21-11-2005, 01:34 PM
(This post was last modified: 21-11-2005, 02:02 PM by Darth Nico.)
Vampire 2006 - #6
Graziella se faisait habiller par sa servante. Elle tendait le bras, sans y penser, l'air songeuse. Camille-les-yeux-bleus, dont le reflet apparaissait dans les vitres, de clan était-il s'il n'était pas Lasombra ? Mais comment Santi aurait-il accepté un imposteur ? Et comment se serait-il laissé berner ?
On sonna à la porte. La servante dut abandonner Graziella, bras gauche tendue, au milieu de la pièce. Blasée, la signora resta dans cette posture de mannequin. Elle entendit le pas lourd de deux hommes.
La porte de sa chambre s'ouvrit.
- Deux messieurs de la police, murmura la servante.
- C'est bien, je vais les recevoir, lança Graziella, d'un air de cantatrice qui va recevoir des hommages dans sa loge.
Mais avant, siffla t-elle, venez finir d'attacher cette robe !
La signora entra encore dans son living-room, à peu près propre après une journée de nettoyage. Sergio et Terrence Brujah, chapeau à la main, étaient plantés au milieu, comme deux gros chênes qu'on est pas près de déraciner. A l'invitation de Valori, ils s'assirent dans les fauteuils, de toute leur masse. Sergio sortit son calepin et Terrence son carnet. L'assistant du chef de la police se sentait bien seul, depuis que l'inspecteur Bud faisait une rechute, suite à l'agression mentale de Shrek dans la tour chinoise.
- Hé bien, messieurs, je suis disposé à répondre à vos questions.
Sergio fit craquer ses doigts. Il était l'heure de "cuisiner".
- Pouvez-vous me préciser vos rapports avec plusieurs de vos invités de la nuit dernière, comme le Duc ou le Sénéchal ?
Graziella dit aimablement la vérité : elle connaissait le Duc depuis quelques jours seulement et entretenait une bonne relation avec le Sénéchal.
- Peut-on considérer que votre soirée, quai de Bercy, était d'ordre politique ? Un Club de la Régence en quelque sorte ?
Graziella fut surprise : elle ne s'attendait pas à ce qu'on l'interroge quant à ses motivations politiques. Pour qu'un policier Brujah parle politique et non de faits, il devait y avoir une intention bien définie derrière. C'est à peine si Sergio évoqua la tuerie de la nuit d'avant. La signora se fit bien cuisiner : le Brujah cherchait à lui faire avouer qu'elle montait un groupe dissident, quai de Bercy. Terrence intervenait par insinuations grosses comme le poing et Sergio reprenait, avec une méthode qui semblait fine en comparaison. Au bout du compte, Graziella se faisait tailler un costume d'activiste politique.
Elle vit repartir les deux Brujah aussi vite qu'ils étaient arrivés. D'un même mouvement, Sergio s'était levé, avait enfilé son chapeau et son imper puis avait passé le seuil de la maison.
C'était le comble. Graziella, restée seule dans le grand salon, n'en croyait pas ses oreilles.
- Ma demoiselle, le Sénéchal à l'appareil.
La signora prit le combiné :
- Allo, monsieur Lucinius ?
Quel plaisir que vous preniez sur votre emploi du temps, sans doute bien chargé :ahah: , pour m'appeler.
- Quelle soirée, hier, Graziella ! Elle ne sera pas oubliée de sitôt ! Vous savez faire les choses.
- Je ne suis pas mécontente de ma soirée, bien que la fin ne fût pas prévue. Dans l'ensemble, vos invités sont contents. Je pense que la chasse au sang, quoiqu'il en dise, leur a plus. De temps à autre, c'est malheureux à dire, mais les Caïnites doivent satisfaire leurs instincts sanguinaires. C'est une sorte de catharsis, après parfois des décennies de continence...
On comprenait que le Sénéchal était bien compréhensif envers les malheureux vampires qui n'avaient même pas le droit, habituellement, d'égorger quelques-uns de leurs semblables. C'était presque s'il ne remerciait pas le Sabbat.
- Seule ombre au tableau, si je puis dire : Brigitte Cellier vous en veut à mort. Même dame D'Orval semble seulement froide envers vous : c'est dire s'il y a de l'espoir, car c'est une Tremere.
- Brigitte Cellier a fait une erreur, trancha Graziella. Elle a quitté le terrain au moment où les choses devenaient intéressantes. Sa réputation de meilleure harpie de la capitale va en prendre un coup. Bientôt, on parlera d'elle au passé.
- Toujours est-il qu'à présent, votre réputation prend un tour nettement politique. Je ne sais pas jusqu'où vont vos ambitions en la matière mais vous n'avez qu'un geste à faire pour constituer une grosse coterie d'opposants aux Ventrue.
- Le pouvoir, sussura vénéneusement Graziella, n'est-ce pas à cela que nous aspirons tous ?
A ce sujet, Lucinius ne savait plus quoi penser.
- Bon, mademoiselle de Valori, je vais vous laisser. Bonne nuit et à très bientôt j'espère.
- A bientôt, monsieur le Sénéchal. Vos nuits doivent être encore plus occupées que les miennes. :ahah:
- Evidemment ! :jmekiffe:
Lucinius raccrocha et bailla en voyant la page vierge de son agenda du jour. Qui allait-il appeler maintenant pour l'embêter ?

Quand il vit Graziella arriver dans ce restaurant de l'île de la Cité, en ayant fait exprès d'arriver une demie-heure en retard, Loren fit semblant de travailler pour respecter l'image du Ventrue bourreau de travail, dévoué à la politique et aux affaires Camarilla. Mais Graziella avait bien repéré, sur les papiers du Ventrue, les grilles de sudoku noircies de chiffre. :ahah: C'était peut-être grâce à ce jeu asiatique, nouvellement arrivé en France, qu'il comptait découvrir la culture kuei-jin. :ahah:
La signora s'assit ; elle échangea avec Loren un coup d'oeil pour lui signaler qu'elle avait repéré un type louche, qui faisait semblant de lire son journal au comptoir et la regardait depuis son arrivée. Loren sourit de son air d'assurance implacable, qui disait "je gère la situation". Manifestement, il était lui aussi au courant. Son absence d'inquiétude agaça Graziella. :na_tac:
Ils se rencontraient dans une petite salle discrête du restaurant, où ils étaient seuls, à l'écart de l'animation joyeuse de la pièce principale, où, à cette heure de fin de repas, les convives avaient bien bu et mangé et fumaient le cigare en discutant politique, affaires, sports et femmes.
Les deux Caïnites reparlèrent de la soirée précédente. Loren assura qu'il n'était au courant de rien ; il savait bien qu'on ne tarderait pas à faire le rapprochement avec Shrek : mais en découvrirait-on des preuves ? Ils parlaient de choses et d'autres, quand le téléphone de Graziella sonna :
- Mademoiselle de Valori, je m'excuse de vous déranger. Ici maître Octave. Si la chose est possible, j'aurais souhaité vous rencontrer cette nuit, pour que je puisse enfin vous parler, à vous et à Sire Loren.
- Ma foi, il se trouve que le maire-adjoint à la sécurité des Tours :ahah: est non loin de moi. Nous allons voir s'il est disponible et je vous rappelle.
Loren était bien sûr d'accord : il ne demandait qu'à savoir enfin ce que maître Octave avait de si urgent à dire. Pour la forme, Graziella attendit un quart d'heure avant de rappeler le notaire.
- Maître Octavio ? par chance, il se trouve que Sire Loren est disponible.
- Parfait ! Je peux vous proposer de me retrouver à côté de la place de la Bastille, impasse du Cheval-Blanc. Je connais une petite gargotte pas piquée des hannetons là-bas.
Graziella était chaque fois désagréablement surprise, autant que Loren, par le ton volontier lourd, vulgaire, employé par le notable de Lyon.
Elle accepta le rendez-vous. James attendait dans sa voiture : Loren et Graziella montèrent à l'arrière. L'infant s'engagea dans le trafic nocturne de la rue de Rivoli. Dans le pare-brise, les passagers avaient repéré qu'ils étaient suivis : Sergio avait pris soin de mettre une "nounou" à disposition de ses deux amis.
- Quelle escorte, soupira Loren.
- D'une discrétion raffinée.
Les rues de la Cour brillaient de mille feux, aux abords de l'imposant palais du Louvre, puis du Marais, en pleines festivités nocturnes. Place de la Bastille, de gros embouteillages s'étaient formés devant l'opéra et le tintamarre des klaxons montaient aux oreilles du génie perché sur sa colonne.
A suivre...
Graziella se faisait habiller par sa servante. Elle tendait le bras, sans y penser, l'air songeuse. Camille-les-yeux-bleus, dont le reflet apparaissait dans les vitres, de clan était-il s'il n'était pas Lasombra ? Mais comment Santi aurait-il accepté un imposteur ? Et comment se serait-il laissé berner ?
On sonna à la porte. La servante dut abandonner Graziella, bras gauche tendue, au milieu de la pièce. Blasée, la signora resta dans cette posture de mannequin. Elle entendit le pas lourd de deux hommes.
La porte de sa chambre s'ouvrit.
- Deux messieurs de la police, murmura la servante.
- C'est bien, je vais les recevoir, lança Graziella, d'un air de cantatrice qui va recevoir des hommages dans sa loge.


La signora entra encore dans son living-room, à peu près propre après une journée de nettoyage. Sergio et Terrence Brujah, chapeau à la main, étaient plantés au milieu, comme deux gros chênes qu'on est pas près de déraciner. A l'invitation de Valori, ils s'assirent dans les fauteuils, de toute leur masse. Sergio sortit son calepin et Terrence son carnet. L'assistant du chef de la police se sentait bien seul, depuis que l'inspecteur Bud faisait une rechute, suite à l'agression mentale de Shrek dans la tour chinoise.
- Hé bien, messieurs, je suis disposé à répondre à vos questions.
Sergio fit craquer ses doigts. Il était l'heure de "cuisiner".
- Pouvez-vous me préciser vos rapports avec plusieurs de vos invités de la nuit dernière, comme le Duc ou le Sénéchal ?
Graziella dit aimablement la vérité : elle connaissait le Duc depuis quelques jours seulement et entretenait une bonne relation avec le Sénéchal.
- Peut-on considérer que votre soirée, quai de Bercy, était d'ordre politique ? Un Club de la Régence en quelque sorte ?
Graziella fut surprise : elle ne s'attendait pas à ce qu'on l'interroge quant à ses motivations politiques. Pour qu'un policier Brujah parle politique et non de faits, il devait y avoir une intention bien définie derrière. C'est à peine si Sergio évoqua la tuerie de la nuit d'avant. La signora se fit bien cuisiner : le Brujah cherchait à lui faire avouer qu'elle montait un groupe dissident, quai de Bercy. Terrence intervenait par insinuations grosses comme le poing et Sergio reprenait, avec une méthode qui semblait fine en comparaison. Au bout du compte, Graziella se faisait tailler un costume d'activiste politique.
Elle vit repartir les deux Brujah aussi vite qu'ils étaient arrivés. D'un même mouvement, Sergio s'était levé, avait enfilé son chapeau et son imper puis avait passé le seuil de la maison.
C'était le comble. Graziella, restée seule dans le grand salon, n'en croyait pas ses oreilles.
- Ma demoiselle, le Sénéchal à l'appareil.
La signora prit le combiné :
- Allo, monsieur Lucinius ?

- Quelle soirée, hier, Graziella ! Elle ne sera pas oubliée de sitôt ! Vous savez faire les choses.
- Je ne suis pas mécontente de ma soirée, bien que la fin ne fût pas prévue. Dans l'ensemble, vos invités sont contents. Je pense que la chasse au sang, quoiqu'il en dise, leur a plus. De temps à autre, c'est malheureux à dire, mais les Caïnites doivent satisfaire leurs instincts sanguinaires. C'est une sorte de catharsis, après parfois des décennies de continence...
On comprenait que le Sénéchal était bien compréhensif envers les malheureux vampires qui n'avaient même pas le droit, habituellement, d'égorger quelques-uns de leurs semblables. C'était presque s'il ne remerciait pas le Sabbat.
- Seule ombre au tableau, si je puis dire : Brigitte Cellier vous en veut à mort. Même dame D'Orval semble seulement froide envers vous : c'est dire s'il y a de l'espoir, car c'est une Tremere.
- Brigitte Cellier a fait une erreur, trancha Graziella. Elle a quitté le terrain au moment où les choses devenaient intéressantes. Sa réputation de meilleure harpie de la capitale va en prendre un coup. Bientôt, on parlera d'elle au passé.
- Toujours est-il qu'à présent, votre réputation prend un tour nettement politique. Je ne sais pas jusqu'où vont vos ambitions en la matière mais vous n'avez qu'un geste à faire pour constituer une grosse coterie d'opposants aux Ventrue.
- Le pouvoir, sussura vénéneusement Graziella, n'est-ce pas à cela que nous aspirons tous ?
A ce sujet, Lucinius ne savait plus quoi penser.
- Bon, mademoiselle de Valori, je vais vous laisser. Bonne nuit et à très bientôt j'espère.

- A bientôt, monsieur le Sénéchal. Vos nuits doivent être encore plus occupées que les miennes. :ahah:
- Evidemment ! :jmekiffe:
Lucinius raccrocha et bailla en voyant la page vierge de son agenda du jour. Qui allait-il appeler maintenant pour l'embêter ?

Quand il vit Graziella arriver dans ce restaurant de l'île de la Cité, en ayant fait exprès d'arriver une demie-heure en retard, Loren fit semblant de travailler pour respecter l'image du Ventrue bourreau de travail, dévoué à la politique et aux affaires Camarilla. Mais Graziella avait bien repéré, sur les papiers du Ventrue, les grilles de sudoku noircies de chiffre. :ahah: C'était peut-être grâce à ce jeu asiatique, nouvellement arrivé en France, qu'il comptait découvrir la culture kuei-jin. :ahah:
La signora s'assit ; elle échangea avec Loren un coup d'oeil pour lui signaler qu'elle avait repéré un type louche, qui faisait semblant de lire son journal au comptoir et la regardait depuis son arrivée. Loren sourit de son air d'assurance implacable, qui disait "je gère la situation". Manifestement, il était lui aussi au courant. Son absence d'inquiétude agaça Graziella. :na_tac:
Ils se rencontraient dans une petite salle discrête du restaurant, où ils étaient seuls, à l'écart de l'animation joyeuse de la pièce principale, où, à cette heure de fin de repas, les convives avaient bien bu et mangé et fumaient le cigare en discutant politique, affaires, sports et femmes.
Les deux Caïnites reparlèrent de la soirée précédente. Loren assura qu'il n'était au courant de rien ; il savait bien qu'on ne tarderait pas à faire le rapprochement avec Shrek : mais en découvrirait-on des preuves ? Ils parlaient de choses et d'autres, quand le téléphone de Graziella sonna :
- Mademoiselle de Valori, je m'excuse de vous déranger. Ici maître Octave. Si la chose est possible, j'aurais souhaité vous rencontrer cette nuit, pour que je puisse enfin vous parler, à vous et à Sire Loren.
- Ma foi, il se trouve que le maire-adjoint à la sécurité des Tours :ahah: est non loin de moi. Nous allons voir s'il est disponible et je vous rappelle.
Loren était bien sûr d'accord : il ne demandait qu'à savoir enfin ce que maître Octave avait de si urgent à dire. Pour la forme, Graziella attendit un quart d'heure avant de rappeler le notaire.
- Maître Octavio ? par chance, il se trouve que Sire Loren est disponible.
- Parfait ! Je peux vous proposer de me retrouver à côté de la place de la Bastille, impasse du Cheval-Blanc. Je connais une petite gargotte pas piquée des hannetons là-bas.
Graziella était chaque fois désagréablement surprise, autant que Loren, par le ton volontier lourd, vulgaire, employé par le notable de Lyon.
- Quelle escorte, soupira Loren.
- D'une discrétion raffinée.
Les rues de la Cour brillaient de mille feux, aux abords de l'imposant palais du Louvre, puis du Marais, en pleines festivités nocturnes. Place de la Bastille, de gros embouteillages s'étaient formés devant l'opéra et le tintamarre des klaxons montaient aux oreilles du génie perché sur sa colonne.
A suivre...
