25-07-2005, 11:17 PM
LE COEUR D'OCEANIE
Résumé : L'eau coule dans le sous-marin et le sous-marin coule dans l'eau...
Ruissellements (suite)
Soudain, une inclination brusque du bâtiment manqua jeter les trois hommes à terre.
- Nous remontons à la surface, dit le Vietnamien. Ils ont de quoi nous draguer… Des cordages, des grappins, énormes…
- Vous voulez dire qu’ils vont pêcher tout ce sous-marin comme une huître ?
-
Les deux vampires et le capitaines se réfugièrent dans le sas avant du bâtiment. Des coups sourds portèrent sur la coque. Tuang-Loc respirait de plus en plus mal.
- Ils ont dû toucher les convertisseurs d’air…
Il haletait, tenait sa gorge.
- Il va falloir tenir le coup, lui dit Lucinius.
Par à-coups très brusques, le sous-marin remontait, de plusieurs mètres à la fois, avant de se stabiliser, puis de remonter encore. Un écran de surveillance montrait que l’ensemble du bâtiment était maintenant sur le point d’être submergé. Aucun des hommes n’en réchapperait. L’eau se déversait partout, déferlant sus à l’équipage, pour les engloutir, dans sa furie, dans le silence impénétrable de ses abysses.
- C’est horrible, disait Lucinius. C’est horrible…
Tuang-Loc était tombé à genoux.
- Il n’a presque plus d’air pour respirer, Corso. Il faut faire quelque chose.
Nouveau choc : le sous-marin remonta encore, tiré par l’arrière.
- Nous sommes à l’avant, remarqua Corso. Ce qui veut dire que les torpilles ne sont pas loin. Le moindre coup là dedans…
- Si on avait voulu nous faire sauter, ce serait déjà fait.
Tuang-Loc haletait, couvert de sueurs.
- Ca sent fort l’air vicié, dit Corso. Allez, relevez-vous maintenant !
- Vous en avez de bonnes, vous ! Ce type est en train d’étouffer…
- Et il est notre seul aide…
Corso réfléchit une seconde, puis dit :
- Nous n’avons plus qu’à tenter le grand plongeon, en espérant que la pression ne nous écrasera pas.
- Quoi ? vous ne voulez pas…
Une remontée brusque interrompit le Toréador. Le sous-marin était penché presque à la verticale vers l’avant. Les trois occupants du sas furent jetés vers la paroi avant, tout contre le magasin de torpilles…
Corso monta l’échelle vers l’étage supérieur, aida Lucinius, qui tenait Tuang-Loc dans ses bras à monter, puis se prépara à ouvrir l’ouverture de secours au-dessus de lui.
- Prêt pour le plongeon ?
- Tuang-Loc ? Vous allez tenir le coup ?
Pour toute réponse, le capitaine gémit quelques mots incompréhensibles.
- Il faudra bien ! dit Lucinius.
Corso ouvrit le sas : l’eau se déversa en cascades dans l’appareil. Le Gangrel fut étourdi par la violence de la pression. Un humain aurait été assommé. L’eau envahit rapidement le sas, et les derniers passagers, immergés entièrement, n’eurent qu’à se laisser sortir du sous-marin. Corso passa le premier et derrière lui Lucinius qui aidait Tuang-Loc.
La clarté de l’eau laissait présager que la surface était proche. Et avec la surface, la lumière du jour. Réalisant cela, Corso fut attaqué par une frénésie atavique, propre aux vampires. Il replongea de toutes ses forces, effrayé. Lucinius aussi, frappé des premières clartés du jour, lâcha Tuang-Loc, qui remonta tout seul vers la surface.
Les deux Caïnites replongèrent vers le sous-marin. L’ombre d’un bâtiment de guerre glissait au-dessus d’eux, pendant que le bruit de ses moteurs tonnait dans l’eau. Les occupants du navire avaient proprement harponné le Requin Bleu à l’aide d’une énorme pince mécanique, grâce à laquelle ils le remontaient.
- C’est bien ce que je disais, pensait Corso, comme une huître…

Alors que Corso et Lucinius, pour échapper au puissant bâtiment inconnu, plongeaient vers les fonds noirs, et qu’ils avaient presque perdu de vue la surface, ils furent éblouis par deux projecteurs, braqués en plein sur eux. Un gros submersible s’approchait d’eux, comme un étrange prédateur : un bathyscaphe ovoïde, destiné à l’exploration des fonds. Il avançait silencieusement, se signalant seulement par un léger ronronnement. Il éteignit ses projecteurs aussitôt après les avoir braqués sur les deux vampires affolés par la lumière. A la surface, Tuang-Loc était recueilli par le navire.
Un sas s’ouvrit sous le bathyscaphe, qui invitait manifestement les deux naufragés à venir à bord.
- Nous ne tiendrons jamais dans cet œuf d’autruche, pensa Corso.
A la suite de Lucinius, le Gangrel s’engagea pourtant sous l’appareil. Ils sortirent la tête à l’air libre, alors que le sas se refermait sous leurs pieds. Mais ils avaient de l’eau jusqu’aux épaules. Le pilote était logé dans le compartiment juste au-dessus.
Le bathyscaphe plongea brusquement, tout en passant la vitesse maximale. Son vrombissement s’amplifia, comme celui d’une ruche tombée à terre.
Des charges explosèrent soudain à proximité du submersible, éclairant l’eau d’éclatantes lumières. Des secousses agitèrent l’appareil. Serrés dans quelques mètres carrés inondés, leurs voix déformées, rendus métalliques, par la profondeur Lucinius et Corso ne savaient plus comment se tenir pour garder leur équilibre. Ils buvaient la tasse après chaque explosion.
Le navire de guerre larguait ses mines avec de plus en plus de précision… Mais la vitesse de plongée s’accélérait. Les explosions furent de plus en plus lointaines.
Le calme des profondeurs revint, solennel comme un cimetière.
- C’était une belle connerie de rentrer là-dedans, grogna Corso, en fixant au-dessus de sa tête le sas qui menait au pilote. Qui sait qui est aux commandes ?
- Impossible de toute façon de s’en aller maintenant… Et je pense que Tuang-Loc est sauf.
- Oui, mais votre chinetoque a été recueilli par des gens qui voulaient couler son sous-marin…
- Qui a pu venir à notre secours ?
Corso tapa à plusieurs reprises sur le plafond.
- Allez, le voisin du dessus ! Montre-nous ta bobine !
Pas de réponse. Le bathyscaphe repartait toujours plus vite vers le silence des fonds.
- Allez mon gros ! Montre-toi ! Tu ne vas pas nous laisser croupir dans notre bain de siège !
Le levier du sas pivota, tandis que l’engin filait tout droit. La cloche en acier s’ouvrit.
Au-dessus des deux Caïnites, les braquant d’un revolver, se tenait au poste de pilotage le nabot kuei-jin. Corso, apeuré, glissa sur le fond de l’engin et tomba à l’eau. Lucinius voulut l’imiter.
- Faire silence maintenant, compris ? dit le Cathéen, en pointant du doigt le canon du revolver.
Corso ressortit la tête de l’eau, en fixant d’une grimace haineuse l’asiatique. Sans y prêter attention, le kuei-jin referma le sas et le verrouilla.
Lucinius baissa le regard et se prit la tête dans les mains.
- Qu’allions-nous faire dans cette galère, soupirait-il.
L’engin continua pendant des heures à s’enfoncer dans l’inconnu.
A suivre...
Résumé : L'eau coule dans le sous-marin et le sous-marin coule dans l'eau...
Ruissellements (suite)
Soudain, une inclination brusque du bâtiment manqua jeter les trois hommes à terre.
- Nous remontons à la surface, dit le Vietnamien. Ils ont de quoi nous draguer… Des cordages, des grappins, énormes…
- Vous voulez dire qu’ils vont pêcher tout ce sous-marin comme une huître ?
-
Les deux vampires et le capitaines se réfugièrent dans le sas avant du bâtiment. Des coups sourds portèrent sur la coque. Tuang-Loc respirait de plus en plus mal.
- Ils ont dû toucher les convertisseurs d’air…
Il haletait, tenait sa gorge.
- Il va falloir tenir le coup, lui dit Lucinius.
Par à-coups très brusques, le sous-marin remontait, de plusieurs mètres à la fois, avant de se stabiliser, puis de remonter encore. Un écran de surveillance montrait que l’ensemble du bâtiment était maintenant sur le point d’être submergé. Aucun des hommes n’en réchapperait. L’eau se déversait partout, déferlant sus à l’équipage, pour les engloutir, dans sa furie, dans le silence impénétrable de ses abysses.
- C’est horrible, disait Lucinius. C’est horrible…
Tuang-Loc était tombé à genoux.
- Il n’a presque plus d’air pour respirer, Corso. Il faut faire quelque chose.
Nouveau choc : le sous-marin remonta encore, tiré par l’arrière.
- Nous sommes à l’avant, remarqua Corso. Ce qui veut dire que les torpilles ne sont pas loin. Le moindre coup là dedans…
- Si on avait voulu nous faire sauter, ce serait déjà fait.
Tuang-Loc haletait, couvert de sueurs.
- Ca sent fort l’air vicié, dit Corso. Allez, relevez-vous maintenant !
- Vous en avez de bonnes, vous ! Ce type est en train d’étouffer…
- Et il est notre seul aide…
Corso réfléchit une seconde, puis dit :
- Nous n’avons plus qu’à tenter le grand plongeon, en espérant que la pression ne nous écrasera pas.
- Quoi ? vous ne voulez pas…
Une remontée brusque interrompit le Toréador. Le sous-marin était penché presque à la verticale vers l’avant. Les trois occupants du sas furent jetés vers la paroi avant, tout contre le magasin de torpilles…
Corso monta l’échelle vers l’étage supérieur, aida Lucinius, qui tenait Tuang-Loc dans ses bras à monter, puis se prépara à ouvrir l’ouverture de secours au-dessus de lui.
- Prêt pour le plongeon ?
- Tuang-Loc ? Vous allez tenir le coup ?
Pour toute réponse, le capitaine gémit quelques mots incompréhensibles.
- Il faudra bien ! dit Lucinius.
Corso ouvrit le sas : l’eau se déversa en cascades dans l’appareil. Le Gangrel fut étourdi par la violence de la pression. Un humain aurait été assommé. L’eau envahit rapidement le sas, et les derniers passagers, immergés entièrement, n’eurent qu’à se laisser sortir du sous-marin. Corso passa le premier et derrière lui Lucinius qui aidait Tuang-Loc.
La clarté de l’eau laissait présager que la surface était proche. Et avec la surface, la lumière du jour. Réalisant cela, Corso fut attaqué par une frénésie atavique, propre aux vampires. Il replongea de toutes ses forces, effrayé. Lucinius aussi, frappé des premières clartés du jour, lâcha Tuang-Loc, qui remonta tout seul vers la surface.
Les deux Caïnites replongèrent vers le sous-marin. L’ombre d’un bâtiment de guerre glissait au-dessus d’eux, pendant que le bruit de ses moteurs tonnait dans l’eau. Les occupants du navire avaient proprement harponné le Requin Bleu à l’aide d’une énorme pince mécanique, grâce à laquelle ils le remontaient.
- C’est bien ce que je disais, pensait Corso, comme une huître…

Alors que Corso et Lucinius, pour échapper au puissant bâtiment inconnu, plongeaient vers les fonds noirs, et qu’ils avaient presque perdu de vue la surface, ils furent éblouis par deux projecteurs, braqués en plein sur eux. Un gros submersible s’approchait d’eux, comme un étrange prédateur : un bathyscaphe ovoïde, destiné à l’exploration des fonds. Il avançait silencieusement, se signalant seulement par un léger ronronnement. Il éteignit ses projecteurs aussitôt après les avoir braqués sur les deux vampires affolés par la lumière. A la surface, Tuang-Loc était recueilli par le navire.
Un sas s’ouvrit sous le bathyscaphe, qui invitait manifestement les deux naufragés à venir à bord.
- Nous ne tiendrons jamais dans cet œuf d’autruche, pensa Corso.
A la suite de Lucinius, le Gangrel s’engagea pourtant sous l’appareil. Ils sortirent la tête à l’air libre, alors que le sas se refermait sous leurs pieds. Mais ils avaient de l’eau jusqu’aux épaules. Le pilote était logé dans le compartiment juste au-dessus.
Le bathyscaphe plongea brusquement, tout en passant la vitesse maximale. Son vrombissement s’amplifia, comme celui d’une ruche tombée à terre.
Des charges explosèrent soudain à proximité du submersible, éclairant l’eau d’éclatantes lumières. Des secousses agitèrent l’appareil. Serrés dans quelques mètres carrés inondés, leurs voix déformées, rendus métalliques, par la profondeur Lucinius et Corso ne savaient plus comment se tenir pour garder leur équilibre. Ils buvaient la tasse après chaque explosion.
Le navire de guerre larguait ses mines avec de plus en plus de précision… Mais la vitesse de plongée s’accélérait. Les explosions furent de plus en plus lointaines.
Le calme des profondeurs revint, solennel comme un cimetière.
- C’était une belle connerie de rentrer là-dedans, grogna Corso, en fixant au-dessus de sa tête le sas qui menait au pilote. Qui sait qui est aux commandes ?
- Impossible de toute façon de s’en aller maintenant… Et je pense que Tuang-Loc est sauf.
- Oui, mais votre chinetoque a été recueilli par des gens qui voulaient couler son sous-marin…
- Qui a pu venir à notre secours ?
Corso tapa à plusieurs reprises sur le plafond.
- Allez, le voisin du dessus ! Montre-nous ta bobine !
Pas de réponse. Le bathyscaphe repartait toujours plus vite vers le silence des fonds.
- Allez mon gros ! Montre-toi ! Tu ne vas pas nous laisser croupir dans notre bain de siège !
Le levier du sas pivota, tandis que l’engin filait tout droit. La cloche en acier s’ouvrit.
Au-dessus des deux Caïnites, les braquant d’un revolver, se tenait au poste de pilotage le nabot kuei-jin. Corso, apeuré, glissa sur le fond de l’engin et tomba à l’eau. Lucinius voulut l’imiter.
- Faire silence maintenant, compris ? dit le Cathéen, en pointant du doigt le canon du revolver.
Corso ressortit la tête de l’eau, en fixant d’une grimace haineuse l’asiatique. Sans y prêter attention, le kuei-jin referma le sas et le verrouilla.
Lucinius baissa le regard et se prit la tête dans les mains.
- Qu’allions-nous faire dans cette galère, soupirait-il.
L’engin continua pendant des heures à s’enfoncer dans l’inconnu.
A suivre...
