se hâtait de parcourir en diagonale des chapitres de connaissances relatives à l’altération du monde par la Force, au moyen de plier la matière ou la vie à ses volontés, de déclencher le feu ou l’éclair, d’apaiser ou d’accentuer la douleur… Il connaissait plusieurs de ces utilisations de la Force. Il les réprouvait, mais il voulait les connaître mieux ! Il voulait prendre le risque de plonger un peu plus le regard dans le côté obscur, afin de mieux discerner le côté lumineux. Il arracha encore quelques pages bourrelées par l’humidité, les roula avec précipitation, referma les plus gros grimoires en replaçant leurs runes.
Soudain, quelques lignes attirèrent son attention : elles mentionnaient un traité des Siths du troisième siècle de la République, sur la formation des Döppelganger : il s’y trouvait précisément le moyen de… El Daoud eut alors un sursaut d’effroi !
Dans un même mouvement, il se retourna et alluma son sabre, qu’il avait fait jaillir de son sac et attrapé à deux mains. La lame argentée en frappa une autre, rouge et crépitante qui allait s’abattre sur lui. Devant El Daoud, une haute silhouette, noire comme les orbites obscènes des squelettes, venait de frapper de son sabre. Les deux lames se fondirent, dans un dégagement de lumière et de crépitements d’éclairs.
- Bien essayé, Darth Zegmor, dit El Daoud, mais je suis encore suffisamment sur mes gardes !…
- Ma bibliothèque t’intéresse, sage El Daoud ?… répondit le terrifiant personnage, qui appuyait de son sabre fermement, comme pour une partie de bras de fer.
El Daoud n’était pas de force : il pliait sous la force implacable de l’Inquisiteur, taillé dans un bloc de jais. Son visage était livide : une grosse prothèse d’oeil, greffée de manière barbare, lui prenait la face du côté du front au côté du nez. Une plaque de métal lui prenait le dessous droit du menton. Il était vêtu du manteau habituel des maîtres de l’obscurité. Son avant-bras droit était également une prothèse qui augmentait ses capacités physiques.
El Daoud était appuyé contre la table, et l’effort de Zegmor était en train de le courber en arrière. Les deux lames se rapprochaient du visage d’El Daoud. Un mouvement soudain de notre héros parvint à les dévier à l’horizontale. Au moment où Zegmor parvenait à dégager sa lame, une vive détente de notre héros le rejetait quelques mètres en arrière. El Daoud rétablit sa garde, avança de quelques pas et encaissa l’attaque brutale de Zegmor, qui frappait violemment pour déstabiliser l’ennemi. El Daoud contre-attaqua de quelques passes fines, qui ne trompèrent pourtant pas son ennemi.
Celui-ci renvoya Ptoh violemment en arrière, qui alla heurter de plein fouet la table. Les manuscrits empilés dessus tombèrent lourdement à terre. Zegmor pointa alors le doigt vers El Daoud, fit quelques mouvements dans les airs : soudain, des livres et des rouleaux de parchemin par dizaines furent projetés vers notre héros. Celui-ci décolla dans les airs, évitant les lourds projectiles, puis atterrit quelques mètres derrière la table. Zegmor voulut projeter celle-ci, mais Ptoh la dévia vers le côté. Le regard fou, Zegmor pointa la main vers son adversaire : des éclairs bleutés partirent de ses mains. El Daoud les arrêta de sa lame énergétique. Mais les Eclairs avaient frôlé au passage nombre de manuscrits tombés à terre. Ceux-ci prirent feu aussitôt : de puissantes flammes en jaillirent. Zegmor ne se priva pas d’aider à la propagation du feu. El Daoud fut cerné d’une barrière de flammes, qui se resserrait sur lui. Zegmor élevait lentement les deux mains, faisant croître en même temps la vigueur des flammes. Celles-ci se refermèrent comme une gueule de fauve sur El Daoud.
Zegmor resta sur ses gardes, tout en contemplant, avec un plaisir de pyromane, le feu prendre en force, dévorant son ennemi, distribuant mille baisers écarlates. Soudain, une boule de feu fut catapultée hors du braiser, à la vitesse d’un tir de blaster : le projectile décrivit une trajectoire de cloche et s’abattit juste aux pieds de Zegmor. Celui-ci recula, et n’eut que le temps de dévier de son sabre une dizaine d’autres boules de feu guidées, expulsées à leur tour. Les boules allèrent s’écraser contre d’autres étagères, qui s’enflammèrent.
Zegmor marcha vers le feu, brandissant son sabre pour d’abattre El Daoud, qui devait avoir survécu à cette fournaise. Il n’était plus qu’à un mètre de la barrière de flammes dévoratrices, quand un formidable jaillissement se produisit, comme un geyser ardent, qui cracha vers le haut plafond. Zegmor recula précipitamment, éteignit le feu qui avait pris à ses vêtements puis d’un revers de main, souffla l’incendie qui prenait à cet endroit et alentour. D’autres rayons étaient encore la proie des flammes.
- Retourne-toi, Inquisiteur, je ne frappe pas dans le dos, moi.
Zegmor se retourna : El Daoud était là, le sabre en garde, son sac juste roussi et le reste intact.
- Les salamandres comme moi ne craignent pas les flammes, Inquisiteur… Souviens-t’en, asséna notre héros.
- Tu es un redoutable adversaire, El Daoud, fit Zegmor, sombre. Mais tu es fou d’être venu ici. Mes Inquisiteurs sont dehors à t’attendre. Ils cernent le bâtiment. Je suis venu seul pour te saigner. Mais je crois que je vais d’abord te livrer à eux : ils sont si impatients de t’avoir entre leurs pinces, crochets et tenailles…
- Vivant, tu ne m’auras pas.
- Les êtres du côté lumineux ne sont que des moutons peureux. Ils sont des proies pour nous, les bêtes féroces qui possèdent le vrai pouvoir.
- Tu n’es qu’un monstre vidé de tout esprit, qui règne sur des machines à tuer. Tu ne maîtrises pas tes pouvoirs, Zegmor, malgré que tu les utilises pour détruire.
- Tu es faible, El Daoud. Tu ne connais pas la vraie nature de la Force.
- Tu n’as rien à m’apprendre, Zegmor, sinon le dégoût et la haine. Je laisse cela à toi et tes semblables, les esclaves de la peur. Qui sait qui sont vraiment les moutons ?…
- Le Jedi qui refuse de combattre est un lâche, un faible qui doit périr.
- Tu n’es qu’une caricature pitoyable et grotesque de ce que furent les Maîtres Jedi de la défunte République. Tu ne connais ni l’harmonie ni la sérénité face à la Force. Tu n’es qu’un jouet entre les mains d’un vieillard dément -ton Empereur !
- Tu auras le temps de te repentir de ces paroles, El Daoud… Tu sauras alors ce que c’est que de défier l’Inquisition et le Seigneur Palpatine...
- Je crois plutôt que je vais m’enfuir d’ici, Zegmor, puis terminer l’Aiguille et frapper à mort tes pouvoirs. Toi et tes sbires, vous finirez comme ces spectres démembrés qui hantent le cimetière…
- Fou que tu es ! de te croire en position de parler, alors que tu n’es qu’un ver de terre dans la gueule du fauve ! Nous sommes la race des seigneurs !
- La Force me guide, Zegmor. Le côté obscur me fascine, il m’attire, mais si le chemin est parfois tortueux, la lumière me conduit toujours vers la sérénité.
- D’autres ont renoncé avant toi à se rebeller contre la vraie nature de la Force. Tu nous rejoindras d’ici peu. Ta descente a déjà commencé : tu as senti la haine en affrontant les créatures d’outre-tombe. Tu as senti les flammes noires te consumer alors que tu parcourais, ivre de désir de connaissance, mes livres.
- Il est naturel d’être tenté par la déchéance, Zegmor. L’essenTIEl est de ne jamais céder. J’ai trop joué avec le feu, mais tu me ramènes à la raison… Tu as passé un pacte si monstrueux qu’il te coupe de tout espoir d’échapper aux tourments…
- Si tu rejoins le côté obscur, tu connaîtras tout ce que renferme ces livres !… L’Empereur fera de toi un vrai Jedi !… Il achèvera ta formation !
- J’aime mieux finir ignorant et en paix avec moi-même, que soûl de savoir et d’appétits meurtriers, assassin décervelé au service du Sith ressuscité. Toi, Vader et l’Empereur finirez par vous entre-tuer…
- Imbécile ! Tu vas mourir comme un esclave, prisonnier de la peur !
- Il n’y a pas de mort, Zegmor, il n’y a que la Force…
Le combat reprit de plus belle : l’Inquisiteur s’était lancé à l’attaque, pareil à buffle. El Daoud avait repris confiance en lui. Il avait eu le temps de se concentrer sur la Force. Il avait senti une peur ignoble l’envahir quand Zegmor avait attaqué, mais il avait surmonté la tentation de se livrer aux séductions du côté obscur. Zegmor par contre enrageait d’avoir échoué à pervertir son ennemi. Il frappa maladroitement, tandis qu’El Daoud paraît aisément, avec un plaisir ironique et non feint. Il contre-attaquait sans adresse excessive. Les deux lames se croisèrent, se frappèrent violemment et se fondirent, alors que les duellistes levaient leurs armes bien haut, au-dessus d’eux. Ils eurent presque leurs visages collés l’un à l’autre, tandis qu’une pluie d’étincelles tombait des deux lames crépitantes.
- Sans doute, dit El Daoud dans le halètement du duel, un Inquisiteur est-il fait pour écouter et pour récolter les aveux, et pas pour parler… D’où ta difficulté, quand tu parles, à masquer que tu n’es qu’une brute déchaînée…
Zegmor dégagea violemment son sabre et contre-attaqua par une attaque frontale grossière. El Daoud la dévia sans peine et sourit encore.
Encore quelques échanges où notre héros se contenta d’encaisser en assurant sa défense. Il recula de quelques pas, laissa venir Zegmor, le laissa déployer sa force brute, tout en feignant la faiblesse. Dans la bibliothèque, les étagères et les livres mangés par le feu crépitaient, se tordaient et craquelaient.
Après plusieurs passes habiles, Zegmor prend l’avantage et porte un coup de flanc. El Daoud pare et lance une contre-attaque fulgurante. Zegmor pare ce coup, qui aurait dû lui percer le cœur. Il ricane de l’échec de son ennemi, quand soudain la lame argentée, vive comme l’éclair, se dégage et se rabat sur le pectoral droit de l’Inquisiteur. Elle le transperce de part en part. El Daoud regarde une longue seconde son adversaire, éberlué et raidi par le coup, puis retire d’un coup sa lame. Zegmor lâche un râle, se contracte, est pris d’un spasme qui le courbe en deux, crache du sang et tombe à genoux.
El Daoud redresse sa lame, ferme les yeux un instant, inspire et regarde l’Inquisiteur.
- Tu as gagné, geint ce dernier. Tue-moi… tu as le temps, avant que mes hommes n’arrivent… tue-moi, et tu prendras ma place… tu auras le pouvoir de défier Vader et Xyzor…
- Je ne me ferai pas bête à la place de la bête, Zegmor. Je sais que si j’essaye de te tuer, la marque maudite qui te protège m’étreindras pour me transformer en monstre sans âme.
- Maudit… maudit… gémit Zegmor, tandis qu’il se relevait.
El Daoud fit sauter d’un geste le sabre de Zegmor, tombé à terre, et le frappa au vol.
Tu as perdu, Grand Inquisiteur. J’ai les parchemins et j’ai résisté à l’attrait de ta malédiction. La marque de Zegmor sera détruite sous peu. Adieu…
Sans attendre, El Daoud tourna les talons et sortit de la bibliothèque. Zegmor se relevait juste quand la porte claquait.
El Daoud partit à vive allure vers la bibliothèque de la nécropole, où étaient conservés les précieux manuscrits nécessaire à la fabrication de la nouvelle aiguille.
La nécropole était en fait le centre de l’île où Khelin, Bellerophon et El Daoud avaient débarqué. Elle était cerné d’un haut et solide mur d’enceinte, de pierres noires. L’espace ainsi cerné avait la forme d’un ovale de deux kilomètres de long sur huit cent mètres de large. Il y avait d’abord le cimetière, dont la population venait de subir une chute drastique, puis un long chemin, qui menait au bâtiment principal, à savoir la tour de Zegmor. Il s’agissait d’un imposant donjon, au sommet duquel claquaient des oriflammes aux couleurs de l’Inquisition, sous un ciel de nuit glacé, qui ne conservait rien de sa rougeur du jour. Dans ce donjon étaient entreposées on ne sait trop quelles dépouilles de guerriers obscurs, gardées par on ne sait trop quelles créatures meurtrières. Non loin du donjon, plusieurs bâtisses de petites tailles, reliées à hauteur du toit par des ponts d’acier, qui cernaient l’entrée d’un souterrain, menant vers d’insondables profondeurs. Des soldats gardaient ces bâtisses. Enfin, à l’écart, la bibliothèque, sorte d’église démoniaque, construite au sommet d’un tumulus, cernée de piliers en haut desquels de grosses pierres d’améthyste brillaient sinistrement.
El Daoud passa loin des bâtisses qui gardaient le souterrain. Il ne fit pas d’efforts particuliers pour dissimuler sa présence : difficile de l’ignorer maintenant qu’il avait déclenché une bataille rangée dans le cimetière ! Il marchait sur un chemin embourbé, et regardait les constructions alentours, qui semblaient toutes menacées de retourner dans une boue informe, si la mer proche, dont on entendait le ronflement, n’engloutissait pas la petite île avant cela.
El Daoud prit le temps d’apaiser les passions féroces suscitées par le combat. A l’abri derrière des bâtiments abandonnés, envahis par les ronces, il se mit dans la position du lotus, en lévitation à quelques mètres du sol. Il sentait les émotions des soldats tapis dans leurs baraquements : ils tremblaient de peur à l’idée que celui qui avait pu passer le cimetière soit maintenant près d’eux.
Redevenu plus serein, El Daoud poursuivit son chemin vers le tumulus. Les piliers aux améthystes s’alignaient le long du chemin qui montait vers la bibliothèque, puis entouraient le bâtiment. Il en irradiait une aura de Force, maléfique bien sûr. A mesure qu’El Daoud approchait, ils se mettaient à briller plus fort, puis brûlèrent de flammes pourpres, qui ondulèrent dans l’espace silencieux de la nécropole. Notre héros se concentra un instant, puis reprit sa marche à une allure prudente. Il absorbait les rayonnements obscurs dégagés par les améthystes. Ces pierres créaient une zone de turbulence importante dans la Force, à cause de l’aura lumineuse d’El Daoud qui troublait le champ, comme un aimant.
S’il avait relâché son pouvoir, les pierres magiques l’auraient sans doute brusquement rejeté hors du tumulus, ou même frappé de quelque pouvoir destructeur.
Il arriva devant la porte de la bibliothèque. Les pylônes améthystes irradiaient leurs ondes néfastes, mais El Daoud leur résistait grâce à ses pouvoirs de méditation. Sans se laisser troubler par les pylônes améthystes, il sortit divers amulettes imprégnées du pouvoir de la Force. Il les passa autour du coup, respira encore profondément, puis ouvrit la porte de bronze qui donnait l’accès à la redoutable bibliothèque.
Le vent se levait alors qu’El Daoud pénétrait dans le lugubre bâtiment. La porte se referma en grinçant, claqua, et ce fut l’obscurité. El Daoud alluma à nouveau une torche : il se trouvait maintenant dans un vestibule poussiéreux, avec des murs décorés de bas reliefs de créatures difformes, qui composait un cortège du même goût que les occupants du cimetière. Au plafond, des visages hideux, qui se fondaient les uns dans les autres, se dédoublaient, se différenciaient, dans des rictus de douleur et des grimaces abominables. El Daoud ne sentait aucune présence dans le bâtiment. Cette antre était déserte. Des statues d’humanoïdes animaux, immobiles, gardaient les lieux, y jetant leur regard sans vie. On se serait cru dans le boudoir d’un démon.
El Daoud monta prudemment un large escalier en colimaçon, qui le mena à un couloir à l’étage. Deux rangées de momies se tenaient, figées, sur les murs. Il y en avait une dizaine de chaque côté, avant d’arriver à une porte ornée de signes cabalistiques. El Daoud s’approcha d’une des momies : comme ses consœurs, elle portait deux sceptres croisés, ainsi qu’une couronne de marbre rouge à veines blanches et des colliers d’or vieilli. Le sage remarqua que les bandelettes de ces gardiennes étaient noircies d’une écriture, qui devait courir sur toute leur longueur. De quoi pouvait parler ces inscriptions en pattes de mouches ? El Daoud n’avait pas le temps de s’en préoccuper. Les momies étaient seules gardiennes du savoir inscrit sur leur peau, pour l’au-delà.
El Daoud s’approcha de la porte du fond : d’une main, il serra une amulette, de l’autre, il traça, du bout de sa torche, des signes dans l’air. Plusieurs runes luisirent, écarlates, comme des tiges se remplissant de sang, puis la porte s’ouvrit, dans le seul bruit du frottement contre le bois usé de la pièce derrière.
Il s’agissait bien de la bibliothèque de Zegmor. Il fallait faire vite. Trop de temps déjà s’était écoulé. El Daoud se concentra : ses amis Khelin et Bellerophon étaient bien en vie. Ils éprouvaient de l’anxiété, de la peur, étaient animés de courage. Ils devaient affronter les troupes impériales. Mais de la nécropole, on entendait pas le bruit des affrontements.
El Daoud s’empressa d’allumer plusieurs lampadaires disposés près des tables. Il put obtenir une lumière suffisante pour commencer ses recherches. Les rayons de livres avaient bien six mètres de hauteur. Ils cernaient toute la pièce, ainsi que d’autres pièces adjacentes, sans compter des rayonnages, dans des traverses, à l’étage d’au-dessus. El Daoud sortit plusieurs parchemins de son sac, les déroula sur une table, puis les étudia attentivement, à la lumière incertaine des flammes vacillantes. Il parcourut plusieurs étagères rapidement, sortit nombre de parchemins de leurs rouleaux, à la hâte. Il recoupa les informations données par divers ouvrages cabalistiques. Des années de recherches laborieuses, à travers la galaxie et cent cultures étranges, allaient enfin aboutir !…
Les dernières indications pour forger l’Aiguille Bleu se nichaient dans une de ses bibliothèques. Il fallait trouver comment manipuler la Force pour la contenir dans le métal, et découvrir les méthodes d’un dizaine d’autres manipulations sur les différents états de la matière. El Daoud sortit de lourds grimoires, alourdies par la poussière, rongés de moisissure, parcourut des pages jaunies, déchiffra des écritures qui étaient lettres mortes depuis longtemps. Du doigt, il suivit, lignes après lignes, des indications ésotériques. Il déchira soigneusement des pages, qu’il plia dans des rouleaux ; il compulsa d’autres énormes ouvrages, le tout dans une fébrilité croissante. Il avait les réponses tant recherchées au bout des doigts !
Il semble dans ses moments-là que les livres soient comme des langues, dont on dit qu’elles brûlent, car elles portent les mots recherchés à leur bout. Révéler les formules, on aurait dit que les lèvres des livres en brûlait d’envie ! El Daoud tendit la main vers plusieurs lampadaires, dont la luminosité augmenta soudain. Des centaines de pages furent secouées pour la première fois depuis des siècles, des poussières, des morceaux de papier moisies s’envolèrent dans la pièce, sortant d’une immobilité immémoriale. El Daoud sortait ces vieilleries de leur pétrification.
Il découpa encore rapidement des pages, qu’il plia ou roula maladroitement, impaTIEnt de les lire, mais pressé par la nécessité d’échapper à l’Empire. Ces pages lui brûlaient les doigts ! Un tremblement le prenait irrésistiblement.
Qui sait s’il ne pourrait pas trouver encore plus que ce qu’il venait chercher ?… Qui sait ?… Qui sait ?… Après avoir tant risqué sa vie à pénétrer dans cette nécropole, pourquoi ne pas en profiter pour exhumer plus de savoir oublié ? Cette connaissance serait utile pour la suite ! Hé, la bibliothèque du Grand Inquisiteur Impérial ! Elle devait en receler des mystères !
El Daoud chercha à se contrôler. Il agrippa des deux mains plusieurs parchemins, les froissa nerveusement, en déchira plusieurs en morceaux, tâchant de résister à l’appel de ces milliers d’ouvrages, qui frétillaient comme des papillons en âge, impaTIEnts de sortir de leurs promiscuité.
Il regarda autour de lui, entendait l’appel de ces milliers de pages délaissées. Mais il fallait être raisonnable.
Mais au fond… quel gâchis de ne pas en emporter plus !… Mais comment choisir ? Pourquoi pas au hasard ? Qui sait, d’ailleurs, s’il ne tomberait pas ainsi sur quelques descriptions importantes d’anciens pouvoirs oubliés ? Les Siths avaient tant exploré les recoins de la Force… El Daoud se jeta avec un appétit glouton sur plusieurs ouvrages aux reliures de cuivre et d’or, cadenassés et verrouillés. Grâce à plusieurs talismans, il neutralisa les runes qui empêchaient qu’on ouvrît les ouvrages, puis se remit à déchiffrer fébrilement, dans une excitation croissante.
VIII°/ La tentation de la déchéance
Les doigts d'El Daoud s’agitaient, tournaient les pages, son regard courait follement le long des lignes. Absorbé dans sa lecture, il ne prenait pas garde à l’imposante créature qui l’observait sans se cacher, depuis le seuil de la bibliothèque… Il se hâtait de parcourir en diagonale des chapitres de connaissances relatives à l’altération du monde par la Force, au moyen de plier la matière ou la vie à ses volontés, de déclencher le feu ou l’éclair, d’apaiser ou d’accentuer la douleur… Il connaissait plusieurs de ces utilisations de la Force. Il les réprouvait, mais il voulait les connaître mieux ! Il voulait prendre le risque de plonger un peu plus le regard dans le côté obscur, afin de mieux discerner le côté lumineux. Il arracha encore quelques pages bourrelées par l’humidité, les roula avec précipitation, referma les plus gros grimoires en replaçant leurs runes.
Soudain, quelques lignes attirèrent son attention : elles mentionnaient un traité des Siths du troisième siècle de la République, sur la formation des Döppelganger : il s’y trouvait précisément le moyen de… El Daoud eut alors un sursaut d’effroi !
Dans un même mouvement, il se retourna et alluma son sabre, qu’il avait fait jaillir de son sac et attrapé à deux mains. La lame argentée en frappa une autre, rouge et crépitante qui allait s’abattre sur lui. Devant El Daoud, une haute silhouette, noire comme les orbites obscènes des squelettes, venait de frapper de son sabre. Les deux lames se fondirent, dans un dégagement de lumière et de crépitements d’éclairs.
- Bien essayé, Darth Zegmor, dit El Daoud, mais je suis encore suffisamment sur mes gardes !…
- Ma bibliothèque t’intéresse, sage El Daoud ?… répondit le terrifiant personnage, qui appuyait de son sabre fermement, comme pour une partie de bras de fer.
El Daoud n’était pas de force : il pliait sous la force implacable de l’Inquisiteur, taillé dans un bloc de jais. Son visage était livide : une grosse prothèse d’oeil, greffée de manière barbare, lui prenait la face du côté du front au côté du nez. Une plaque de métal lui prenait le dessous droit du menton. Il était vêtu du manteau habituel des maîtres de l’obscurité. Son avant-bras droit était également une prothèse qui augmentait ses capacités physiques.
El Daoud était appuyé contre la table, et l’effort de Zegmor était en train de le courber en arrière. Les deux lames se rapprochaient du visage d’El Daoud. Un mouvement soudain de notre héros parvint à les dévier à l’horizontale. Au moment où Zegmor parvenait à dégager sa lame, une vive détente de notre héros le rejetait quelques mètres en arrière. El Daoud rétablit sa garde, avança de quelques pas et encaissa l’attaque brutale de Zegmor, qui frappait violemment pour déstabiliser l’ennemi. El Daoud contre-attaqua de quelques passes fines, qui ne trompèrent pourtant pas son ennemi.
Celui-ci renvoya Ptoh violemment en arrière, qui alla heurter de plein fouet la table. Les manuscrits empilés dessus tombèrent lourdement à terre. Zegmor pointa alors le doigt vers El Daoud, fit quelques mouvements dans les airs : soudain, des livres et des rouleaux de parchemin par dizaines furent projetés vers notre héros. Celui-ci décolla dans les airs, évitant les lourds projectiles, puis atterrit quelques mètres derrière la table. Zegmor voulut projeter celle-ci, mais Ptoh la dévia vers le côté. Le regard fou, Zegmor pointa la main vers son adversaire : des éclairs bleutés partirent de ses mains. El Daoud les arrêta de sa lame énergétique. Mais les Eclairs avaient frôlé au passage nombre de manuscrits tombés à terre. Ceux-ci prirent feu aussitôt : de puissantes flammes en jaillirent. Zegmor ne se priva pas d’aider à la propagation du feu. El Daoud fut cerné d’une barrière de flammes, qui se resserrait sur lui. Zegmor élevait lentement les deux mains, faisant croître en même temps la vigueur des flammes. Celles-ci se refermèrent comme une gueule de fauve sur El Daoud.
Zegmor resta sur ses gardes, tout en contemplant, avec un plaisir de pyromane, le feu prendre en force, dévorant son ennemi, distribuant mille baisers écarlates. Soudain, une boule de feu fut catapultée hors du braiser, à la vitesse d’un tir de blaster : le projectile décrivit une trajectoire de cloche et s’abattit juste aux pieds de Zegmor. Celui-ci recula, et n’eut que le temps de dévier de son sabre une dizaine d’autres boules de feu guidées, expulsées à leur tour. Les boules allèrent s’écraser contre d’autres étagères, qui s’enflammèrent.
Zegmor marcha vers le feu, brandissant son sabre pour d’abattre El Daoud, qui devait avoir survécu à cette fournaise. Il n’était plus qu’à un mètre de la barrière de flammes dévoratrices, quand un formidable jaillissement se produisit, comme un geyser ardent, qui cracha vers le haut plafond. Zegmor recula précipitamment, éteignit le feu qui avait pris à ses vêtements puis d’un revers de main, souffla l’incendie qui prenait à cet endroit et alentour. D’autres rayons étaient encore la proie des flammes.
- Retourne-toi, Inquisiteur, je ne frappe pas dans le dos, moi.
Zegmor se retourna : El Daoud était là, le sabre en garde, son sac juste roussi et le reste intact.
- Les salamandres comme moi ne craignent pas les flammes, Inquisiteur… Souviens-t’en, asséna notre héros.
- Tu es un redoutable adversaire, El Daoud, fit Zegmor, sombre. Mais tu es fou d’être venu ici. Mes Inquisiteurs sont dehors à t’attendre. Ils cernent le bâtiment. Je suis venu seul pour te saigner. Mais je crois que je vais d’abord te livrer à eux : ils sont si impatients de t’avoir entre leurs pinces, crochets et tenailles…
- Vivant, tu ne m’auras pas.
- Les êtres du côté lumineux ne sont que des moutons peureux. Ils sont des proies pour nous, les bêtes féroces qui possèdent le vrai pouvoir.
- Tu n’es qu’un monstre vidé de tout esprit, qui règne sur des machines à tuer. Tu ne maîtrises pas tes pouvoirs, Zegmor, malgré que tu les utilises pour détruire.
- Tu es faible, El Daoud. Tu ne connais pas la vraie nature de la Force.
- Tu n’as rien à m’apprendre, Zegmor, sinon le dégoût et la haine. Je laisse cela à toi et tes semblables, les esclaves de la peur. Qui sait qui sont vraiment les moutons ?…
- Le Jedi qui refuse de combattre est un lâche, un faible qui doit périr.
- Tu n’es qu’une caricature pitoyable et grotesque de ce que furent les Maîtres Jedi de la défunte République. Tu ne connais ni l’harmonie ni la sérénité face à la Force. Tu n’es qu’un jouet entre les mains d’un vieillard dément -ton Empereur !
- Tu auras le temps de te repentir de ces paroles, El Daoud… Tu sauras alors ce que c’est que de défier l’Inquisition et le Seigneur Palpatine...
- Je crois plutôt que je vais m’enfuir d’ici, Zegmor, puis terminer l’Aiguille et frapper à mort tes pouvoirs. Toi et tes sbires, vous finirez comme ces spectres démembrés qui hantent le cimetière…
- Fou que tu es ! de te croire en position de parler, alors que tu n’es qu’un ver de terre dans la gueule du fauve ! Nous sommes la race des seigneurs !
- La Force me guide, Zegmor. Le côté obscur me fascine, il m’attire, mais si le chemin est parfois tortueux, la lumière me conduit toujours vers la sérénité.
- D’autres ont renoncé avant toi à se rebeller contre la vraie nature de la Force. Tu nous rejoindras d’ici peu. Ta descente a déjà commencé : tu as senti la haine en affrontant les créatures d’outre-tombe. Tu as senti les flammes noires te consumer alors que tu parcourais, ivre de désir de connaissance, mes livres.
- Il est naturel d’être tenté par la déchéance, Zegmor. L’essenTIEl est de ne jamais céder. J’ai trop joué avec le feu, mais tu me ramènes à la raison… Tu as passé un pacte si monstrueux qu’il te coupe de tout espoir d’échapper aux tourments…
- Si tu rejoins le côté obscur, tu connaîtras tout ce que renferme ces livres !… L’Empereur fera de toi un vrai Jedi !… Il achèvera ta formation !
- J’aime mieux finir ignorant et en paix avec moi-même, que soûl de savoir et d’appétits meurtriers, assassin décervelé au service du Sith ressuscité. Toi, Vader et l’Empereur finirez par vous entre-tuer…
- Imbécile ! Tu vas mourir comme un esclave, prisonnier de la peur !
- Il n’y a pas de mort, Zegmor, il n’y a que la Force…
Le combat reprit de plus belle : l’Inquisiteur s’était lancé à l’attaque, pareil à buffle. El Daoud avait repris confiance en lui. Il avait eu le temps de se concentrer sur la Force. Il avait senti une peur ignoble l’envahir quand Zegmor avait attaqué, mais il avait surmonté la tentation de se livrer aux séductions du côté obscur. Zegmor par contre enrageait d’avoir échoué à pervertir son ennemi. Il frappa maladroitement, tandis qu’El Daoud paraît aisément, avec un plaisir ironique et non feint. Il contre-attaquait sans adresse excessive. Les deux lames se croisèrent, se frappèrent violemment et se fondirent, alors que les duellistes levaient leurs armes bien haut, au-dessus d’eux. Ils eurent presque leurs visages collés l’un à l’autre, tandis qu’une pluie d’étincelles tombait des deux lames crépitantes.
- Sans doute, dit El Daoud dans le halètement du duel, un Inquisiteur est-il fait pour écouter et pour récolter les aveux, et pas pour parler… D’où ta difficulté, quand tu parles, à masquer que tu n’es qu’une brute déchaînée…
Zegmor dégagea violemment son sabre et contre-attaqua par une attaque frontale grossière. El Daoud la dévia sans peine et sourit encore.
Encore quelques échanges où notre héros se contenta d’encaisser en assurant sa défense. Il recula de quelques pas, laissa venir Zegmor, le laissa déployer sa force brute, tout en feignant la faiblesse. Dans la bibliothèque, les étagères et les livres mangés par le feu crépitaient, se tordaient et craquelaient.
Après plusieurs passes habiles, Zegmor prend l’avantage et porte un coup de flanc. El Daoud pare et lance une contre-attaque fulgurante. Zegmor pare ce coup, qui aurait dû lui percer le cœur. Il ricane de l’échec de son ennemi, quand soudain la lame argentée, vive comme l’éclair, se dégage et se rabat sur le pectoral droit de l’Inquisiteur. Elle le transperce de part en part. El Daoud regarde une longue seconde son adversaire, éberlué et raidi par le coup, puis retire d’un coup sa lame. Zegmor lâche un râle, se contracte, est pris d’un spasme qui le courbe en deux, crache du sang et tombe à genoux.
El Daoud redresse sa lame, ferme les yeux un instant, inspire et regarde l’Inquisiteur.
- Tu as gagné, geint ce dernier. Tue-moi… tu as le temps, avant que mes hommes n’arrivent… tue-moi, et tu prendras ma place… tu auras le pouvoir de défier Vader et Xyzor…
- Je ne me ferai pas bête à la place de la bête, Zegmor. Je sais que si j’essaye de te tuer, la marque maudite qui te protège m’étreindras pour me transformer en monstre sans âme.
- Maudit… maudit… gémit Zegmor, tandis qu’il se relevait.
El Daoud fit sauter d’un geste le sabre de Zegmor, tombé à terre, et le frappa au vol.
Tu as perdu, Grand Inquisiteur. J’ai les parchemins et j’ai résisté à l’attrait de ta malédiction. La marque de Zegmor sera détruite sous peu. Adieu…
Sans attendre, El Daoud tourna les talons et sortit de la bibliothèque. Zegmor se relevait juste quand la porte claquait.