23-12-2020, 12:22 AM
Cte casting all inclusive

Episodes
|
23-12-2020, 12:22 AM
Cte casting all inclusive
![]()
28-12-2020, 12:23 PM
(This post was last modified: 29-12-2020, 12:02 AM by Darth Nico.)
![]() « Subitement, une grande clarté se fit, la pluie discontinua, les nuées se désagrégèrent, le vent venait de sauter, une sorte de haute fenêtre crépusculaire s’ouvrit au zénith, et les éclairs s’éteignirent ; on put croire à la fin. C’était le commencement. » Victor Hugo, Les Travailleurs de la mer, deuxième partie, livre III, ch.6
La trombe aspire à la fois la mer et le ciel, qui se retrouvent emmêlés dans cette colonne tortueuse qui danse dans les ténèbres. Le Whidah Galley avance vers elle, toutes voiles repliées, incapable désormais d'échapper à son attraction. Le Tigre, le navire de de Graaf, a déjà disparu. Il est caché par l'espèce de mur de nuage poivrées qui s'est refermé derrière Bellamy et son équipage. On a encore vu un boulet franchir cette barrière noire, pour s'écraser, dérisoire, dans les vagues qui ressemblent maintenant à des gueules de chiens enragés. Mais le plus étonnant a été d'entendre, quand on pouvait encore entendre quelque chose, des cloches résonner dans le mugissement qui monte des flots. Bellamy a alors éclaté de rire au moment où le navire de cette vieille fripouille de Gan Ling apparaissait dans un jaillissement d'écume. Lui aussi brave tout pour échapper à de Graaf : l'éclair, la nuit, la tempête et le trombe, tout pour semer le corsaire Thranois que l'on surnomme le diable blond. Car De Graaf est réputé pour sa cruauté et son équipage, pour sa férocité. Dans sa cabine, il collectionne les crânes de ses ennemis. Quand la maison de Kriengburg fait appel au diable blond, c'est pour châtier un ennemi d'une façon spectaculaire. Sa dernière prise, qui l'a fait entrer dans la légende, n'est autre que le fameux avalonien Edward Teatch, que tous surnommaient Barbe Noire. De Graaf a réussi à le capturer après une folle course-poursuite dans l'archipel-sous-le-vent. Le diable blond a ramené, triomphant, le plus redouté des pirates au prince-électeur de Kriengburg, qui l'a fait pendre sur la place centrale de Bewerdjick. Alors qu'il avait déjà la corde autour du cou, Teatch a accepté un dernier verre et a crié au prince de Kriengburg que dans une heure, il boirait à sa santé avec le diable. Il a éclaté d'un rire que la corde a étranglé. A cette heure, avec ses six pistolets rangés sur les poches de son torse, les mèches lentes qu'il s'entortillait dans les cheveux pour effrayer ses ennemis, Teatch doit festoyer avec tous les démons. Si Bellamy et Gan Ling ont choisi la fuite désespérée, c'est parce que de Graaf a un navire bien supérieur aux leurs, et parce qu'il est suivi de deux sloops rapides. Or, Bellamy n'a jamais fait le vœu de combattre et son équipage ne s'est pas engagé pour cela. Ils sont venus dans le Whidah Galley pour piller des navires. Et c'est pour cela que de Graaf était après eux, depuis que Bellamy a capturé ce Thranois lors d'un abordage qui a servi de baptême de piraterie à nos héros ! C'est un spectacle ahurissant de voir le navire de Gan Ling avancer, avec sa proue démoniaque, ses belles voiles en soie et ses grosses cloches qui font ce tintamarre bien connu de ses victimes. Sarutobi a eu le temps de voir ce bâtiment qui doit venir des Mantes, et il a fait le lien avec les cloches du temple des cloches de la mort. Par quel coïncidence un pirate peut-il avoir surnommé son navire le Shimushigaki, du nom de ce démon buveur de sang qui hante le temple des cloches de la mort, au sud de Kyuden Suzume ?... S'ils survivent au passage de la trombe, Sarutobi se promet d'aller parler à ce Gan Ling. A présent, même les cloches ne retentissent plus assez fort pour couvrir le bruit monstrueux qui provient de la trombe. Celle-ci a un appétit d'ogre et les deux petits navires pirates ne vont pas servir à la rassasier. Au minimum, elle va les broyer et les pulvériser avant de continuer son avancée erratique sur la mer. Petit à petit, le soleil crépusculaire a été dévoré par les nuages, les rares étoiles à leur tour sont avalés par les monstres noires qui évoluent au-dessus de la mer. A bord du Whidah Galley comme du Shimushigaki, les hommes ont tout fait pour se préparer : les voiles sont nouées, le pont est dégagé, les tonneaux d'eau douce sont coincés entre de lourdes caisses et le tout est attaché par des chaînes. Maintenant, il n'y a plus qu'à attendre la suite. Ils sont une bonne centaine de condamnés en sursis, attendant la condamnation ou que leur peine soit commuée. Le ciel craque de partout, les éclairs pleuvent, la mer est percée par la grêle aussi loin qu'on puisse voir, la trombe aspire tout ce qui passe, et les nuages les plus fragiles semblent avoir disparu dans un cri d'épouvante. Dans les cales, Bellamy fait distribuer une ration de rhum à tout le monde. Gan Ling doit faire pareil. Les deux capitaines se sont hélés de loin, se saluant en frères terribles. Ils ont hissé des pavillons pour confirmer qu'il n'y aurait pas d'attaque entre eux. Bellamy et Ling n'ont pas eu besoin de s'entendre pour savoir que chacun souhaitait bonne chance à l'autre : s'ils se revoient, ce sera après avoir passé une porte de l'enfer ! Maintenant, la mer est creusé au maximum, et le Whida oscille comme un planche minuscule. Le pont doit être balayé d'écumes, comme lavé à grandes eaux savonneuses. On imagine à peine l'enfer que cela serait de s'y trouver en ce moment. A chaque fois qu'on a passé le sommet d'une vague, on redoute la redescente angoissante qui arrive fatalement, et c'est à chaque fois comme si on tombait dans un gouffre, sans savoir si on va remonter ou être englouti pour de bon. Bellamy se demande s'il a eu raison. Il a pris une décision terrible et ses hommes l'ont compris. Et ils ont obéi sans sourciller. Le capitaine avalonien a confiance dans le Whida Galley, c'est un bâtiment solide et maniable, bien plus que le Tigre de de Graaf, et c'est pour cela que le Thranois n'a pas pu les suivre. Alors que les hommes attendent, résignés, un craquement sinistre parcourt le navire, qui semble le déchirer de la proue à la poupe comme si c'était les ongles de la mort en personne. Des hommes arrivent et signalent une voie d'eau dans une soute. Deux canons sont tombés à la mer avec des caisses de boulets. Bellamy demande des volontaires pour tenter de colmater la soute avant qu'il ne soit trop tard. Korimi, Meikudo, Feiyan et Sarutobi y vont avec d'autres hommes. Ils n'auront pas le temps de sauver le contenu de la cale : ils peuvent juste voir les caisses disparaître par le trou de la coque, engloutis dans l'obscurité liquide et hurlante. Les charpentiers arrivent avec les plus lourdes planches de réserve. Certains les tiennent et d'autres se mettent à les clouer tant bien que mal. A chaque secousse, l'eau gicle par les trous. L'effort est harassant. Une planche n'a pas le temps d'être clouée qu'elle éclate, manquant d'éborgner deux hommes. Il faut tout recommencer, pendant qu'une chaîne s'organise pour écoper. Enfin, après plusieurs minutes, la cale est colmatée, l'eau est contenu. Alors que tout le monde travaillait, on est passé au plus près de la trombe, qui, si elle pouvait, sourirait aimablement devant ces efforts touchants. Pour aujourd'hui, la démonne des eaux se montre clémente : elle épargne les hommes. Elle les regarde passer dans sa robe mousseuse, aérienne, assourdis par le hurlement des vents, et soudain, alors que le Whida ressort de sa traîne, le vent retombe et on n'entend plus rien. Le silence est stupéfiant. Les hommes laissent éclater leur joie. Nouvelle tournée de rhum ! Maintenant, la mer est totalement plate, à peine distincte de l'épaisse poisse qui la recouvre. La brume a tout envahi et assourdit tout. Le Whida semble voler dans les limbes, entre une eau grise qui se confond avec le ciel posé sur elle. Dans le lointain, on entend retentir des cloches. Les hommes de Bellamy éclatent de rire et sortent sur le pont. On ne discerne pas le Shimushigaki mais on le devine. Le Whida Galley avance dans une sorte de soupe d'algues orangées. On croirait pouvoir marcher sur l'eau, sur ce chemin luisant et gluant. La brume se dissipe à son tour, et c'est comme si on découvrait le soleil pour la première fois. La mer retrouve sa couleur bleue virginale, et on voit même sauter des poissons qui semblent accueillir les visiteurs. * Il fait un temps magnifique mais il n'y a plus un poil de vent. Après avoir traversé l'enfer, le Whida semble emprisonné au paradis. Aucune terre à l'horizon, pourtant parfaitement dégagé. Bellamy et Gan Ling collent leurs navires. C'est Bellamy qui passe sur le Shimushigaki. Ils s'embrassent avec cette vieille fripouille, qui offre le verre de bienvenue à tous les officiers du Whida Galley. Nos héros sont là aussi. Les hommes des deux navires se saluent et commencent qui à jouer aux dés, qui à improviser un concert, qui à faire des bras de fer. Gan Ling a reconnu des compatriotes en nos héros, mais il ne semble pas ravi de les voir à son bord. Quand Bellamy a terminé de discuter, Sarutobi échange quelques mots avec Ling. Bellamy devine qu'ils ont des choses à se dire. Il tape sur l'épaule de Sarutobi : - You stay here, mister Wasp, and you come back on board when you're done, ok ? Take your time... Bellamy trouve amusant de surnommer Sarutobi « monsieur Guêpe ». Après tout, c'est marqué sur ses habits. Sarutobi prend son temps pour questionner Gan Ling sur son passé, l'air de rien. Il va le faire comme au Nid pour ses meilleurs « clients », à la chansonnette ! La cabine du capitaine du Shimushigaki est en train de se transformer en salle d'interrogatoire. Mais à l'amiable, hein ! Pourquoi Ling se sent-il obligé de répondre ? Habitude ? Il admet être déjà passé par le Nid, à l'époque où il cherchait à quitter Bakufu. C'était il y a dix ans, en fait, au moment de la première insurrection des Poings de Justice. A l'époque, il était un simple moine au temple des cloches de la mort. Pendant des années, il a sonné quotidiennement ces fichues cloches, pour empêcher ce démon buveur de sang de revenir dévorer les vivants ! Rien d'épuisant en soi, mais il ne se plaisait guère dans cet emploi ! Il y a deux siècles, des conspirateurs ont volé une des cloches, dans le but de capter le pouvoir du gaki. Une histoire tortueuse, durant laquelle le clan du Lièvre a été accusé d'avoir pactisé avec ce démon. La famille Usagi a été déchue, mais l'héritier, Ozaki, a réussi à s'échapper. Avec l'aide d'un magistrat d'Emeraude, il a pu retrouver les vrais coupables et refonder son clan. Mais pas sans que le Shimushigaki soit venu du royaume des âmes enragées et n'ait provoqué une terrible bataille. Sarutobi a vu l'esprit d'un samouraï Kakita qui combattait dans le temple. Sans doute ce magistrat ou un de ses assistants. Vieilles histoires, tout cela, mais Gan Ling a des informations plus fraîches : il y a dix ans, un Dragon tatoué est venu au temple pour se renseigner sur le pouvoir du Gaki. Il avait l'allure d'un moine tatoué, donc il devait être Togashi. Il était chauve, avec un troisième oeil tatoué sur le front. Il appartenait à un ordre vénérant Onnotangu, le seigneur de la lune, et se faisait appeler l'Oeil du Tao. Et ce personnage qui a aidé les Poings de Justice à s'organiser contre l'Harmonie. C'est à ce moment que Gan Ling a trouvé que les choses devenaient malsaines. Il a été enrôlé dans les Poings de Justice, mais il a déserté à la première occasion. Il a fui dans Bakufu, a fait son temps chez les contrebandiers du ruban bleu, a visité quelques fois le Nid, puis a trouvé une place à bord d'un navire qui partait pour l'archipel. Puis il est devenu le capitaine de son propre navire. En souvenir de son passé, il lui a donné le nom du démon gaki, et il a eu l'idée de mettre ces cloches pour effrayer ses proies. Mais il n'y a aucune magie à bord de son navire, il en serait bien incapable. Sarutobi, stupéfait d'apprendre tout cela, ici, dans cette mer d'huile du bout du monde, mémorise soigneusement. Le soir, il fait part de ce qu'il a appris à ses amis. Cet Oeil du Tao est au minimum un responsable important de la Sainte Triade ! Un fanatique qui monte des révoltes contre l'Harmonie et qui se renseigne sur le pouvoir d'un énorme gaki et des esprits malsains qui sont apparus au temple... Bellamy salue Gan Ling et ordonne de mettre le cap sur une cité amie, Dunwall. * Dunwall est la cité des brumes, de l'acier, des baleiniers qui ramènent les immenses carcasses sanglantes dans le port envahi par la vapeur. Le froid est piquant, l'eau salée ronge la basse-ville. Des bâtiments gris qui deviennent noirs sous le ciel étoilé. Partout, l'humidité, les odeurs rances. Les bâtisses d'où fument des cheminées crachotantes et qui laissent deviner la vie rude et sans joie des marins. L'aurore est argentée, avec un soleil laiteux qui darde sur les entrepôts. Bellamy félicite tous les hommes pour ce rude voyage. Il leur donne trois jours de permission : - Enjoy your life, go see the girls, get drunk and come back for a fresh new journey ! La plupart des hommes passeront ce congé dans les bouges du bord de mer. Meikudo a compris que Korimi et Feiyan ne voudront pas rester dans ce quartier mal famé. Elle les emmène plus haut dans la ville. Au bout de la grande avenue qui monte du port, un grand château d'eau avec une horloge. De grandes maisons bourgeoises dont les balcons sont décorés de barrières en fer forgé. Des calèches, des dames dans de grandes robes mauves, des hommes aux chapeaux haut de forme. Des boutiques aux enseignes peintes. Un magasin de jouet devant lequel des enfants bavent d'admiration. Rapidement, les trois femmes sont l'attraction de tous les jeunes séducteurs qui voudraient les emmener dans des virées du diable. Mais Feiyan sait tenir à l'écart les Dunwalliens trop entreprenants. Les trois femmes prennent le temps de se promener. Elles sont surprises par le sifflement qui vient d'un grand bâtiment en acier : un train, la chaudière bouillante, qui crache déjà sa fumée noire et part plus loin dans l'île. Ainsi, les Avaloniens ont déjà un chemin de fer ! Les wagons transportent du charbon, du poisson dans la glace ou encore des pouterelles en acier sorties des manufactures de l'ouest de Dunwall. En remontant encore, elles sortent du nuage crasseux qui stagne sur la ville et découvrent un charmant quartier aux ruelles pavées. Elles entrent dans un restaurant où on leur sert des crêpes avec du jambon et des œufs, la spécialité de la région ! En boisson, du cidre dans un pichet en grès. A ce moment, Feiyan se sent vraiment au bout du monde. Elle se demande si Rokugan n'est pas dans un autre monde. Deux jours plus tard, Bellamy est à pied d'oeuvre : il fait réapprovisionner les soutes, réparer de fond en comble les cales, les mats, recoudre les voiles. Les hommes, qui sont revenus de leur virée de débauche, se remettent aussi au travail. Le surlendemain, avec la marée descendante, le Whidah Galley largue les amarres et repart vers les îles de la Mante. Le navire est bientôt décrassé de toute la poussière de charbon accumulée dans le port glauque de Dunwall. En deux jours, on retrouve le beau temps, le vrai ciel bleu, la chaleur des tropiques. Bellamy reçoit nos héros dans sa cabine et leur annonce qu'il s'est renseigné à Dunwall sur les négriers Thranois. Dans les tavernes, on trouve tous les renseignements, quand on sait s'adresser aux bonnes personnes. Après trois jours de traversée calme, un bâtiment de la maison de Krienburg est en vue : De vrolijke visser, le pêcheur joyeux. Mais aujourd'hui, c'est le Whidah Galley qui va le hameçonner ! Le Thranois est un bâtiment négrier, les informations de Bellamy étaient bonnes. Il fait bien 90 pieds de longs, et doit contenir au moins cent cinquante esclaves. Il est peu défendu, car cette route est peu fréquentée, se trouvant loin des criques et des îles d'où les pirates ont l'habitude de faire partir leurs raids. La veille, le Whidah a été rejoint par un navire allié, le Prince Joachim du capitaine Olivier d'Exquin, un vieux compagnon de route de Bellamy. Les deux vont s'allier pour prendre en tenaille le Thranois. Le Prince est plus rapide : il approche par l'arrière tribord et lance quelques coups de semonces, pendant que le Whidah approche par babord et lance lui aussi plusieurs boulets, qui tombent à l'eau juste avant de fracasser le Vrolijke visser ! Les hommes de Bellamy et d'Exquin se tiennent prêts pour un abordage simultané, mais le capitaine Thranois fait hisser le drapeau blanc. - Goodness gracious, s'exclame Bellamy, that's almost too easy ! Les deux capitaines avaloniens sont accueillis à bord par le capitaine Van der Loen, qui admet sa défaite. Les pourparlers seront brefs, car Bellamy a déjà sa petite idée : il s'empare du bâtiment Thranois, d'Exquin s'empare de sa cargaison et en échange, Van der Loen peut repartir sur le Whidah Galley ! Bellamy avait une certaine attache sentimentale pour ce navire, mais dans son métier, on ne peut pas trop laisser cours à ce genre de sentiments ! Bellamy fait déplacer à bord du Visser ses canons et son matériel. Il laisse les hommes de d'Exquin s'emparer des richesses à bord. Mamballa est dans les premiers à descendre dans les soutes : quelques esclaves Nambiwa en effet, parmi la trentaine qui se trouvent là, mais aussi d'autres peuples des îles, même des Rokuganis et des Merenae. Ils vont partir avec d'Exquin, qui a promis de les déposer sur une île amie. Pendant ce temps, Bellamy, qui a un certain sens pratique, discute avec ses charpentiers pour réaménager le Visser. Il va falloir rapetisser les quartiers du capitaine, trop luxueux, et faire de la place pour mettre plus de canons ! Ensuite, il s'agira de le rebaptiser ! Au passage, Bellamy fait fouiller les dossiers de Van der Loen, qui a ses accréditations pour entrer sur l'île du Requin. Il confie le dossier à Meikudo. Cela sera précieux pour se rendre là-bas, et retrouver où sont partis, il y a quatre ans, les Nambiwa des îles perdues. - Good, good ! fait Bellamy en fumant sa pipe. We've done a good job, mister Wasp ! Il annonce qu'après une si belle prise, il va falloir marquer une nouvelle pause : cap sur la baie d'Along ! Là-bas, Bellamy trouvera de quoi remettre à son goût le Visser et nos héros pourront rencontrer une des plus grosses fripouilles des frères de la Côte, Seong Feng ! Feiyan se souvient de ce nom : c'est le docteur Rijin qui lui avait parlé de ce membre de la grande confrérie, qui a ses entrées sur l'île du Requin. A Porto Maravila, Jamal leur a dit qu'il a travaillé dans le temps pour Seong Feng, avant d'acheter son indépendance comme capitaine d'aéronef. Quatre jours plus tard, le navire de Bellamy, renommé The Hungry Fisherman (le pêcheur n'est plus joyeux, il est affamé !), entre dans la somptueuse baie d'Along, glissant sur son eau turquoise, entre ses îles aux falaises recouvert de végétation. A l'entrée de la ville de Gaong-Bak, un grand marché flottant : des centaines d'embarcations où l'on vend de tout, des légumes, des oiseaux, des épices, avec des planches pour passer de l'une à l'autre. Dans les rues, un vacarme insensé : la foule, les pousse-pousse, les cris des vendeurs à la sauvette, une vraie ruche ! Seong Feng est le seigneur redouté de la ville : il réside dans le plus grand bâtiment, dont tout le rez-de-chaussée est une vaste salle de jeu. Les gens s'y pressent avec avidité, s'entassant aux tables malgré la chaleur étouffante. Derrière des persiennes, dans une épaisse fumée, l'argent passe de mains en mains, fébrile, les dés roulent, des miséreux achèvent de tout perdre, tandis que des employés, impassibles, empochent les mises perdues. Bellamy s'essuie le front et glisse quelques pièces ici et là, puis il dit à nos héros de suivre une stoïque vieille dame, mince comme une puce, très maquillée, avec du violet à lèvres et du fard sur le visage, qui les emmène dans un long couloir sombre, puis tout en haut d'un escalier. Elle les introduit dans une antichambre, gardée par deux énormes gaillards torse nus. Puis nos héros entrent dans un grand bureau où, derrière les rideaux tirés, on devine une vue magnifique sur toute la baie. Seong Feng est grand, sec, de longues moustaches en lame de rasoir. Il porte une longue robe de satin orange, avec des boutons brillants qui sont sans doute des diamants. Il fait servir à boire et s'adresse à ses visiteurs dans un Rokugani assez correct. Sarutobi lui explique qu'ils veulent entrer à l'île du Requin grâce à son aide. En échange, ils peuvent offrir de l'argent, de l'argent Thranois plus exactement. Seong Feng affiche un large sourire puis dit que l'argent ne l'intéresse pas, car son aide leur coûterait beaucoup plus cher que ce qu'ils peuvent offrir. Il a compris en réalité qu'il n'a pas affaire à de simples pirates. Ce ne sont pas des hommes de ce vaurien de Gan Ling. Les manières et l'accent de Feiyan et Sarutobi trahissent leur origine. Sans le dire explicitement, Seong Feng leur fait comprendre que, grâce à leur origine et leur position sociale, ils peuvent lui être bien utiles autrement. - J'ai une certaine inimitié gênante avec mon voisin de l'île des Epices, le gouverneur Yoritomo Daizu. Il a décidé de me mener une guerre sans répit, en attaquant mes navires, alors que je n'ai aucun souvenir de l'avoir agressé. Admettez que c'est incompréhensible. Il refuse de m'écouter mais vous, je suis certain qu'il vous prêtera une oreille plus attentive. Allez le voir, demandez-lui de cesser de harceler mes navires, et je vous ouvrirai les portes de l'île du Requin. « Je sais comment sont les Rokuganis comme vous. Des gens à qui l'on peut faire confiance, n'est-ce pas ? - Nous irons voir Daizu pour lui demander de vous laisser en paix, répond Feiyan. Chez un samouraï, les paroles et les actes ne font qu'un.
29-12-2020, 12:08 AM
(This post was last modified: 24-01-2021, 12:23 PM by Darth Nico.)
![]() Feon-Seng dit que les termes ont changé : les Thranois arrivent, donc il demande aux PJ de servir d'intermédiaire avec le gouverneur Daizu pour obtenir son aide. Il va faire chercher le meilleur pilote, Corben Wallace ! Pilote de biplan, il parle en anglais primaire à nos héros. Corben pilote, Sarutobi derrière à la place du canon, Feiyan à l'arrière avec la réserve de grenades. Survol de la magnifique baie d'Along. Navires au loin : les Thranois ! Plus tard, panne de l'hélice droite en vol. Corben s'attache avec un mousqueton et confie les commandes à Saru ! Corben va réparer l'hélice à coup de clef anglaise (avalonienne), pendant que Saru se dirige vers la piste en haut de la falaise de l'île de Daizu, et réussit un atterrissage en douceur. Impressionné, Corben invite nos héros au mess des pilotes. Offre sa tournée. - Alors les crapules, on ne m'attend pas pour boire ? C'est Jamal ! Il assure une liaison entre Porto Maravila et cette île. Rencontre avec le gouverneur Daizu, qui accepte de venir en aide à cette fripouille de Feong-Seng, en échange d'une renégociation des accords avec lui ! Saru part avec la flotte Mante, tandis que Feiyan repart en avion avec Corben. Les Thranois attaquent la baie d'Along. Feiyan défend le casino de Feong-Seng avec des hommes à lui : combat dans les rues de la ville contre les Thranois. Des assaillants sont repoussés dans les ruelles en pente, mais les Thranois ont débarqué dans le port. Leurs navires ont envahi toute la baie. La flotte Mante arrive et attaque les Thranois. A bord d'un bâtiment léger, Sarutobi mène un abordage contre un navire. Essuient des tirs thranois, puis mène son groupe aux canons, et s'emparent du navire. Saru ordonne alors de faire feu sur les navires thranois. Le navire de Bellamy surgit alors d'une grotte sous les falaises d'Along et attaque les Thranois près du port ! C'est la déroute pour les Thranois. Navires capturés. Nos héros demandent une faveur à Daizu : garder un des capitaines thranois comme otage et l'utiliser pour obtenir des informations. Quelques jours plus tard, sur une petite île déserte, nos héros rencontrent les Thranois et relâchent leur otage, en échange d'informations sur l'île des esclaves, l'île du Requin. Ils apprennent ainsi où les Nambiwa des îles perdues ont été emmenées. Départ sur le navire de Bellamy pour les îles sous le vent. Grande île avec une plantation où travaillent les esclaves nambiwa. Elle n'est gardée que par un petit navire qui ne fait pas le poids face au galion pirate de Bellamy. Le capitaine Thranois proteste contre ces crapules de pirate. Très fier, Bellamy monte sur le rebord du navire et sert ce discours de légende à l'équipage vaincu : « Vous êtes un chiot sournois, comme tous ceux qui se soumettent aux lois que les riches ont faites pour leur sécurité, car les petits lâches n'ont pas le courage de défendre ce qu'ils obtiennent par la ruse. Maudissez-les tous, maudissez-la, cette meute de coquins rusés, et vous, qui les servez comme une bande de poules mouillées ! Ils nous vilipendent ces scélérat, quand il n'y a que cette différence entre eux et nous : c'est qu'ils volent tranquillement les pauvres sous le couvert de la loi et nous, nous pillons les riches sous la protection de notre propre courage. N'auriez-vous pas mieux fait de devenir l'un d'entre nous, plutôt que de vous mettre au service de ces scélérats pour trouver du travail ? Je suis un prince libre, moi, et j'ai autant d'autorité pour faire la guerre au monde entier que celui qui a cent voiles de navires en mer et une armée de 100.000 hommes sur le terrain ; et voilà ce que me dit ma conscience ! » Tous les hommes de Bellamy l'applaudissent, crient et battent son nom à tout rompre. Le Thranois, défait, n'a d'autre choix que de laisser entrer les pirates. Ils se rendent alors, très civilisés, dans la plantation pour y prendre l'or et l'argenterie. Ils en ressortent avec des beaux habits thranois, des cigares, des chapeaux haut de forme. Un vrai défilé d'élégance ! Pendant ce temps, Mamballa retrouve sa famille et s'effondre en larmes dans les bras de sa femme et de ses enfants, sur cette petite île où le soleil du matin se lève. Il ne sait comment remercier nos héros. Quand ils reviennent à bord du navire, ils trouvent Meikudo et Korimi en train de se disputer. - Ca y est, dit Sarutobi, un crêpage de chignons. Les deux femmes demandent à Feiyan d'être leur arbitre : Meikudo veut offrir à son amie des rubis pris aux Merenae sur l'île des larmes. Ces rubis étaient à bord du navire de Wilderbrandt, qui a été fait prisonnier à la baie d'Along. Meikudo veut les offrir à Korimi pour la remercier de l'avoir accueillie quand elle était dans la détresse. Ce ne serait que justice et en vendant ces rubis, Korimi pourrait enfin réaliser ses rêves : elle ne mérite pas de continuer sa vie dans la bicoque humide du port, à tatouer les fesses des gros marins ! Feiyan dit que cela lui paraît juste. Korimi, qui considère un peu Feiyan comme sa conscience, dit que dans ces conditions, elle accepte. Bellamy leur dit alors qu'il peut les emmener voir la grande prêtresse Oshabi, qui parle avec les esprits. Bellamy, qui est passé de l'état de petit pirate à grand capitaine des sept mers depuis qu'il connaît nos héros, accepte de les emmener là-bas : l'île du crane ! Le navire mouille au pied de la montagne du crâne, et nos héros continuent en barque à travers la jungle. Ils entrent dans le jardin aux mille fleurs d'Oshabi, où la prêtresse aux yeux de lune les attend. Elle a allumé un grand feu, dans lequel elle jette des runes qui font surgir des visions du passé : Un Rokugani tatoué, avec un oeil de lune au milieu du front comme un troisième oeil, accoste à l'île des Larmes de l'est, et est introduit dans les sociétés secrètes Nambiwa. Il assiste à leurs cérémonies et à la condamnation d'un coupable à l'état de zombi. Bientôt, il est initié à leurs pratiques et il vole les secrets de la zombification puis quitte l'île, en y laissant un complice : le shugenja de l'Air Isawa. Ce Rokugani communique avec les esprits des morts et s'est introduit dans leur monde pour les faire revenir parmi les vivants. Les visions s'arrêtent. Nos héros vont pouvoir repartir à Rokugan ! Sarutobi, lui, aurait bien passé la fin de la nuit avec la prêtresse ! Bellamy ramène nos héros à Porto Maravila et c'est la soirée d'adieu organisée par Sarutobi, avec également Jamal et le gros Fuji. En quelques traits sur le papier, Feiyan immortalise cette joyeuse compagnie. Réveil difficile le lendemain. Feiyan et Meikudo sont les premières debout, alors que les hommes ronflent encore. Moment d'adieu pour les deux soeurs : - En paroles, tu as été sévère avec moi, dit Meikudo, mais en fait, tu t'es montrée bonne avec moi. Cela change des gens qui font des discours doucereux en attendant de te dénigrer dans ton dos. Feiyan lui redit qu'elle est sa soeur et qu'elle sera toujours la bienvenue à Bakufu. Mais elle lui demande de faire attention : désormais, Bellamy va être pourchassé par les Thranois. - Ne t'inquiète pas, on a toujours des ennemis dans les sept mers ! Allez, soeurette, à bientôt ! Et selon la tradition des îles, elle prend Feiyan dans ses bras, les larmes aux yeux. Puis elle met son beau chapeau à plumes et salue : il est l'heure pour elle de repartir sur l'île du grillon ! Le soir, après la soupe à l'oignon chez Fuji pour se remettre, et un dernier verre d'adieu, c'est le retour par la navette. Cela fait du bien de retrouver la terre ferme ! On apprendra un peu plus tard que Mamballa est arrivé avec sa famille à Bakufu et a ouvert une boutique d'herboristerie près du quartier Merenae, maintenant largement déserté. Et que Korimi s'est offert aussi la boutique de ses rêves : un grand entrepôt dans le quartier du Levant, qu'elle va réaménager pour en faire un atelier de tatouages exotiques, inspirés par les sept mers. Elle va recevoir l'aide d'un de ses anciens amants, un Asahina qui est danna (patron de geishas), qui va lui apporter de la clientèle ! Finie la misère sur le port, maintenant Korimi va s'adresser à une clientèle jeune et avide de distinction et d'exotisme. FIN
DU CHAPITRE II
24-01-2021, 12:57 PM
(This post was last modified: 26-01-2021, 09:51 PM by Darth Nico.)
![]() Nos héros sont de retour à Bakufu après un long périple en mer. Genichi leur donne les nouvelles des cinq semaines pendant lesquelles ils étaient absents : la paix a définitivement été signée avec les Lièvres. Le chemin de fer a bien avancé et va bientôt arriver à Kyuden Usagi, étape ô combien symbolique pour le progrès de l'Harmonie. Puis avant l'hiver, le train devra arriver à la Cité des Mensonges. Nos héros racontent leurs aventures, comment ils ont réussi à rembourser leur dette d'honneur envers Mamballa, en délivrant sa famille. Des réorganisations importantes ont lieu dans la magistrature : Genichi va changer de poste et être affecté hors de Bakufu. Nos héros peuvent le suivre, ou bien rester à Bakufu au service de Miya Sekawa, qui va reprendre le poste de Genichi. Pour Sarutobi comme pour Feiyan, il n'y a guère de doute : ils vont tout faire pour rester au service de Genichi, peu importe où il sera affecté. En attendant de savoir, nos héros font le point sur ce qu'ils ont appris dans les sept mers : ils savent qu'un homme, avec un tatouage de lune comme troisième œil, s'est emparé des connaissances des sociétés secrètes Nambiwa. Par leur discussion avec le pirate Gan Ning, l'ancien moine du temple des cloches de la mort, ils savent que ce même homme tatoué s'est renseigné sur le shimushigaki qui y est emprisonné, et aussi sur les esprits des deux samouraïs corrompus qui s'y trouvent. Or, ils apprennent de nouvelles choses par Suzume Kiohage et Daigotsu Yori, qui ont enquêté au temple ces dernières semaines : les deux esprits corrompus se nomment Dajan et Nakiro. Ils ont fomenté une conspiration contre le clan du Lièvre avant le second jour des tonnerres, il y a deux cent ans. Ils ont laissé accuser les Usagi de maho et ont voulu lier le nom du daimyo déchu, Ozaki, au shimushigaki afin de réveiller ce démon emprisonné des siècles plus tôt. Ils ont appris que Dajan et Nakiro ont été mis en déroute par un magistrat, Kakita Hiruya, qui était en poste à la Cité des Mensonges, peu avant le second jour des tonnerres. Sarutobi a alors la certitude que c'est l'esprit de Kakita Hiruya qu'il a aperçu dans le temple quand il s'y est rendu. Il a aussi la conviction que beaucoup de choses se sont noués autour de ce Hiruya. En effet, celui-ci est mort dans des circonstances mal élucidées, peu après le second jour des tonnerres. Il veut donc en apprendre plus sur lui. Kiohage et Yori savent où se trouvent les cendres de ce magistrat : dans une petite île au large de Bakufu, l'île des Epices. Nos héros s'y rendent donc par une petite navette. Il est étonnant qu'une si petite île bénéficie d'une liaison aérienne. Sur place, dans la ville portuaire, il règne une activité importante : Sarutobi est sûr de reconnaître des membres du Ruban Bleu, les contrebandiers du port des brumes. Ceux-ci sourient obséquieusement à leur cher magistrat. Il y a là aussi des Daidoji, qui aux yeux de Sarutobi, sont tous des trafiquants. Egalement des Merenae. En-dehors du port, sur une plage plus au nord, un petit temple Kakita : c'est là que se trouve la tombe du fameux magistrat. Nos héros se recueillent devant le petit monument. Ils sont alors assaillis de visions troublantes : Feiyan perçoit un danger à venir. Kiohage dira qu'il a vu un lien kharmique entre Hiruya et sa propre famille, via son ancêtre Suzume Mitsurugi. Sarutobi perçoit des impressions de déshonneur, de mort violente, de bouleversements ayant eu lieu en même temps que la mort de Hiruya. Yori dira avoir perçu un lien indirect avec la création de sa famille. Tout cela fait beaucoup trop, pour un samouraï mort il y a deux siècles ! Comme si les dangers qu'il a affrontés n'avaient pas disparu, et s'apprêtaient à ressurgir ! Nos héros vont ensuite voir les Kakita. Ce sont des samouraïs de l'Emeraude, donc normalement des rivaux, sinon des ennemis, mais ici, on est en terrain neutre. C'est la bienveillante Feiyan qui fait les présentations. Les Kakita se montrent flattés que des samouraïs viennent s'intéresser à leur prestigieux ancêtre. Ils racontent brièvement les hauts de Hiruya : il était magistrat de la Cité des Mensonges, où il eut à démêler nombre d'affaires criminelles (quoi d'étonnant dans une cité pareille ?) On lui prêtait une alliance spirituelle avec un Kenku, ces oiseaux humanoïdes maîtres du sabre, ce qui lui permit de rentrer dans la prestigieuse école kenshinzen, la crème de la crème des duellistes. Il fut également un artisan du retour en grâce du clan du Lièvre, après avoir déjoué des machinations démoniaques au temple des cloches de la mort. Enfin, il trouva la mort peu après le second jour des tonnerres, dans l'exercice de son devoir. Il fut tué lors d'un affrontement avec un assassin célèbre, la Grue Noire. Un destin bien troublé, et troublant. Nos amis prennent le nom de tous les assistants qu'eut Hiruya : Shinjo Kohei, un ami d'enfance à lui. Bayushi Bokkai, qui prit ensuite la place de Hiruya et devint magistrat de la Cité des Mensonges. Hida Shigeru, qui prit sa retraite peu après. Mirumoto Ryu, qui finit sa vie paisiblement dans ses montagnes natales. Et Isawa Ayame, une shugenja qui se retira aussi sur les terres de son clan. Les Kakita disent enfin que tous les ans, les Licornes viennent rendre hommage à l'esprit de Hiruya. Voici une nouvelle piste ! De retour à Bakufu, Feiyan va rendre visite à Moto Kohei et aux vierges de bataille. Elle raconte ses aventures. Elle note que les Utaku se gardent bien de lui demander des nouvelles de sa soeur Meikudo. Il est évident qu'à leurs yeux, elle n'existe plus. Au contraire, Kohei demande comment elle va, et Feiyan la rassure sur ce point. Puis elle lui demande pourquoi les Licornes vont chaque année prier sur la tombe de ce Kakita Hiruya. Feiyan lui dit qu'elle a entendu parler d'un des assistants du magistrat, qui se nommait Shinjo Kohei. Il était un ami d'enfance de Hiruya, et après la mort de ce dernier, il entreprit de le venger. Moto Kohei finit par admettre, modeste, qu'on lui prête Shinjo Kohei comme ancêtre. C'est trop le flatter ! Car Shinjo Kohei travailla au service de l'Empereur Toturi, puis aida les Scorpions dans la quête des conspirateurs qui avaient tué Hiruya. Ensuite, estimant son ami Hiruya vengé, Kohei se retira dans les terres Licornes, où il devint, déjà âgé, le précepteur du jeune Moto Chagataï, le futur premier Khan, qui monta sur le trône d'Emeraude, lors de la succession troublée de l'Empereur Toturi. Feiyan est très fier que Moto Kohei ait un ancêtre comme lui ! Elle lui demande alors si l'ambassade a encore des documents ayant appartenu à Shinjo Kohei. Moto Kohei promet de chercher. Par Yori, nos héros apprennent que les Daigotsu ont été fondés sous l'Empereur Toturi, par un samouraï nommé Bayushi Daigotsu, qui avait rendu de grands services à l'Empereur. En remerciement, ce dernier permit au Bayushi de fonder une famille à son nom. Plus tard, les Bayushi ayant déplu à l'impératrice Iweko, les Daigotsu prirent la tête du clan du Scorpion, et le refondèrent sous le nom de l'Araignée. Il paraît très probable que Shinjo Kohei ait aidé ce Bayushi Daigotsu. Quelques jours plus tard, Miya Genichi invite nos amis à déjeûner. Chez qui ? Chez monsieur Jan, bien sûr ! Le Thranois, toujours expansif, accueille les magistrats : - Genichi-sama, si vous m'aviez dit que vous veniez, j'aurais déjà tout préparé ! - Jan-san, ce n'est pas compliqué, répond Genichi, vous nous servez ce que vous avez, et ce sera délicieux. - D'accord, mais alors, ce sera... du fugu ! - Jan-san, vous nous ferez mourir... de rire ! Autour d'un bon repas, Genichi annonce alors sa nomination : le district de Hokufuu, tout à l'ouest de l'Harmonie. En bordure de la forêt Shinomen, entre la vallée du Crépuscule du clan du Sanglier et la vallée aux esprits où réside le clan du Faucon. Sarutobi manque de s'étrangler et à ce moment, il aurait encore préféré avaler un fugu entier ! Hokufuu ! Cela rime avec Bakufu, sauf que c'est moins bien en tout ! Un endroit on ne peut plus reculer, qui est de plus sur la frontière avec les barbares Ujik-Hai ! Rien n'est plus loin de la civilisation ! Feiyan ne serait pas mécontente de retrouver les Faucons, chez qui elle s'était fait des amis lors d'une expédition périlleuse contre ces barbares Ujik-Hai. La forêt Shinomen l'a toujours attirée... au point qu'elle s'y était précipitée de façon très imprudente ! Genichi dit alors que Kiohage restera de toute façon à Bakufu : il est entré dans la magistrature grâce à Miya Sekawa, et même s'il a été on ne peut plus honoré de servir Genichi, il doit rester fidèle à Sekawa. Pour sa part, Daigotsu Yori est prête à venir. Cela ne déplait pas à Sarutobi, car la magistrate, malgré son air ténébreux (ou grâce à lui ?) n'est pas sans lui plaire... Sarutobi accepte donc. Qui plus est, il lui serait impensable de renoncer au service de Genichi, qui est comme un père pour lui, une figure tutélaire, le seul homme pour qui il se jetterait au feu sans discuter. Genichi ajoute qu'il est nommé là-bas en remplacement provisoire du magistrat actuel de Hokufuu, qui a été envoyé ailleurs. Genichi sera donc en poste jusqu'au printemps prochain au moins, donc presque un an. Dès que nos héros sont sortis du restaurant, et que Genichi est parti, Sarutobi laisse tomber : - C'est une catastrophe ! Hokufuu !... "Il n'y a rien là-bas ! C'est le trou du cul du monde ! A Hokufuu, le monde flottant, c'est un cabanon ! Yori éclate de rire : - Et si pour chasser ces idées noires, Sarutobi, vous nous indiquiez plutôt où aller boire un verre. Sarutobi se ressaisit : - Ah oui, profitons-en, parce qu'après, ce sera régime sec ! Bol de riz et eau... L'hiver sur les frontières barbares va être long, c'est moi qui vous le dit !
28-01-2021, 11:26 AM
(This post was last modified: 11-02-2021, 06:15 PM by Darth Nico.)
![]() Nos héros préparent leur départ pour le lointain district de Hokufuu. Feiyan passe dire au revoir à Korimi dans sa nouvelle boutique chic de tatouages. Korimi a pris les choses en main pendant que les ouvriers sont en train de travailler : elle les dirige comme une vraie patronne, elle est sur leur dos toute la journée pour vérifier qu'ils ne font pas de bêtises. - La tapisserie, vous me la clouez mieux ! Et là, les meubles, vous déplacez, on ne peut pas passer... Elle soupire en tirant nerveusement sur son fume-cigarettes, mais on la sent très fière de cette promotion sociale. Finie la brume du port, elle est désormais dans le quartier des jeunes samouraïs huppés, il s'agit de faire bonne impression. Elle a tiré des rideaux mais elle sait que derrière la fenêtre, il y a toujours cinquante voyeurs, la joue collée à la vitre, qui essaient d'apercevoir les geishas qui vont venir se faire tatouer ici. Feiyan la félicite et lui apprend sa nomination à Hokufuu. - Hokufuu ? Mais c'est où ça ?... Après être allée dans les mers de l'est, vous voilà partie pour le désert de l'ouest ! Feiyan est contente de retrouver les plaines sauvages où elle galopait, il y a encore un an. Elle les aime autant sous le soleil cuisant de l'été que sous un manteau de neige l'hiver. - Bon, dit Korimi, si cela vous plaît... Elle commande alors à Feiyan des dessins pour illustrer sa boutique. Modeste, Feiyan répond qu'elle n'a certainement pas un talent d'artiste. - Allons, allons, vous vous débrouillez très bien. J'ai vu vos dessins de la baie d'Along, des îles Nanbiwa et d'ailleurs, et ma clientèle adore l'exotisme. Je sais bien que ce ne sont que des esquisses pour le moment, mais je suis certaine que vous aurez le temps de les améliorer quand vous serez à Hokufuu, et d'en faire de vraies oeuvres. Je serai fière de les mettre aux murs. Je vous les payerai bien sûr. - Il n'est pas question de cela ! Je vous en ferai cadeau ! Les deux femmes échangent encore quelques politesses, puis Feiyan passe à l'ambassade Licorne. - Ah, dit poliment Moto Kohei, Hokufuu c'est loin... Du moins vous serez proche de nos terres ancestrales. Vous allez enfin pouvoir galoper tout votre content là-bas. Ah tenez, puisque vous me parliez de mon ancêtre Shinjo Kohei l'autre jour, j'ai cherché si nous avions des archives sur lui... En fait, ce sont les Daigotsu qui possèdent la majorité de ces documents un peu sensibles liés à la création de leur famille. Mais j'ai retrouvé cette lettre du magistrat Kohei, elle pourra vous intéresser. Feiyan ne veut pas emmener un document aussi vénérable, aussi elle la lit attentivement et la mémorise pour plus tard. « De : Shinjo Kohei, Cité Interdite A : Hida Shigeru, retraite de la Persévérance Cher ami, Voici donc venu le moment de déchaîner notre colère ! Dans quelques jours, Kakita Hiruya sera vengé ! L'Empereur a réuni des hommes qui ont prêté serment de ne rien dire sur ce que nous allons faire. Moi-même, je peux que te parler par allusions. Je ne peux même pas te dire où nous allons. Mais je peux t'affirmer que les derniers conspirateurs seront châtiés ! Le samouraï que Bokkaï nous a recommandé dirigera notre troupe. C'est quelqu'un de brillant et ambitieux : nous en entendrons certainement parler dans les années à venir. Pour ma part, je serai en première ligne face aux conspirateurs et ensuite, si les Fortunes me prêtent vie, je retournerai sur mes terres ancestrales avec ma femme. Je ne veux plus me mêler de ces intrigues. Je voudrais même que le souvenir de ces conspirateurs disparaisse avec nous. Mon ami, si tu n'as pas honte de me connaître, je serai heureux de t'accueillir chez nous, quand tu voudras sortir quelques jours de ta retraite, que je sais être paisible. Tu salueras Bayushi Bokkaï, et qui sera aussi le bienvenu chez nous. Meilleurs souvenirs, Shinjo Kohei Lune 1132, 2ème mois » Le lendemain, nos héros partent, escortant le magistrat Miya Genichi qui voyage en palanquin. Avec leur collègue Daigotsu Yori, ils passent la porte ouest de la ville et partent sur la route qui passe par les anciens marécages de Uebi, puis au sud du château des Renards, où ils font une étape. Le lendemain, ils traversent le nord de la plaine du soleil d'or, aperçoivent loin au sud le château des Moineaux. Ils suivent un tronçon du chemin du fer, qui bifurque ensuite vers le nord, en direction du château des Lièvres. Puis, dans l'après-midi de ce premier jour, ce sont les immenses plaines agricoles du clan du Crabe. La chaleur est écrasante et les champs semblent figés sous le soleil blanc. Les grillons crissent dans les herbes, tandis que les paysans peinent, courbés et boivent à grandes gorgées. Le lendemain, ils font étape au village de Kura Mura, perdu parmi les champs à pertes de vue. Ils sont invités par les notables à visiter une manufacture qui fait la fierté de la région, où les ingénieurs chimistes de la famille Kaiu mettent au point des engrais plus performants qui, un jour, permettront de mettre fin aux ravages des parasites. Ensuite, ils prennent la route nord à travers la province de Kuda et traversent en une journée la plaine du vent paisible. Au loin, on aperçoit déjà l'immense forêt Shinomen, sorte de forteresse végétale imprenable. Face à eux, la tour de garde de l'ouest, seul bâtiment que l'on voit à des lieux de loin dans ces étendues agricoles. En fin de journée, ils arrivent à la frontière de Hokufuu. Une averse de fin de journée, maussade, semble tomber point pour les accueillir au château du Singe. Sarutobi rumine de sombres pensées. Il a dû quitter sa ville adorée, sa fille non moins adorée, et son Nid tout autant adoré, pour venir dans cette région perdue, désespérante et monotone ! Le juge Toku Kengo est un vieil ami de Miya Genichi. Ils ont fait leur droit ensemble, alors que l'Harmonie n'existait pas encore. Cela remonte ! Kengo est un petit homme replet, qui arbore l'air jovial propre à son clan, connu pour être souriant même face aux épreuves. Il accueille les nouveaux magistrats dans ce château du Singe qui ne paye pas de mine. Le lendemain, ils se rendent à Maisuna Shiro, château d'une famille vassale des Kaiu qui est chargée d'entretenir le mur ouest. - Une famille vassale des Kaiu, maugrée Sarutobi, vraiment c'est trop d'honneur qu'on nous fait... Yori se retient de pouffer de rire. Mais même Genichi n'a pas son moral des beaux jours, nos héros le sentent, même si le magistrat se doit de rester impassible et digne, étant le nouveau gouverneur de la région. Le château Maisuna est une bâtisse puissante, bien plus grande qu'on ne l'attendrait d'une famille vassale. Le daimyo vante la solidité de ses fortifications et le présente comme un chef-d'oeuvre du savoir-faire de sa famille. Sarutobi se retient de baîller. Normalement, c'est l'heure où il va boire un premier verre au Nid ! Que fait le patron à cette heure-ci ? Il doit recevoir les livreurs et faire transporter les grosses caisses de saké. Sa femme doit déjà être en cuisine et la bonne odeur de la soupe à l'oignon doit égayer la fin de matinée. Les hommes qui ont fait la nuit prennent un dernier verre avant d'aller dormir. Ceux qui ont patrouillé dans le Monde Flottant racontent les incidents de la nuit. Une équipe se prépare pour une descente sur le port des brumes, une autre revient avec quelques canailles qui tentaient de passer des marchandises. La belle vie, la vraie vie ! - Les fortifications ont jusqu'à cinq pouces d'épaisseur à cet endroit et les tours sont espacées de... Sarutobi n'arrive pas à écouter. Vivement l'heure de la collation ! Est-ce qu'ils connaissent seulement le saké dans ce coin ?... Oui heureusement ! Et il n'est pas mauvais. Un petit goût pierreux. On sent déjà le vent du désert qui passe par-dessus les montagnes du crépuscule. Des choucas hurlent depuis les sommets. Le lendemain, c'est la traversée du district et l'arrivée au château du dernier rayon. Il pleut plus fort que la veille. Une pluie grise comme des vieux cheveux filasses. Une tuile se détache du toit. Le soleil descend en silence derrière les montagnes. Le gouverneur Miya Genichi prend son poste dans le district le plus à l'ouest de l'Harmonie. * Dastan est originaire des Sables Brûlants. Quel passé a été le sien là-bas ? On peut deviner une vie aventureuse, qui l'a obligé à quitter les provinces de Oudhin, Mehdin et Mahudin, et à venir travailler dans Rokugan. Il vit toujours sur les frontières, au service de l'Ambre, un groupe de contrebandiers qui passent des marchandises à travers les montagnes du crépuscule. La base d'opération de l'Ambre est dans une boutique discrète, dans la ville qui entoure le château des Emissaires de l'Est. Les trafics vont bon train dans cette grande ville au nord du district de Hokufuu. Les Yasuki la dirigent et ont depuis longtemps établi un commerce régulier avec les clans voisins du Sanglier et du Faucon, ainsi qu'avec les gaijins. Ils sont en concurrence, mais aussi en partenariat avec les caravanes marchandes de la Licorne qui viennent parfois d'aussi loin que Medinat Al-Salaam et qui se rendent jusqu'à Bakufu. Dastan évolue dans ce monde interlope depuis des années, où la frontière symbolique entre samuraïs et marchands est déjà ténue le jour et s'abolit parfois la nuit, quand les uns et les autres se retrouvent dans des maisons pour discuter et passer des commandes auprès de rônins qui n'ont peur de rien pour transporter tout ce que veulent leurs clients. Le chef de l'Ambre est un ventripotent personnage, Amir Ben Moussa, qui entretient les meilleures relations avec les Yasuki. Il sait trafiquer jusque comme il faut pour que ce soit profitable, pas assez pour que ce soit visible et que les Yasuki soient obligés de sévir. En revanche, un groupe concurrent, la maison de l'Onyx, se montre nettement plus violente dans ses opérations et n'hésite pas à se livrer au trafic d'esclaves. Il y a forcément une clientèle pour ces gens-là, mais il vaut mieux ne pas poser de questions, si on ne veut pas finir les pieds au fond de l'ancien marécage de l'Outremonde. Ce petit monde ronronnait tranquillement sous l'ancien gouverneur, mais depuis que celui-ci a été envoyé ailleurs, tout le monde craint pour son confort. Car le nouveau gouverneur, Miya Genichi, a la réputation d'être tout sauf souple sur les lois. Il est connu déjà pour sa rigueur sous son apparente bonhomie. Il a la réputation d'être juste et clairvoyant, mais aussi d'être intransigeant quand on ne s'y attend pas. Bref, un idéaliste, donc l'ennemi juré du contrebandier ! Or, cela ne peut pas rater, Genichi-sama va forcément faire une tournée d'inspection de tout le district. Le gros Ben Moussa en transpire déjà, alors que Dastan, allongé négligemment en train de picorer des dattes, le rassure : tout va très bien se passer. - Tu dis ça, tu dis ça... La chaleur de cette fin de journée d'été est encore lourde. - En attendant, on a un chargement ce soir. - Aucun problème, laisse tomber Dastan, je m'en occupe comme toujours. Tu peux me faire confiance. Par contre, je vais encore avoir des frais pour les porteurs... Ben Moussa n'a jamais réussi à savoir si Dastan est un fainéant, un beau parleur, un entourloupeur, comme tous ceux qui viennent de la région d'Oudhin, ou si c'est quelqu'un d'intelligent et dévoué. Sans doute un peu les deux, il faut bien tout cela dans ce métier ! - Il va falloir faire vite, dit Ben Moussa en s'essuyant le front. - Oui, oui... Le gouverneur ne va pas arriver d'une minute à l'autre, tout va bien. - Il ne va pas forcément se faire annoncer ! Le soir, Dastan part dans les montagnes silencieuses avec deux porteurs et à un col en haut d'un chemin escarpé, ils retrouvent les passeurs qui sortent du désert, de gros ballots sur le dos. On se connaît, pas trop de nécessité de négocier. - Allez, on repart, dit Dastan, pendant que ses hommes se chargent à leur tour. Tout juste s'il ne siffloterait pas au retour ! Mais non, pour la forme les Yasuki font des patrouilles, et si on les croisait, cela ferait encore des frais ! - Tu vois, tout s'est bien passé ! dit-il tranquillement à son patron, tandis qu'il se rallonge et se sert à boire. Ben Moussa ne montre pas trop sa satisfaction. Ce Dastan est vraiment un sans-gêne. Il boit et mange dès que l'envie lui prend, il prend son travail presque à la rigolade et il va finir la nuit avec des filles, sans s'occuper du lendemain ! - Allez, bonne nuit ! Ne t'amuse pas trop, j'ai besoin de toi en forme, grogne Ben Moussa. - Mais ne t'en fais pas ! Est-ce que je t'ai déjà lâché ?... N'empêche que Dastan lui a encore rapporté un beau paquet d'argent avec cette livraison. On ne peut pas lui enlever cela. Mais le patron de l'Ambre est content de se retrouver tout seul chez lui ! * Le lendemain, une fille endormie sur chaque épaule, Dastan se réveille alors qu'on frappe violemment à sa porte. - Oui, oui, j'arrive. Il s'habille un minimum en vitesse. Il entrouvre juste la porte fermée avec une chaîne. Ce sont deux soudards de Ben Moussa : - Le patron veut te voir. Il claque la porte et grogne qu'il vient dès qu'il peut. Il met les filles dehors et se présente deux heures plus tard au patron de l'Ambre, alors que l'agitation matinale de la ville monte doucement. On sent de la nervosité dans l'air car la nouvelle est arrivée pendant la nuit et a circulé dans tous les établissements : le nouveau gouverneur ne vient pas mais ce sont ses assistants qui viennent se présenter ! - C'est la catastrophe ! Ben Moussa tourne en rond, d'autant plus nerveux que Dastan ne l'est pas, déjà allongé à picorer des friandises. - Et toi, ça ne te fait rien ? Ils vont pendre quelques-uns de nous pour l'exemple ! - Il suffit que ce ne soit pas toi ou moi... - Comme si on allait choisir ! Dastan part en ville faire la tournée des points d'information. Au marché de la Carpe Dorée, il passe dire bonjour aux uns et aux autres, pour sentir l'ambiance. Les gens ont le regard fuyant. Chacun espère que c'est le voisin qui prendra. Dastan a déjà soif et va prendre un verre à la Maison des Mille Vérités, le lieu de rencontre des trafiquants de la région. - Salut les gars ! Il est le seul à avoir l'air dégagé. A croire qu'il n'est au courant de rien ! Il paye des verres à quelques habitués et écoute ce qu'ils ont à dire. Un yoriki, qui entame déjà son soshu, lui raconte ce qui se dit : - Il y en a un qui est un Guêpe. Il a fait pas mal parler de lui à Bakufu. Il connaît bien les milieux comme le nôtre. Tu connais les gens du ruban bleu ?... Ils travaillent sur le port là-bas. Ils le connaissent bien. "Et le deuxième assistant, c'est une femme. Une Licorne. Une idéaliste paraît-il. Et la dernière, c'est encore pire : une Araignée ! Dastan tique : trois incorruptibles ! Il va falloir s'y prendre différemment pour se mettre à l'abri de ces gêneurs. Employer les grands moyens... - Ils arrivent ce soir. Ils vont rencontrer le gouverneur. D'après leur réputation, ils vont se mettre tout de suite au travail et faire la tournée de la ville. Dastan est au pied du mur. Il va vraiment falloir faire vite ! * Le lendemain matin, Dastan est à pied d'oeuvre. Il apprend que les assistants sont bien arrivés la veille au soir. La Licorne, Utaku Feiyan fait une première tournée en ville, l'air de rien. Elle s'est rendue à la maison des Mille Vérités. Dastan y arrive, frais comme un gardon, et aborde sans ambages la magistrate. Il se montre le plus flagorneur possible, ce qui ne manque pas d'agacer aussitôt Feiyan. Dastan fait servir des boissons et se comporte dans l'auberge comme s'il était le patron. Il déploie tout son baratin pour s'attirer les bonnes grâces de la Licorne, qui ne se laisse pas tellement prendre à ses salamalecs. Mais il a déjà établi un premier contact : il veut passer pour le guide et l'informateur indispensable dans la ville des Emissaires de l'Est ! Seulement, Dastan a plus d'un tour dans sa poche percée. Et il va fomenter pour le soir une ruse des plus sombres... Il connaît quelques mauvais garçons qui travaillent pour les trafiquants de l'Onyx. Sans rien dire au patron de l'Ambre, Dastan s'arrange pour les rencontrer, déguisé, et leur fait croire que le patron de l'Onyx a mis à prix la tête des magistrats. Dans cette ruelle à l'écart, il leur glisse la pièce. Il sait qu'il en faut peu pour décider certains gredins de l'Onyx à se lancer dans les pires entreprises. Le soir, ce sont les trois magistrats qui sont de sortie pour découvrir la vie nocturne de la Cité. Dastan est en embuscade. Il voit s'approcher cinq soudards de l'Onyx : ils sont venus en nombre ! Dastan n'en avait payé que deux. Il se demande s'il n'y est pas allé trop fort... L'un d'eux allume la mèche d'une grenade et la lance sans hésiter sur la Licorne, l'Araignée et la Guêpe. Les trois samuraïs ont le temps de se jeter sur le côté, mais ils sont étourdis par le souffle de l'explosion ! En pleine rue ! Dastan reste caché, tandis qu'un combat s'engage, bref et violent : les hommes de l'Onyx sont vite mis à terre, deux sont tués, un blessé se vide de son sang, un troisième est assommé. Et le dernier s'enfuit. C'est la Licorne qui se lance à sa poursuite. Dastan surgit alors à ce moment et offre son aide -désintéressée bien sûr ! - Vous ici, Dastan ? Tiens donc... - J'avais promis de vous aider de mon mieux, répond-il, obséquieux. Mais ils ne pourront pas retrouver le dernier membre de l'Onyx, qui connaît trop bien les recoins de la ville. Quand ils reviennent, les deux autres magistrats ont achevé leur prisonnier. Feiyan tique devant cette justice expéditive. - Ne mettez pas votre compassion là où cela ne vaut pas la peine, lui dit la Daigotsu. - Ce n'est pas une question de compassion, proteste Feiyan, c'est une question de respecter la loi. Sarutobi hausse les épaules. Pour se remettre, ils vont boire un verre dans une maison réputée, tandis que la cité entre en ébullition ! On a tenté de faire exploser les trois assistants du nouveau gouverneur ! Dastan veille à ce que le nom de l'Onyx soit prononcé partout, et la nouvelle se répand comme une traînée de poudre ! Cela réussit bien et le lendemain, c'est le patron de l'Onyx, Al-Meznir, qui est amené de force devant le gouverneur Yasuki. Le pauvre Al-Meznir ! La vieille fripouille pleure toutes les larmes de son corps en jurant qu'il n'y est pour rien. Dastan, du dehors prend des renseignements auprès des serviteurs, et apprend que les magistrats croient à l'innocence d'Al-Meznir. Imaginer que des trafiquants connus de tous s'en prendraient aux hommes du gouverneur, ce serait du suicide ! L'enquête va piétiner par la suite : les Yasuki arrêteront du monde et en pendront plusieurs, pour la forme. Mais on ne retrouvera jamais le commanditaire de l'attentat. Le soir, Dastan retrouve Ben Moussa et le tient au courant. - Ah tiens, dit le patron de l'Ambre, en transpirant abondamment, je me demande bien qui a pu monter un coup pareil ! Tu n'as pas une idée, toi ?... - Moi ? dit Dastan, en recrachant un noyau de datte, pas la moindre, chef... Le lendemain, Dastan commence sa journée avec un bon gros spiff, pour se remettre des fatigues de la veille. Au palais, il a appris que les magistrats continuent leur tournée en direction des Faucons. Dastan les attend dans la grand'rue et se présente à eux comme ils en sortent. Il y va encore de toute sa politesse grasse et sucrée comme une pâtisserie des Sables Brûlants. - Cessez ce petit jeu, lui réplique Feiyan, du haut de son immense monture. Sarutobi rit de toutes ses dents devant le jeu de Dastan. Il trouve tordante sa façon de draguer ouvertement Feiyan. Ce qui le décide à accepter l'aide de Dastan comme guide ! Feiyan fait la tête, mais soit... En fin d'après-midi, ils traversent l'impressionnante vallée aux esprits. Au sortir de la ville bruissante, c'est tout d'un coup un silence de tombeau, dans cette forêt qui semble vibrer dans le monde des esprits, de chaque branche ou chaque buisson. Dastan connaît la région pour y avoir fait plusieurs passages de marchandise, dans un sens ou dans l'autre. Il passe le premier et a conseillé aux magistrats de ne surtout pas quitter la route. Au crépuscule, on entend une vieille femme qui pleure. Ses sanglots ont quelque chose de déchirant : les magistrats tendent l'oreille : elle pleure que son enfant est mort, qu'elle est seule et qu'elle a peur. La bonté de Feiyan lui commande d'aller lui porter secours. Mais Dastan, sinistre, l'arrête : - Si vous quittez le chemin, vous ne reviendrez jamais, magistrate. Il lui explique alors l'horrible vérité : cette vieille est un esprit-vampire ! Elle cherche à les attirer par cette ruse ignoble. Feiyan est horrifiée : contrefaire à ce point la détresse et oser jouer sur la pitié des gens ! - Ces gakis n'ont pas d'âme, répond Dastan, c'est pour cela qu'ils ont besoin de se nourrir de la nôtre. La marche reprend, et plus personne n'ose se moquer de Dastan. Le soir, ils trouvent une patrouille Toritaka à la sortie de la vallée. Ceux-ci brandissent une lanterne pour guider les voyageurs. Ils s'excusent de ne pas être allés au-devant d'eux. - Tiens, mais qui voilà ? Dastan bombe le torse : - C'est moi qui ai guidé ces honorables seigneurs jusqu'à vous ! - C'est ça... Tu as bien de la chance qu'ils aient fait confiance à un traîne-savate comme toi ! Allez, suis-nous, tu iras te faire nourrir aux cuisines. C'est déjà bien pour toi ! - Vous ne connaissez pas ma valeur, répond hautement Dastan. - C'est ça, c'est ça, allez file ! Fais-toi discret pour une fois !
28-01-2021, 09:51 PM
Le pauvre Sarutobi a bien du courage pour supporter la terrible épreuve du voyage à Hokufuu
![]() Merci pour les résumés, toujours un plaisir de relire nos exploits ![]()
29-01-2021, 02:29 AM
Notre géo ici est officiellement relancé!!!
Et c’est clair que ça change tout, le raysumay c’est 1/3 du plaisir ![]()
11-02-2021, 06:40 PM
(This post was last modified: 14-02-2021, 02:01 PM by Darth Nico.)
![]() Les Toritaka ne sont pas d'un abord avenant, mais leur hospitalité est irréprochable. Ils savent ce que doivent endurer ceux qui traversent la Vallée aux Esprits pour arriver à eux. Sarutobi se renseigne dès son arrivée sur ce que les Faucons savent du temple des Cloches de la Mort. Ceux-ci connaissent bien l'endroit, puisque l'esprit d'un énorme gaki, le shimushigaki, y est enfermé. - Mais il ne s'est pas échappé, honorable magistrat ? - Non, rassurez-vous, dit Sarutobi. Je chercher seulement à mieux connaître ceux qui ont été mêlés de près ou de loin à ce temple, il y a deux siècle très exactement, quand ce shimushigaki s'est échappé. Les Faucons promettent de fouiller leurs archives et de ressortir tout ce qu'ils pourront trouver. En attendant, les magistrats sont invités à découvrir les élevages de rapaces qui font la fierté du clan. Sur un plateau en plein vent, les faucons s'envolent en lançant des cris perçants. On aperçoit vers l'ouest la plaine immense et sauvage des terres Ujik-Hai, immobile sous le grand ciel bleu. On distingue des nuages de poussière formés par une troupe ou une caravane Licorne. Vers le nord, on distingue les tentes d'un campement Baraunghar, une partie de l'armée Moto. Vers le sud, la vallée du crépuscule, où fument les usines des Sangliers -les vieux rivaux des Faucons. Dans l'après-midi, un archiviste se présente aux magistrats : il a pu exhumer un document précieux concernant le shimushigaki : un témoignage d'un chasseur d'esprit Toritaka sur l'inquisiteur Nakiro ! Sarutobi se jette sur le document : « Rapport de Toritaka Endo, maître chasseur d'esprits sur l'inquisiteur Asako Nakiro A l'intention du magistrat Shinjo Kohei, Kyuden Toketsu 10ème Kami 1130 L'Inquisiteur Asako Nakiro est arrivé à Shiro Toritaka au milieu de l'année 1115. Il nous a expliqué être à la recherche d'information sur le shimushigaki, un esprit vengeur souillé par l'Outremonde qui s'était attaqué à sa province natale. Nous avons pris tout de suite cette menace très au sérieux. Les gakis sont des esprits assoiffés de sang qui reviennent parmi les vivants, mais il est très rare qu'ils soient touchés par la souillure infâme. Voilà donc un démon doublement dangereux ! Nous avons rapidement soupçonné l'inquisiteur d'être lui-même touché par la souillure. Nous en avons eu confirmation lors d'une enquête au château des émissaires de l'Est : depuis des années déjà, la famille Yasuki fournissait discrètement un remède à l'inquisiteur contre la souillure. Mais les médecines peuvent ralentir le mal, pas l'éliminer. Nous avons appris que ces remèdes, très chers, étaient payés par un riche samouraï de la Grue, Daidoji Dajan. Un samouraï puissant, contre lequel notre clan ne peut bien sûr rien dire. Néanmoins, nous avons fait savoir à Dajan-sama et son protégé l'inquisiteur que leur présence n'était plus souhaitable chez nous. Nous avions discrètement prévenu nos amis de la famille Kuni pour nous soutenir en cas de besoin. Voici l'événement qui nous a décidé à ne plus les accueillir chez nous : un soir, Asako Nakiro, qui avait beaucoup bu, parlait seul dans sa chambre et affirmait servir la volonté d'Isawa en versant son sang. Alors qu'il avait fini par s'endormir, nous avons envoyé un serviteur inspecter sa chambre. A côté des bouteilles d'alcool, nous avons trouvé un mon qui évoquait celui de la famillle Isawa : non pas une main tenant une plume, mais une main aux doigts ensanglantés. Nous avions tracé plusieurs glyphes de protection autour de la chambre de l'inquisiteur et nous aurions vu venir n'importe quelle attaque démoniaque. Daidoji Dajan et Asako Nakiro repartirent de chez nous à la fin de l'année 1115, juste avant l'arrivée des inquisiteurs Kuni qui voulaient les interroger. Il vous faut savoir qu'ils n'ont pas hésité à traverser seuls la vallée aux esprits, pour partir plus vite ! Durant les six mois passés chez nous, l'état de santé de l'inquisiteur s'était détériorié considérablement. Nos amis Kunis sont prévenus que l'inquisiteur Nakiro a un intérêt pour le shimushigaki qui a de quoi éveiller tous les soupçons. Nous avons appris par la suite que Daidoji Dajan était un samouraï qui se livrait à toutes sortes de commerces sur la côte du grand océan. Nous restons votre humble serviteur etc. » Sarutobi a la conviction que Dajan et Nakiro sont les deux esprits qu'il a vus aux cloches de la Mort. Il faut savoir absolument pourquoi les inquiétants Dragons sont venus se renseigner là-bas, surtout qu'il y a dans le lot ce moine tatoué avec son troisième oeil de lune ! La lettre mentionne des événements survenus en 1115, soit huit ans avant le second jour des tonnerres. Or, Sarutobi a la conviction que quelque chose de grave s'est joué autour de la mort de Hiruya, à peu près au moment de la disparition de la famille Hanteï. Quelque chose de si grave que, deux siècles après, cela pourrait encore avoir des conséquences. Utaku Feiyan note que c'est bien Shinjo Kohei, l'ancêtre de Moto Kohei dont elle a la lettre, qui a séjourné ici en 1130 : il venait donc se renseigner directement sur Nakiro. Soit deux ans environ avant d'entrer au service de Bayushi Daigotsu et de venger feu son ami Kakita Hiruya. Mais le rapport du chasseur Faucon n'était pas adressée où nos héros résident : elle était envoyée à Kyuden Toketsu, le deuxième plus grand château Toritaka, tout au nord du clan. Cela vaut donc la peine de s'y rendre. Il faut pour cela traverser une région de lande sauvage, entièrement dégagée : au moins n'y risque-t-on pas d'être surpris par des esprits enragés ! Le guide Faucon leur explique que ce château fut bâti par un riche marchand Yasuki qui voulait couler une retraite paisible. C'est aussi là que surgit, il y a plus de sept ans, le plus grand oni qu'on ait vu de l'histoir de Rokugan : le Kusatte Iru, un monstre littéralement grand comme une montagne, qui portait une ville entière sur son dos. Il fallut à l'époque le sacrifice d'un grand nombre d'inquisiteurs Kunis pour en venir à bout. Il y a de quoi trembler, rétrospectivement, que Dajan et Nakiro aient réussi à réveiller "seulement" le shimushigaki, et pas cette monstruosité capable de détruire la moitié de l'Empire ! On trouve toujours pire... Et le pire est à venir dans les découvertes que vont faire nos héros à partir de maintenant. Car ces découvertes ne leur en apprendront que trop sur Dajan et Nakiro, donc sur des secrets inavouables anciens, mais surtout finiront par ébranler leur confiance en eux-mêmes, en l'harmonie et en Miya Genichi. Car comme le dit un proverbe ancien : la connaissance est un poison. Ou encore : les dieux punissent les hommes en satisfaisant leur curiosité... Car à Kyuden Toketsu se trouvent une lettre écrite par Dajan lui-même, à l'intention de celui dont il allait faire son complice, Nakiro. Elle est écrite en langue gaijin mais grâce à l'aide de Dastan, qui a réussi à se mettre du voyage, nos héros peuvent la déchiffrer. Ce qu'ils y découvrent n'est que la première d'une série de révélations qui leur aurait fait souhaité, après coup, d'aller plutôt dans l'Outremonde, où la mort rôde à tous les coins mais où nul samouraï ne peut conspirer. De Daidoji Dajan A Asako Nakiro, Kyuden Toketsu Togashi 1123 Mon ami, nos destins sont étrangement similaires. Votre famille vous a refusé la connaissance des Énigmes, tout comme les Kolat m'ont refusé l'entrée au Temple Secret. Mais justement, nous ne croyons pas au destin ! Nous croyons que les dieux ne doivent plus faire de nous leurs marionnettes ! Et les hommes encore moins ! Nous allons le prouver en maîtrisant le pouvoir interdit du Shimushigaki. Je vais me servir de ce que les Kolat m'ont appris pour les détruire. J'ai pris sous mon chantage plusieurs notables de Ryoko Owari Toshi. Ils vont témoigner contre le clan du Lièvre et nous obtiendrons sa destruction. Alors, nous utiliserons le nom de l'héritier Usagi pour le rituel du Nom du Héros. Mais je dois être prudent : je sais qu'un maître Kolat se trouve en ville. Bientôt, rien ne pourra nous arrêter. Nos héros n'en croient pas leurs yeux. Sarutobi est abasourdi de découvrir de pareils conspirateurs. Quant à Feiyan, elle voit ce nom honni entre tous, le Kolat, dont elle sait bien qu'il a causé des deshonneurs gravissimes dans son clan, il y a deux siècles de cela, avant l'accession au trône d'Emeraude de Chagataï Khan. Or, il y a une seconde lettre à Kyuden Toketsu qui peut intéresser nos héros : elle est écrite par Hida Shigeru, l'ancien assistant d'Emeraude, à destination de Shinjo Kohei. Elle doit dater de huit mois environ avant la vengeance de Kohei : De : Hida Shigeru, retraite de la Persévérance A : Shinjo Kohei, Kyuden Toketsu Très honorable ami, Notre informateur très bavard me dit qu'un maître Kolat a vécu dans la région après la fin du Gozoku, et a rédigé un écrit important : Le codex de l'Aurore. Si l'on peut mettre la main sur cet écrit, nous en apprendrons sans doute plus sur les conspirateurs. Mais selon le bavard, ce maître s'est enfui chez les gaijins. Je vais vous rejoindre et nous pourrons en parler autour d'un bon verre de mugijochu ! Votre dévoué, Hida Shigeru, moine désormais ! Hantei 1131, 3ème mois - Tout cela fait beaucoup, murmure Sarutobi, qui sent son échine frissonner de ce frisson qu'on a quand on craint d'être assailli par un assassin la nuit. Nous devons mettre la main sur ce Codex de l'Aurore ! Et en apprendre plus sur ce Kolat ! * Le retour à travers la vallée aux esprits se fait en journée, accompagné de guides du clan Toritaka, qui remercient encore les magistrats d'être venus leur rendre visite. Il y a bien longtemps que l'Harmonie n'avait pas envoyé de représentants officiels. On devine que les gouverneurs précédents n'étaient pas des hommes de la carrure de Genichi... Au sortir de la forêt, ils trouvent un poste avancé tenu par les Faucons et les Renards, qui surveille le nord de la forêt Shinomen. Les nouvelles sont inquiétantes : depuis l'hiver dernier, la brume, qui envahit chaque année la forêt, n'a pas disparu. Les shugenjas soupçonnent quelque magie mais personne jusqu'à présent n'a pu définir son origine. Les Kuni sont formels : il ne s'agit pas de la magie interdite. Aucune trace de souillure dans cette brume. Les Faucons s'y sont aventurés et y ont aperçu des esprits ancestraux qui rôdent, sans se laisser approcher. Marchant dans la brume à pas feutrés, ils passent entre les gouttelettes en suspension et semblent s'y fondre, et réapparaître ailleurs, comme de la buée qui se condense sur une vitre. La prochaine étape est le camp des Sangliers en bordure de la forêt Shinomen, au bord de l'ancien marécage de l'Outremonde, précisément. C'est là, il y a dix ans, après la première guerre des poings de Justice, que l'armée de la Tortue a fait sa première démonstration de force : les Bunraku incendiaires sont descendus dans ce cloaque souillé et ont proprement détruit les monstruosités qui s'y nichaient. Assistés par les shugenjas de jade de la famille Kuni, par les purificateurs Asahina et par les chasseurs d'onis Usagi, ils ont prouvé que Rokugan pouvait faire reculer véritablement l'Outremonde. Forte de ce premier exploit, l'armée de la Tortue a ensuite entrepris de reconquérir les terres au-delà de la Muraille du sud. Aidée des technologies sorties des forges du Sanglier, elle a brûlé les terres souillées et piétiné les Onis qui se dressaient sur son chemin. Lentement mais sûrement, la Tortue avance, renforçant ses défenses et le déluge de feu qu'elle fait tomber sur ses ennemis. Le camp du Sanglier semble modeste mais il est une pièce essentielle dans l'économie du clan : c'est en effet une exploitation forestière et une scierie. Le bois du marécage assaini sert à alimenter les forges. Mais les Sangliers ont commencé à exploiter la forêt Shinomen, ce qui a soulevé l'effroi du clan du Faucon et des Renards venus s'installer ici. Ils pensent qu'il est dangereux de s'en prendre à la forêt millénaire où dorment encore les Nagas. Les Sangliers eux, n'y voient que des superstitions et de la jalousie de la part de clans restés à l'âge de pierre. Tandis que l'Empire de l'avenir sort, selon eux, des forges du crépuscule ! - Seigneurs, il n'y a plus rien à craindre de ses marécages, leur affirme le fort commandant du lieu, le travail a été bien fait. Et pour le cas où il y aurait le moindre danger, nos amis Kuni sont toujours proches. Les magistrats notent ce reste de prudence. Ils demandent aux Sangliers ce qu'ils pensent de la brume qui envahit Shinomen. Cela leur fait plutôt hausser les épaules : ils ne doutent pas que les Kuni, ainsi que les Faucons bien sûr, finiront par découvrir la nature de cette magie et ensuite à la dissiper. Leur vœu serait que le chemin de fer arrive bientôt dans cette région de l'ouest, afin d'acheminer rapidement les plaques d'acier vers les terres Hida. Après une halte au château des Renards, nos héros se rendent le lendemain à l'arche de la Persévérance, où ils vont découvrir une nouvelle lettre d'il y a deux cent ans... * Feiyan avait noté que la lettre de Kohei, que lui avait remis Moto Kohei, était adressée à Hida Shigeru, à la retraite de la Persévérance. C'est donc là que l'ancien assistant Crabe de Kakita Hiruya s'était retiré après s'être tondu la tête. Or, cela ne peut que désigner une retraite près de cette arche de la Persévérance légendaire dans le district. On raconte que vers le troisième siècle, des Scorpions enlevèrent le fils d'une samuraï et l'emmenèrent dans la forêt Shinomen : là, ils l'attachèrent à un arbre, s'apprêtant à le torturer, quand des Nagas intervinrent et chassèrent les Scorpions. En remerciement, la mère passa des années à rouler une énorme pierre, sans aucun chariot ni instrument, depuis les terres Crabes jusqu'à l'entrée de la forêt. Apprenant cela, l'Empereur Hanteï décida d'honorer cette samuraï en l'élevant au rang de Fortune de la Persévérance. L'énorme pierre fut alors hissée en haut d'une arche, qui sert depuis d'entrée officielle dans Shinomen. Daigotsu Yori s'empresse de dire que ces Scorpions étaient certainement des Bayushi donc... rien à voir avec les Daigotsu, bien sûr ! Feiyan éclate de rire mais elle ne dit rien de plus pour ne pas froisser sa collègue. L'arche de la Persévérance est un important lieu de pélerinage : des religieux mais aussi des samuraï y viennent de tout l'Empire. On y trouve donc des moines de plusieurs églises et sectes, ce qui fait que l'endroit est fortement surveillé par les Crabes de l'Harmonie, car il est inévitable que parmi tous ces pélerins se cachent des espions de l'Emeraude. Près de l'arche se trouve une communauté monastique qui accueille des guerriers ayant rangé leur daishô pour préparer leur prochaine vie. C'est donc là que l'ami de Shinjo Kohei a fini paisiblement ses jours... Ou peut-être pas si paisiblement, puisqu'il a encore aidé le magistrat Licorne dans sa quête des assassins de Kakita Hiruya. En effet, nos héros se rendent auprès du chef de la communauté, qui ira lui aussi chercher dans les vieux papiers, et revient de la bibliothèque avec cette lettre : De : Shinjo Kohei, Shiro Toritaka A : Hida Shigeru, retraite de la Fortune de la Persévérance Mon cher ami, Je séjourne depuis un mois maintenant chez nos amis Toritaka, à la frontière du désert. Je sais que Nakiro a séjourné ici pour étudier le Shimushigaki. Il a contracté la souillure de l'Outremonde, avant de s'allier avec Dajan. J'ai appris qui était notre informateur commun et je l'ai rencontré non loin d'ici. Quelqu'un de très bavard en effet. Il est décidé à mettre à bas la conspiration, à laquelle il ne croit plus depuis des années. Et pour cela, il nous avait d'abord renseigné sur Dajan, qui était un traître au Kolat ! Quel sac de nœuds ! Voici une autre nouvelle importante : Notre informateur bavard m'a dit de rencontrer le clan du Loup. Des rônins plutôt honorables. Je vous reparlerai de leur inspirateur, Matsu Mitsurugi. Un exemple pour nous tous, qui avait déjà combattu la conspiration à l'époque du Gozoku. Un homme aussi valeureux que Kakita Hiruya ! Cet été, je vais remonter à la capitale et rendre compte à l'Empereur de ce que nous avons appris. Sur le chemin du retour, je ferai étape chez les Lièvres, pour savoir ce que Ozaki a appris. Quelle ironie ! A force de combatttre ces conspirateurs, nous nous comportons comme eux ! Dites à Bayushi Bokkaï de m'écrire là-bas. Qu'il sache que parmi toutes les Fortunes, celle que je vénère le plus actuellement est celle de la vengeance. Bien à vous, Shinjo Kohei Soleil 1131, 1ère mois Saruboti partage l'avis de Shinjo Kohei : ces conspirations dans tous les sens finissent par le perdre ! Dajan a fait partie de ce Kolat, mais il a entrepris de le trahir en réveillant le shimushigaki avec Nakiro. Et par-dessus cela, un mystérieux informateur bavard, appartenant manifestement au Kolat, avait fini par renseigner Kakita Hiruya et ses assistants sur les projets de Dajan ! Il devient patent que c'est ce Kolat qui a tué Hiruya... Et au-milieu de la lettre, le nom de Matsu Mitsurugi qui apparaît ! Or, le magistrat Suzume Kiohage a parlé de son célèbre ancêtre qui portait ce nom, et qui vivait bien à l'époque du Gozoku... Il faudra voir si c'était bien le même, mais cela ne fait guère de doute. Le Kolat existait donc déjà il y a sept cent ans, à une époque troublée pour l'autorité impériale. Il a encore fait parler de lui au moment du jour des tonnerres, quand les Hanteï ont été tués à la suite de l'Empereur... Qu'est-ce qui est en train de se jouer aujourd'hui ? Dans la lettre retrouvée à l'ambassade Licorne, Shinjo Kohei assurait que les conspirateurs allaient être châtiés sous peu, par la troupe sous le commandement de Bayushi Daigotsu. Ont-ils vraiment réussi à les abattre tous ou bien ce Kolat pourrait-il encore ressurgir ? Tout cela fait beaucoup, mais le père supérieur de la retraite apporte une seconde lettre : celle-ci est signée de Bayushi Bokkaï, autre assistant de Hiruya, qui a pris la place de ce dernier à la Cité des Mensonges. Et celle-ci est encore pire que les précédentes, si cela était possible : « De : Bayushi Bokkai, magistrat d’Émeraude, Ryoko Owari Toshi A : Shinjo Kohei, Retraite de la Persévérance Cher ami, J'ai suivi les instructions de Hida Shigeru et vous écris donc dans ce petit village. Vous me disiez que désormais, vous vénérez une fortune plus que toutes les autres, celle de la Vengeance. Je n'aurais pas l'outrecuidance de dire que Kakita Hiruya était mon ami, mais il était mon supérieur, et je veux aussi venger sa mort. Depuis mon retour à la capitale des Scorpions, j'ai repris notre enquête. A présent que la conspiration est découverte, les rats quittent le navire ! Les langues se délient. Ainsi, j'ai retrouvé une informatrice qui avait été décisive à l'époque : une certaine Chinoko, patronne d'un syndicat criminel. Elle avait contacté Isawa Ayame et nous avait mis sur la piste des cloches de la mort. Une femme trop bien renseignée. Je sais maintenant qu'elle est une des dix maîtres ! Elle était chargée d'espionner les samouraïs. Nous pouvons donc rayer de la liste : maître Lotus. Malgré son passage par les mains des interrogateurs Yogo, Chinoko n'a pas dit l'emplacement du temple secret. Mais elle va nous permettre une prochaine arrestation très bientôt : Doji Akae, alias Maître Koku ! Si nous enlevons encore de la liste le grand maître, Tigre, il nous en reste sept. Un début encourageant. Votre dévoué, Bayushi Bokkai Hantei 1131, 3ème mois PS : Celui m'a renseigné sur Chinoko est le même personnage bavard que vous avez rencontré chez les Faucons. » Dix maîtres, chacun ayant un nom. Nos héros tiquent en songeant aux questions subversives posées par les esprits de Dajan et Nakiro, dont l'une était : "Pourquoi l'Harmonie a-t-elle dix conseillers ?" Nos héros ne savent plus quoi penser... Il semble que le Kolat ait été châtié, puisque l'Empereur a remercié Baysuhi Daigotsu en lui permettant de fonder une famille. Mais il y a encore des esprits tourmentés qui murmurent le nom de ces traîtres à l'Ordre Céleste. Il y a les visions sombres autour du tombeau de Hiruya. Il y a les cloches de la mort, il y a le conflit latent entre l'Harmonie et l'Emeraude. Il reste encore quelques étapes avant d'avoir fini le tour du district, et il semble que le passé n'ait pas fini de recracher ses secrets, comme la mer qui rejette des restes d'épave sur la plage. * Le lendemain, les épaules plus lourdes qu'avant, les assistants de Genichi font étape au château du Singe. Les magistrats qui maintiennent l'ordre dans l'ouest de l'Harmonie sont visiblement contents que Genichi soit le nouveau gouverneur. Le tour de Hokufuu se termine en fin de journée par une étape moins officielle, au pied des montagnes du crépuscule : c'est là, à la frontière du district et de celui de Yoake, qu'une bande de rônins a établi une austère forteresse, adossée aux sommets. Sous la bannière du Loup, ils se sont installés aux confins des terres des clans, dans une sorte de nid d'aigle qui voit venir de loin tout assaillant. Or, dans la lettre que Kohei écrivait à Shigeru, le magistrat Licorne mentionnait le fait que ces rônins se réclamaient de l'honorable et valeureux Matsu Mitsurugi. Feiyan se dit que cela augure bien de leur sens de l'honneur. Les magistrats sont accueillis par des rônins un peu circonspects par ces visiteurs. Ils les emmènent à travers les rues étroites et très pentues, au château du Loup noir. On sent de la méfiance de la part de ces hommes farouches. Le chef de la "meute" leur explique que leur fondateur légendaire se nommait Ranto, et qu'il avait été au service de Matsu Mitsurugi. Depuis, les préceptes de bravoure et de droiture de l'officier Lion ont traversé les siècles et inspiré les Loups, qui n'accueillent que leurs frères de la vague prêts à se plier à une discipline morale et militaire. Feiyan se sent confiante et cela doit se sentir, car les Loups se détendent. Sarutobi finit de briser la glace en proposant de boire. De sorte que c'est dans cette forteresse austère et solide, dans ces terres perdues, que nos héros passent la nuit. Ils ne sont pas venus ici pour rien, et c'est décidément dans les endroits les plus insolites que l'on trouve des informations. Les Loups ont dit qu'ils sont régulièrement engagés par les Kaiu pour surveiller cette portion de la muraille. Mais malgré cela, des Ujik-Hai parviennent à s'introduire dans Rokugan. Les Loups disent qu'ils seraient plus efficaces s'ils obtenaient une reconnaissance officielle... Après cela, les magistrats ont continué leur enquête sur ce qui s'est passé il y a deux siècles : le chef des Loups a consulté les anciens de la forteresse pour savoir ce qui s'est transmis. Il se trouve que le château n'a pas toujours été occupé au cours du temps. Il a passé des décennies parfois sans être occupé, avant qu'un nouveau chef ne parvienne à réunir une meute et à faire claquer de nouveau la bannière légendaire du Loup. Cependant, il y a deux siècles, la forteresse était occupée et, d'après les témoignages qui ont traversé le temps depuis le second jour des tonnerres, les Loups avaient été approchés par le magistrat Bayushi Daigotsu, qui était à la tête d'une troupe de samouraïs poursuivants des traîtres. Les Loups avaient alors servi de guides : ils avaient mené Daigotsu et ses hommes à la ville Ujik-Hai la plus proche, où, au nom de l'Empereur, les samouraïs avaient abattu les derniers fuyards qui s'en étaient pris à l'Empereur. Feiyan et Sarutobi comprennent que le Kolat a bien pris fin dans cette région, deux siècles plus tôt. Renseigné par Shinjo Kohei, Bayushi Daigotsu est venu ici détruire le temple secret de cette conspiration qui a tant nui à la lignée Hanteï, jusqu'à précipiter sa fin peu après l'accession au pouvoir de Toturi. C'est bien là que Kohei a fini d'accomplir sa vengeance contre les assassins de Hiruya. * Le lendemain, Feiyan remercie les Loups pour leur hospitalité mais elle ne peut s'empêcher de leur dire que, bien sûr, vivant sur les terres de l'Harmonie, ils sont en règle de l'impôt. Le Loup noir toussote. Devant son embarras, Feiyan n'insiste pas, mais elle sait à quoi s'en tenir. Il doit y avoir longtemps qu'on n'a pas vu de percepteur dans la région ! Si Feiyan savait que le dernier à être passé s'appelait Miya Toshiro ! Mais elle l'apprendra plus tard. Le lendemain, les magistrats reviennent au château Miya. Sarutobi déguste une bonne bière, pour oublier tout ce qu'ils ont appris ces derniers jours et qui lui pèse sur l'estomac comme un repas trop arrosé. Dans une taverne bruyante, il tient un conciliabule avec Dastan. Il sort de sa manche une grande pièce de koku et la montre fermement au gaijin, qui en a les yeux qui brillent. Un koku, la fortune ! - Tu vas prendre cette pièce, lui dit Sarutobi et tu vas te rendre à la cité Ujik-Haï. Je veux que tu me retrouves un exemplaire de ce Codex de l'aurore. - Bien sûr, bien sûr seigneur. - Je te donne trois jours. - Trois jours ! Sarutobi le regarde d'un air insistant. Il faut une journée pour se préparer, une journée pour aller là-bas et autant pour revenir. Autant dire que, s'il veut tenir les délais, Dastan n'aura même pas le temps de s'arrêter en ville ! Et Sarutobi de conclure : - Je te conseille de partir sur-le-champ.
11-02-2021, 10:26 PM
Excellentes ces parties et ces résumés, ça se déguste
![]() ![]()
12-02-2021, 09:38 PM
Mmmmmhhh mais oui, c’est bon comme dès shokobons!!!
![]() |
« Next Oldest | Next Newest »
|