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20e Episode : La captive
#11
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Mitsurugi ressortait de l'aile du palais réservée aux Grues.
Il rentrait hagard, accompagné par trois soldats qui voyaient bien que leur ambassadeur n'était pas dans son état normal.
Mitsurugi n'avait pas perdu la face publiquement mais il avait honte, tellement honte !
- Vous êtes encore jeune, Mitsurugi, avait dit Onegano.
Il lui avait parlé comme s'il avait quinze ans ! Alors qu'il en avait dix de plus !
- Vous êtes fougueux, vous avez du tempérament. Aujourd'hui, tout vous sourit... Vous vivez de grandes choses. Mais vous verrez, la flamme s'éteint d'autant plus vite qu'elle a brûlé ardemment. Si les dieux vous prêtent longue vie, ce que je vous souhaite, vous verrez qu'on ne peut bâtir sa vie sur des décisions brusques, insensées. Ikue est une jeune fille sensible, qui aime la tranquillité. Vous, vous êtes un batailleur, un homme du sabre et du verbe. Vous êtes capable de grandes choses et en cela, je vous envie. Dans ma jeunesse, je n'étais pas aussi fougueux que vous... Mes enfants ne sont pas non plus des foudres de guerre.
"De plus, pensez aux conséquences. Vous verriez-vous, demain, porter les couleurs de notre clan ? Vous plier à notre façon d'être ?
Mitsurugi s'enferma dans sa chambre, comme un enfant puni. Les mots d'Onegano lui martelaient la tête. Jamais il ne s'était senti mortifié de cette façon. Il avait pourtant été déchu de son ancien clan ; il s'était retrouvé littéralement la tête sous le talon de Jukeï, mais c'était des injustices. Il n'y était pour rien !
Avec Ikue, il s'était à corps perdu dans ce véritable coup de folie ! Cette fièvre ! Et c'était ce respectable jeune vieillard d'Onegano qui lui administrait une douche glacée !
Même Kokatsu l'avait soutenu, parce qu'un samuraï doit aller au bout de ses actes, vivre sans regrets ! A présent, tout le monde devait rire de lui chez les Grues ! Bientôt chez les Lions, et les autres clans !... Le Bouffon perdrait son travail, on n'aurait plus besoin de rire pour se faire des gorges chaudes !
Il les défierait tous en duel, un par un, s'il le fallait !...

Mitsurugi sortit de sa chambre, rasa les murs et alla prendre un bain. Il retrouva dans la salle d'eau Ikoma Noyuki, qui somnolait dans son tonneau. Le poète et dramaturge n'était pas encore au courant.
Il bailla.
- Salutations, Mitsurugi...
L'ambassadeur entra dans l'eau et se fit frotter le dos par les servantes. Après la honte, la grogne. Comme un vieil ours dans sa grotte. Il se renfrognait. Noyuki sentit que son ami avait des soucis, il préféra le laisser tranquille, tout en regardant, à travers ses yeux presque clos, la tête qu'il faisait.

Au fond, pensa Mitsurugi, qui parvenait à rassembler des pensées un peu plus cohérentes, cela simplifiait bien des choses. Plus d'Ikue, plus à se soucier du clan de la Grue ; il pourrait faire la cour à la première venue ! En somme, Onegano venait de lui enlever un boulet.

- Ce n'était que l'amour d'un hiver, monsieur l'ambassadeur et certaines choses ne résistent pas au retour du printemps...
Mitsurugi avait fini par être exaspéré par ces tournures contournées. Il regardait cette histoire qui se terminait comme un champ après la bataille. Il sourit en s'enfonçant un peu plus dans l'eau.
Quand Noyuki apprit la nouvelle le lendemain, par les bruits d'alcôve, il murmura à son informateur (un colporteur de ragots de la famille Asahina) :
- Maintenant qu'elle a perdu son pucelage, le suivant risque d'être déçu.
- Elle finira sa vie dans un couvent à plier des papiers.

Noyuki s'en voulait de n'avoir pas prévenu Mitsurugi. Il venait de faire la même erreur que lui, il y a quelques années. Ah, les belles jeunes filles du clan de la Grue ! La perte de tous les hommes au tempérament trop chaud !
Il était cependant probable que Mitsurugi n'y laisserait pas autant de plume que Noyuki en son temps. Le poète vit venir à lui le gros Bouffon, qui se dandinait, empressé comme un maître de cérémonie dans ses derniers préparatifs :
- Alors, quoi, on ne me prévient même pas !
Il était maquillé comme une vieille geisha, en prévision d'un numéro qu'il allait faire devant la famille Kakita.
- Tu retardes, mon gros ! Où as-tu laissé traîner tes oreilles dernièrement !
- Alors le jeune bellâtre se fait rembarrer par l'ex-futur beau-papa, et personne ne me prévient !
Il était furieux, contrarié, comme un gamin.
- Je te déconseille de monter une saynète sur cette affaire, dit Noyuki. Mitsurugi viendrait avec une armée pour te piétiner.
- Nous verrons cela, mon bon seigneur !
Il fit demi-tour et partit, vexé comme un pou.


Samurai

Yatsume revenait dans la bicoque où logeait sa petite famille.
Yutsuko lisait, Avishnar remettait une petite bûche au feu.
Elle ramenait un peu d'argent avancé par Sasuke.
- Nous tiendrons quelques jours avec cette somme.
Ils se préparèrent ensemble une bonne soupe en chantonnant. Ils regardèrent les bons légumes fondre dans le jus, les petites bulles éclater.
Yutsuko touilla la soupe, Avishnar jouait d'une guitare à deux sous. La petite s'endormit après sa soupe. Avishnar put alors demander :
- Que veut Sasuke de toi ?
- Des gens à surveiller, dit Yatsume, évasive. D'ailleurs, je vais sortir ce soir.
- Où vas-tu ?
- Je vais voir la cour des miracles.
- La quoi ?
- C'est le quartier de la ville où se réunissent les mendiants, les malades, les voleurs...
- C'est un endroit dangereux.
- Pas plus que les Sables Brûlants. Nous avons survécu aux pillards, je survivrai à quelques éclopés.
Elle remit son manteau. Un mauvais vent soufflait sur les rues du quartier eta.
Avishnar se coucha près de la petite, qui le blottit contre elle.

Le Bouffon venait de remporter un triomphe devant un parterre de jeunes nobles Kakita.
- Mes amis je vous quitte ! Les délicates gens de la cour des miracles ! Vous m'excuserez si je préfère passer ma soirée avec une bande de lépreux et de cul-de-jatte !
Et les Kakita riaient, applaudissaient !
Le gros Yoriku alla se démaquiller et descendit dans la cour de ses chers éclopés.
Il se vautra sur les coussins moelleux disposés en désordre dans la grande place. C'était un bric à brac de vieux palanquins, de roulottes. Comme une scène de théâtre encombrée de morceaux de décors et d'accessoires. Tout le monde vivait plus ou moins les uns sur les autres. On mangeait à toute heure, on bâfrait, alors qu'on était censé être dans l'endroit le plus miséreux de la Cité. Il y avait, d'un bout à l'autre de la journée, des gens qui dormaient, d'autres qui étaient debout. C'était une agitation perpétuelle, même au beau milieu de la nuit.
Le Bouffon se servit dans un des chaudrons communs, où l'on mangeait avec les doigts. On retrouvait parfois certains penchés sur la soupe, prêt à tomber dedans. Il prit un cruchon qui traînait, dans lequel dix personnes avaient dû boire avant lui.
On faisait cercle autour de lui.
- Alors, raconte-nous !
- Je vous raconte, dit-il, entre deux bouchées, les faits et gestes de la cour de nos maîtres.
C'était sa formule rituelle.
- Alors écoutez un peu, bande de disgraciés et de miséreux. Mais d'abord, passez-moi un morceau de poulet.
On lui faisait passer une carcasse à grignoter.
Il avait accès aux cuisines de tous les clans, où il allait se faire nourrir après ses spectacles, et pourtant, il avait toujours faim pour s'empiffrer de cette mauvaise nourriture.
- Repassez-moi du vin ! Je meurs de soif.
Il allait enfin raconter les ragots de ces derniers jours, quand il aperçut une silhouette inconnue. Il s'interrompit et la regarda fixement. Sa clique d'admirateurs se retourna et regarda en silence l'intrus.
Yatsume avança et enleva sa capuche.
- Je viens te prévenir d'un danger, ô grand Empereur des gueux !
- Tiens donc ; avance et informe-nous donc !


Samurai

Yoriku en avait connu un certain nombre, de ces êtres au bout du rouleau, qui venaient jouer la comédie chez lui ; c'était leur dernière chance de trouver une sorte de foyer. Ils venaient faire leur numéro pour lui plaire, ils espéraient entrer dans son petit monde, dans sa troupe de rebuts de la société.
En voyant cette fille, il vit tout de suite en elle un rônin. Elle avait dû avoir une bonne éducation, apprendre à se tenir et à se battre. Et comme tant d'autres en ces temps troublés, à la suite d'une gaffe, d'un mauvais tour du sort, elle avait été rejetée de sa caste.
- Ecoute-moi, grand Empereur, je suis venue te prévenir que quelqu'un en veut à ta peau.
Il y eut quelques rires, comme à un numéro un peu drôle, un peu original.
- C'est un assassin qui vit dans les ombres... Je suis venue te prévenir.
Elle avait l'air de croire à son affaire. Yoriku pensait qu'elle en rajoutait.
- Les ninjas, hein, lança un vieil édenté. Mais ils ne viennent pas ici, les ninjas, c'est déshonorant pour eux !
Le public partit d'un rire gras. La fille ne se décourageait pas. Elle continuait à décrire cette menace.
- Moi je peux t'en protéger...
Elle arrivait enfin à l'essentiel.
Le Bouffon l'écouta, sa grosse tête appuyée sur la main. Il la trouvait distrayante, assez audacieuse. Il dit :
- Allez, tu m'as convaincu ! Dans ma magninimité, je t'autorise à te joindre à nous !

Elle s'inclina et remercia respectueusement.
Elle ne se jeta pas sur la nourriture. Elle faisait encore ses manières nobles, sûrement. Elle ne voulait pas passer pour une crève-la-faim. Au début, ils sont comme ça, les samuraï déchus. Après, ils arrêtent de faire des manières et viennent à la gamelle comme tout le monde.
On but un verre à sa santé.
Quelqu'un parla à l'oreille du Bouffon :
- C'est toi qui vit avec ta famille, lança Sa Grosseur, dans le quartier eta ?
- C'est exact.
- Dis à tes protégés de venir ici. Vous y serez mieux que chez les croque-morts. Ces gens-là ne respirent pas la joie de vivre. Nous devons être encore plus pauvres qu'eux mais au moins, on s'amuse !
- Je te remercie de ta générosité.
Elle portait un yari. Yoriku ne disposait pas d'hommes capables de manier une arme. Elle pourrait être utile au cas où. La ville n'était pas sûre la nuit. La cour des miracles, située en marge des autres quartiers, avait déjà connu des attaques de pillards surgis de la campagne.
- Allons, va les chercher avant la nuit, dit le Bouffon. Si tu sais porter une arme, nous te réserverons un taudis pas trop sale.
- Je mettrai mon bras à ton service.

Yatsume salua. On ne faisait déjà plus trop attention à elle. Elle avait eu son petit moment de gloire. Maintenant que le Bouffon l'avait acceptée, elle faisait partie de la famille.
Notre héroïne prit les ruelles qui la ramenaient au plus vite chez les etas.
- Joli numéro...
Elle se retourna, ne vit personne. Une voix avait murmuré, quelque part. Elle se retourna et vit Kokamoru face à elle.
- Toi...
- Tu me cherchais, tu m'as trouvé...
Il avait son visage normal. Yatsume recula.
- J'ai vu notre fille... Elle va bien, elle lit.
- Je t'interdis de l'approcher.
- Elle ne m'a pas vu, pas plus que ton gaijin.
- Sasuke te cherche. Il a des choses à te dire.
- Je le verrai au moment voulu.
- Quelle est cette magie que tu utilises ?
- Ce n'est pas de la magie...
- Quoi que ce soit, c'est dangereux, trop dangereux...
- J'ai fait ce pacte avec les ombres pour te sauver, Yatsume.
- Je n'avais pas demandé d'aide face à mon mari.
- Ce qui est fait est fait... Maintenant, il faut penser au présent.
"Je suis traqué, Yatsume. Pas que par toi. Par un homme qui se fait appeler Cristal.
- Un allié de Nuage ?
- Oui. Il traque les gens comme moi. Et toi aussi, il te poursuit.
- Je ne suis pas comme toi.
- Il est après toi, Yatsume, que ça te plaise ou pas. Et après ta fille.
Yatsume frémit.
- Il veut nous détruire. Il emploie les services d'un assassin, un vrai "ninja", celui-là. La Grue Noire.
- On murmure son nom dans les mauvais quartiers.
- C'est un tueur aguerri. Personne n'a jamais eu le temps de l'affronter directement. Il tue trop vite pour cela.
- Que proposes-tu ?
- Je veillerai sur vous, Yatsume. Je veillerai à ce qu'ils ne touchent pas à Yutsuko. Notre fille ne sera au courant de rien. Je la protégerai depuis les ombres. Je surgirai si elle est en danger.
- Si ce n'est pas moi qui te livre à Sasuke, il enverra d'autres personnes te traquer...
- ... et elle ne me trouveront pas. Mais rassure-toi, je ne vais pas me cacher indéfiniment. Je vais même aller les voir, ces Lions.
- Qu'as-tu en tête ?
- Nous avons un ennemi commun : Cristal. Sasuke et Mitsurugi s'opposent frontalement à cette conspiration.
- Ils ne s'allieront pas avec toi.
- Je leur demanderai directement.
- Je ne peux pas accepter ton aide. Si je te revois...
Yatsume serrait les poings :
- Je te tuerai.
- Je protégerai notre fille, même contre toi, s'il le faut.
Kokamoru recula et disparut dans une ruelle. Yatsume sut qu'il était inutile de le poursuivre. Elle se hâta de rentrer chez elle.
- Nous déménageons. J'ai trouvé un emploi de yojimbo. Je vais gagner de l'argent. Regardez déjà...
Elle montra l'avance consentie par Sasuke.
Elle avait de l'argent, c'était vrai, mais entre les Lions, Kokamoru et les conspirateurs, cela devenait un sac de noeuds. Elle ne savait plus quel parti prendre.
- On va aller voir le Bouffon, dit-elle à sa fille, tu vas voir, il est très drôle !
- Chouette !
Sa fille lui sauta au cou.
Ils quittèrent dans l'heure le sinistre quartier des tanneurs et préparateurs mortuaires, observés à leur insu par l'ombre de Kokamoru.

Tout le monde trouva Yutsuko très charmante.
- Ne la touche pas, toi le vérolé, lança Yoriku. Et vous autres qui traînez plus de poux qu'une bande de chiens errants, interdiction de vous approcher d'elle, compris ? Cette petite et ses parents sont sous ma protection. Toi, le noiraud, d'où viens-tu ?
- Des Royaumes d'Ivoire, répondit fièrement Avishnar.
- Tu parles notre langue ?
- Un peu ?
- Où sont mes cuisiniers ? Qu'on fasse chauffer de la soupe pour la petite !... Pustule, Verrue, Purin, où sont-ils ? Bande de soiffards, vous étiez encore en train de cuver alors que c'est l'heure de la tambouille !
Les trois affreux cuisiniers accouraient avec leur marmite et les légumes.
- Pressez, le soir tombe, tout le monde meurt de faim ! Moi le premier !
Le Bouffon fit des grimaces à Yutsuko, qui se méfia d'abord et fut vite hilare.
- Avec moi, interdit d'être triste ! On doit rire tous les jours ! C'est la loi !
La soupe fut vite prête. Les gueux accouraient.
- Arrière, vermines ! Laissez la petite en prendre avant que vous ne mettiez vos vilains doigts dedans ! Allons, arrière !
Yutsuko but manger de la soupe tant qu'elle voulut.
- Purin, refais de la soupe ! La petite a tellement bon appétit qu'il ne reste rien pour les autres affamés ! Verrue, va voir aux cuisines du palais ce qui leur reste !
La cour des miracles récupérait les restes des réceptions qui se tenaient tous les jours pendant la cour d'hiver. Il restait souvent de quoi nourrir des dizaines de gueux avec des plats faits par les meilleurs cuisiniers de l'Empire.
Il y en avait parfois tant qu'on en redonnait ensuite aux etas, qui profitaient de ces restes de festins.
- Un Crabe, ça bouffe beaucoup, dit Pustule. Et quand les Crabes invitent des Grues et des Phénix, et bien, ils bouffent beaucoup et bien, et c'est nous qu'on en profite !
La cour des miracles était en fait bâtie, meublée, décorée, de restes du palais Hida. On récupérait tout ce qu'on pouvait, des panneaux de bois, des vases, des vieux meubles, des chiffons et des outils de cuisine. L'arrivée de la cour d'hiver était un présent du Ciel pour les gueux. Depuis le début de l'automne, ils avaient pu se procurer des tas de vieux meubles dont les Crabes s'étaient débarrassés, pour accueillir leurs invités dans des chambres neuves.
On avait entassé des tapisseries, des lampes. C'était la fête aux gueux.
Tout cela, on ne le découvrait que lorsqu'on entrait vraiment dans la Cour, c'est à dire sous une vieille halle où une centaine de personnes dormaient, mangeaient, vivaient. Avant d'y entrer, on pouvait croire que le quartier était aussi miséreux que chez les etas.
Quand on entrait, on découvrait un entassements de laideurs sans noms et d'oeuvres admirables, plus assez belles pour les samuraï.
- On n'a jamais autant grossi, nous tous, disait Yoriku entre deux bouchées. Il y a des étés où on a plus crevé la dalle que cet hiver ! Loué soit le Divin Fils du Ciel de déverser sur nous tous ces présents !
"Non, vous ne manquerez de rien, croyez-moi...

Il l'aimait bien cette petite Yatsume. Et notre héroïne se plaisait dans ce décor qui lui rappelait certains souks crasseux et débordants de trésors dans Medhin.
Avishnar avait trouvé parmi les instruments de musique une longue guitare qui lui rappela un instrument de chez lui. Il le prit, pinça les cordes, et joua quelques notes. Puis il prit de l'assurance, se mit à jouer, et joua en fait pendant des heures et des heures.
Yutsuko s'était endormie près du Bouffon.
- Je vous la confie, dit Yatsume. Je dois aller au palais.
- Va, va... Tu ne seras pas aussi bien reçue qu'ici, crois-moi !
Les mélodies d'Avishnar fascinaient toute la clique des gueux, qui se perdit dans ces effluves enivrantes évoquant des pays lointains et des palais enchanteurs.


A suivre...Samurai
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#12
Suite : Avishnar nous la joue Sitar Academy [Image: ezzz.gif]
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#13
Enorme!
Excellent!

[Image: nouvellestar_baltard1.jpg]
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#14
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Yatsume se présenta à l'aile du palais des Lions et se présenta devant Mitsurugi et Sasuke.
- Je lui avais demandé de retrouver Kokamoru, expliqua le shugenja.
- Je l'ai retrouvé, dit Yatsume. mais vous l'amenez sera autrement plus difficile.
- Difficile de s'emparer d'une ombre, dit Sasuke.
- Il y a autre chose... J'ai parlé à Kokamoru...
- Tiens donc, dit Sasuke.
- Je jure que c'est lui qui est venu vers moi. Il peut surgir de n'importe où...
- Qu'a-t-il dit ? demanda Sasuke.
- Il m'a dit qu'il était traqué par un certain Cristal...
Mitsurugi avait fini par apprendre de Sasuke le fin mot de l'histoire de Cristal : c'est Cristal qui possédait l'île où nos héros s'étaient aventurés ; c'était donc Cristal qui avait organisé leur déchéance ; Cristal encore qui avait capturé le pennagolan, parce qu'il avait corrompu le mari de Yatsume et qu'il était le témoin de la mort de ce dernier.
Cristal enfin, qui était un complice de Lotus et Nuage.
- Selon Kokamoru, il s'en prendra à vous et à moi...
- Ne nous trompons pas de cible, dit Mitsurugi. Nous n'en avons pas d'abord après Cristal. J'ignore pourquoi ce conspirateur se mêle de magie noire. Quant à Kokamoru, ce n'est pas un danger imminent ; s'il est avéré qu'il fait usage de pouvoirs interdits, alors nous devons le signaler à l'Inquisiteur Tadao. C'est son domaine, pas le nôtre.
"Pour l'heure, Cristal n'est qu'un complice des autres. C'est lui qui a organisé notre déchéance, d'accord, mais je ne chercherai pas la vengeance. Nous devons d'abord servir l'Empereur, c'est à dire nous attaquer à Lotus et son complice Nuage, c'est à dire à un homme capable de propager la corruption dans tout le clan du Crabe, et à un autre, capable de manipuler les esprits et de faire assassiner -rappelons-le- un soldat de notre ambassade à la Cité de la Pieuvre.
- Je ne serais pas si rassuré concernant Kokamoru, dit Sasuke à voix basse.
- Je jure de vouloir le tuer, dit Yatsume.
- Je te crois, dit Mitsurugi, mais pour nous, ce n'est pas le plus urgent. Aux dernières nouvelles, ce n'est qu'un conseiller de deuxième ordre.
- Je me demande d'ailleurs ce que pense la famille Bayushi de sa disparition, murmura Sasuke.
- Avant de savoir ce que pense un Scorpion !
Ils remercièrent Yatsume et lui dirent de faire quand même attention à elle.
Mitsurugi attendit qu'elle sorte.
La nuit était tombée. Une partie du palais s'endormait. Des fêtes commençaient à plusieurs endroits, des rues se remplissaient, d'autres éteignaient leurs lumières.
- Le carnaval approche, fit Sasuke. Lotus pourrait bien agir à ce moment-là.
- C'est vrai, dit Mitsurugi.
Par la fenêtre, il vit que Yojiro était aux cuisines et s'apprêtait à sortir.
Mitsurugi le siffla et lui fit signe d'attendre. Il descendit l'escalier, arriva dans la cour au moment où Yatsume sortait par la petite porte.
- Ecoute, j'ai besoin que tu la surveilles un peu, dit l'ambassadeur. Uniquement si elle vient rôder par ici, d'accord ? Pas besoin de la suivre dans toute la ville. Elle risque juste d'attirer quelqu'un de dangereux. Donc si elle se montre dans le quartier, tâche de ne pas la perdre de vue. Tu peux même lui proposer un travail, pour la tenir à l'oeil.
- Entendu.
- Et dans les jours à venir, tu vas me surveiller tout spécialement le palais des Grues. Prends plusieurs hommes pour t'aider. Je veux savoir où ils retiennent Ikue. Et surtout, avertis-moi si elle sort !
- D'accord, ce sera fait.
Mitsurugi lui glissa une poignée de pièces.
- Tu seras mes yeux et mes oreilles chez les Grues.
- Je connais un restaurant où planquer tranquillement pour les surveiller.
- Alors ouvre-toi une ardoise là-bas.


Samurai


Yojiro descendit au restaurant Le Crabe batailleur. La clientèle était habituellement composée de soldats et de sous-officiers qui venaient oublier leur dure vie sur la Muraille. Depuis le début de la cour d'hiver, c'était aussi un lieu de rendez-vous de rônins et de serviteurs qui travaillaient pour les courtisans. Ils venaient tous là pour surveiller une porte du palais, rencontrer un informateur, passer des billets, écouter les rumeurs.
- Tiens, voilà Yojiro.
Le rônin reconnut Noname et Ranto, deux membres du clan du Loup.
- Alors, tu bosses pour qui, toi ?
- Je viens juste prendre un verre.
- Ben voyons !
On lui offrit un verre.
- La prochaine est pour moi, dit Yojiro.
- De toute façon, tu es là pour une partie de la nuit, non ?
- J'ai mon temps libre ce soir, oui.
- Tu veux dire que tu ne partiras pas tant qu'ils ne seront pas couchés là-bas.
Là-bas, c'était le palais, ses réceptions, ses rencontres d'alcôve et ses intrigues menées à des heures indues.
Les rônins trinquèrent :
- Tu travailles toujours pour les Lions, toi ?
- De temps en temps...
Yojiro ne se souciait pas tellement de bien mentir. Il faisait franchement sourire les deux Loups.
- C'est quand même amusant, fit Ranto, à ce qu'on dit tu aurais pu rejoindre la famille Matsu à un moment. Même ton ami Mamoru a retrouvé son clan. Et toi, tu es resté avec les hommes de la vague*.
- Je suis bien comme je suis..
- Tu aimes ton indépendance.
- Disons-le comme ça, oui.
[*traduction littérale de rônin.]<!--sizec--><!--/sizec-->
Yojiro paya sa tournée.
- Apportez-moi aussi une soupe et du riz.
- Sans rire maintenant, reprit Noname, tu surveilles qui ? Un Kakita cocu ? Un empoisonneur Shosuro ?... Tu dois découvrir qui couche avec la fille de l'ambassadeur Shiba ?
- Toi, tu vas finir par avoir des problèmes avec tous ces gens, dit Yojiro, très sérieux.
- Tu dois être sur une mission sacrément importante, voilà ce que j'en dis.
- Mais laisse-le, dit Ranto, tu vois bien qu'il ne veut rien te dire. C'est un malin, le père Yojiro, tu ne lui tireras pas les vers du nez...
- Vous ne craignez pas d'ennuis avec le shinsen-gumi, vous autres ? dit Yojiro. Ils logent à deux pas d'ici. A ce qu'on dit, Otomo Jukeï viendrait bien vous dépecer pour se faire une descente de lit.
Les deux Loups prirent le parti d'en rire.
- C'est une menace ou tu t'inquiètes pour nous ?
- Je m'inquiète pour vous.
- Si le shinsen-gumi vient ici, il trouvera à qui parler, dit Noname. Un loup ne craint pas les toutous du Gozoku !

La nouvelle bouteille de saké arrivait, avec le repas de Yojiro.
- Vous ne mangez pas ? dit ce dernier. Je vous paye un plat, vous m'avez l'air affamé.
- Il paye bien, hein, Mitsurugi ?
Yojiro, le nez dans son bol, ne répondit pas.
Il écouta les deux Loups faire les bravaches un moment. Il était déjà tard, le restaurant se vidait, quand il vit entrer un serviteur de la famille Kakita. Yojiro finit son verre et lui fit signe de venir.
- Oh, tu as des affaires à traiter, dit Ranto, alors on va te laisser. On ne veut pas te déranger...
- C'est ça, dit Yojiro, à bientôt.
Il attendit que ces deux taquins soient partis pour glisser une pièce au serviteur et prendre des informations sur les logements des Grues.
- Tu connais Doji Onegano ?
- Oui, je vois qui c'est.
C'était un serviteur des Crabes. Il n'était au service des Grues que pendant la cour d'hiver.
- Tu sais où est logée sa fille, Ikue ?
Yojiro lui redonna une pièce.
- Je sais qu'elle au secret.
- Oui, je suis au courant, dit le rônin. Je voudrais savoir où.
- Dans une chambre, dans le couloir qui mène aux logements du shinsen-gumi. La fenêtre de sa chambre donne sur la cour où se trouve la remise pour le bois.
- Je vois laquelle c'est.
Yojiro se leva. Les dernières bougies s'éteignaient dans le palais.
- On dirait qu'ils se décident enfin à dormir là-dedans.
Il s'étira et rentra chez les Lions.
Il savait depuis quelle auberge il irait "planquer" le lendemain.

A suivre...Samurai
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#15
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Ce même soir, Sasuke rencontrait l'Inquisiteur Tadao, sur le chemin de ronde sud des murs de la capitale. Ils n'étaient qu'à quelques dizaines de pas des fortifications qui menaient sur la Muraille elle-même.
La neige recommençait à tomber. Yasashiro marchaient quelques pas derrière eux, et surveillaient. Ils croisaient les patrouilles de surveillance, et les groupes de soldats qui partaient prendre leur service. De vagues gémissements apportés par le vent retentissaient dans l'Outremonde, des vagissements et des beuglements, des échos de respirations lourdes.
- J'ai appris des choses importantes, dit l'Inquisiteur. C'est pour cela que je ne pouvais vous voir qu'ici. Pour obtenir ces informations, j'ai dû enquêter dans les recoins les plus malodorants de cette Cité. Pourtant, je sais que l'on ne m'a pas menti. Le bas peuple est celui qui connaît le mieux la conspiration du Lotus. On ne croirait pas ce qui tombe dans l'oreille de ces gens.
- Ils reçoivent toutes nos ordures...
- C'est exactement cela. Personne ne se soucie jamais de ce qu'il dit en face d'un eta. Cela, Lotus l'a bien compris, au point de recruter des agents parmi la lie la plus dégoûtante...
- Je ne sais pas si j'ai envie d'entendre ce que vous allez me dire, soupira Sasuke.
- Il le faudra bien. Je vous rappelle que nous avons en face de nous des conspirateurs qui veulent abattre la lignée impériale.
- Et le Fils du Ciel a besoin de ses serviteurs de l'ombre.
- C'est le rôle que nous avons à jouer, oui.
- Je vous écoute, dit Sasuke en remontant le col de son manteau.
Une bise chargée de neige passait, cinglante.
Les deux hommes se tournèrent vers l'Outremonde et Tadao dit, alors qu'une bourrasque tourbillonnait en sifflant :
- La conspiration du Lotus a plusieurs hommes à sa tête. Ils sont dix. Dix conspirateurs qui se partagent les tâches. Lotus et ses complices amassent de l'argent par extorsion ; Nuage use de la magie...
- Qui est le chef ? Ils doivent bien avoir un chef.
- Je ne sais pas.
- Et Cristal ? Que fait-il dans cette histoire ?
- Le peuple ici connaît Lotus, car il a réussi à infiltrer les familles marchandes. Dans le bas peuple, plus personne ne se fait d'illusion sur le degré de corruption de la famille Yasuki...
- Si le bas-peuple n'a plus d'illusions, alors...
- Ils sont organisés, Sasuke. Extrêmement prudents, mais très efficaces. Tout le monde les craint. La rumeur circule qu'ils sont capables d'écouter n'importe qui n'importe où.
- Ils doivent user d'une puissante magie de l'Air. Je m'imagine ce Nuage très puissant, dit Sasuke.
- Assurément. Vous en savez à présent autant que moi.
Sasuke avait l'impression d'avoir reçu une giclée de boue.
- Bien, si vous le permettez, je vais rentrer.
L'Inquisiteur le regarda partir sans rien dire. Il continua de fixer l'Outremonde, mortifié de comprendre qu'une menace venait directement de l'intérieur de l'Empire. Yasashiro surveillait toujours.
- Nous rentrons aussi, dit l'Inquisiteur.

Sasuke resta tard dans la grande salle difficile à chauffer de leur palais. Il regarda les braises frileuses et fit jaillir un grand feu dans la cheminée.
Une conspiration avec à sa tête dix personnages masqués, oeuvrant à renverser la famille impériale. Sasuke, emmitouflé dans une peau de bête s'assoupit devant le bon feu. Il se réveilla en sursaut. ll fut frappé d'une idée et monta dans la bibliothèque.
- Je ne peux pas croire qu'il n'y ait aucune archive sur ces conspirateurs... Ils sont arrivés dans le clan du Crabe avec la famille Yasuki, ce qui voudrait dire qu'ils sont nés dans le clan de la Grue.
Sasuke s'empressa de s'installer. Un assistant dut se relever pour le servir. Le shugenja fouilla avec attention les rayons. Bien sûr, le contenu avait dû être soigneusement expurgé avant l'arrivée des invités de la cour. Sasuke ne trouva rien.
Il enrageait. Il était sûr de tenir une piste. Il fit envoyer un mot à la tour des Inquisiteurs, pour que Tadao le reçoive dès son réveil.
En fait, le messager trouva l'Inquisiteur réveillé. Lui non plus ne dormait pas et pensait à la même chose qu'à Sasuke. Il fit donc renvoyer une réponse, que Sasuke, qui ne trouvait pas le sommeil, lut, satisfait.
Et le lendemain, après une courte nuit, le shugenja retrouvait l'Inquisiteur devant l'entrée de la bibliothèque de l'Inquisition.


Samurai


Les deux samuraï se mirent dans une aile discrète de la salle de lecture.
- Ici, nous ne serons pas dérangés. Surtout si tôt le matin, il n'y a personne.
Le soleil était à peine levé. La tour, la cité, le pays entier étaient figés. A peine si une bise matinale, qui fendait en certains endroits la brume, donnait un peu de mouvement aux arbres. Le décor était blanc et gris, enrobé dans le brouillard ou saisi par le froid. La Cité et les bois paraissaient glacés, comme sur le point de casser.
Les parchemins étaient durs au toucher. Des petits pics de glace apparaissaient dans les jointures des pierres. L'haleine était d'un blanc épais.
Deux serviteurs apportaient une marmite de soupe.
- Nous nous en souviendrons de cette cour d'hiver, ricana l'Inquisiteur. Cela fera les pieds à tous ces prétentieux de Grues qui nous regardent de haut et croient que c'est une sinécure de surveiller la Muraille.
Sasuke arrivait avec un tas de parchemins. Il s'était servi lui-même, profitant de l'autorité de Tadao.
- Nous finirons bien par mettre un nom sur ces conspirateurs, dit Sasuke.
- Je crains de découvrir qui ils sont. Pour avoir si peu de scrupules, être si bien organisés, si influents, ils doivent être haut placés. Maudit Gozoku qui nourrit et engraisse de pareilles canailles !
- Lotus ne peut pas être le chef, dit Sasuke. Nous avons découvert son existence en premier parce qu'il est le plus visible : il est au contact du peuple, il prend directement dans leurs poches. Les autres sont bien plus mystérieux. Nuage et Cristal par exemple.
- Cela en fait trois. Des sept autres, nous ne savons rien, pas même leur nom de guerre.
- Nous les démasquerons, dit Sasuke. Un par un.
- On ira les chercher au fond des latrines des préparateurs mortuaires s'il le faut, fit Tadao, secoué de rire.
- On brûlera plutôt tout le quartier des etas.
- Ne faisons pas les choses à moitié !
C'était pratiquement la devise des Crabes !

Les deux hommes se mirent au travail, et compulsèrent dans la matinée des centaines de pages. Ils lisaient en diagonale. C'était décourageant. Ils cherchaient dans les comptes des marchands, dans les affaires les plus sordides dont l'Inquisition ait eu à s'occuper.
Sasuke se frotta les yeux, s'étira. Il s'aperçut qu'il avait le dos courbé depuis presque trois heures. Ses yeux le piquaient. Les colonnes d'idéogrammes se mélangeaient.
- J'ai la tête farcie, dit Tadao.
Il bâilla très fort. D'autres Inquisiteurs étaient arrivés.
- Là, regardez, dit Sasuke, surpris.
Il tendit le parchemin. Tadao regarda le texte, narquois. C'était la vie d'Osano-Wo, le légendaire fils de Hida, élevé au rang de Fortune du Tonnerre et protecteur des bushis.
- C'est une belle histoire, ceci dit, dit l'Inquisiteur, d'humeur moqueuse.
- Oui, sauf la fin.
Tadao se rembrunit. Il lut ce que disait le parchemin.
- Mouais, tout ça ce sont des histoires, hein...
- Assassiné, c'est ce qui est marqué, si on déchiffre le sens de ces textes anciens, et qu'on enlève le style fleuri. Osano-Wo a été assassiné, par un tueur. Et envoyé par qui ? Cette version le dit clairement...
Tadao lut jusqu'à la fin :
- Un tueur envoyé par une hydre à dix têtes...
- Voilà, dit Sasuke. Osano-Wo n'a pas été tué par un monstre sorti de l'Outremonde. Non, il s'agit d'un tueur, envoyé par cette "hydre".
- Une hydre à dix têtes, oui, dit Tadao, de mauvaise grâce. Et alors ?
- Osano-Wo a été tué dans les montagnes du crépuscule, à l'est d'ici.
- Oui, à une journée et demie de marche.
- Il a découvert là-bas quelque chose qui était si important que cette "hydre" a envoyé un tueur assez puissant pour l'abattre.
- Tout cela remonte à plus de quatre siècles !
- La conspiration du Lotus -ou quel que soit son vrai nom- est peut-être plus ancienne que ce que nous pensions...
- Impossible, dit Tadao. Ces conspirateurs se sont réunis quand le Gozoku est apparu.
- A moins qu'ils ne se soient reformés à cette occasion.
Tadao n'avait pas envie de comprendre.
- Je vais me rendre dans ces montagnes, dit Sasuke.
- En cette saison ?
- La neige, j'ai de quoi l'enlever de mon chemin, dit Sasuke, qui claqua des doigts pour faire apparaître une petite flamme.
- C'est de l'inconscience ! Que croyez-vous trouver dans ces montagnes perdues !
- La raison de l'assassinat d'Osano-Wo.
- Vous nagez en pleine légende...
- Non, je ne crois pas. D'ailleurs, je ne vous demande pas de m'accompagner...
- Ce que mes charges d'Inquisiteur ne me permettraient pas...
- Je vais réunir quelques hommes de mon clan et nous irons voir.
- Vous connaissez le chemin au moins ? Il y a cent façons de se perdre dans cette région...
- Non, je ne suis jamais allé là-bas. Mais un explorateur chevronné, j'en connais au moins un.
- Vous allez au-devant de grandes déceptions.
- Vous êtes trop terre à terre, sauf votre respect. Nous, les adorateurs du feu, nous fonctionnons bien plus à l'instinct.
- Puisse cette neige vous refroidir la tête.
Tadao était épuisé par cet enthousiasme juvénile et cette attitude insolente face aux difficultés. Il avait pris son air le plus buté, le plus grognon, mais au fond, il appréciait cette ardeur à la tâche. S'il avait vingt ans de moins !

Sasuke se leva, sûr de lui, retourna au palais des Lions et convoqua Yojiro sur l'heure !


A suivre...Samurai
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#16
Haha quel tête brulée ce Sasuke Chilperic
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#17
Quelle tête à brûlerAloy
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#18
Le coup de boule de Sasudine Zidane à Bayushi Materazi, il te met le feu:sayen:
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#19
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE

Sasuke se mit en route le surlendemain, avec Yojiro, un éclaireur Hiruma et cinq soldats Matsu. Les montagnes du crépuscule n'étaient normalement qu'à une journée de marche ; avec la neige, il fallait compter une bonne journée de plus.
Il faisait un soleil radieux, qui rendait la neige étincelante, crépitante de diamants. Pendant que les soldats avançaient à pied sur les chemins mal dégagés, Sasuke lisait dans son palanquin.
- Rien de tel que le bon air de la campagne, disait-il en s'étirant.
Les soldats approuvèrent avec un enthousiasme forcé. Yojiro regrettait son travail de surveillance du palais Grue. Il était trop bien au chaud dans son restaurant : il fallait bien sûr que les Dieux l'envoient marcher dans la campagne glaciale !
Il avait laissé sa place à Yatsume :
- Surtout, si tu vois qu'Ikue sort, ou si tu entends qu'elle est emmenée ailleurs dans le palais, tu devras prévenir aussitôt Mitsurugi.
C'est Yatsume qui était heureuse de reprendre ce travail !
Elle ignorait que Yojiro avait aussi demandé à un rônin du clan du Loup de la surveiller !
Yojiro en avait informé Mitsurugi :
- Comme ça, Ikue est surveillé, et Yatsume aussi.
- Cette ville est un vrai nid d'espions.
- Tout le monde surveille un peu tout le monde, oui. L'époque est à la méfiance...
- Je me demande où Sasuke veut t'emmener.
- Il n'y a rien dans ces montagnes à l'ouest. Rien que des mauvais esprits.
- Des mauvais esprits ? dit Mitsurugi, ils fuiront en voyant Sasuke...

Ils passèrent leur première nuit hors de la Cité dans un village minuscule, où il y avait tout juste un relais pour voyageurs et quelques maisons.
Les gens vinrent servir les samuraï, intimidés.
- Yojiro, demande-leur s'ils ont entendu des choses bizarres sur les montagnes du crépuscule.
Le rônin se dit que lorsque Sasuke avait une idée dans la tête, il ne l'avait pas ailleurs ! La réponse était évidente, mais Yojiro la posa tout de même :
- Non, seigneur, nous n'avons aucune nouvelle. Il n'y a presque personne dans ces montagnes. Des esprits très puissants y logent et personne n'osent les déranger.

Ils passèrent une nuit paisible. Ils partirent tôt, alors que le soleil perçait à l'horizon. Dès qu'ils eurent quitté les petits chemins, ils furent assaillis par des violents qui tombaient de la montagne. Ils avancèrent une heure, frappés par la neige.
- Nous ne pouvons pas continuer plus longtemps, dit l'éclaireur. Une avalanche peut se déclencher à tout moment. Je connais un village abandonné pas loin d'ici, il y a encore quelques bâtiments debout, nous devons nous y réfugier.
Yojiro transmit le message à Sasuke. Le groupe bifurqua ; au bout d'une heure, ils arrivèrent dans un hameau fantôme.
- Il va falloir trouver du bois, dit l'éclaireur.
- Cassons une de ces vieilles bicoques, dit un Matsu.
- Bonne idée, dit l'éclaireur.
Sasuke entra dans la maison la plus solide, pendant que ses hommes allèrent abattre un pan de mur. Ils trouvèrent une hache de bûcheron. Ils trouvèrent même une réserve avec quelques bûches et un billot. Un Matsu commença à fendre le bois pendant que les autres accumulaient les planches.
On entendit un sifflement et un bref cri : le Matsu qui coupait le bois avait laissé tomber sa hache et s'effondra, une flèche dans la gorge. Les autres sortirent aussitôt leurs sabres. Trois autres flèches volèrent et deux Matsu tombèrent, frappés au coeur.

Sasuke se mit à couvert, rejoints par les autres.
Le vent venait de retomber. On n'apercevait aucune silhouette. Les deux porteurs du palanquin étaient terrifiés.
- Vous, restez là, dit Sasuke aux soldats. Yojiro, tu viens avec moi.
Le rônin courut le premier jusqu'à la bicoque d'à côté, et s'y mit à couvert. Il dit à Sasuke qu'il surveillait. Les deux Matsu encochèrent leurs flèches et couvrirent la course du shugenja. Il y avait un petit bois à la sortie. Yojiro courut jusqu'à une grange en ruine. Il vit plusieurs hommes en armes dissimulés derrière des arbres. Sasuke le rejoignit et s'accroupit.
Yojiro dit qu'on pouvait les prendre à revers.
Ils sortirent de la grange et coururent vers un ruisseau glacé, se cachèrent derrière d'un talus. Les hommes sortirent du bois. On vit d'abord sortir leurs museaux :
- Des Nezumis, murmura le rônin.
- Ça n'habite pas dans l'Outremonde ces bêtes-là ?
- Normalement, si.
Les Hommes-Rats avaient des tatouages et des marques de scarification. Les Nezumis se postèrent à l'orée du bois. Ils n'étaient plus qu'à quelques bâtiments des Matsu, de l'éclaireur et des porteurs, barricadés dans la maison. Sasuke et Yojiro coururent le long de la rivière. Au moment où les Nezumis sortirent en courant, le vent se leva violemment, projetant de la neige, couvrant leur avancée.
- Quelqu'un provoque cette tempête, dit Sasuke.
Yojiro remonta du lit de la rivière et se plaqua dans la neige. Il attendit que les Rats soient bien sortis du bois. Il étaient trois. Il devait y en avoir d'autres restés en arrière. Le vent soufflait contre les Nezumis. Yojiro arriva derrière eux ; pendant ce temps, Sasuke courait vers le bois. Il vit que deux Rats, cachés derrière un tronc, encochaient. Ils avaient Yojiro ; ils allaient siffler pour prévenir leurs camarades. Sasuke invoqua son sabre de feu et les abattit coup sur coup. A ce moment, Yojiro se relevait, courait et prenait les autres Nezumis par surprise. Une brève mais violente escarmouche s'en suivit : le rônin transperça le dos du premier, tomba avec lui dans la neige. Les deux autres frappèrent mais leurs lames frappèrent leur congénère agonisant. Yojiro roula sur le côté et sectionna les jambes du second ; il évita un coup fatal et lacéra le ventre du dernier.
Il les acheva en vitesse.
Les Matsu barricadés avaient vu et se précipitaient à l'aide du rônin.

Sasuke avançait dans le sens du vent ; il sentait les esprits du Vent en colère, enragés de devoir hurler. Les Lions arrivaient dans le bois ; ils firent face à deux autres Nezumis, qui tombèrent d'une branche.
- Matsu !
Ils hurlèrent et expédièrent au royaume des morts ces caricatures d'hommes.
Sasuke vit la source du vent : une femme exécutait un rituel aux esprits de l'Air. Le shugenja la reconnut : elle avait la peau foncée, des ongles violets, toutes sortes de colifichets autour du cou. Elle ne devait pas connaître tellement la neige, car elle vivait d'habitude dans les îles de la Mante. C'était cette sorcière qui lui avaient échappé sur l'île des flibustiers. Cette sorcière au service de Nuage !
Sasuke jaillit de derrière son arbre, son poing enflammé et lui envoya une boule crépitante. Frappée en pleine poitrine, elle s'écroula dans la neige. Elle hurlait, se tordait de douleur, suffoquée.
Sasuke courut, invoqua son sabre et lui plaça sur la gorge :
- C'est Nuage qui t'envoie ?
Elle gémissait. Sasuke appuya, lui brûla la peau :
- Oui, oui...
- Qui sont ces Nezumis ?
- ... les ai pris à mon service... Nuage les a hypnotisés...
Sasuke lui trancha la gorge.

Yojiro, les Matsu et l'éclaireur sortaient du bois.
- Nous sommes sur la bonne piste, dit le shugenja.

Ils avaient perdu trois hommes. Le soir, on hissa les corps sur un bûcher. Sasuke y mit le feu et récita les prières rituelles. Ils regardèrent les corps partir en cendres, tandis que, dans le bois, les corps des Nezumis et de la sorcière étaient ensevelis par la neige.


Samurai


Yatsume avait passé une journée dans l'auberge. Yojiro lui avait dit qui étaient les bons indicateurs et lui avait laissé de l'argent pour ses faux-frais.
Elle commençait sa deuxième journée de surveillance, tôt le matin. Le patron avait compris qu'elle avait devenir une habituée. Il lui apporta un gros bol de soupe.
- Merci, dit Yatsume, qui avait le nez rouge.
Elle grelottait. Elle était la première arrivée dans le restaurant encore froid. Elle s'approcha du feu et y mit son manteau à sécher. Avishnar et Yutsuko dormaient encore quand elle était partie. Elle se cala contre le mur et s'apprêta à finir sa nuit.
Un serviteur qui venait de chez les Grues entra dans le restaurant, agité.
Il vit cette rônin qui remplaçait Yojiro.
- Hé toi ?
Yatsume ouvrit un oeil de mauvaise grâce. Le serviteur la secouait :
- Enlève tes pattes de là, toi !
Elle saisit son yari.
- Pitié, pitié, pitié, dit-il à voix basse. Je viens vous prévenir... La fille, elle va sortir !
- Quoi ?
- Elle part, elle part, elle part...
- Où ça ?
- Les gens du shinsen-gumi, dit-il, vraiment tout bas, ils vont l'emmener.
Yatsume grogna un juron, se leva et prit ses affaires. Elle n'avait que trois rues à traverser pour arriver chez les Lions mais elle devait faire vite. A cette heure-ci, Mitsurugi serait à peine levée, et le shinsen-hgumi le savait, qui en profitait en opérant aux aurores.
Yatsume tourna au coin de la rue, la porte des Lions n'était plus qu'à une centaine de pas. A ce moment, un tueur, embusqué dans une ruelle, encocha une flèche et tira sur elle. De l'autre côté de la rue, dans une autre ruelle, Kokamoru, qui la surveillait aussi, poussa un jeune serveur qui sortait les ordures sur Yatsume. Il la bouscula, la renversa. La flèche siffla au-dessus d'elle et vint se ficher dans le mur.
Yatsume roula par terre avec le garçon ; elle poussa un juron affreux et attrapa le pauvre garçon par le coup ; le pauvre ne pouvait rien dire. Yatsume, trop pressée, le rejeta, se releva. Elle vit alors la flèche plantée juste dans le mur. Prise de vertige, elle regarda les rues encore vides, et reprit sa course.
Le tueur, voyant son coup raté, jeta son arc et s'enfuit. Kokamoru surgit au coin de la rue et lui trancha la tête.
Le Scorpion rangea son sabre et s'en alla.

Yatsume arriva au palais et fit prévenir Mitsurugi. Celui-ci faisait ses exercices du matin. Il les arrêta et, sans prendre le temps d'un bain, s'habilla à la diable, enfila son daisho et courut rejoindre Yatsume.
- Ils vont l'emmener !... En chemin, j'ai failli y passer, si un garçon ne m'avait pas...
Mitsurugi n'avait pas le temps d'écouter. Il prit trois hommes avec lui et partit à une cadence martiale vers le palais des Grues.
- Non, non, elle ne va pas partir par là...
C'était le serviteur, mort de peur, mais qui espérait bien une récompense.
- Par où s'en vont-ils ?
Mitsurugi s'était adressé directement à lui.
- La porte nord !
- Allons !
Les Lions prirent au plus court. Ils finirent au pas de course. Les premiers paysans entraient, quelques charrettes. Mitsurugi, essoufflé, s'adressa au sergent :
- Salutations à vous.
Le sous-officier reconnut le fracassant ambassadeur des Lions !
- Seigneur Mitsurugi !
Les Crabes s'inclinèrent devant lui.
- Merci, très bien...
On n'avait pas le temps pour les politesses en règle !
- Vous n'avez pas vu passer un palanquin du shinsen-gumi ?
Mitsurugi retrouvait son souffle.
- Personne aujourd'hui, seigneur.
- Seigneur, regarde !
C'était un des Matsu. Mitsurugi se retourna : le palanquin du shinsen-gumi ! Avec une escorte de trois de ces chiens du Gozoku, et trois Kakita !
Le sang de l'ambassadeur se mit à bouillir : ils avaient à leur tête l'ignoble Otomo Jukeï !
Ce dernier ne parut pas surpris le moins du monde de trouver son ennemi en travers du chemin.

Mitsurugi fit craquer ses poings derrière son dos. Il dit à ses hommes de rester devant la porte.
- Que se passe-t-il ? demanda le sergent Crabe.
- Rien du tout, dit sèchement le Matsu.

L'ambassadeur fit deux pas en avant. Otomo Jukeï s'arrêta le premier. Les deux hommes se saluèrent.
- Un départ bien matinal, capitaine.
- Je ne quitte pas la Cité moi-même. Je ne fais qu'escorter mes amis du clan de la Grue jusqu'à cette porte.
- Ils craignaient d'être attaqués en ville ?
- Vous-même, que faites-vous de si bonne heure, loin de votre palais ?
- Je crois que je connais la personne qui se trouve dans le palanquin.
- Et quand bien même ?
- Je manquerais à toute politesse si je ne lui souhaitais bon voyage et si je ne m'informais pas d'où elle va. D'où elle est emmenée, plus exactement.
- Nul ne vous tiendra rigueur de ne pas lui dire au revoir. A présent, mes amis Kakita aimeraient passer, car ils ont une longue route à faire jusqu'à chez eux.
- Vous me permettrez, évidemment, de simplement la saluer ?
- Je ne sais pas si cette rue est le lieu pour ce genre de cérémonie. Dites seulement à vos hommes de faire quelques pas de côté, que nous puissions passer.
Les trois Kakita et les trois soldats de Jukeï étaient sur leurs gardes. Ils ricanaient. Ils avaient été prévenus.
Mitsurugi n'avait pas encore mangé. Il aurait bien fendu la tête de ces Kakita pour se mettre en appétit !
Il fit un effort sur lui et dit simplement :
- Je souhaite juste saluer la personne qui se trouve dans le palanquin. Je ne vous retarderai pas.
Jukeï dit simplement :
- Très bien, allez-y. Je m'en voudrais d'empêcher un Lion d'être poli.
Mitsurugi fit un petit salut, passa à côté de Jukeï, qui regardait droit devant lui et s'approcha du palanquin. Les Kakita se tenaient à quelques pas. Mitsurugi ne leur adressa pas un regard. Il s'agenouilla devant le palanquin.
- Je venais simplement vous dire au revoir.
Il entendit des pleurs retenus. Une main sortit et écarta le rideau. La délicate main d'Ikue.
- Je vous en remercie, monsieur l'ambassadeur. Je suis touché par votre geste... Je suis flattée que vous vous soyez déplacé.
- J'ignorais ce départ, qui me paraît précipité.
- Hélas, je dois retourner voir une vieille tante qui se meurt, dans ma famille. Je resterai un moment auprès d'elle.
- Je vous adresse mes condoléances. Où habite-t-elle ?
- Un petit village charmant où j'ai passé mon enfant... La Cité des Mille Cerisiers.
Les Crabes avaient fini d'inspecter les papiers de voyage fournis par Otomo Jukeï.
- Tout est en règle, dit ce dernier. Les Kakita avancèrent de quelques pas. Mitsurugi se releva lentement. D'un coup, il saisit fermement la main d'Ikue, écarta les rideaux. Celle-ci se recula, cacha son visage en pleurs. Mitsurugi lui tint la main, l'obligea à le regarder :
- Je viendrai te chercher.
Il la regarda dans les yeux.
Un Kakita s'approcha pour refermer le rideau. Il regarda Mitsurugi avec un visage de marbre. Notre héros lâcha la main d'Ikue.
Il salua le Kakita et recula. Il fit signe aux Matsu de s'écarter du passage.
Le palanquin avança, traversa la porte nord et partit sur le chemin enneigé, escorté des trois Kakita. Et ainsi partit Ikue, comme un flocon de neige.

Mitsurugi serrait les poings. Otomo Jukeï s'en allait.
Au bout de la rue, l'ambassadeur fit le vieux Doji Onegano, qui arrivait, pressé, qui comprenait qu'il arrivait trop tard. Otomo Jukeï passait à côté de lui, le saluait à peine.
Doji Onegano vit que Mitsurugi était là, comprit qu'il avait fait face, et ne dit rien.






SamuraiFORCE ET HONNEUR, SAMURAÏ !Samurai
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#20
Fuck Yea
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