27-02-2007, 04:40 PM
(This post was last modified: 15-08-2007, 12:03 PM by Darth Nico.)
DOSSIER #1<!--/sizec-->
LE CUISINIER DE L'HIPPOCAMPE<!--/sizec-->
SHC 3 - RUS 0 - IEI 0
LE CUISINIER DE L'HIPPOCAMPE<!--/sizec-->
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Maréchal se réveilla en sursaut. Au-dessus de lui, une lampe de plafond grésillante se balançait rapidement. La salle de bain était verte, et vide en dehors de la baignoire vide où l’inspecteur était allongé.
Il avait froid. Il entendait l’eau goutter quelque part et le grondement lointain du tramway. Par la fenêtre, le clair de terre de Forge jetait une lumière blafarde, crue. Dehors, des immeubles délabrés et une rue déserte.
Maréchal entendait de plus en plus distinctement le bruit d’une frappe au chromatographe, rapide et précise. Il sentait très fort la cigarette, dans son imperméable gris. Il ne se souvenait plus de ce qu'il avait bu la veille, ni d'où il avait fini.
Il savait qu'il n'était pas chez lui, ni chez une connaissance, ni dans son quartier.
Il sortit de la baignoire, alla vers l’unique porte de sortie, entrebâillée.
Elle donnait sur une grande terrasse, sur laquelle se trouvait une sorte de navire archaïque, comme les Leviathans qui parcourent l'Océan Noir, et dont les projecteurs éclairaient violemment la nuit brune. Les bâtiments, immenses, plongeaient dans les noirceurs du ciel.
Les projecteur se braquèrent sur Maréchal, qui se protégea le visage de la main.
Il entendit une voix derrière lui.
- Le temps est écoulé, inspecteur. Vous avez dû trouver les trois indices, maintenant.
Il voulut se retourner.
Il se réveilla, allongé sur le lit de camp, dans le bureau des détectives.
On était en pleine nuit.
Dans la pièce d’à côté, l’inspecteur Novembre menait, depuis huit heures, l’interrogatoire d’un petit truand.
C’était l’heure pour Maréchal de reprendre son poste. Il croisa le détective Rampoix, qui allait prendre sa place sur lit.
- Bon courage, il est costaud celui-là...
Du sommeil plein le corps, Maréchal entra dans le bureau de Novembre et alla s'asseoir à la machine à écrire. Il fit craquer ses doigts et repositionna le rouleau de la machine à gauche.
- Tu y es, Maréchal ?
Novembre ralluma un bout de cigarette. Le détective approuva.
- Bon alors, on va reprendre du début, hein...
Le truand pouvait avoir une petite trentaine. Il soupira, fatigué, mais pas décidé à passer à table.
- Nom et prénom.
- Sobotka. Pavel.
- Profession ?
- Marchand ambulant.
Novembre ricana.
- Marchand ambulant, tu entends ça, Maréchal ?
Le détective ricana en même temps que son supérieur.
- Et tu vends quoi ?
- Bah toutes sortes de choses : des briquets, des cordes, des lampes...
- Et tu peux me dire ce que tu faisais sur la Platz, hier soir, à 2h du matin ?
- Bah je passais avec ma roulotte quoi...
- Tu avais beaucoup de clients à cette heure-ci j'imagine...
Novembre tira sur sa cigarette. Maréchal tapait machinalement.
- Pas beaucoup, non.
- Tu en as eu au moins un...
- Un seul c'est vrai.
- Son nom ?
- Je ne sais pas.
- Je vais te le dire : il s'appelait Rupert Beltrando. 34 ans. Employé de la banque Pham'Velker.
- C'est possible, chef...
- Et tu es le dernier à l'avoir vu vivant. Il était quelle heure quand tu l'as croisé ?
- Je sais pas. 2h peut-être...
- Beltrando a été retrouvé mort, à 3h, par une patrouille de PANDORE. Qu'est-ce que tu en dis ?
Pavel Sobotka baissait la tête.
Novembre finit sa cigarette. Il fit signe à Maréchal de venir avec lui dans le couloir.
A cette heure-ci, le commissariat, noir à l'extérieur, blafard à l'intérieur, somnolait. C'est l'heure où la fatigue est la plus forte, où elle pèse lourd sur les corps.
- Ecoute, disait Novembre, j'ai besoin de faire une pause. Je n'ai pas dormi depuis trente heures et ça fait bientôt sept heures que je suis avec cet imbécile. Tu vas reprendre tranquillement avec lui. Montre-lui qu'on a tout notre temps. Tu devrais avoir bientôt les résultats du laboratoire, ça peut accélerer ses aveux.
- Compris, chef.
- A tout à l'heure.
Maréchal entra. Sobotka s'assoupissait.
- Allez, réveille-toi.
Le détective prit une belle feuille blanche et la roula lentement dans la machine.
- On y va. Nom et prénom ?
Le suspect soupira lentement. Il fallait s'y remettre.
- Donc tu as croisé l'employé. Tu lui as parlé ?
- Il voulait m'acheter un briquet.
- Tu lui en as vendu un ?
- Non, finalement, il n'a pas voulu.
- Ce qui a dû t'énerver.
- Oui un peu.
- Un peu, oui...
Maréchal tapa quelques mots.
- Et tu t'es énervé ?
- Non...
- Juste un peu.
- Trois fois rien, quoi... Ce type, c'était un rupin. Dans son beau costume.
- Un beau costume d'employé de banque. Et toi, petit vendeur ambulant...
- C'était un sale richard, vous voyez...
- Ouais, confirma Maréchal, un sale bourge d'employé de banque. Qui gagne plus en un mois que toi en un an.
- Oui c'est ça ! sourit Pavel.
- Il n'a rien voulu t'acheter et tu en as eu marre...
- Oui, c'est ça.
- Et tu l'as un peu bousculé.
- Rien qu'un peu, quoi ! Enfin, ce type, il est derrière son bureau, il ne connait pas la rue ! Pour nous, dans la rue, c'est trois fois rien. Mais pour lui, cette chochotte...
- Donc tu reconnais l'avoir frappé.
Maréchal nota.
- Il ne t'a rien acheté et ça t'a foutu en rogne, Pavel.
- Oui, c'est ça...
- Et ensuite, il s'est énervé, peut-être. Et vous vous êtes battus...
- Pas vraiment, non...
On toqua à la porte. Un homme passa la tête : Gaston Rainier, de la police scientifique.
Maréchal passa dans la porte à côté. On se serra la main.
- J'ai les résultats des analyses, détective. L'employé de la banque consommait de la cocaïne. Il en avait encore sur les doigts. Ces gens-là ne comptent pas leurs heures. Ils ont besoin d'excitants pour tenir.
Maréchal savait que Sobotka avait déjà été pris pour vente de drogue.
- Et il est mort comment, l'employé ?
- Coups de couteaux, vraisemblablement. C'est le coup au coeur qui a été fatal. Mais il a aussi été frappé aux reins et dans le dos.
- On s'est acharné sur lui.
- Certainement.
- Je vous remercie.
Maréchal retourna dans le bureau.
- Hé bien voilà, Pavel, on y est ! La Scientifique vient de nous dire toute la vérité. Ton cas est clair.
- Comment ça ?
- Le type était dans un état second. Et peut-être que toi aussi. Vous aviez consommé de la poudre, tous les deux. Possible que tu lui en aies vendu. Parce que, entre nous, ton histoire de briquet, hein...
- Mais attendez, c'est des conneries ! Comment ils peuvent savoir, ces flics dans leur labo ! Ils étaient pas dans la rue avec moi !
- Allons, Pavel, la police scientifique fait des merveilles de nos jours. Ils savent ce qui s'est passé, comme s'ils l'avaient vu.
- Mais non enfin, je vous dis que-
- Dis-moi, Pavel, fit Maréchal, songeur, tu as un couteau dans ta roulotte ?
- Un couteau ?... Oui, je crois...
- Tu crois... Ecoute, on va aller voir. J'espère pour toi qu'il s'y trouve.
Le détective prit son imper. Dans la tisanerie, il retrouva Rampoix, qui buvait un café, après son petit somme.
- Alors ?
- C'est presque fini. Tu as le temps de m'accompagner sur la Platz ?
- Si tu veux.
Les deux hommes sortirent du commissariat, pendant que Sobotka était raccompagné par un Pandore dans sa cellule.
La Platz était le centre du quartier. Elle était entouré par les bâtiments officiels et les succursales d'importantes corpoles, dont la Pham'Velker, ainsi que par l'immeuble d'un gros syndicat ouvrier.
La roulotte de Sobotka était gardée par un Pandore, immobile sous la fine pluie.
Les deux détectives de SURETE le saluèrent.
- On a besoin de fouiller.
- Allez-y, fit le prétorien, content de pouvoir aller boire un coup au bistrot d'à côté.
Les deux détectives renversèrent la roulotte et la vidèrent sans ménagement. Au milieu du bordel, Maréchal trouva une cuillère tordue et noircie.
- Tu trouves quelque chose, Rampoix ?
- Pas de couteau.
Les deux hommes vérifièrent minutieusement et abandonnèrent la roulotte vidée sous la pluie.
- Pas de couteau, Sobotka.
Le truand blêmit sur sa chaise inconfortable.
- Donc c'est clair. Tu as croisé Beltrando, vous en êtes venu aux mains. Et tu l'as proprement poignardé, avant de t'acharner sur le corps.
Devant un jury, l'avocat de la partie civile traduirait cela en : "assassinat avec acharnement sauvage".
- Quelque chose à ajouter, Pavel ?...
- Non, je vous jure ce n'est pas moi !
La porte s'ouvrit et Novembre, hiératique, lugubre, coléreux, entra. Sobotka le fixa avec des yeux exorbités.
- Tu commences à nous faire sérieusement chier, mon garçon !
Maréchal enleva la feuille de l'imprimante et en remit une autre pendant que Novembre reprenait sa place au bureau.
- Alors, on va reprendre ensemble, depuis le début, une dernière fois...