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Dossier #10 : Penthésilée 64-300 Exécution
#4
DOSSIER #10<!--sizec--><!--/sizec-->


Portzamparc se fit déposer à Névise. Il voulait en savoir plus sur l'incendie de la Brigade Spéciale.
Le quartier était calme. Des milliers de lentilles fluorescentes flottaient dans le grand canal, de telle sorte qu'on pouvait apercevoir distinctement les palais sous-marins recouverts de coquillages.
Le détective interrogea deux petites vieilles femmes, qui habitaient un logis en face des bureaux qui avaient brûlé. Il ressortait qu'une bande de gaillards cagoulés étaient arrivés brusquement des petites rues sombres. Des jerrycans à la main, ils étaient entrés dans l'immeuble et y avaient mis le feu. Ils étaient ressortis avant que les flammes ne prennent tout le bâtiment, avec un sac qui contenait visiblement un corps, et ils l'avaient jeté dans le canal.
Les Pandores avaient retrouvé le sac mais n'avaient pu identifier le corps. La seconde dame connaissait juste la victime, un homme d'une trentaine d'années, qui venait manifestement travailler dans le bâtiment.
Portzamparc posa quelques questions sur le commissaire Weid, en donnant simplement sa description physique : "un homme entre deux âges, cheveux poivre et sel, un manteau et un chapeau gris, l'air sévère."
- Oh oui, il devait travailler là lui aussi. On le voyait arriver tôt le matin. Un petit signe de tête, parfois, quand on le croisait mais c'était un monsieur très réservé.
- Vous ne savez pas où il habitait ?
- Sans doute pas dans le quartier. Il partait tard le soir, par les ruelles Oscuros. Il ne traînait jamais dans le quartier. Vous croyez qu'il est mort dans l'incendie ?
- Je ne sais pas. Je ne pense pas, dit Portzamparc.
La première voisine avait décrit le visage d'un des membres de la bande, et Portzamparc avait reconnu sans hésitations Milovic, le goguenard, l'un des plus zélés de la bande du Somnambule.
C'était bien la guerre à outrance qui était déclarée. Du côté ennemi, on était décidé à ne pas prendre d'otages !
Le jeune homme précipité dans le canal devait être le secrétaire de Weid. Portzamparc l'avait aperçu la dernière fois qu'ils étaient venus dans les bureaux de Weid. Le détective visita le bâtiment calciné. Weid avait-il pu s'échapper ? Outre la porte d'entrée, il n'y avait dans les bureaux minuscules qu'un vasistas dans la cuisine, et une fenêtre dans le bureau du commissaire, qui donnait sur une fenêtre, à cinq mètres de là. Pour sauter sur le rebord d'en face, il aurait fallu à Weid une sacrée détente, sans parler de l'élan à prendre. Un vrai exploit sportif. Portzamparc aurait à la limite pu y arriver, mais il voyait mal le frêle commissaire bondir comme un fureuil et s'accrocher en face, tout ça poursuivi par les hommes du Somnambule dans un bâtiment en flammes !
D'autant qu'une fois accroché de l'autre côté, il faisait une cible idéale. Physiquement, il était presque impossible que Weid ait réchappé à l'incendie. Mais le fait est qu'on n'avait pas retrouvé son corps.

Le détective fouilla les décombres noirs. Il ne savait pas ce qu'il cherchait. En tâtant le plancher, il craqua une latte déjà calcinée et découvrit en dessous une cache. A l'intérieur, une grosse boîte métallique qui avait résisté aux flammes. Elle était très lourde. Portzamparc la tira et la posa sur une pierre. Il ouvrit et trouva à l'intérieur un chromatographe. Un modèle robuste, presque sans aucune décoration. Ce n'était pas vraiment la mode, qui était plutôt aux appareils délicatement ouvragés. Portzamparc détacha l'écran et l'entonnoir, trop encombrants, pour n'emporter que la console avec le clavier et la carte-mémoire.

Il rentra à son hôtel discret du quartier Galippe où il étudia le chromatographe. Il emprunta l'écran de celui du gérant : il trouva dans l'appareil plusieurs fichiers protégés par un code. Le détective appela alors son réseau :
- Ici Hadaly 20-52...
Une voix lui répondit en Autrellien et dans la même langue, Portzamparc demanda à rencontrer un contact. On lui dit qu'il aurait un rendez-vous le lendemain.
Il appela ensuite Penthésilée qui, la dernière fois, lui avait laissé un numéro où la joindre. Elle ne répondait pas mais la ligne passa sur un enregistreur automatisé sur lequel Portzamparc laissa un message.
- J'imagine que vous avez appris ce qui est arrivé à mon collègue. J'ai l'intention de faire payer cela aux responsables. Puisque vous m'avez proposé votre aide, j'accepte. Je vous contacterai très bientôt, dès que mes recherches auront avancé.
Il parlait de façon volontairement vague, car on ne savait pas qui pouvait écouter cet océan sonore qu'étaient les communications de CONTRÔLE.
Le détective se coucha tôt, ce soir-là, dans sa petite chambre perdue dans ce quartier isolé.

Le lendemain matin, il appela l'hôpital, où on lui dit que l'état de Maréchal était stationnaire.
- Il sera emmené dans deux jours dans une autre clinique, détective.
- Vous savez laquelle ?
- C'est sur la demande de sa tante. Elle le fait emmener... Attendez... Oui, à la Vague Noire. A la clinique de la plage.
- Je vous remercie, mademoiselle.
Ce n'était pas une mauvaise chose que Maréchal aille prendre le grand air. Il était bon de l'éloigner des miasmes de la Cité, où il y avait vraiment trop de gens infréquentables, dont Portzamparc -officiellement, il était encore en stage pour quelques jours- allait personnellement s'occuper !

*

Le détective retrouva un de ses contacts dans un café discret du quartier des Passantes. Ce contact n'était pas le petit gros mais le grand maigre âgé avec son air ricaneur, le spécialiste du fusil. Il arrivait le chapeau en arrière, les mains dans les poches.
- Salut, fiston... Tu offres quoi ?
- Ce que vous voudrez. Et moi, j'ai besoin de renseignements rapidement.
C'était le lendemain de la fouille à Névise. Portzamparc avait essayé sans résultat d'accéder aux fichiers du chromato depuis sa chambre.
- Tu sais que nous, on fait bien les choses, fiston... Mais il faut que ce soit important. On sait que tu t'es embringué dans cette affaire du Somnambule. Tu crois qu'il peut être dangereux pour nous ?
- Pas pour le moment. Mais ça pourrait venir.
L'autre ricana d'un air et prit le verre que lui apportait le garçon. Il prit la cigarette qu'il avait coincée derrière son oreille et l'alluma négligemment.
- Dis-moi de quoi tu as besoin.
- J'ai des fichiers à lire, des informations à chercher.
- On connait un petit génie du bidouillage des réseaux de CONTRÔLE...
- C'est juste ce qu'il me faut.
- Je vais te laisser son adresse. Il a déjà travaillé pour nous, sans savoir qui on était.
- Je m'en doute bien.
- Tiens-nous au courant. On ne voudrait pas qu'il t'arrive malheur.
Portzamparc paya les boissons et partit. Il retrouva Corben qui racontait sa vie au bistrot d'en face à une assemblée d'habitués qui l'écoutaient d'une oreille.
- Et alors, le gars, j'y dis... Oh, je vais y aller ! Voilà le client ! Et il ne plaisante pas sur la ponctualité, hein !
Il finit son verre et partit en s'essuyant ses grosses moustaches maculées de vin.
Portzamparc lui tendit le carton avec l'adresse.
- On pourra dire qu'on a fait un bout de chemin ensemble, hein patron !
- Comme tu dis, Corben, comme tu dis...
Le ballon alla des Passantes à Torvald, bloc industriel où s'étaient installés plusieurs déchetteries et des services de SANITATION consacrés au recyclage.
Des tapis roulants convoyaient des tonnes de déchets qui tombaient dans de grosses cuves où ils étaient fondus, brassés, avant de ressortir en cubes compacts, au milieu d'énormes roues dentelées qui activaient des presses. C'était des gueules d'acier et d'ombres qui dévoraient les rejets du reste d'Exil, les digéraient et les recrachaient ailleurs.
- Si c'est pas impressionnant, ces trucs-là... J'ai un cousin qui travaille dedans. On vous recyle une tonne de matériau à l'heure !
Corben avait un cousin dans presque chaque corps de métier de la Cité !
Le détective trouva son chemin entre les différents plateaux de recyclage. De gros chariots arrivaient pour déverser leurs ordures, au milieu du tintamarre extraordinaire des cuves et du fracas métallique. Portzamparc se présenta à l'entrée de la déchetterie 42C, montra sa plaque et entra. Il fallait vraiment connaître l'endroit pour se repérer. Il passa entre des piles de gravats, de parpaings et de ferrailles et vit un escalier qui descendait sous un tumulus soutenu par un échafaudage de bois.
Il prit les marches et arriva dans une antre pleine de matériel chromatographique. Le sol était recouvert de morceaux de plaques gravées et il y avait jusqu'au plafond des instruments de connexions. Un jeune homme rouquin, les joues piquetées de tâches rousses, s'acharnait avec un tournevis sur un clavier de machine à écrire.
- Satané bazar de foutu machin...
Il se retourna quand il entendit taper derrière lui.
- Je ne vous dérange pas...
- Qui êtes-vous ? Vous n'êtes pas un ouvrier de...
- Bien observé, monsieur... Linus, c'est ça ?
- Oui, on m'appelle comme ça, mais ce n'est qu'un surnom !
Il en était visiblement très fier.
- Je m'appelle Portzamparc, je viens engager vos services.
- Qui vous a donné mon adresse ?
- Un de vos bons clients. J'ai besoin de lire un vieux chromatographe.
- Montrez voir...
Le policier prit dans son sac l'appareil et lui donnait. L'autre l'ausculta aussitôt et dit, d'un air expert :
- Chromatographe de l'année 200... Je me demande bien où vous l'avez eu.
Portzamparc sourit : cela ne le regardait bien sûr pas.
- Non, parce que la plupart des chrom' de cette année ont été rappelés par le constructeur. Ils étaient défectueux. Je ne pensais pas qu'il en restait sur le marché.
- J'ai besoin de lire les documents contenus sur celui-ci. Mais ils sont cryptés.
- Cryptés ?... Aucun cryptage ne me résiste, mais je ne suis pas donné.
Portzamparc souriait toujours : l'argent n'était pas un problème.
- Combien ?
- Pour ce boulot-là, 400 velles. Rapidité et discrétion garantie.
400 velles : un mois de salaire d'un fonctionnaire de SÛRETÉ. Portzamparc ne sourcilla pas. C'est ce qu'il gagnait, en plus, chaque semaine. Depuis son arrivée à Exil, son réseau lui versait en effet cette somme hebdomadaire sur un autre compte. Personne n'était au courant, pas même sa femme.
- D'accord, 400 velles mais je veux les fichiers ce soir.
- Mettons demain matin, et j'y passerai la nuit. J'ai d'autres commandes, vous savez...
Il jouait les importants -et peut-être l'était-il vraiment, s'il était si génial dans son domaine - mais il en fallait plus pour impressionner le policier.
Portzamparc entendit alors un objet dégringoler l'escalier. Une grenade !
Elle fumait déjà ! Ni une ni deux, le détective ramassa la grenade et la rejeta dehors. Elle explosa en touchant le sol, dans un bruit assourdissant. La niche de Linus fut secouée, le toit craqua, plusieurs objets tombèrent, juste après que Portzamparc s'était jeté sur le pirate pour le plaquer à terre. Une épaisse fumée envahissait la pièce quand Portzamparc se releva. Les deux hommes, asphyxiés et les yeux en pleurs, pouvaient à peiner respirer. Portzamparc, un mouchoir sur le nez, fit signe à Linus de rester allongé par terre, et tira son révolver. Il s'accroupit au pied de l'escalier et monta prudemment les marches.
Il aperçut un tireur allongé sur le tumulus d'en face, derrière de vieilles baignoires. Un tir de fusil claqua mais le policier s'était rejeté en arrière. La fumée commençait à se dissiper. En bas, Linus osait se relever. Portzamparc lui fit signe de ne pas approcher de l'escalier. Notre héros n'était adossé à une marche et regardait au-dehors. Le tueur rechargeait son arme. Le policier jaillit comme un diable et tira.
Le tireur roula sur le côté et disparut derrière une baignoire. Portzamparc tira plusieurs balles et vit l'autre se redresser et dévaler son tas de déchets.
Dans les rues retentissaient des sifflets de Pandore. Portzamparc courut en haut du tumulus, d'où il vit le tueur s'enfuir et se dissimuler derrière une vieille armoire en fer. Impossible de l'atteindre. Rageur, le policier mit un genou à terre et visa. L'autre devrait bien s'enfuir.
C'est alors que deux Pandores arrivèrent en courant, la matraque levée. Le tueur se releva. Il allait tirer quand Portzamparc fit feu. Il le rata mais l'obligea à se jeter sur le côté. Le moment d'après, le Pandore assénait un solide coup à la mâchoire de l'homme. Il s'effondra à terre et l'autre prétorien lui passa les menottes, son genou sur son dos.
Portzamparc descendit de son abri et montra sa plaque.
- Repos, les gars...
Les deux hommes considérèrent d'un œil mauvais cette intrusion dans leur travail.
- Je suis sur une enquête, messieurs...
L'éternel conflit de services. Une fois de plus, SÛRETÉ reprenait à son compte une brillante affaire de PANDORE !
Portzamparc regarda l'homme à terre. Il était habillé comme un Exiléen anonyme ; on l'aurait pris pour un petit clerc de notaire.
- Mais je serais heureux d'avoir votre collaboration pour faire parler cet individu, avant de vous le confier...
Les deux Pandores se consultèrent et acceptèrent.
Quelle ne fut pas la surprise du brave Linus quand il vit revenir ce monde-là dans son repaire !
- C'est quoi cet endroit ? grogna un des Pandores. Et ce matériel, il vient d'où ?
- Concentrons-nous sur l'essentiel, messieurs, proposa le détective. Cet endroit, je m'en occupe.
L'autre Pandore asséna un crochet du gauche au tueur et le plaqua au mur.
- Tu vas parler, dis ?
Linus était effrayé. Portzamparc sourit :
- Notez qu'on ne lui a encore rien demandé...
- Je sais les travailler au corps moi, les tueurs comme lui... On va ramollir la viande !
Le détective le pria d'arrêter et posa doucement quelques questions. On se trouvait dans la situation du bon flic, deux mauvais flics !
L'autre n'était plus en état de résister.
Quelques minutes plus tard, il était emmené par les deux prétoriens et Portzamparc emmenait Linus avec lui.
- Tu n'es plus en sécurité ici. Tu as été découvert...
Le pirate regrettait déjà ce contrat à 400 velles !
- Qui a fait ça ?...
- J'ai peur de le savoir, Linus, mais je ne pense pas que tu voudrais le savoir. Alors, prends le minimum de matériel et suis-moi.
Linus jeta tout ce qu'il put dans un gros sac et suivit Portzamparc. Corben faisait chauffer le moteur quand ils arrivèrent. Ils décollèrent dans la minute.
- Dites, chef, c'est pas pour dire, mais le sac du gamin là, nous alourdit drôlement ! Alros, si ça se trouve, on va devoir lâcher du lest !
- Personne ne touche à mon matériel, s'écria Linus en prenant son sac dans ses bras.

Le ballon-taxi se posa dans Rotor 24, pas loin de la planque où Portzamparc avait fait son entrée chez le Somnambule.
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Dossier #10 : Penthésilée 64-300 Exécution - by Darth Nico - 12-04-2009, 09:46 AM

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