28-10-2006, 11:39 AM
(This post was last modified: 04-11-2006, 12:04 PM by Darth Nico.)
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE
Le soleil se levait dans une épaisse brume qui blanchissait les rues de la Cité et transformait ses bâtiments et ses habitants en inquiétants spectres. L'humidité était glaçante, malgré les quelques rayons de chaleur qui la perçait.
Les Magistrats d'Emeraude s'étaient réunis dans la grande salle du palais, autour de Miya Katsu. Shosuro Kimi fit son entrée, mit le front à terre pour écouter ce qu'on avait à lui dire :
- Nous sommes honorés de recevoir la fille du Gouverneur entre nos murs. Vous pourrez rester parmi nous le temps qu'il vous plaira car l'hospitalité est une chose sacrée pour les représentants de l'Empereur.
Kimi remercia et se retira.
Katsu fit signe que le moment n'était pas encore venu d'aller lui parler.
Ryu repartit chez les Teinturiers, qui étaient aux quatre cent coups à cause d'elle.
- Pour ce soir, exigea l'enquêtrice, j'ai besoin que vous vous soyez infiltrés dans le palais Shosuro !
Au palais, Ayame alla voir le Moine et Rukya et leur confia ses inquiétudes, qu'ils partageaient.
- Nous avons maintenant un allié, un allié discret, suggéra la shugenja.
- Oui, il a rendu visite à Hiruya également. Ce... ce Ninja, dit le Moine avec répugnance.
- Impossible de savoir où il se trouve, dit Rukya.
- Pourtant, fit le Moine, nous savons que ce "Ninja" combat les créatures touchées par l'Ombre. Il l'a prouvé dans la campagne... Nous en sommes à utiliser une ombre contre les Ombres.
- Nous aurons besoin de faire certains compromis, expliqua la shugenja.
L'après-midi, on signala l'approche d'une forte troupe de Vierges de Batailles Otaku, qui établirent un campement à proximité des murs de la ville. Ide Baranato, le chef du clan Licorne de la Cité, se réjouissait de ses renforts, non seulement contre les Crabes mais aussi contre les manigances des Scorpions... Les guerrières Licorne étaient menées par le général Otaku Tetsuko, l'un des plus grands officiers de son clan, tante de la célèbre Otaku Kamoko, daimyo de la famille.
Le soir, très tard, alors que Miya Katsu avait fait veiller ses assistants, il leur de le suivre dans une aile du palais généralement peu occupée, où l'on entreposait surtout du matériel et où logeaient les nouveaux domestiques. Le Magistrat ouvrit le panneau d'une des pièces. Kimi était là, à prendre soin d'une vieille femme malade. Et cette femme, c'était sa mère, le Gouverneur Hyobu !
Les assistants n'en croyaient pas leurs yeux. Elle avait le visage tuméfiée. Elle avait dû être rouée de coups.
- Elle est arrivée avant-hier, murmura Katsu. C'est son cri que nous avons entendu.
Hyobu-sama voulut se lever mais le Magistrat lui dit que c'était inutile de produire un tel effort. Il fit ressortir ses assistants dans le couloir et repartit avec eux dans leurs quartiers.
- Elle a été jetée depuis la fenêtre du premier étage. Deux serviteurs ont réussi à l'amener ici mais elle m'a fait jurer de garder le secret, au moins la première nuit. Elle dit qu'elle a été chassée de son poste de Gouverneur... On a pris sa place, de force.
- Mais qui ?...
C'est Shigeru qui avait le premier "craqué", mais la question était sur toutes les lèvres.
- Un dignitaire de la famille Bayushi et sa suite sont arrivée avant-hier, en début de nuit. Et pas n'importe quel dignitaire... Le Maître des Secrets en personne, l'accusateur de Kumanosuke... Bayushi Goshiu !
Autrement dit, le second Scorpion le plus puissant de Rokugan après l'Impératrice elle-même ! L'un des trois Bayushi ayant survécu au deshonneur de son clan ! Le pire intrigant des cours, ayant tressé un réseau de relations et de chantages inégalable !
Miya Katsu baissa d'un ton :
- Shosuro Hyobu ne m'a pas donné plus de détails... Seulement, elle a fait allusion à une vieille malédiction. Une malédiction disant qu'un jour, le premier gouverneur de la ville, un maudit d'entre les maudits, reviendrait prendre sa place sur le trône. Et ce Gouverneur se nommerait Bayushi Goju !...
Bien sûr, la proximité Goshiu / Goju prêtait à confusion... Etait-ce un simple délire du Gouverneur chassé ? Ayame n'était pas porté à le croire, avec ce qu'elle savait de Goju lui-même et de ses écrits impies...
Ce qui était choquant dans cette histoire n'est pas tant la prise de pouvoir violente (on avait déjà vu pire) mais les manifestations de l'Ombre la nuit même de l'arrivée de Goshiu. Ce dernier était-il un masque pour le Premier Gouverneur, revenu comme le promettait la malédiction de la Cité ?... La Cité maudite par le retour de son fondateur...
L'heure de Togashi s'achevait déjà. La nuit serait courte. La plupart des assistants eurent de la peine à trouver le sommeil. Bayushi Bokkai s'était bien gardé de montrer ce qu'il pensait.

Le lendemain matin, une invitation était arrivée au palais : le Gouverneur invitait la Magistrature d'Emeraude à une réception officielle.
"L'honorable Bayushi Goshiu sera honoré de rencontrer l'honorable Miya Katsu et ses honorables assistants afin de..."
Renfrogné, Katsu ne savait quoi penser. Il ne pouvait refuser cette invitation. Mais qui emmener avec lui ? Il envoya Ikky et Ayame prendre conseil auprès de Hyobu, et s'enquérir de sa santé par la même occasion.
La vieille femme était toujours veillée par sa fille, qui se refusait tout sommeil : elle lui tenait la main, elle lui mettait des chiffons frais sur le front, elle passait de la pommade sur ses blessures. Jusqu'ici, Kimi n'avait passé, aux yeux d'Ayame, que pour une petite fille gâtée, une intrigante utile, mais là, elle était admirable de dévouement. Elle ne vivait plus que pour sa pauvre mère, tabassée et jetée par les brutes de Goshiu. Comme la posture pouvait changer quelqu'un : Hyobu, si impressionnante assise sur le trône de son palais, avec sa voilette, son éventail, ses gardes autour d'elle, l'apparat du pouvoir, était maintenant une malheureuse pauvre femme, qui inspirait la pitié !
- Goshiu nous invite à le rencontrer, murmura notre shugenja à son oreille.
- Le malheur est sur nous, articula t-elle d'une voix rauque. Goshiu... Goju... Goju... Pour lutter contre, il vous faut... les larmes de dame Soleil... les Licornes en ont... il vous les faut...
Ayame savait de quoi elle parlait : les "larmes" en question étaient le cristal, que le clan de Shinjo avait ramené de ses voyages dans les Sables Brûlants. Le cristal, la seule matière capable de tuer les serviteurs de l'Ombre. Ayame avait toujours ses petits ciseaux...
Les deux Phénix vinrent rendre compte à Katsu de leur entretien. Les autres assistants étaient là.
- L'invitation est pour l'heure de Shinjo, dit le Magistrat. Nous avons donc une bonne journée devant nous. Le conseil de Hyobu paraît judicieux. Shigeru, tu iras voir les Licornes et tu achéteras à leurs marchands leurs objets en cristal, quels qu'ils soient. Passe à l'intendance prendre des kokus. Ryu, tu tâcheras de rencontrer Jocho, pour lui signaler que nous prenons soin de sa mère et de sa soeur.
Quand on y repensait, Shosuro Jocho avait dû faire preuve d'une maîtrise inhumaine de lui-même, pour ne pas montrer sa détresse, sachant sa mère entre la vie et la mort. Fallait-il que les Scorpions aient poussé loin l'art de l'hypocrisie en toutes circonstances !
- Ayame, vous irez sur l'île de la Larme, chez cette gaijin là, Magda. Elle aussi doit bien posséder des bijoux en cristal. Il faut les réquisitionner. Ensuite, que ces objets soient rassemblés dans l'armurerie, où ils seront mis sous haute surveillance !... Et ce soir, nous irons ensemble au palais du Gouverneur. Bayushi Bokkai restera ici.
Les assistants s'inclinèrent. Miya Katsu évita de croiser le regard du Scorpion : il ne voulait pas savoir si celui-ci était satisfait ou non d'échapper à une entrevue avec Goshiu. Et en son for intérieur, il souhaitait un retour rapide de Kakita Hiruya, dont il aurait bien eu besoin dans une telle situation...

L'heure de Shinjo était déjà passée de moitié lorsque la Magistrature d'Emeraude se présenta à la porte du palais du Gouverneur. Le retard voulu par Katsu était un message clair envoyé au Gouverneur en place : "nous ne sommes pas à votre merci, nous avons les moyens de nous opposer à vous."
On fit entrer le Magistrat et ses assistants dans la grande cour. La dernière fois que les représentants de l'Empereur étaient entrés ici, la famille Soshi n'y avait pas survécu...
Ils entrèrent dans la salle de réception. Bayushi Goshiu était assis sur le trône du Gouverneur. A ses côtés, les dignitaires Bayushi, dont Korechika, le chef de famille, et des officiers de la Garde du Tonnerre. Les shugenjas de la famille Yogo étaient en retrait.
Miya Katsu s'inclina, au moment où Goshiu se levait pour accueillir ses invités. Il était toujours aussi inquiétant que lors du procès, caché derrière son large masque qui dissimulait le haut de son visage. Les samuraï avaient posé leur daisho à l'entrée, en signe d'apaisement. Qu'ils aient accepté de venir dans ces conditions signifiaient qu'ils reconnaissaient Goshiu comme successeur de Hyobu.
- Je suis honoré de vous recevoir, honorables Magistrats. Il me tardait de recevoir les envoyés du divin fils du ciel.
Il leur fit un petit discours de bienvenue, mielleux à souhait que Katsu écouta sans impatience mais sans sourire.
- Je connais les dangers qui pèsent sur cette ville, déclarait le Gouverneur. Je sais que l'armée du Crabe a juré de détruire notre Cité, qu'ils détestent car ils y furent naguère humiliés. Cependant, je ne suis pas prêt à les laisser piller la seconde ville de l'Empire. Toutefois, nous connaissons l'ampleur de leurs forces : si nous avions à nous battre contre eux, nous verserions le sang d'un grand nombre de nobles samuraï et l'Empereur n'y trouverait aucun contentement. Nous savons que Hida Kisada déteste notre Empereur. Il veut marcher sur la capitale et prendre le trône. Chacun sait cela.
"Le col de Beiden étant fermé par les troupes Licornes, les Crabes n'auront d'autre choix que de passer par notre Cité pour atteindre le nord du Toit du Monde. Nous allons donc jouer le rôle de mur face à l'invasion des Crabes. L'unité de l'Empire repose sur nous !
"Je ne laisserai pas cet Empire, qui existe depuis mille ans, se couper en deux. J'ai l'intention d'engager des pourparlers avec les Crabes afin de les décider à se retirer pacifiquement. Mes négociations n'échoueront pas !
Ayant dit cela, il jugea de son effet. Miya Katsu ne s'attendait pas à ce genre de discours. Négocier avec les Crabes, cela ne lui serait pas venu à l'idée... Etait-ce une mauvaise idée ?... Il ne savait pas...
Mais Ryu, elle, avait entendu ces paroles tout autrement. Elle repensa à la centaine d'hommes avec qui elle était partie guerroyer. Elle repensait que neuf sur dix avaient été tués. Elle repensa aux horreurs de l'Outremonde, aux crimes commis par les Crabes. A cette guerre qui n'aurait rien signifié, si jamais on négociait maintenant avec les hommes de Hida Kisada...
Au milieu du silence qui suivit le discours de Goshiu, elle dit alors séchement :
- Gouverneur... j'ai l'impression que vos intentions sont aussi honorables que celles des Crabes !

Le Gouverneur se leva. Même lui qui avait appris à dominer chaque trait de son visage ne put masquer sa stupeur. Et que dire du reste de l'assistance, qui n'avait pas cette maîtrise ?
C'était un silence glacial, écrasant qui s'était abattu dans la salle de réception.
Katsu-sama en particulier était devenu livide. Il n'avait même pas encore la force d'imaginer qu'il devrait tuer Ryu sur place.
Un chef-d'oeuvre de notre enquêtrice ! la plus belle phrase de sa vie ! une perle !
Accuser le second Scorpion de l'Empire de ne pas valoir mieux que les Crabes alliés à l'Outremonde !
Goshiu put enfin esquisser un sourire et murmurer :
- Qu'en pensez-vous, honorable Magistrat ?
Katsu- ne put rien répondre.
- Vous semblez hésiter. C'est bien naturel. Permettez-moi donc de vous inviter dans mon modeste palais, pour que vous y pensiez...
Les soldats Scorpions firent cercle autour des Magistrats, qui durent se lever et les suivre docilement jusque dans les chambres des "invités".
Oui, Goshiu venait de réaliser la plus belle prise de sa carrière, comme un pêcheur qui attrape d'un coup cinq gros poissons aux écailles d'Emeraude !
Une prise d'otages historique !

Nos Magistrats furent réunis dans une suite luxueuse. En dehors du fait que le palais entier les surveillait, toute la garnison et jusqu'au dernier des serviteurs, l'endroit était accueillant. Une chambre spacieuse, luxueuse, avec vue sur le jardin d'hiver. Les Scorpions ne négligeaient pas leurs hôtes.
Le silence régnait, pesant, mortel. Personne n'osait dire un mot. Ryu semblait à peine prendre conscience de la gravité de ses paroles.
Ce fut Bayushi Otado, déjà offensé par Ryu lors de sa descente dans la maison de jeu qu'il protégeait, qui vint porter la parole du Gouverneur. Il s'assit devant nos Magistrats puis énonça ce qui allait se passer.
- Le Gouverneur serait infiniment honoré d'accueillir les Magistrats d'Emeraude pour le temps qu'il leur plaira. Toutefois, conscient de la charge infinie qui pèse sur eux, Goshiu-sama ne veut pas retenir tous les assistants du vertueux Katsu-sama.
Ce dernier avait compris le message. Il fit signe que les deux Phénix et Ryu pouvaient partir. Otado-san n'y fit pas d'objection. Les Scorpions avaient le Magistrat lui-même et Shigeru, c'était suffisant.
- Mais nous serions honorés si le valeureux Bayushi Bokkai pouvait nous rejoindre. Quel avantage d'accueillir un si brave chui, qui s'est distingué à la guerre.
Katsu dit qu'Ayame le ferait appeler.
Les trois femmes sortirent du palais. Ryu rentra de son côté au palais. Les deux Phénix ne montrèrent rien de leurs émotions dans la rue. Au palais, elles s'enfermèrent dans leurs appartements.
- Mais, par Shiba, qu'allons-nous FAIRE !!
Ikky se délestait enfin de cette phrase de détresse qu'elle avait retenue jusque là !
- Je ne sais pas, dit Ayame d'une voix blanche.
On tapa timidement au panneau. C'était Rukya qui venait aux nouvelles. Elle vit l'air de déterrées des deux femmes. Sa lèvre trembla et elle les larmes lui montèrent aux yeux.

Ryu partit voir Shosuro Hyobu et sa fille Kimi. Quelle ne fut pas sa surprise de trouver là Jocho ! Supposé être le chef de la Garde du Tonnerre, il était dans ce palais au moment même où le Gouverneur réunissait tous les dirigeants de la ville !
La tête basse, les épaules, Ryu dit, sans du tout raconter ce qui s'était passé :
- J'avoue, j'ai craqué... J'ai vu mourir quatre-vingt-dix de mes hommes. Je refuse qu'on puisse négocier avec les Crabes. J'ai une fille, là-haut, dans les montagnes de mon clan. Je pense souvent à elle. Je ne veux pas qu'elle grandisse dans un Empire déchiré par la guerre...
Et elle ressortit, laissant la famille Scorpion parfaitement ahurie.
Ce n'est que plus tard qu'un des administrateurs du palais, qui avait mené à bien certaines négociations avec les Scorpions par le passé, vint expliquer à l'ex-Gouverneur et ses enfants ce qui s'était passé. Kimi et Jocho eurent un moment envie de se blottir dans les bras de leur mère, comme de petits enfants effrayés par l'orage, mais Jocho se releva, fièrement, en homme décidé à lutter contre le destin.
L'administrateur se retira, vraiment très désolé.
Entre alors Ryu, ferme et décidée :
- Jocho-sama, je viens vous annoncer que le Gouverneur voudrait vous inviter au palais.
Un rictus de haine apparut sur le visage de Jocho. Il sortit de la pièce. Il n'eut pas à toucher Ryu mais il aurait été prêt à la bousculer si nécessaire. Des samuraï d'Emeraude voulurent s'interposer face au chef de la Garde : un coup partit, un bras craqua, un autre, une jambe plia... Jocho continua son chemin pendant que les soldats se tordaient de douleur dans couloir.
Furieux, Jocho entra dans la chambre des deux Phénix. Ikky s'avança, main sur le sabre. Impérieux, terrible, fier comme le tonnerre, Jocho avança.
- Jocho-sama, je comprends bien... fit Ayame, de son air le plus diplomate, la situation est très difficile... LEs Bayushi ont les moyens de ne faire aucun compromis...
Elle ne voyait pas comment elle allait calmer leur invité... ELle n'avait aucun argument à lui opposer. Accepter de collaborer avec les Scorpions pour faire repartir Jocho, c'était trahir les lois sacrées de l'hospitalité. Pendant que les Magistrats se rendaient au palais, Jocho, trop inquiet pour sa mère et sa soeur, avait réussi à quitter le palais du Gouverneur, en sa qualité de chef de la garde. Maintenant, implicitement, il demandait asile à son tour, pour n'avoir pas à servir celui qui avait renversé sa mère.
Certes, sa situation n'était donc pas très régulière, mais elle se défendait du point de vue de l'honneur.
Ryu, qui était la plus gradée maintenant des trois assistantes, prit possession du bureau de Katsu-sama. Comme étourdie par l'ampleur de sa bêtise, elle se plongea dans une médiocre besogne de classement de papiers sans intérêt. Elle ne savait plus à quoi se raccrocher pour retrouver contenance, pour se rassurer.
Un émissaire de la famille Bayushi arriva dans son bureau.
- Le Gouverneur m'envoie, honorable Ryu-sama. Car le Gouverneur s'inquiète du départ de Jocho-sama et désirerait savoir quand il rentrera.
- Je comprends, fit Ryu, qui tâchait de garder un air digne, maîtrisé, qui ne trompait personne. Je vais aller les chercher.
Elle essayait de faire croire qu'elle agissait de son propre chef, d'autant plus qu'elle était à la merci des désirs des Scorpions. D'autant plus cruelle la vérité, d'autant plus fort le besoin de la couvrir d'illusion.
- J'ira, balbutia t-elle pour se rattraper, mais je suis un peu occupée.
Elle voulait quand même garder un peu d'initiative personnelle !
- Ah, que c'est dommage, soupira le Bayushi, mais le Gouverneur aimerait tant que vous allassiez les chercher immédiatement...
- Très bien, fit Ryu, avec une fierté vraiment factice.
Elle fit convoquer le plus mauvais samuraï du palais, qu'en desespoir de cause on avait relégué à une fonction subalterne de gratte-papiers.
- Tu vas aller me chercher Shosuro Jocho, ordonna notre enquêtrice de chic et de choc.
Le pauvre garçon tremblait comme une feuille.
- Moi... moi ?...
La scène était aussi comique que dérisoire. Ryu qui commande, un minable petit guerrier comme émissaire, les Magistrats en otage...
Les choses se seraient passées d'une toute autre façon si Kakita Hiruya avait été là !
La Magistrature pouvait difficilement tomber plus bas, plus profondément dans la boue du deshonneur.
Accablé du poids de la fatalité du monde, le gratte-papiers alla porter les instruction aux Phénix, devant Jocho. Celui-ci dut se sentir encore plus insulté que ce soit un pareil minable qui vienne lui signifier la fin de son séjour dans ce palais !
Ayame essaya de temporiser. Il y eut comme ça quelques allers-retour du messager entre Ryu et les deux Phénix, la Magistrature en étant réduite à négocier entre elles, pendant que l'émissaire Bayushi arbitrait l'affrontement en maintenant la pression sur Ryu, aussi préparée à des négociations diplomatiques qu'un origamiste Asahina à la chasse au troll.

On finit par conclure que Hyobu et sa fille resteraient au palais, la première ayant besoin des soins de la seconde. Le Bayushi déclara que le Gouverneur serait déçu mais il ramenait le plus important : Shosuro Jocho, humilié de devoir abandonné sa famille, d'être trahi par la Magistrature d'Emeraude, de se soumettre à Goshiu !...
Pour terminer cette belle journée, Ryu tâcha de s'abstraire de la réalité, en se plongeant dans les affaires courantes, pendant que les deux Phénix se sentaient dans un asile de fous, bien plus qu'au temple qui pourtant en hébergeait un certain nombre !
A suivre... :shock: