15-01-2009, 12:03 PM
(This post was last modified: 15-01-2009, 02:15 PM by Darth Nico.)
Lire la fin ci-dessus<!--sizec--><!--/sizec-->
Ce jour-là, tandis que Manji était à son entraînement, Katon était déjà à l'auberge des chemins, où il s'entretenait avec ses "informateurs". D'autres membres du clan du Loup étaient là.
- Nous savons, Katon, que d'autres groupes de rônins se sont constitués en "clan du Loup". Certains de ceux présents ici ont eu des contacts. Habituellement, ces groupes se nomment des "repaires". Il y en a déjà au moins trois, au nord des montagnes du toit du monde. Nous, nous serions donc le quatrième repaire.
- Très bien. Il faut entrer en contacts avec eux. Il faut pouvoir communiquer avec eux, s'échanger des informations.
- Comme tu t'en doutes, Katon, la localisation de ces repaires est assez secrète. Pas complètement, cependant...
- Et je suis sûr que vous me l'apportez ?
- Tout à fait, dit l'un des émissaires en souriant. Nous avons interrogé les personnes qu'il fallait, et nous avons pu tracer des cartes...
- Excellent, vous avez bien travaillé.
Katon leur donna une récompense en pièces sonnantes et trébuchantes.
Manji arrivait peu après et Katon le mit au courant.
- Nous devons trouver le moyen de nous unir, disait Katon, en tapant dans son poing. Former un véritable clan du Loup.
- Tu vas un peu vite, dit Manji. La force des Loups est de constituer des petits groupes mobiles. Si nous nous réunissons, nous serons trop visibles, trop menaçants et il y aura des représailles.
- A ce sujet, j'ai appris une mauvaise nouvellle, dit Katon à voix basse.
- Quoi donc ?
- Jukeï est de retour.
- Otomo Jukeï ?
- Oui, il pourrait prendre ses quartiers d'hiver chez le Gouverneur.
- Il n'en a donc pas fini avec ses collectes d'impôts ?
- Il se pourrait bien qu'il vienne à la chasse au rônin cette fois-ci...
- Raison de plus, dit Manji, pour respecter ce que je disais : garder les repaires secrets... Allons, viens, patron-san va nous attendre. Il a de gros joueurs à ses tables aujourd'hui.
La vie continua ainsi dans le quartier marchand, pendant tout le mois du Rat (début de l'hiver) et une partie du mois du mois du Boeuf.

Les informations reçues par Katon étaient vraies : alors que la moitié du mois du Boeuf était écoulé, on annonça l'arrivée du contrôleur général Otomo Jukeï, capitaine du shinsen-gumi, au palais du gouverneur.
- Maya va dormir dans un bon lit ce soir, dit Yojiro.
- Qui est-ce, cet Otomo Jukeï ? demanda Yatsume.
Celle-ci dînait avec la BEC dans une petite auberge près du fleuve.
- Otomo Jukeï, la peste l'emporte, expliqua Yojiro. C'est un homme du Gozoku, et féroce avec ça. Il traque les rônins. Et le fait est qu'il est arrivé ici presque en même temps que nous. Sur sa route, il a croisé Maya, et en a fait sa favorite, pendant un temps. Ensuite, il l'a délaissée. Quant aux autres rônins, il n'attend qu'une occasion pour les embrocher !... Autant dire qu'on ferait mieux de se tenir à carreaux !
- Quelle histoire, soupira Yatsume. Il va falloir être très vigilants !
- Ne t'inquiète pas pour le moment. Continuons notre travail chez Patron-san. Il paye bien. On a de quoi passer l'hiver au chaud et le ventre plein et c'est l'essentiel !
A l'auberge des chemins, Katon avait sa table réservée, dans un coin de la salle. Par mesure de précaution, on avait abaissé de quelques crans le fier étendard du clan du Loup, de peur de voir débarquer, la bave aux lèvres, Jukeï et ses hommes.
- Les Loups vont hiverner, dit Katon.
Le soir de l'arrivée de Jukeï, trois nouveaux rônins entrèrent dans l'auberge : on ne les avait pas vus depuis des semaines. Juro et ses deux hommes ! Comme par hasard...
Katon se leva et alla au-devant de lui :
- Que viens-tu faire ici ?
- Ma foi, dit Juro en retirant ses mitaines pleines de neige, je viens boire un verre.
Katon l'invita à sa table, toujours méfiant.
- Écoute, dit Juro en se versant du thé, je ne viens pas ici en ennemi. La dernière fois, si j'avais voulu, j'aurais été en droit d'emmener Sazen. J'avais vaincu son champion, après tout, non ?
- Pourquoi ne l'as-tu pas fait ?
- Je ne sais pas... Sans doute parce que je ne voulais pas me mettre à dos tous les rônins de la région... Et que j'ai senti que Manji était quelqu'un d'honorable. C'est à ce sujet que je viens.
- Que veux-tu dire ?
- Si honorable que soit ce Manji, il s'illusionne sur le cas de Sazen. Il se fit aux belles légendes qu'on entend dans les tavernes de cette ville sur le rônin borgne et manchot. La vérité, je vais te la dire, et elle est moins belle à entendre. Tange Sazen était, comme on peut s'en douter, un senseï dans son clan. Seulement, il s'était attiré les foudres de nombreux personnages. C'était un coureur de jupons, vois-tu... Et un jour, les maris trompés se sont réunis. Et les cocus ont généralement de la ténacité dans la vengeance. Ils sont arrivés au dojo de Sazen, l'ont défié en duel. Un par un.
- Combien étaient-ils ?
- Dix, douze ?... Seul Sazen le sait exactement. Et combien en a-t-il vaincu ? Peut-être quatre, peut-être six. On ne sait pas. Mais il a fini par être vaincu. Il y a laissé un bras et un œil, et son statut de samuraï.
- Et depuis, il veut se venger des autres ?
- Il veut les provoquer en duel, à leur tour. Seulement, ce que tu ne sais pas, c'est le nom de la personne qui était à la tête des conjurés...
- Qui est-ce ?
- Otomo Jukeï.
Katon ne dit rien pendant quelques secondes. Il avait du mal à avaler.
- Tu voudrais dire que Jukeï est revenu...
- ... pour attraper Sazen, oui. Et que si le clan du Loup le protège, il encourra la colère du shinsen-gumi. A ta place, je chercherais à éviter ça.
Ni Katon ni Juro ne se doutaient qu'au même moment, Maya sortait des draps du capitaine Jukeï. Celui-ci, très satisfait, se faisait apporter un verre de saké par une servante.
- Tu as dû en apprendre des choses, depuis le temps que tu es là...
- Je ne sais pas trop, dit Maya.
- Non, tu ne sais pas ?... J'ai appris ton langage : tu veux me dire que tu as plein de choses à m'apprendre...
Pourquoi Maya faisait-elle cela ? Même pas par vénalité, car elle ne se faisait pas payer. Elle cédait, c'était tout, devant plus fort qu'elle. Jukeï avait été le premier. Depuis, elle n'osait pas refusait. Il était tout-puissant pour elle.
- Écoute moi. Il y a en ville quelqu'un que tu as dû remarquer, Maya. Un vieillard éclopé. Un vieux débris...
- Je me renseignerai...
Jukeï l'attrapa par le bras :
- Oui, tu vas te renseigner, et vite encore. Je veux que cet homme me soit livré, c'est compris ? C'est pour lui que je suis venu. Et gare à d'éventuels complices. A d'autres rônins susceptibles de l'aider, compris ?
- Oui, j'ai compris...
Maya prit ses affaires et s'en alla.
Juro terminait son thé.
- C'était évidemment Otomo Jukeï qui m'avait engagé. Mais il ne comptait guère sur moi. Il a engagé pas mal de monde. Seulement, ceux qui se sont frottés à Sazen s'y sont piqués...
- Il est si fort que ça ?
- Tu as bien dû entendre parler de sa technique secrète...
- J'en ai entendu parler, oui, dit Katon, mais c'est tout.
- C'est une technique qu'il aurait développée dans son dojo, avec ses élèves.
Juro reprit du thé :
- Il n'est pas impossible, d'ailleurs, qu'Otomo Jukeï ait voulu découvrir cette technique (lui ou le Gozoku), que Sazen ait refusé de la donner. Et qu'on ait éliminer Sazen ensuite.
- Ce sont des suppositions, dit Katon. Moi, ce qui m'intéresse, c'est la sécurité du clan du Loup.
- Si Jukeï découvre que Sazen entraîne le chef de ton clan, cela fera mauvais genre, tu ne crois pas ?
- Je pense oui. Mais toi, que viens-tu faire dans cette histoire, Juro ?
- Je ne veux plus de cette vie errante. J'ai besoin d'un toit, de chaleur, de compagnie. Je viens te demander de faire partie de ton clan.
- Tiens donc...
- Je ne suis plus tout jeune, Katon. Je ne me vois pas passer le reste de l'hiver dehors. Tu n'as aucune raison de me refuser. Je n'ai offensé personne d'entre vous.
Il n'ajouta pas : "et j'ai vaincu ton chef en duel", mais c'était sous-entendu.
- Je demanderai son avis à Manji.
- Je peux t'aider à joindre les autres clans du Loup, Katon. J'ai visité plusieurs repaires.
- Combien en connais-tu ?
- Quatre.
- Avec celui-ci ?
- Non, dit Juro. Quatre sans celui-ci. Celui-ci est le cinquième.
- Tiens donc. On m'avait parlé de trois.
- Il y en a un quatrième, non loin de cette Cité. Il se pourrait d'ailleurs qu'il ait besoin de votre aide.
- Pourquoi pas...
- Si les Loups ne s'entraident pas...
- Tu me dis que nous serions donc ici, le cinquième repaire ?
- Oui.
- Bien. Je dirai à Manji que tu souhaites rejoindre notre clan.
- Je te remercie. En attendant, mes hommes et moi prendrons une chambre dans cette auberge. Et ne t'inquiète pas : je ne suis pas un mouchard de Jukeï. Crois-tu que je serai allé me représenter devant lui, sans ramener Sazen ?
Katon ne dit rien et salua Juro avec son verre.

Avec un groupe de rônins solides et bien organisés, et le soutien financier de Patron-san, le clan du Loup profita du milieu de l'hiver pour s'organiser. Ce qu'on craignait par dessus tout, c'était une action prématurée d'Otomo Jukeï, avant le printemps.
- L'hiver est généralement une période d'accalmie, entendait-on dans l'auberge des chemins. Jukeï ne va pas nous tomber dessus dès maintenant.
- D'accord, mais pourquoi viendrait-il passer l'hiver dans notre Cité, alors qu'il pourrait profiter des fastueux palais impériaux ? Il faut qu'il soit drôlement acharné à retrouver Sazen.
- Il n'a peut-être pas le choix, qui sait ?
L'entraînement de Manji continuait. De plus en plus intense, de plus en plus ardu. Sazen ne le ménageait pas, et Manji apprit énormément en l'espace de quelques semaines.
- Allons, j'arriverai à faire de toi un duelliste convenable, souriait le vieux rônin.
Les gardes se succédaient pour les rônins. Les établissements de jeux de Rintaro divertissaient tout le quartier marchand.
Katon continuait d'organiser ses informateurs :
- Le Lotus Noir n'a pas pu plier bagage comme ça, du jour au lendemain. J'ai besoin de traces, j'ai besoin d'une piste. Il faut retrouver ce fumier de Horiu ! Apportez-moi quelque chose !
- Bien, Katon !
Il demanda à parler à Juro :
- Tu m'as parlé de ce quatrième repaire ?
- A cette saison, il doit être sous la neige...
- Écoute, je veux envoyer une expédition là-bas, pour le retrouver.
- En plein hiver ?
- Oui. Jukeï peut nous tomber dessus à tout moment. Il nous faut un plan de repli en cas d'urgence.
- Si tu parviens là-bas, tu seras à l'abri, car l'endroit est difficile à localiser.
- C'est ce qu'il me faut...
Katon fit signe à l'aubergiste de servir du saké. Il en versa une bonne rasade à Juro.
Celui-ci sortit des plis de ses vêtements un gros parchemin en peau de bête. Il l'étala sur la table :
- Bon, regarde bien...
L'auberge était encore bondée ce jour-là. Personne ne mettait le nez dehors à cause du verglas et de la neige. Et les Loups étaient les rois du monde dans cette auberge : c'était chez eux et personne d'autre. Depuis qu'ils avaient reçu du gouverneur le pouvoir de maintenir l'ordre dans le quartier, ils avaient éliminé plusieurs bandes de yakuzas qui refusaient de se plier à leur loi. Les gros bras du clan avaient jeté le nez dans la boue glacée plusieurs récalcitrants.
- Très intéressant, dit Katon. Il faut que j'en parle à Manji.
Juro repliait sa carte
La BEC et Yatsume furent convoqués le soir par Manji et Katon.
- Nous avons une mission pour vous, déclara solennellement Manji.
En fait, il n'était pas vraiment capable de se prendre au sérieux quand il disait ça devant la BEC. Il en rajoutait exprès.
- Nous allons vous envoyer prendre l'air à la campagne !
Yojiro et Mamoru grimacèrent d'incompréhension.
Katon expliqua la teneur de la mission.
- Intéressant, dit Yojiro.
Il avait été élevé dans une famille d'explorateurs. Il devinait déjà les dangers potentiels.
- Nous trouverons ce repaire, affirma-t-il.
- Bien, dit Manji, et prenez Maya avec vous ! Elle a besoin de prendre l'air, elle aussi !
Ce fut l'arête qui resta en travers de la gorge de nos héros !
Et dès que les courageux désignés volontaires eurent le dos tourné, Manji et Katon se tapèrent dans le dos et s'offrir à boire, bien contents d'avoir écarté cette traîtresse d'espionne d'Ize-Zumi !
A suivre...
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE
Ce jour-là, tandis que Manji était à son entraînement, Katon était déjà à l'auberge des chemins, où il s'entretenait avec ses "informateurs". D'autres membres du clan du Loup étaient là.
- Nous savons, Katon, que d'autres groupes de rônins se sont constitués en "clan du Loup". Certains de ceux présents ici ont eu des contacts. Habituellement, ces groupes se nomment des "repaires". Il y en a déjà au moins trois, au nord des montagnes du toit du monde. Nous, nous serions donc le quatrième repaire.
- Très bien. Il faut entrer en contacts avec eux. Il faut pouvoir communiquer avec eux, s'échanger des informations.
- Comme tu t'en doutes, Katon, la localisation de ces repaires est assez secrète. Pas complètement, cependant...
- Et je suis sûr que vous me l'apportez ?
- Tout à fait, dit l'un des émissaires en souriant. Nous avons interrogé les personnes qu'il fallait, et nous avons pu tracer des cartes...
- Excellent, vous avez bien travaillé.
Katon leur donna une récompense en pièces sonnantes et trébuchantes.
Manji arrivait peu après et Katon le mit au courant.
- Nous devons trouver le moyen de nous unir, disait Katon, en tapant dans son poing. Former un véritable clan du Loup.
- Tu vas un peu vite, dit Manji. La force des Loups est de constituer des petits groupes mobiles. Si nous nous réunissons, nous serons trop visibles, trop menaçants et il y aura des représailles.
- A ce sujet, j'ai appris une mauvaise nouvellle, dit Katon à voix basse.
- Quoi donc ?
- Jukeï est de retour.
- Otomo Jukeï ?
- Oui, il pourrait prendre ses quartiers d'hiver chez le Gouverneur.
- Il n'en a donc pas fini avec ses collectes d'impôts ?
- Il se pourrait bien qu'il vienne à la chasse au rônin cette fois-ci...
- Raison de plus, dit Manji, pour respecter ce que je disais : garder les repaires secrets... Allons, viens, patron-san va nous attendre. Il a de gros joueurs à ses tables aujourd'hui.
La vie continua ainsi dans le quartier marchand, pendant tout le mois du Rat (début de l'hiver) et une partie du mois du mois du Boeuf.

Les informations reçues par Katon étaient vraies : alors que la moitié du mois du Boeuf était écoulé, on annonça l'arrivée du contrôleur général Otomo Jukeï, capitaine du shinsen-gumi, au palais du gouverneur.
- Maya va dormir dans un bon lit ce soir, dit Yojiro.
- Qui est-ce, cet Otomo Jukeï ? demanda Yatsume.
Celle-ci dînait avec la BEC dans une petite auberge près du fleuve.
- Otomo Jukeï, la peste l'emporte, expliqua Yojiro. C'est un homme du Gozoku, et féroce avec ça. Il traque les rônins. Et le fait est qu'il est arrivé ici presque en même temps que nous. Sur sa route, il a croisé Maya, et en a fait sa favorite, pendant un temps. Ensuite, il l'a délaissée. Quant aux autres rônins, il n'attend qu'une occasion pour les embrocher !... Autant dire qu'on ferait mieux de se tenir à carreaux !
- Quelle histoire, soupira Yatsume. Il va falloir être très vigilants !
- Ne t'inquiète pas pour le moment. Continuons notre travail chez Patron-san. Il paye bien. On a de quoi passer l'hiver au chaud et le ventre plein et c'est l'essentiel !
A l'auberge des chemins, Katon avait sa table réservée, dans un coin de la salle. Par mesure de précaution, on avait abaissé de quelques crans le fier étendard du clan du Loup, de peur de voir débarquer, la bave aux lèvres, Jukeï et ses hommes.
- Les Loups vont hiverner, dit Katon.
Le soir de l'arrivée de Jukeï, trois nouveaux rônins entrèrent dans l'auberge : on ne les avait pas vus depuis des semaines. Juro et ses deux hommes ! Comme par hasard...
Katon se leva et alla au-devant de lui :
- Que viens-tu faire ici ?
- Ma foi, dit Juro en retirant ses mitaines pleines de neige, je viens boire un verre.
Katon l'invita à sa table, toujours méfiant.
- Écoute, dit Juro en se versant du thé, je ne viens pas ici en ennemi. La dernière fois, si j'avais voulu, j'aurais été en droit d'emmener Sazen. J'avais vaincu son champion, après tout, non ?
- Pourquoi ne l'as-tu pas fait ?
- Je ne sais pas... Sans doute parce que je ne voulais pas me mettre à dos tous les rônins de la région... Et que j'ai senti que Manji était quelqu'un d'honorable. C'est à ce sujet que je viens.
- Que veux-tu dire ?
- Si honorable que soit ce Manji, il s'illusionne sur le cas de Sazen. Il se fit aux belles légendes qu'on entend dans les tavernes de cette ville sur le rônin borgne et manchot. La vérité, je vais te la dire, et elle est moins belle à entendre. Tange Sazen était, comme on peut s'en douter, un senseï dans son clan. Seulement, il s'était attiré les foudres de nombreux personnages. C'était un coureur de jupons, vois-tu... Et un jour, les maris trompés se sont réunis. Et les cocus ont généralement de la ténacité dans la vengeance. Ils sont arrivés au dojo de Sazen, l'ont défié en duel. Un par un.
- Combien étaient-ils ?
- Dix, douze ?... Seul Sazen le sait exactement. Et combien en a-t-il vaincu ? Peut-être quatre, peut-être six. On ne sait pas. Mais il a fini par être vaincu. Il y a laissé un bras et un œil, et son statut de samuraï.
- Et depuis, il veut se venger des autres ?
- Il veut les provoquer en duel, à leur tour. Seulement, ce que tu ne sais pas, c'est le nom de la personne qui était à la tête des conjurés...
- Qui est-ce ?
- Otomo Jukeï.
Katon ne dit rien pendant quelques secondes. Il avait du mal à avaler.
- Tu voudrais dire que Jukeï est revenu...
- ... pour attraper Sazen, oui. Et que si le clan du Loup le protège, il encourra la colère du shinsen-gumi. A ta place, je chercherais à éviter ça.
Ni Katon ni Juro ne se doutaient qu'au même moment, Maya sortait des draps du capitaine Jukeï. Celui-ci, très satisfait, se faisait apporter un verre de saké par une servante.
- Tu as dû en apprendre des choses, depuis le temps que tu es là...
- Je ne sais pas trop, dit Maya.
- Non, tu ne sais pas ?... J'ai appris ton langage : tu veux me dire que tu as plein de choses à m'apprendre...
Pourquoi Maya faisait-elle cela ? Même pas par vénalité, car elle ne se faisait pas payer. Elle cédait, c'était tout, devant plus fort qu'elle. Jukeï avait été le premier. Depuis, elle n'osait pas refusait. Il était tout-puissant pour elle.
- Écoute moi. Il y a en ville quelqu'un que tu as dû remarquer, Maya. Un vieillard éclopé. Un vieux débris...
- Je me renseignerai...
Jukeï l'attrapa par le bras :
- Oui, tu vas te renseigner, et vite encore. Je veux que cet homme me soit livré, c'est compris ? C'est pour lui que je suis venu. Et gare à d'éventuels complices. A d'autres rônins susceptibles de l'aider, compris ?
- Oui, j'ai compris...
Maya prit ses affaires et s'en alla.
Juro terminait son thé.
- C'était évidemment Otomo Jukeï qui m'avait engagé. Mais il ne comptait guère sur moi. Il a engagé pas mal de monde. Seulement, ceux qui se sont frottés à Sazen s'y sont piqués...
- Il est si fort que ça ?
- Tu as bien dû entendre parler de sa technique secrète...
- J'en ai entendu parler, oui, dit Katon, mais c'est tout.
- C'est une technique qu'il aurait développée dans son dojo, avec ses élèves.
Juro reprit du thé :
- Il n'est pas impossible, d'ailleurs, qu'Otomo Jukeï ait voulu découvrir cette technique (lui ou le Gozoku), que Sazen ait refusé de la donner. Et qu'on ait éliminer Sazen ensuite.
- Ce sont des suppositions, dit Katon. Moi, ce qui m'intéresse, c'est la sécurité du clan du Loup.
- Si Jukeï découvre que Sazen entraîne le chef de ton clan, cela fera mauvais genre, tu ne crois pas ?
- Je pense oui. Mais toi, que viens-tu faire dans cette histoire, Juro ?
- Je ne veux plus de cette vie errante. J'ai besoin d'un toit, de chaleur, de compagnie. Je viens te demander de faire partie de ton clan.
- Tiens donc...
- Je ne suis plus tout jeune, Katon. Je ne me vois pas passer le reste de l'hiver dehors. Tu n'as aucune raison de me refuser. Je n'ai offensé personne d'entre vous.
Il n'ajouta pas : "et j'ai vaincu ton chef en duel", mais c'était sous-entendu.
- Je demanderai son avis à Manji.
- Je peux t'aider à joindre les autres clans du Loup, Katon. J'ai visité plusieurs repaires.
- Combien en connais-tu ?
- Quatre.
- Avec celui-ci ?
- Non, dit Juro. Quatre sans celui-ci. Celui-ci est le cinquième.
- Tiens donc. On m'avait parlé de trois.
- Il y en a un quatrième, non loin de cette Cité. Il se pourrait d'ailleurs qu'il ait besoin de votre aide.
- Pourquoi pas...
- Si les Loups ne s'entraident pas...
- Tu me dis que nous serions donc ici, le cinquième repaire ?
- Oui.
- Bien. Je dirai à Manji que tu souhaites rejoindre notre clan.
- Je te remercie. En attendant, mes hommes et moi prendrons une chambre dans cette auberge. Et ne t'inquiète pas : je ne suis pas un mouchard de Jukeï. Crois-tu que je serai allé me représenter devant lui, sans ramener Sazen ?
Katon ne dit rien et salua Juro avec son verre.

Avec un groupe de rônins solides et bien organisés, et le soutien financier de Patron-san, le clan du Loup profita du milieu de l'hiver pour s'organiser. Ce qu'on craignait par dessus tout, c'était une action prématurée d'Otomo Jukeï, avant le printemps.
- L'hiver est généralement une période d'accalmie, entendait-on dans l'auberge des chemins. Jukeï ne va pas nous tomber dessus dès maintenant.
- D'accord, mais pourquoi viendrait-il passer l'hiver dans notre Cité, alors qu'il pourrait profiter des fastueux palais impériaux ? Il faut qu'il soit drôlement acharné à retrouver Sazen.
- Il n'a peut-être pas le choix, qui sait ?
L'entraînement de Manji continuait. De plus en plus intense, de plus en plus ardu. Sazen ne le ménageait pas, et Manji apprit énormément en l'espace de quelques semaines.
- Allons, j'arriverai à faire de toi un duelliste convenable, souriait le vieux rônin.
Les gardes se succédaient pour les rônins. Les établissements de jeux de Rintaro divertissaient tout le quartier marchand.
Katon continuait d'organiser ses informateurs :
- Le Lotus Noir n'a pas pu plier bagage comme ça, du jour au lendemain. J'ai besoin de traces, j'ai besoin d'une piste. Il faut retrouver ce fumier de Horiu ! Apportez-moi quelque chose !
- Bien, Katon !
Il demanda à parler à Juro :
- Tu m'as parlé de ce quatrième repaire ?
- A cette saison, il doit être sous la neige...
- Écoute, je veux envoyer une expédition là-bas, pour le retrouver.
- En plein hiver ?
- Oui. Jukeï peut nous tomber dessus à tout moment. Il nous faut un plan de repli en cas d'urgence.
- Si tu parviens là-bas, tu seras à l'abri, car l'endroit est difficile à localiser.
- C'est ce qu'il me faut...
Katon fit signe à l'aubergiste de servir du saké. Il en versa une bonne rasade à Juro.
Celui-ci sortit des plis de ses vêtements un gros parchemin en peau de bête. Il l'étala sur la table :
- Bon, regarde bien...
L'auberge était encore bondée ce jour-là. Personne ne mettait le nez dehors à cause du verglas et de la neige. Et les Loups étaient les rois du monde dans cette auberge : c'était chez eux et personne d'autre. Depuis qu'ils avaient reçu du gouverneur le pouvoir de maintenir l'ordre dans le quartier, ils avaient éliminé plusieurs bandes de yakuzas qui refusaient de se plier à leur loi. Les gros bras du clan avaient jeté le nez dans la boue glacée plusieurs récalcitrants.
- Très intéressant, dit Katon. Il faut que j'en parle à Manji.
Juro repliait sa carte
La BEC et Yatsume furent convoqués le soir par Manji et Katon.
- Nous avons une mission pour vous, déclara solennellement Manji.
En fait, il n'était pas vraiment capable de se prendre au sérieux quand il disait ça devant la BEC. Il en rajoutait exprès.
- Nous allons vous envoyer prendre l'air à la campagne !
Yojiro et Mamoru grimacèrent d'incompréhension.
Katon expliqua la teneur de la mission.
- Intéressant, dit Yojiro.
Il avait été élevé dans une famille d'explorateurs. Il devinait déjà les dangers potentiels.
- Nous trouverons ce repaire, affirma-t-il.
- Bien, dit Manji, et prenez Maya avec vous ! Elle a besoin de prendre l'air, elle aussi !
Ce fut l'arête qui resta en travers de la gorge de nos héros !
Et dès que les courageux désignés volontaires eurent le dos tourné, Manji et Katon se tapèrent dans le dos et s'offrir à boire, bien contents d'avoir écarté cette traîtresse d'espionne d'Ize-Zumi !
A suivre...
