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Les Contes de la Canine #4 : Histoire de Laura G. Cervantès
#4
HISTOIRE DE LAURA-GABRIELLE CERVANTES (suite et fin)

3EME PARTIE : UN SOIR A L'OP?RA


MASCARADE

Sous cette tendre et p?le araign?e, la lune, qui trempe dans une piscine de soie bleu, scintillent les flambeaux align?s de l'Op?ra, la bacchanale haussmanienne des grands magasins, l'orchestre baroque du tintamarre de la soir?e, les fourrures, les diamants chatoyants qui r?verb?rent sur les vitres et le pav?, sur la folie bouffe de l'agitation parisienne, dans la nuit qui ?tinc?le.
Arrive une Rolls Royce d'enfer, chromes ardents, moteur feulant ravi, satyre r?joui, avan?ait comme le prince des dauphins au milieu des pr?dateurs grondants. L'Op?ra en ce soir de premi?re est un retable pa?en, le panth?on des danseuses ?toiles v?n?r?es et des saintes actrices. Chor?graphie ! Art lyrique ! sont nos mauvais larrons ! Voil? ce temple qui attire ? lui les processions de spectateurs ; voil? le Tout-Paris, voil? le gratin des grands boulevards ; voil? les marquis, voil? le monde des grands soirs. Les Muses danses, mutines, sur les toits ; la ville s'abreuve ? la fontaine de magie ?lectrique.
Ce soir, les danseuses d?fieront les roses et les ?toiles, pr?s des fils d?or de la rampe. Le faste de la m?tropole s'?panche, majestueux.

diablotin

La Rolls d'Enfer vint se garer pr?s sur la place. On en vit descendre vivement, un personnage inqui?tant et superbe, qui attira sur lui tous les regards des invit?s, venus assister ? cette premi?re de la Fl?te Enchant?e.
- Le voil?, enfin !, disait-on.
- C'est lui, murmurait-on. J?r?me Saint-Luc? le m?c?ne, celui qui a mont? cette pi?ce? Un homme secret, mais tellement esth?te, tellement g?n?reux au fond !
Les ragots commen?aient :
- Sa vie n'est pas exempte de zones d'ombres, mais quelle charisme !
On murmurait sur le parvis de l'op?ra, on murmurait dans les loges, chez les costumi?res, chez les ?lectriciens. La ville ce soir est un banc de murmures qui coule dans les profondeurs du vacarme.

Plusieurs personnes all?rent vers Saint-Luc pour le saluer. Celui les ?vita poliment, pour aller vers un personnage d'allure emprunt?e, vaguement amus? du succ?s de Saint-Luc.
- Marquis de la Villeferri?re, comment allez-vous ? dit ce dernier
- Mais tr?s bien, et vous-m?me, monsieur Saint-Luc ? dit le Marquis, qui fumait n?gligemment avec son fume-cigarette. Il ?tait entour? de plusieurs ravissantes jeunes femmes.
- On ne peut mieux. Je suis ravi de voir que vous ?tes venu en bonne compagnie.
- Oui c'est vrai, l?cha avec un sourire paresseux le Marquis. Laissez-moi vous pr?senter la comtesse de Rothschild, le duc de Montpensier?
- Enchant?, dit Saint-Luc. Nous nous ?tions d?j? rencontr?s ? ce gala de charit?, si je ne me trompe?
- Ma foi, c'est bien possible, dit le duc de Montpensier.
La comtesse de Rothschild salua et partit vers un autre groupe.
Devant plusieurs quidams et journalistes qui prenaient des photos de ce caviar des nuits parisiennes, le Marquis de la Villeferri?re continua les pr?sentations :
- J?r?me Saint-Luc, vous connaissez d?j? Elisabeth d'Orval?
- Tout ? fait, dit Saint-Luc en posant un baisemain sur la jeune femme blonde au regard profond.
Toujours avec son sourire plein de d?tachement, le Marquis pr?senta une jeune femme brune, qui rentrait son menton dans le col roul? de son pull.
- Christina Giovan, je vous pr?sente mon ami J?r?me Saint-Luc.
- Enchant?e, j'ai entendu parler de vous, longuement... dit-elle, avec un l?ger accent italien.
- Voici Armand d'Hubert, un bon ami ? moi, dit le Marquis.
- Comment allez-vous, dit Saint-Luc en serrant la main au s?v?re personnage.
- J'appr?cie beaucoup la musique de Mozart, dit d'Hubert, raide comme un piquet. Je suis certain que nous passerons une excellente soir?e.
Les flashs des journalistes people cr?pitaient comme la mitrailleuse d'Al Capone. Le Marquis posait complaisamment pour les photos, toisant de haut les journalistes, qui adoraient cette attitude de snob qui daigne s'abaisser ? ?tre pris en photo. Elisabeth d'Orval et Christina Giovan ne firent pas d'effort pour avoir la semaine d'apr?s leur portrait sur papier glac? : elles donn?rent le bras ? J?r?me Saint-Luc et entr?rent dans l'Op?ra.
Voyant que la meute ?blouissante des journalistes s'acharnait, Saint-Luc pria aimablement les deux femmes de rentrer, d'aller s'asseoir aux places d'honneur qui leur ?taient r?serv?es. Puis il redescendit quelques marches et fit face au h?rissement de micros, de cam?ras et d?appareils photos qui se fit devant lui. Les journalistes, affam?s de confidences, serraient le rang en demi-cercle autour de Saint-Luc, s?agitant comme des gueux attendant qu?on leur donne leur pain quotidien. Les question fus?rent :
- Monsieur Saint-Luc, que pensez-vous de Mozart ? Pourquoi la Fl?te Enchant?e ? Savez-vous que Maurice B?jart montera la m?me pi?ce en avril prochain : est-ce un choix d?lib?r? de vous mettre ainsi sur le m?me plan ? Votre projet est-il financ? par des loges ma?onniques ? Que pensez-vous de la politique culturelle de l?actuel gouvernement ? Etes-vous pour la l?galisation des drogues douces ? Et la guerre en Irak : votre pi?ce n?est-elle pas un t?moignage ? Quel message voulez-vous faire passer ? La culture est-elle soluble dans la soci?t? du 21?me si?cle ?
Saint-Luc laissa les questions fuser comme des p?tards, puis en souriant appela au calme les journalistes. On manquait se jeter sur lui, pour tout savoir, pour tout apprendre d?un coup ! lui ouvrir la bo?te cr?nienne pour y prendre toutes les opinions sur tous les sujets et les ?taler sur le papier !
- Messieurs, messieurs ! je vous en prie ! Un peu de raison. Si je monte cette pi?ce, c?est d?abord en hommage au divin Mozart, ? qui nous pensons tous ce soir. J?esp?re rendre une interpr?tation qui aurait plus ? notre cher Amadeus et je pense ce soir ? tous ceux qui aiment la grande musique et qui en connaissent le caract?re universelle ! voil?.
Il acheva sa phrase sur une intonation magistrale et fit volte-face, triomphant et d?daigneux. Les journalistes voulurent lui courir apr?s, le prendre en chasse, lui en extorquer encore de l?information, le vider enti?rement !? Mais ils n?arriv?rent pas ? la bo?te cr?nienne. Des gardes du corps s?interpos?rent et firent reculer les indiscrets imp?tueux, qui devraient encore attendre pour entrer.

Saint-Luc put enfin rentrer dans l?op?ra. Dans le hall d?entr?e, on voulut le saluer, on voulait le toucher, avoir son morceau de conversation avec lui. Il s?excusa encore poliment, passa rapidement au milieu des convives.
On vit ? regret Saint-Luc passer une porte ?qui devait le mener vers les loges des acteurs. Derri?re, il tomba face au ? Marquis ?. Il fumait sa cigarette avec la m?me allure, entour? de deux gardes du corps et d?Armand d?Hubert.
La porte se referma derri?re Saint-Luc en battant.
- Alors, Sire Lucien, dit le Primog?ne Ventrue, gu?re avenant, votre soir?e est-elle pr?te ?
- Tout ? fait, r?pondit le Ca?nite, m?fiant. Quel tour pendable cherchait ? lui jouer le Marquis, alias le Prince Villon ? Pourquoi ne pas gagner vos places, d?s maintenant, proposa Lucien. Je vais vous faire porter discr?tement des coupes de mon meilleur cru.
- C?est bien aimable ? vous, dit Villon. Le Sire d?Hubert et moi-m?me esp?rions que tout se passerait ce soir sans? anicroche.
- Naturellement, l?assura Lucien, sur la d?fensive. Nous sommes l? pour c?l?brer les trois M : la Mascarade, Mozart et la Musique !
- Tant ce cas, tr?s bien, r?pondit Villon. Nous nous verrons apr?s la repr?sentation, fit-il en tournant les talons lentement, mani?re de montrer ? Armand d?Hubert qu?il n?y avait pas plus lieu d?insister.

Lucien les regarda s??loigner, emprunta un grand escalier, puis alla ? grand pas vers une loge discr?te, ? l??cart de celles des danseurs et des com?diens. On ?tait en quelque sorte dans les coulisses des loges, l? o? les journalistes, les admirateurs et les amants ne venaient pas, faisant des loges une annexe de la sc?ne et un endroit encore plus couru.
Lucien entra vivement, apr?s avoir jet? un coup d??il dans le couloir, d?sert.
L?int?rieur ?tait une petite pi?ce presque nue : une table, un frigo, une pauvre lampe. Assis ? la table, cinq hommes en bras de chemises, r?volvers en holsters, jouaient au carte pour tuer le temps, en buvant de la bi?re et en fumant abondamment. Cinq autres ?taient assis autour, ? v?rifier des fusils ? pompe. A la fen?tre, un autre comparse jetait des coups d??il intermittent ? travers le rideau.
Tous s?arr?t?rent en voyant Lucien entrer.
- Eh bien, dit-il, o? en sommes-nous ?
- Tout va bien, monsieur, dit le chef de la bande, un type costaud, voix ?raill?e, assez ?g? avec une petite t?te et des cheveux gras et broussailleux. Nous sommes pr?ts.
- Bon, tr?s bien. Vous ne faites rien sans mon signal. Dans l?id?al, je n?aurai pas besoin de vous. Je vous appellerai sur votre t?l?phone portable.
- ?a va de soi, monsieur. On bougera pas d?ici de la soir?e, sauf si ce t?l?phone que j?ai dans la poche se met ? sonner. On est juste votre service de s?curit? priv?, monsieur.
- Tr?s bien, dit Lucien, ? plus tard.
Il ressortit, continua dans le couloir d?sert, inqui?tant de par son aspect froid, nu, qui contrastait singuli?rement avec le faste chaleureux ?quoique mondain ? o? baignaient tous les invit?s de la soir?e et les acteurs. Le Ca?nite alla frapper ? une autre porte, au bout du couloir.
On vint lui ouvrir. C??tait Ma?tre Fantas, le Tremere.

A suivre... Diable
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Les Contes de la Canine #4 : Histoire de Laura G. Cervantès - by Darth Nico - 24-03-2003, 12:29 PM

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