06-03-2007, 06:28 PM
(This post was last modified: 07-03-2007, 01:24 AM by Darth Nico.)
Tourville se réveilla, vit dans quelle situation il était. Il avait une rude voix d'homme de la mer. Il devint blanc comme un linge.
- Qui est-ce ? demanda Maréchal.
Tourville s'assit dans un fauteuil.
- C'est Landévec ! Mais ce n'est pas moi qui-
- Silence, répondez à mes questions, c'est urgent. Ute Lamborghini était ici ?...
- Oui-da ! C'est elle et Desforêts qui m'ont séquestré ! Ils ont dû m'emmener dans cette chambre, après m'avoir endormi !
Les hommes de PANDORE arrivaient au pied de l'hôtel, alertés par l'agitation qui y régnait. Des gens faisaient leurs bagages, surtout ceux qui avaient, indépendamment de ce meurtre, quelque chose sur la conscience.
Maréchal se fit raconter en vitesse ce qui s'était passé par Tourville. Il savait qu'on aurait amplement le temps de reprendre ces questions au commissariat.
Le vieux marin avait rencontré Lamborghini quelques mois plus tôt. Ce n'est qu'au dernier moment que Tourville avait compris que la fille était complice de Desforêts.
- Je suis allé le trouver hier, après avoir tant peiné à le trouver ! Et j'ai senti son parfum alors ! J'ai su qu'elle était dans cette maison ! Et ce n'était pas quelqu'un d'autre avec le même parfum !... C'est à ce moment qu'un domestique a dû m'assommer.
- Vous cherchiez à obtenir votre part du trésor ?
- Oui... Et ce salopard le savait, lui qui s'est tout gardé pour lui !
- C'était quoi, ce trésor ?
- De la poudre de selenium. Les militaires s'en servent pour certaines de leurs armes. Le navire qu'on a visité devait en avoir dans ses soutes. La plupart était partie à la flotte mais il devait en rester. C'est ça que Desforêts a trouvé. Ca vaut une fortune !
- Il a attendu la retraite pour la vendre ?
- Sans doute.
- Il aurait refusé à tous les coups de partager.
- Dans ce cas, je l'aurais accusé de vol de biens militaires.
- Mais vous n'en avez pas eu le temps...
- Non, ils m'ont étendu avant...
- Pourquoi tuer Landévec ?...
- Ce n'est pas moi ! Ils m'ont emmené dans cette piaule et m'ont mis ce couteau en main !
- Pourquoi Desforêts voudrait tuer Landévec ?
- Je ne sais pas... Ce que je sais, c'est que cette pute m'a séduit sur ordre de Desforêts...
- Comment vous avez pu payer la chambre de Lamborghini ?
- En vendant quelques assurances bidons ! Je vous assure que c'est tout ce que j'ai fait de mal ! Jamais je n'aurai tué !
Les Pandores arrivaient dans la chambre.
- Emmenez-le, dit Maréchal, mais faites-le attendre dans mon bureau.
L'inspecteur voulait croire le marin innocent et lui éviter le Dépôt. Il appela le commissariat et ordonna qu'on se rende au Novö-Art.
Il partit à pied et arriva après ses collègues. Dans sa chambre, Lamborghini avait tenté de se suicider. On venait de l'emmener à l'hôpital.
Deux heures plus tard, on appela l'inspecteur, qui était retourné chez lui. C'était le docteur Jouvet. Il avait procuré quelques soins urgent à Lamborghini, dans l'hôtel et l'avait accompagnée à l'hôpital. Ses jours n'étaient pas en danger mais elle avait perdu beaucoup de sang.
- Elle s'est réveillée et a demandé à dicter ses aveux à un policier. Je lui ai dit de se reposer pour le moment. La police est venue m'apprendre qu'un certain Desforêts a été arrêté. Elle a paru soulagée.
- Merci de votre appel, docteur.
- J'ajoute qu'elle a parlé de vous. Elle a dit qu'elle était désolée. Elle implorait même votre pardon.
- Merci docteur.
Maréchal raccrocha et retourna à sa bouteille, à l'alcool au goût de larmes.
En début d'après-midi, l'inspecteur était au commissariat. Desforêts avait passé un sale moment en compagnie des détectives, puis de l'inspecteur Novembre.
Maréchal ne voulut pas le voir. Il se contenta de lire ses aveux.
Bien qu'ayant fait fortune, il avait mal géré son argent. Ses affaires de chevaux ne marchaient pas. Il s'était retrouvé insolvable. Les banques ne lui prêteraient rien. Alors il s'était souvenu que Landévec possédait aussi une partie du sélénium. Et comme le cinquième homme de l'Hippocampe n'avait pas fait fortune, Desforêts en avait conclu qu'il n'avait pas compris la valeur de cette poudre. Ou qu'il n'avait pas voulu prendre de risque en vendant un bien militaire.
Il s'était renseigné sur les autres marins. De vivant, il restait, en plus de Landévec, que Tourville. Desforêts avait donc ordonné à Ute de séduire le vieux marin, pour savoir s'il savait quelque chose sur le sélénium. Finalement, les recherches de Tourville avaient permis à Desforêts de retrouver Landévec. Ute avait retrouvé, le jour d'avant, Tourville et ce dernier avait parlé du trésor. Il avait l'intention d'en parler à Landévec, de s'en faire un allié contre Desforêts. Ce dernier, mis au courant par l'ex-danseuse de cabaret, avait alors imaginé la mise en scène du Negresco. Il était prêt à tuer pour récupérer le selenium et se renflouer avec.
Tourville s'était jeté dans la gueule du loup en allant lui-même rue Verte. Il avait bien senti le parfum d'Ute, juste avant qu'un domestique ne l'assomme. Le soir, les deux ravisseurs s'étaient rendus au Negresco avec Tourville endormi, transporté par un domestique. C'est Desforêts qui avait tué Landévec en découvrant qu'il avait la poudre avec lui. Et il avait obligé Ute à mettre elle-même le couteau dans la main du vieux marin.
Alors que Desforêts et son domestique prenait une minute pour peaufiner la mise en scène, Ute s'était enfuie, s'était précipité dans la loge du concierge (qui n'était pas couché, inquiet du remue-ménage dans la chambre 32) et elle avait appelé en catastrophe Maréchal, avant d'être "reprise" par le domestique. Elle avait été emmenée au Novö-Art. Desforêts tentait de rentrer rue Verte, mais sur le chemin, Rampoix et Boncousin l'interceptait avec son domestique.
En fin de journée, Maréchal se rendit à l'hôpital. Encore très faible, Ute n'ouvrait pas les yeux mais était consciente.
- Vous avez fait ce qu'il fallait en m'appelant. C'était courageux... J'imagine votre desespoir.
Bien sûr, il était incapable de lui en vouloir.
- Si tu veux continuer à nous aider, je ferai de mon mieux pour alléger les peines contre toi.
- Je me suis rendue complice d'un assassinat.
- En tant qu'inspecteur, je pourrai certifier que tu as agi largement sous la contrainte. C'est toi qui nous a alertés.
- Comment va Louis ?
- Il est au commissariat. Il se remet. Je pense qu'on va le libérer. Il aura une amende pour n'avoir pas aidé SÛRETE alors qu'il savait que nous voulions l'interroger.
- C'est tout ?
- Oui.
Que se serait-il passé si je Maréchal avait retrouvé rapidement Tourville ? Car c'est bien Desforêts qui avait dit à Ute d'aller voir la police.
Si Tourville avait été retrouvé, Ute aurait dû jouer la fiancée morte d'inquiètude. Desforêts voulait savoir ce que Tourville savait sur le sélénium. Les choses seraient allées plus vite, car Desforêt se serait tourné plus vite vers Landévec. La mise en scène aurait été la même mais pas dans l'urgence et Tourville aurait été accusé à coup sûr.
- Le vieux Louis a eu raison de vous faire courir, conclut Novembre en relisant le rapport de l'inspecteur.
- Je rentre me coucher.
- Prends quelques jours, Antonin. Tu en auras besoin.
- Merci.
Joseph Desforêts eut contre lui au tribunal non seulement Ute et Tourville, pour la mort de Landévec, mais aussi des officiers de la Marine, pour vol de matériel militaire. Il fut aussi reconnu coupable de séquestration sur la personne de Tourville. Il fut pendu deux mois plus tard. Tourville eut du sursis pour entrave à l'action de la police, et une amende.
Le patron du Negresco fut envoyé au Château pour complicité d'assassinat. Il savait très bien ce qui se passait dans la chambre 32, les billets dans ses poches en témoignaient éloquemment.
De Portzamparc se remit à la recherche de celui qui avait prévenu Tourville que la police était après lui. Il découvrit que c'était bel et bien l'ouvrier Ballack. Il le mit en garde-à-vue deux jours, le temps de charger son dossier. Pour obstruction à la justice, il partit lui aussi au Château quelques temps.
Enfin, Ute, pour complicité d'assassinat sous la contrainte, fut envoyée six ans dans une prison pour femme. Maréchal avait pesé comme il avait pu pour qu'elle bénéficie de circonstances atténuantes.
Trois mois plus tard, un soir qu'il avait déjà bu avec Novembre puis seul chez lui, il vit sous sa porte une carte-postale. Elle était signée d'Ute et Tourville. Le marin avait rendu visite à la prisonnière et ils étaient tombés amoureux pour de bon.
Ils allaient se marier bientôt ! Ils invitaient Maréchal à la cérémonie, qui se déroulerait dans la cour de la prison.
L'inspecteur trouva un prétexte pour ne pas y aller. Il lut dans le journal que la cérémonie avait été émouvante.
Plusieurs détenues, prostituées, empoisonneuses, tueuses, avaient fondu en larmes.
En somme, Maréchal avait bien fait son boulot de flic : il avait aidé une femme en détresse, arrêté un assassin, permit à l'armée de retrouver son sélénium et contribué à faire naitre l'amour entre un marin retraité et une ex-danseuse de cabaret. Si c'était pas le plus beau métier du monde...
FIN DU DOCUMENT