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24ème Episode : La Cité hors du temps
#12
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Sasuke et Yojiro rejoignirent la troupe de Kokatsu dans les montagnes et les quittèrent à la sortie de la Cité du Cri Perdu. Il prenaient plein nord, vers les montagnes des Dragons.
- J'espère que vous savez ce que vous faites, leur dit Mitsurugi.
- J'espère aussi, dit Sasuke. Non, en fait, j'en suis sûr...
- Tu ne m'as même pas dit où en est le conflit de succession.
- Toujours pareil.
- Je ne comprends pas comment la famille Kitsu a pu se laisser entraîner chez Tangen.
- La réponse est dans ta question : parce que c'est Tangen.
- Cela nous dépasse... Pour le moment, je me garderai bien de transmettre l'information à Kokatsu.

Ils traversèrent le grand fleuve qui venait de l'est et entrèrent dans une région sauvage, au nord des terres du Lion. Des vallées très vertes, d'immenses tapis de fleurs. Quelques villages qui vivaient à l'écart de tout clan. Ils entamèrent l'ascension des montagnes éternelles du Dragon. Ils changèrent de monture, prirent un guide pour les amener rapidement vers les sommets.
- Nous ferons étape à Heibetsu, seigneurs, c'est une ville où il est indispensable de s'arrêter.
Ils découvraient un pays isolé, des hauts plateaux, avec dss temples perchés en haut de pentes rocailleuses. Ils assistèrent un soir à une démonstration de l'art du combat à deux sabres, avec deux samuraï au crâne rasé, tatoués de partout. les sabres virevoltaient en tous sens.
- Qu'as-tu pensé de cet art du sabre ? dit Sasuke.
- Virtuose à l'évidence, dit Yojiro, en connaisseur, mais ce sont plutôt des danseurs que des guerriers, ceux qui se battent comme ça.
Ils continuèrent leur ascension pendant trois jours. Le soleil était éblouissant à cette altitude, l'air très pur. Ils arrivaient en vue d'Heibetsu, planté comme un nid d'aigle au pied des neiges éternelles. Un glacier bleu s'arrêtait presque à l'entrée de la ville. Il y avait au pied de ce monstre de glace un autel sur lequel brûlait de l'encens et des chiffons. Ils entrèrent par une porte où il fallait tourner un moulin à prières. Un gros marchand passait sur le dos de son yack presque aveugle à cause de ses poils. L'énorme animal portait une selle magnifiquement décorée.
- Même dans ces hauteurs, il y a des nouveaux riches, dit Yojiro.
- Quant à nous, nous ne devons pas nous faire remarquer.
Notre shugenja voyageait habillé comme un humble samuraï. Il avait troqué le beau kimono des Matsu pour de solides vêtements de montagnes. Il demanda à rencontrer le gouverneur de la ville. C'était le père supérieur de la communauté qui régissait la région. C'était un religieux dans la force de l'âge. Devant les honnêtes villageois, il jouait le rôle de bon père de la communauté, avec son grand bonnet orange. Quand il fut seul avec lui, Sasuke comprit qu'il avait les pieds sur terre et savait jauger les hommes.
Il s'entretint d'abord longuement avec lui, pour lui expliquer qui il était.
- Ta venue ici, noble Lion, pourrait être une bénédiction pour le village.
- Je ne peux m'acquitter de mes devoirs pour le moment. Cela pourrait alerter mes ennemis, mettre en péril ma mission.
- Alors il vaut mieux que tu ne restes pas trop longtemps par ici.
- Je comprends.
- Que cherches-tu dans une région qui t'est inconnue ?
- Je cherche quelque chose dont j'ai eu la vision. Je cherche une pièce dont les murs sont sertis de morceaux de cristal...
- Puis-je te demander la raison pour laquelle tu cherches cette pièce ?
Sasuke baissa les yeux et avoua poliment qu'il ne pouvait en dire plus.
Il sortit le soir du temple. Yojiro l'attendait à l'auberge, où il jouait aux osselets avec des paysans.
- Ces moines ont un certain culte du secret et des énigmes, dit Sasuke, agacé.
- Hmmm ?
- Ils doivent toujours y aller par quatre chemins. Et comme ils disent : le chemin qui descend et aussi le chemin qui monte !
- Je ne comprends pas.
- Moi non plus, sinon que le père supérieur m'a embrouillé les esprits.
- Ils veulent protéger leurs secrets des étrangers, quoi d'étonnant ?
- J'ai réussi à comprendre que nous devons aller vers l'ouest. J'y rencontrerai d'autres de ces moines tatoués.
- Qui sait si nous ne tomberons pas sur Maya ?
- Elle ? Les dieux nous en gardent...
- Elle doit être la risée de son clan...
- Ils l'ont déjà oubliée !
- Vers où allons-nous ?
- Nous montons vers le château des Agasha. Je devrais m'entendre avec eux : ces shugenjas vénèrent les divinités du feu.
- Allons, Sasuke-san, dites plutôt que vous viendriez les épater par vos talents !
- Non, non, incognito j'ai dit...
Ils prirent le chemin de la montagne de fer. Ils firent étape chez des paysans misérables, inquiets de voir des étrangers.
Le premier soir, il leur sembla entendre des cavaliers sur la route. Yojiro voulut demander aux paysans : ceux-ci détournaient la tête, ne comprenaient pas.
- Pas de cavaliers par ici... Chevaux ne passent pas.
A l'étape suivante, chez des ermites, même impression : des cavaliers sur la route, des hennissements de chevaux à la tombée de la nuit.
- Une troupe de cavaliers ? Impossible à cette altitude. Les chevaux ne survivraient pas longtemps. Il n'y a que certains mulets qui peuvent arriver si haut.
On leur souriait aimablement.
Le troisième soir, alors que le sommet rose de la montagne était en vue, avec les bâtiments en bois de la grande mine de fer, ils dormirent à la belle étoile. Encore les cavaliers.
Sasuke alluma des torches. Ils se promenèrent dans la montagne de nuit : ils percevaient l'écho de ces chevaux, des sabots qui martèlent la pierre. Ils perçurent en contrebas un tourbillon qui se déplaçait : Sasuke y sentit les esprits de l'air enragés.
- Allons voir...
Yojiro n'aimait pas cela.
Un chemin descendait raide dans une ravine profonde. Les deux samuraï traversèrent le tourbillon en quelques pas. Leurs torches toujours en main, ils suivirent les eaux qui ruisselaient sur la pierre lisse. Ils entendirent des sabots claquer derrière eux : trois cavaliers les observaient, trois formes noires armées de lances.
- Qui êtes-vous ? cria Yojiro.
Les cavaliers ne répondirent pas.
- Je vous somme de répondre, par Matsu ! dit Sasuke.

Un sifflement : une lance se planta aux pieds de Yojiro. Sasuke expédia une boule de feu vers le lanceur : celui-ci la reçut et tomba sans un cri. Le cheval rua de même, sans un bruit et s'enfuit. Les deux autres cavaliers rebroussèrent chemin. Sasuke remonta en haut de la pente, où il ne trouva rien que de la poussière calcinée.
- Nous sommes sur le bon chemin, crois-moi, dit-il à Yojiro.
Ils redescendirent le long du courant. Ils entendaient des cavaliers de plus en plus nombreux affluer. Avec l'écho, cela prenait des proportions effrayantes. L'espace entier était empli des hennissements, des roulements de rochers, des fracas de sabots. Au fond du creux, ils trouvèrent un chemin tout droit. Ils savaient qu'ils étaient cernés par les cavaliers, qui allaient descendre par la ravine et se mettre à leur poursuite. Ils pressèrent le pas. Sasuke maintenait une flamme allumée dans sa main, qui pliait sous le vent de la montagne. Il devait la couver entre ses doigts. Soudain, un galop se fit entendre. Sasuke se retourna et projeta une boule de feu sur l'assaillant invisible. Le feu explosa sur lui, révélant une forme humaine indistincte, au visage presque lisse, monté sur un cheval aveugle. Ce fut bref. Yojiro trancha la tête du monstre.
- Viens, ne perdons pas de temps.
Horrifié, Yojiro s'éloigna : cavalier et monture se liquéfiaient à vue d'oeil.
- Dans quoi nous sommes-nous plongés ?
- Dans le royaume des ombres vivantes, dit Sasuke.
D'autres cavaliers trépignaient à l'entrée du chemin.
- Je reconnais l'endroit, dit le shugenja.
Le chemin serpentait maintenant entre des parois abruptes. Ils remontèrent une pente douce, qui s'élargissait pour arriver dans un cirque. Les cavaliers progressaient dans le chemin tortueux. Sasuke alluma une grande torche. Il vit l'entrée d'une grotte se dessiner dans la paroi lisse. A l'intérieur, on devinait un scintillement.
- Nous y sommes, dit Sasuke, haletant.
Ils s'engouffrèrent dans le tunnel. Des cristaux brillaient au mur. Au bout du boyau, une pièce où il faisait presque clair comme en plein jour. Une table avec un épais parchemin déroulé.
Et au pied de cette table, une femme évanouie. Jeune, elle portait les couleurs de la famille Isawa. Elle était amputée du bras gauche. De l'encre noire avait coulé de ses yeux : ou bien des larmes ?...
- C'est elle, dit Sasuke, qui cachait son émotion. Emmenons-là.
Le rônin n'essaya pas de comprendre. Il prit la fille dans ses bras et ils sortirent. Sasuke invoqua son sabre de feu : il ouvrit violemment le passage dans les créatures obscures qui s'étaient agglutinées devant l'entrée. Ils dévalèrent la pente. Les cavaliers se jetaient du haut du plateau dans le ravin. Ils auraient dû se tuer s'ils n'avaient été de grotesques imitations d'hommes et d'animaux.
Ils couraient de toutes leurs jambes quand ils faillirent basculer dans une large fissure, qui était apparue au sol. Elle était franchissable par un cheval, bien plus difficilement par un homme, surtout s'il fallait emmener la fille. Sasuke se concentra, tapa son poing dans sa paume, leva les mains puis les abaissa brusquement. Une grosse avalanche se déclencha : l'effondrement se propagea dans un grondement et engloutit la plupart des cavaliers.
- Voilà qui est mieux.
Yojiro déposa avec précaution la fille par terre et dégaina son sabre. La roche remuait : les cavaliers allaient se ranimer. La substance noire de l'ombre s'écoulait hors de l'éboulis et reformait les assaillants difformes.
- C'est beaucoup trop large pour qu'on saute, dit Sasuke.
Il invoqua encore son sabre de feu.
- Ils vont être nombreux, trop nombreux pour nous, dit Yojiro.
Les chevaux reprenaient leur fausse vie, poussaient des hennissements glacés à la lune, les cavaliers sifflaient. Yojiro fit tourner son sabre et le prit fermement en main.
La fille remua, gémit...
- Elle ne dort plus, elle ? Elle risque pas de nous être utile de toute façon...
- Hé ho, dit vertement Sasuke, tu oublies de qui tu parles !
- Pardon, on ne me tient au courant de rien... Une cousine à vous ?
- En quelque sorte...
Les cavaliers se regroupaient pour l'assaut.
- J'aime ces réunions de famille dans des endroits improbables...
Sasuke invoqua tous les esprits du feu qu'il put, alors que l'armée des ténèbres lançait sa charge.








Samurai FORCE ET HONNEUR, SAMURAÏ ! Samurai
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RE: 24ème épisode : La Cité hors du temps - by Darth Nico - 24-03-2012, 11:28 AM

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