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Dossier #5 : La vie d'hommes infâmes
#17
DOSSIER #5<!--sizec--><!--/sizec-->

Dès qu'il arriva, Portzamparc constata :
Maréchal n’est pas là, ce matin
- Il a appelé, dit Sampieri. Il arrivera cet après-midi seulement. Il dit qu’il n’a pas dormi de la nuit.
Rampoix était au parlophone, très agité. Il raccrocha et se précipita dans le bureau des inspecteurs :
- J’étais en communication avec l’inspecteur Tircelan, de la Rue Verte. Vous savez que là-bas aussi, ils sont sur l’affaire Boncousin. Hé bien, ils ont identifié l’amant…
- Alors ?
- Il s’agit d’un certain Gaëlien de Saint-Preux. Il est responsable du personnel chez les Donasserne.
Rampoix n’était pas mécontent de lui.
- Le salaud… Si c’est lui qui a fait buter Patrick… Je vais aller en parler au commissaire, puisque c’est lui qui dirige les opérations, maintenant…
- J’ai voulu appeler Novembre, dit Sampieri. Il avait laissé le numéro de son hôtel, au cap Blanc-Nez, mais on m’a dit qu’il n’était pas là. Il est peut-être descendu à une autre adresse.

En début d’après-midi, Maréchal entra, sans se faire remarquer, pendant que ses collègues mangeaient la soupe à l’oignon au restaurant d’en face. Souple comme une scolieuvre, il traversa le commissariat et se glissa dans son bureau, où l’attendait son hamac. Il avait installé son chromatographe de manière à pouvoir s’en servir presque facilement en étant allongé.
- Allô mademoiselle, passez-moi le commissariat de Rainure – Saint-Polska.
Il raccrocha et s’endormit. Il fut réveillé par la sonnerie.
- Monsieur, ne quittez pas. Le correspondant demandé va vous répondre.
- Allô ?
- Allô, oui…
Il se présenta et demanda si on avait aperçu dans le quartier un type avec une Gueule de Rat.
- Je suis en train de vous transmettre le portrait robot, dit Maréchal. Il a déjà pas mal circulé ces derniers temps. Vous savez qu’un de nos collègues a été tué…
- Nous sommes au courant, inspecteur. Nous avons le visage de cet homme. Mais il n’a jamais été vu chez nous.
- Tant pis.
- Désolé.
- Je vous remercie.
Paresseux, grognon, Maréchal ferma les yeux. Dans son demi-sommeil, il repensa à ce qu’on venait de lui dire. Pas un mot d’encouragement ni de soutien pour Boncousin, contrairement aux autres commissariats, ce qui était bien le moins quand un collègue se faisait tuer !
Juste une excuse, formulée mécaniquement.

Maréchal eut alors un frisson dans le dos. Est-ce que la voix qui lui avait répondu n’était pas celle du Scientiste qui lui avait proposé l’abri pour la nuit ?...

Maréchal regarda bizarrement son chromatographe, comme si le Scientiste s’y était introduit...

Pour se rassurer, il appela le poste de la Jointure. Là, il reconnut la voix de son interlocuteur : un vrai policier en chair et en os, qui l’assura qu’on faisait tout pour retrouver le tueur de Boncousin !
- L’inspecteur Boncousin nous avait appelé, dit-on à Maréchal, au sujet des casseurs de la Pham’Velker. Apparemment, l’affaire lui tenait à cœur.
C’était l’inspecteur Velmer, qu’on disait promis à un brillant avenir, dans la police judiciaire, et qui faisait ses armes à la Jointure.
- Merci pour votre aide.

Maréchal raccrocha.
Ses collègues qui rentraient du déjeuner, le trouvèrent en train de ronfler comme un bienheureux, une jambe pendant hors du filet.

*

- Que fait-on pour ce Saint-Preux ? demanda Sampieri.
- Je peux aller le voir, proposa Portzamparc.
- Entendu, dit Rampoix. Tu es le mieux désigné pour ce genre de démarches.
- J’ai l’habitude maintenant.

Portzamparc repassa donc chez lui se changer.
- Ce soir, je sors. Mais c’est pour le travail.
- Il va falloir t’habiller un peu proprement, lui dit sa femme.
Elle lui repassa son costume pendant qu’il se faisait beau.
- Ne serre pas tant, dit-il pendant qu’elle lui redressait sa cravate.
- Si je n’étais pas là, tu aurais l’air d’un clochard…
- Tu exagères toujours…
- Plains-toi que je m’occupe de toi…

Frais et parfumé, le détective se rendit à la station de ballon-taxi, où Théodule Corben rit de bon cœur en le voyant :
- Où on va ce soir, patron ? Au bal des débutantes ? Au gala de la comtesse Tropschild ?
- Pas si loin. Rue Verte !
- C’est parti !

L’engin décolla.
De grosses gouttes se mirent à tomber. Portzamparc avait prévu sur surcot de protection.
- Sale temps, hein... Et comme d'habitude, on n'annonçait pas un nuage...
Le tonnerre gronda au loin, et de l'électricité parcourut les nuages noirs, dans le ciel bleu acier ; d'énormes cumulus se déformaient à une vitesse fantastique. Puis le ballon-taxi redescendit, au-dessus des beaux quartiers.
- A tout à l’heure, dit Corben.
Il était content d’aller, en attendant, se rincer la gorge à la brasserie de la rue des grands ormes.

Portzamparc lui dit qu'il ferait vite.
Les fiacres passaient sur le pavé luisant. Les belles dames descendaient de voiture pour entrer dans les restaurants. Des officiers en permission avançaient, torse bombé, cigarette aux lèvres et les restaurants étaient bondées, remplies de gens aux beaux habits pimpants sous les lumières.

L’immeuble où se rendait Portzamparc était dans une grande artère plantée d’arbre, l’avenue Marthuis, bien éclairée, sans une feuille morte par terre.
Le détective se présenta à la loge, qui était grande comme un petit pavillon.
- Vous désirez ?
On n’aurait à peine pu qualifier la femme qui gardait les lieux de concierge. Elle était plutôt jeune, encore séduisante, habillée comme la secrétaire d’un grand cabinet médical.
- Je voudrais voir monsieur de Saint-Preux…
Dans ce décor, Portzamparc avait plutôt l’allure d’un jeune avocat aux dents longues que d’un fonctionnaire de SÛRETÉ. Il inspirait confiance.
- Je l’appelle…
L’immeuble disposait en effet pour lui seul d’un réseau chromatographique privé ! Une telle installation coûtait une fortune.
- Monsieur de Saint-Preux vous attend.
Portzamparc eut le réflexe de chercher l’escalier. Mais il y avait une belle cage d’ascenseur, avec une grille en fer forgé, de la moquette et des boutons dorés. Il se laissa monter. L'installation était si bien huilée qu'il eut à peine l'impression d'être soulevé.
A l'étage, après avoir marché sur de l'épaisse moquette rouge, le détective sonna. Il entendit des pas de l’autre côté de la porte vernis. On ouvrit :
- Entrez, inspecteur.
C’était un bel homme.
Cheveux châtains, pose à la fois assurée et détendue, d’une quarantaine d’années, en robe de chambre et pantoufles, un fume-cigarettes à la main. Il fit passer le détective dans un grand salon. Il y avait une terrasse qui donnait sur le parc bordant l’hippodrome.
- Asseyez-vous, je vous en prie.
Dans la journée, le détective l’avait appelé pour solliciter ce rendez-vous. Il avait aussi prévenu l’inspecteur Tircelan de sa démarche.
- Je pense que vous savez pourquoi je viens, monsieur de Saint-Preux.
- Oui, hélas… Je veux dire que la mort de cette fille m’a énormément affecté…
- Sans doute autant que nous avons été affectés par la mort de notre collègue, la même nuit…
- J’ai lu la nouvelle dans les journaux… C’est affreux.
- Nous pensons que les deux affaires sont liées.
Portzamparc s'assit et regarda un moment par la fenêtre

- Mais revenons à cette danseuse, Juliana… Que pouvez-vous me dire sur elle ?
- J’ai eu le béguin, je ne peux pas le nier. Seulement, ces derniers temps, je me suis dit que ce n’était pas une relation saine.
- Connaissez-vous cet homme, monsieur de Saint-Preux ?
Portzamparc tendit la photo de Gueule de Rat. Son hôte blémit.
- Il a vraiment…
- Une sale tête ? Oui… Vous n’avez rien d’autre à m’en dire ?... D’après les concierges de Juliana, cet homme a rencontré Juliana et il lui a fermement conseillé de ne plus vous fréquenter…
- Mais, pourquoi ?... Je n’ai jamais vu cet homme…
Il y avait quelque chose d’héroïque chez lui, pour arriver à mentir avec autant d’aplomb. On le sentait rongé.
- Revenons à mon collègue qui a été tué. Nous pensons que l’auteur du meurtre n’est autre que cet homme qui a une si vilaine tête. Nous l’avons surnommé Gueule de Rat…
- Ma foi, dit Saint-Preux en s’efforçant de sourire, il n’a pas volé ce surnom.
- Vous avez dû croiser mon collègue à la Dentelle Rose, non ? Regardez…
Portzamparc tendit une photo de Boncousin.
- C’est bien possible, oui… Vous savez, ce n’est pas lui que je regardais quand j’y allais…
- Quelles que soient les personnes qui avaient « préparé » Saint-Preux à cet entretien, elles avaient bien écrit son rôle. Elles avaient dû lui conseiller de ne pas mentir sur sa liaison avec Juliana. Mais ne rien lâcher concernant la Gueule de Rat ou Boncousin.
- Mon collègue aussi, à vrai dire, avait repéré Juliana. Alias Noémie Ranaud, d’ailleurs. Vous saviez ?
- Oh non, vous savez, son vrai nom… Quant à votre collègue, je le comprends… Qui, au cabaret, n’était pas plus ou moins amoureux de cette danseuse, n’est-ce pas ?
Bien sûr.
- Voilà, détective. J’aimerais vous aider davantage, mais…
Portzamparc sourit largement, pour montrer qu’il n’était pas dupe. Il se leva et devina le soulagement de Saint-Preux. Il eut ce soupir qu’on pousse quand le dentiste annonce :
- C’est fini pour aujourd’hui…
Oui, c’était fini pour aujourd’hui, mais pas pour les autres jours. Portzamparc n’en avait pas terminé avec lui. Seulement, il n’était pas dans son quartier et ce Saint-Preux avait une place enviable chez les Donasserne. En insistant, Portzamparc aurait créé des ennuis à l’inspecteur Tircelan.
- Au revoir, monsieur de Saint-Preux.
- Détective de Portzamparc, au plaisir.

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