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12e Episode : "Plus jamais ça..."
#5
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Les deux rônins racontèrent ce qu'ils avaient appris : que le clan du Serpent savait des choses sur Nuage et que le Lotus allait s'en prendre au Serpent ; et le retour de la Grue Noire, au service de ce "Maître Cristal".
Sasuke fit aussitôt le lien, mais n'en laissa rien voir : Cristal était le nom de celui qui avait capturé le pennagolan et qui l'avait emmené sur l'île... Il devenait également clair que la secte du Lotus avait un "Lotus" à sa tête, et que ce n'était pas, comme l'avait parfois cru nos héros, ce "Nuage" qui la dirigeait.
Et maintenant, il y avait un nommé "Cristal" qui s'ajoutait à ces noms cryptés de conspirateurs.
- Ils pensent que le Serpent est corrompu ? dit Sasuke.
- C'est ce qu'ils ont dit...
- Corrompu... par la Souillure ?
- C'est bien possible, mais ils ne l'ont pas affirmé.
Sasuke restait dubitatif. Il savait que la menace sur le clan du Serpent devait être prise au sérieux mais c'était encore imprécis.
- Bon, vous vous reposerez aujourd'hui, dit Sasuke. J'enverrai un shugenja guérir vos plaies. Vous allez avoir besoin de toutes vos forces ! Maya va continuer à surveiller le Lotus, et vous, dès demain, vous surveillerez les Serpents !
Les deux rônins s'inclinèrent.
- A propos, Mamoru, où en est l'interrogatoire du Shuten-Doji ? L'Inquisiteur obtient-il des réponses ?
- L'Inquisiteur Tadao travaille sans relâche à obtenir la vérité de la part de ce monstre.
- Bon, bien... Allez dormir maintenant.

A la "Carapace", l'Inquisiteur Tadao avait ses quartiers réservés. Et il y avait les sous-sols de ces quartiers... D'anciennes cavernes aménagées où étaient amenés les sujets considérés les plus dangereux, pour y être confiés aux etas les plus experts en interrogatoires.
Cette vaste chambre de torture avait plusieurs tables, et des armoires débordant d'instruments affûtés et effrayants. Il y avait plusieurs cuves, des marmites d'eau bouillante, des brûloirs avec des charbons rouges en permanence.
Tadao y descendait, ce matin-là, par un grand escalier tortueux. Il fit craquer ses doigts.
Sur la grande table au milieu de la pièce, un grand humain aux traits marqués par la fatigue et la rage était attachés aux poignets et aux chevilles. C'était l'incarnation du Shuten-Doji de la Honte. Il saignait en plusieurs endroits et portait des traces de brûlures sur tout le corps. Mais sa vigueur démoniaque lui avait permis de résister à plus de quatre jours d'interrogatoires incessants. Des runes dessinées sur la table et sur le sol autour de lui l'affaiblissaient considérablement.
- Aujourd'hui, démon, tu finiras par parler, fit l'Inquisiteur, très las. Ou bien je te réserverai un tel traitement que tu me supplieras de t'expédier dans les griffes de ton maître...
- Je ne te crains pas, Inquisiteur ! Rien ne peut venir à bout de la force d'un être comme moi !... Plus tu me tortureras et plus ma rage augmentera. A la fin, je briserai mes chaînes et ce sera à mon tour de jouer avec vous !
L'Inquisiteur avait pris un tison chauffé à blanc et le promena tout près du visage du Shuten-Doji :
- Je vais avoir besoin de t'extraire des réponses, monstre. Je préfèrerais les voir sortir toutes seules, volontairement, mais j'ai des moyens pour les extraire.
- Tu ne peux rien faire, rugit le monstre. Rien ! Tu ne connais pas...
L'Inquisiteur lui enfonça d'un coup le tison dans la bouche et lui transperça la joue, le clouant littéralement à la table.
Le monstre hurla mais un serviteur arriva pour lui déverser une jarre d'eau bouillante dans la bouche, noyant ses cris.
- Je t'ai assez entendu parler pour ne rien dire, soupira Tadao. Maintenant, je ne veux plus que des réponses claires à mes questions.
Un autre serviteur arrivait, portant une coupe pleine d'aiguilles au bout chauffées à rouge. L'Inquisiteur en prit une, l'examina et dit :
- Nous autres Kuni utilisons notre propre art de l'acupuncture. Il a guéri bien des créatures dans ton genre, de toute velléité de résistance.
"Je te le demande une dernière fois : Où est le Shuten-Doji du Regret ?... Qu'est-il arrivé au clan du Serpent ?
Le monstre, qui recrachait l'eau, ne voulait toujours rien dire. Tadao retira le tison d'un coup.
- Alors, parle !
- Rien ! Tu ne sauras rien !
Des serviteurs prirent les aiguilles brûlantes et commencèrent à les enfoncer. Le monstre se mit à hurler de plus belle. L'Inquisiteur prit un poignard et ouvrit grand la bouche du Shuten-Doji :
- Tu m'excuseras de te couper la langue pendant ce "traitement"... Je sais qu'elle aura repoussé dès demain.
Il fit un effort pour bien enfoncer sa lame pendant qu'un assistant maintenant la gueule ouverte, et il trancha d'un coup sec.
- Il faudra environ une journée pour cette acupuncture, Shuten-Doji... Je reviendrai quand ce sera fini.

Les serviteurs continuèrent à planter les aiguilles et Tadao remonta au palais, où il alla prendre un bain parfumé.
Il déjeuna en compagnie d'ingénieurs de la Muraille, qui le tinrent au courant des dernières attaques et des travaux de reconstruction de la partie ouest. Dans l'après-midi, il vaqua à ses occupations : il reçut plusieurs nobles de la Cité et remplit des papiers. Au coucher du soleil, il reprit un bain puis redescendit dans la salle d'interrogatoire. La chaleur qui y régnait était presque intenable. Sans parler de la puanteur épaisse. Cinq etas presque nus tapaient ensemble à coups de battes sur le corps du monstre. Ils s'inclinèrent devant leur maître et lui annoncèrent qu'ils avaient fini de lui briser les os.
- Il a failli s'échapper de ses liens, maître...
- Oui, il va falloir que je redessine les runes. Elles doivent commencer à perdre de leur puissance.
- Ce ne sera pas utile, maître. Il a fini par parler. Nous avons consigné ses réponses par écrit.
L'Inquisiteur prit le parchemin et le lut.
- Excellent travail, grommela-t-il. C'est tout ce qu'il avait à nous dire ?
- Oui, maître.
- Bien, alors éloignez-vous, je vais terminer la besogne.

L'Inquisiteur tendit les mains devant lui et invoqua un tetsubo qui luisait d'une aura de jade. Il le soupesa et s'approcha du Shuten-Doji, plus mort que vif.
- Nos épreuves touchent à leur fin. Tu vas pouvoir repartir d'où tu viens.
Tadao leva bien haut son arme et fracassa le crâne du monstre. Il y eut un jaillissement d'éclats de jade brûlants, qui giclèrent dans la pièce et s'écrasèrent à terre.
Puis l'Inquisiteur étendit les mains au-dessus du corps du supplicié et invoqua un rituel de bannissement. Des flammes vertes embrasèrent le corps et le consumèrent rapidement. La dépouille partit en une fumée âcre et poisseuse, qui partit par le conduit de la cheminée.
L'épaisse crasse s'envola au-dessus de la Cité. Ceux qui vivaient à la Carapace et autour surent que l'Inquisiteur Tadao en avait terminé avec un de ses interrogatoires.

- Vous avez bien travaillé, dit l'Inquisiteur. Vous aurez une bonne prime pour que vos familles n'aient pas à s'inquiéter de l'hiver.
Les assistants se retirèrent, tandis que d'autres etas arrivaient pour nettoyer cette espèce d'antichambre de l'enfer. L'Inquisiteur ne se priva pas d'aller prendre un autre bain !

Samurai

Yatsume arrivait en vue de la Cité des Mensonges. Elle avait voyagé seule en évitant les grandes routes. Elle était passée inaperçue au milieu des terres de son ancien clan. Elle avait vécu presque comme une sauvage, à la lisière des bois. Elle avait su écarter quelques bandits de grands chemins qui la prenaient pour une proie facile. Ce matin-là, elle voyait enfin les murailles grises de la capitale des Scorpions. La brume se déchirait lentement, percée par le soleil. Yatsume s'assit en haut d'une colline, car elle attendrait l'agitation de la matinée pour se faufiler en ville. La Cité était encore froide de la nuit, et seuls quelques samuraï matinaux et les boulangers étaient déjà debout. L'herbe était humide, et du bois d'où sortait Yatsume, on entendait le crissement des animaux qui s'éveillaient. Le soleil se hissait dans le ciel, silencieux, derrière la Cité et réchauffait déjà la grande plaine.
Yatsume surveilla les chemins, assise le naginata planté à côté d'elle. A l'intérieur de cette Cité se trouvait l'asile où elle avait été confinée par son clan. Les Bayushi qui avaient profité de sa terreur devant la mort de son mari pour l'en accuser. Elle n'avait eu aucun mal à croire qu'elle l'avait tué, car elle le voulait depuis des mois.
Elle avait vu son mari s'enfoncer peu à peu dans la folie, dévoré par le mal de l'Outremonde à cause de ses recherches dans les arcanes de la maho. C'était l'ignoble pennagolan maho-tsukaï, Yumi Iro, qui avait répondu aux appels de son mari... Et l'horrible créature avait encore eu le culot d'affirmer que ce n'était pas lui l'assassin... Ni lui, ni Yatsume... Avant de mourir, il avait dit que c'était quelqu'un d'autre, qui l'avait fait "par amour"... Quelqu'un qui aimait Yatsume et qui avait frappé à sa place ?
Si ce troisième homme n'avait pas agi, c'est Yatsume qui l'aurait fait, de toute façon. Qu'est-ce cela changeait, tant son intention de le faire était forte ?... C'est pour cela qu'elle avait sombré dans la folie. Parce qu'elle avait tellement prévu de tuer son mari qu'elle en était presque aussi coupable que l'assassin réel.

Seulement, il y avait plus, et cela, même Yumi Iro l'ignorait. Pour l'apprendre, Yatsume avait dû plonger dans le donjon de la nécropole... Et ce n'est que récemment qu'elle avait retrouvé ses souvenirs sur ce voyage... Le chat qui l'avait guidée dans l'Outremonde jusqu'au pied de la Muraille, après un passage parmi le monde des morts... Et avant cela, Yatsume s'était rappelée être passée dans un vaste monde, une plaine infinie, vert-de-gris, sous un ciel éclatant de cent tonnerres... Partout des grondements et des roulements, dans le ciel et sur terre.
Yatsume s'était vue, ressortant du donjon, courir jusqu'à une hauteur, pour éviter le fracas de deux immenses armées spectrales, semblables à un typhon de fantômes et de carcasses de zombies, qui allaient se rentrer dedans. Elle avait pu s'écarter au dernier moment, juste avant que les deux armées, qui semblaient plus nombreuses à elle deux que tout un clan, commencent à engager une bataille gigantesque, où il y eut des soulèvements, des vagues et des reflux de soldats enragés. Au bout de longues heures, épuisés, les guerriers encore debout se retiraient et se dispersaient... En quelques pas, ils avaient disparu comme des esprits. Il en restait des milliers à terre, à perte de vue, et Yatsume avait marché parmi cette plaine jonchée de corps.
Et un mourant l'avait appelée. Elle avait approchée sur ses gardes et avait tressailli : c'était son mari qui l'appelait !
Il avait enlevé son masque de bataille et tendait faiblement le doigt vers elle.
- Écoute, lui dit-il, d'une voix qui ne semblait pas venir de sa bouche, c'est bien moi, Yatsume... J'ai été précipité dans ce monde pour mes fautes... Pour expier mon comportement. Je me suis déshonoré, Yatsume, et je t'ai précipité dans la folie... Ici, je ne peux presque ressentir aucun sentiment. Je ne suis qu'un pantin qui doit se battre, encore et encore...
Yatsume vit alors qu'il s'enfonçait peu à peu dans la terre. Elle lui prit la main, voulut tirer, mais sentit que c'était inutile. Elle pleurait, agitée par les sanglots et voulait empêcher l'inéluctable :
- Reviens, reviens...
Elle entendait à peine ses propres cris.
- Tu n'appartiens pas à ce monde, Yatsume... Tu ne peux rien changer à son cours... Quelle folie tu as eu de vouloir entrer dans le Toshigoku (Royaume du Massacre) !
- Je voulais te revoir ! J'ai entendu ta voix !
- Qui ne gémit pas, dans ce monde ?... Toi, tu ne peux rester là ! Tu vas repartir, regarde...
Sa poitrine avait disparu dans le sol, ainsi que ses jambes. Il désignait un chat blanc, assis à quelques pas, qui se léchait les pattes.
- C'est un ami à moi... Je n'aurai pas le temps de t'expliquer... Suis-le, il te ramènera chez toi... chez nous...
Yatsume tirait de toutes ses forces mais elle sentait qu'elle allait arracher le bras de son mari ! Celui-ci l'agrippa au poignet :
- Écoute...
Son bras avait presque disparu sous terre. La tête et le cou dépassaient encore.
- Quand tu étais à l'asile... "Ils" ne t'ont pas dit, Yatsume... Mais avant que tu ne t'évades, tu as mis au monde... un enfant, une fille...

Terrifiée, Yatsume recula. Elle toucha son ventre, et vit son mari finir de disparaître. Les corps autour s'enfonçaient dans la terre. Yatsume fut bientôt seule avec le chat au milieu de la plaine, tandis que des grondements au loin annonçaient qu'une autre bataille se préparait.
Yatsume tomba à genoux, à bout de forces. Le chat s'approcha d'elle et miaula. Celle-ci le caressa et il regarda Yatsume ;il fit mine de s'en aller. Notre héroïne se releva et le suivit. Ils coururent pour éviter le prochain déluge d'esprits guerriers voués à des combats éternels. Ils entrèrent dans une grotte, au pied d'une grande montagne rouge et trouvèrent un chemin étroit qui descendait en pente raide.
- Tu mettras un bandeau sur tes yeux, dit le chat à Yatsume en lui parlant dans sa tête, car si tu vois le monde des morts où nous allons, tu en resteras prisonnière à jamais...

Des marchands arrivaient à la porte du dragon. Yatsume apercevait l'étang de l'honneur noyé, autour duquel était bâtie la Cité. Le soleil se mirait déjà dedans et les habitants sortaient peu à peu de leurs maisons. La ville prenait des couleurs dans la lumière et grâce à ses habitants. Les principaux ponts de la Cité seraient complétement encombrés dans moins d'une heure. Yatsume but à sa gourde, finit quelques fruits qu'elle transportait dans sa besace, puis descendit de la colline et se mêla à la foule qui avançait sur la route pavée.

Samurai

Elle ne fut pas étonné de mettre plus de la moitié de la journée à traverser la ville. Elle ne fit pas d'esclandre et attendit son tour pour passer, anonymement. Elle s'arrêta dans une auberge du quartier des marchands puis reprit son trajet pendant les heures chaudes. Elle connaissait bien la Cité et savait que la sieste y était un rituel presque sacré !
Le soleil frappait impitoyablement quand elle arriva à l'entrée du quartier des temples. Yatsume retrouva la petite au fond de laquelle était entrée de l'asile. Une vieille grille, mal fermée. Derrière, un petit parc mal entretenu, avec des herbes folles et quelques "habitants" des bâtiments qui déambulaient dans les allées.
Yatsume poussa doucement la grille et l'écouta grincer, puis racler les cailloux de l'allée.
Elle fit quelques pas prudents. Des grillons crissaient dans l'herbe. Un petit serpent disparaissait dans son trou. Les pierres brillaient à la lumière.
Notre héroïne s'avança en se protégeant le visage de sa main. Elle entendit alors ricaner. Elle vit près d'elle, assise sous un gros cerisier, une vieille femme à la peau épaisse, cuivrée et plissée. Ses tout petits yeux moqueurs disparaissaient dans les rides de son gros sourire, qui partait de son énorme bouche édentée.
- Toi, je te connais... Toi, je te connais.
Yatsume avait sursauté. Elle planta fermement son naginata à côté d'elle :
- Qui es-tu ?
- Toi, je te connais... Tu étais ici, hein !
La petite vieille avait un gros tas de cerises à ses pieds. Elle les dénoyautait patiemment et les jetait dans un panier. Parfois, elle en croquait une, gourmande.
- Qui es-tu, vieille femme ?
- Tu étais ici... Tu avais une poupée dans le ventre, toi !...
Elle ricana et croqua une autre cerise. Puis elle en fit tomber trois dans son panier.
- Qu'es devenue ma fille ? Réponds !
- Je ne sais pas moi... Non, je ne sais pas...
La petite vieille, qui avait un sourire presque figé, devint soudain très timide et baissa la tête. Notre héroïne voulut trouver quelqu'un de sensé pour lui répondre.
Elle traversa le jardin et reconnut le pavillon où elle avait été enfermée. Elle frissonna. Elle revoyait surtout cette nuit hiver d'il y a six ans, quand elle s'était enfuie. Elle entra dans le pavillon, celui des femmes, et reconnut la porte au fond du couloir, sa cellule. C'était là que sa fille était née.
Le parquet grinça ; Yatsume se retourna : elle vit la patronne de l'asile ! Elle se souvenait de l'affreuse mégère !
Elle revit aussi les Scorpions qui venaient lui rendre visite. Qui profitaient des faiblesses de la patronne pour se payer une descente crapuleuse chez les folles ! Tout lui revenait d'un coup.
La femme effrayée, venait de reconnaître Yatsume : elle voulut s'enfuir mais notre héroïne, rapide comme un courant d'air, l'empêcha de ressortir en se plantant devant elle :
- J'ai à te parler ! Tu sais qui je suis, alors ne perdons pas de temps !... Je veux savoir où est ma fille !... Vous me l'avez enlevée quand elle est née ici !
- Pitié, dit la vieille femme.
Yatsume l'avait attrapée par le col et la mit à genoux :
- Réponds-moi ! Ma fille !
- Nous l'avons envoyée, sanglota la vieille femme.
- Où ça ?... où ?
- Au temple de la fortune de la Charité. Ils recueillent... les enfants abandonnés...
- Où est ce temple ?
- A l'ouest d'ici, sur la route de la province Soshi...
- J'irai là-bas, vieille femme, et j'espère que tu ne m'as pas menti !
- Vous devez partir... Vite, car ils vont arriver...

On entendit la grille grincer et racler le sol. Yatsume lâcha la patronne et sortit, le naginata en mains. Quatre samuraï entrèrent, qui portaient les couleurs de la famille Bayushi ou Shosuro. L'un d'eux avait un bandeau qui lui barrait le visage au niveau du nez ! Yatsume se souvint de son coup de mâchoire ! Elle eut à nouveau le goût du sang dans la bouche.
D'une voix nasillarde, mais fou de rage, ce Shosuro "Néanmoins" s'avança : il l'avait reconnue ! Il tira son sabre et ses amis l'imitèrent.
- Tu es vraiment complétement folle ! Tu as osé revenir ici !
Yatsume ne dit rien et se mit en garde.

Ils étaient quatre, deux Bayushi, deux Shosuro. Même si elle se débarrassait d'eux, ce qui était improbable, le bruit de leur combat alerterait une patrouille, puis bientôt la ville entière !... Ils étaient certes dans un endroit isolé, dans une heure creuse de la journée, mais cela ne suffirait pas.
Les quatre Scorpions avançaient lentement. La patronne s'enfuit, pendant que la vieille, au pied de son arbre, ricanait gentiment.
Et la patronne allait donner l'alarme !
Yatsume s'enfuit. Elle savait qu'il y avait une autre sortie à l'autre bout du parc !
Les quatre Scorpions lui coururent après... Deux la rattrapèrent, elle dut faire face : elle en lacéra un, évita le coup de sabre de l'autre ; plusieurs branches tombèrent, et des oiseaux s'envolèrent. Yatsume répliqua et empala le second. Les deux Scorpions tombèrent et notre héroïne reprit sa course. "Néanmoins" était presque sur elle ; il enjamba plusieurs grosses branches, bondit par dessus un fourré et lui sauta dessus en hurlant. Yatsume se jeta de côté et dévia deux coups meurtriers, de justesse. La lame du Shosuro se planta dans un arbre et Yatsume repoussa son ennemi d'un coup de pied. Le Shosuro repartit à l'attaque ; Yatsume fut la plus rapide, et lui transperça la gorge. Elle voyait arriver le quatrième ; elle retira sa lame de "Néanmoins", puis courut vers un pavillon pour les vieillards. Elle traversa le couloir, paniquée et passa par une fenêtre, roula dans une ruelle, et courut encore... Elle sortit du quartier des temples, arriva dans les rues des menuisiers, essoufflée. Elle n'eut pas le temps de reprendre haleine : elle entendait son dernier poursuivant. Elle reprit sa course, haletante ; elle allait être rattrapée, quand elle entendit une flèche siffler, sortie d'une fenêtre, qui alla se planter dans le crâne du Bayushi !
Elle ne vit personne et courut encore. Elle s'arrêta quand elle fut sur les quais. Elle entra dans une auberge et commanda à boire.

La chaleur était encore plus pesante. Quelques pêcheurs dormaient dans leurs barques. De rares chats bravaient le soleil. Des clients ronflaient au fond de la pièce.
- Une bière...
Yatsume s'assit et respira enfin. Elle ferma et écouta son cÅ“ur battre. Elle était à bout de forces et ne comprenait pas encore comment elle était ressortie vivante. Elle n'était pas encore tirée d'affaire, car elle n'avait pu rattraper la patronne. Elle avait reçu un mauvais coup dans l'aine. Elle se fit un bandage de fortune...
Yatsume ne se connaissait aucun allié dans la Cité ; et il y avait quelqu'un qui avait abattu le dernier Scorpion ! L'esprit de mari ?... L'esprit du chat ?... Elle ne comprenait pas. Elle ne pouvait s'attarder. Elle paya, sortit de l'auberge et alla se perdre dans le dédale des rues des marchands. Elle trouva un apothicaire, qu'elle effraya, et qui lui vendit des onguents. Elle en enduisit sa plaie et repartit. Elle entendit une patrouille de la Garde du Tonnerre qui arrivait dans le quartier. Le palais du Gouverneur était déjà prévenu !

Elle passa la fin d'après-midi à entrer dans des chambres d'auberges miteuses, pendant une heure à chaque fois, ou chez des habitants, puis elle repartait. Elle ne pouvait aller dans les quartiers etas, qui étaient hors des remparts. La nuit vint enfin. Les recherches ne s'arrêtaient pas. Elle passa une nuit très longue, à courir sur les toits, à se cacher, à changer d'auberge.
Au petit matin, fatiguée, elle sut qu'elle devait partir... Elle tenta l'impossible, de se faufiler parmi les premiers marchands à la porte du nord-ouest. Sa blessure la tiraillait encore. Elle réussit à se glisser entre deux charrettes chargées de tonneau. Celles-ci rejoignirent un convoi qui attendait dehors. Yatsume s'allongea sur la route et se faufila vers l'arrière, entre les roues et les pattes des bÅ“ufs, puis descendit dans un fossé.
Elle était libre !

Elle était ressortie vivante de la Cité des Mensonges ! Si elle avait été encore du clan, on l'aurait félicitée pour cet exploit !

A suivre...Samurai
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12e Episode : "Plus jamais ça..." - by Darth Nico - 17-09-2009, 05:18 PM

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