17-05-2008, 11:54 PM
(This post was last modified: 18-05-2008, 04:25 PM by Darth Nico.)
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE
<span style="color:#008000">2ème chapitre : Contrebande, opium et katanas<!--sizec--></span><!--/sizec-->
<span style="color:#008000">2ème chapitre : Contrebande, opium et katanas<!--sizec--></span><!--/sizec-->
Manji et Katon étaient cachés dans un coin du grand entrepôt, parmi les caisses de marchandise de Patron-san. Ils attendaient depuis une heure quand ils entendirent la petite porte de derrière grincer. Par le filet de lumière de seigneur Lune qui entrait, ils virent deux silhouettes pénétrer à pas de velours, sans faire grincer le parquet. L'une d'elle s'approcha d'une caisse et la déplaça doucement. Il révéla ce faisant un passage entre cet entrepôt et celui d'à côté, qui appartenait aussi à Rintaro. Il se mit à quatre pattes et s'engagea dans le passage. Alors qu'il se relevait pour étudier les lieux, il se fit attraper par le col et vit une grande flamme jaillir, qui venait des mains d'un jeune homme. Elle s'élevait en une torche ; le bandit hurla et recula.
- Ne bouge plus !
Dans l'entrepôt d'à côté, Manji attrapait l'autre en lui collant sa lame sur la gorge.
Le cri du premier sonna l'alerte : les deux complices qui attendaient à l'extérieure prirent leurs jambes à leurs cous... Ils entendirent alors un cri qui les pétrifia sur place, le célèbre cri qui tue, et le moment d'après, Maya leur sautait dessus comme une enragée, puis les envoya au tapis en quelques coups bien placés.
En retrait, Mamoru et Yojiro hésitaient à intervenir.
- On est censés couvrir leur fuite, non ?
- Ça doit être ça... dit Yojiro.
Ils ne disaient même pas ça par peur des coups mais par discipline : ils voulaient suivre scrupuleusement les ordres reçus et ne pas gêner les infiltrés.
Ceux-ci passèrent le plus mauvais quart d'heure de leur vie dans l'entrepôt, exposés aux hommes de main de Rintaro. L'un d'eux se fit rosser par Maya, et traîner dehors. Maya aperçut alors deux silhouettes, les mêmes que celles vues dans le brouillard, sans davantage les reconnaître. De son côté, Yojiro reconnut bien Maya et ses formes inoubliables.
- Elle a l'air de tenir la forme ce soir, se dit Yojiro.
Sur ce, les deux anciens Crabes se dirent qu'il était l'heure d'aller boire un verre.
- Alors, disait Maya en baffant le yakuza, tu venais chercher quoi ici ? De la drugs, c'est ça ??...
Elle aurait fait sourire son interlocuteur s'il avait encore eu une lèvre pas trop gonflée pour ça...

Le lendemain, Horiu retrouva les deux Crabes, qui se promenaient tranquillement dans la rue.
Il les fit entrer dans la même taverne que la veille :
- Qu'est-ce qui s'est passé hier ? Vous n'êtes pas intervenus ?
- On avait compris qu'on devait couvrir une éventuelle retraite...
- Mais pas du tout ! Je vous ai dit d'intervenir s'il y avait du grabuge...
- On a mal compris...
Et ils ne paraissaient pas peureux en le disant, juste un peu "épais"... Ils avaient vraiment mal compris !
- J'ai quatre hommes qui se sont fait attraper comme des chiens galeux... Ils ont dû parler et Rintaro va savoir !
- Ah, c'était un entrepôt de Patron-san ?...
- Oui !
- Parce qu'on connaît des samuraï qui sont à son service...
- Il va falloir vous rattraper, dit vertement Horiu. Je ne vais pas tolérer un nouvel échec.
- On est désolés si on a mal compris, dit Yojiro.
C'était comme ça : les Crabes avaient des moments d'absence...
Un des hommes de main entra dans la taverne en courant :
- Chef, voilà la bande à Rintaro !
- Ils n'ont pas perdu de temps !
Patron-san arrivait, suivi par ses désormais célèbres acolytes, Manji, Maya et Katon.
- Horiu ! Sors de là, j'ai à te parler !
Pour essayer de se rattraper, Yojiro et Mamoru sortirent se poster devant l'entrée.
- Tiens, qui voilà ? dit Katon.
- Konnichi-wa, dit Yojiro, de son air le plus sérieux.
- Bon, suffit, dit Rintaro, conduisez-moi à votre chef ! On a des choses à se dire là !
Un homme de main s'approcha de l'entrée :
- C'est bon, ils peuvent passer. Horiu accepte de les voir.
Katon fit signe que de toute façon, il avait intérêt à bien vouloir !
Rintaro passa et dit à sa suite d'aller s'asseoir à une table, boire aux frais de leur hôte.
- Pas d'inquiétude, les enfants, on va discuter à part.
- On sera juste à côté, s'il y a un problème, dit Manji.
Les deux patrons se retirèrent. Du coup, les samuraï eurent le temps de boire un verre ensemble, comme de vieux amis. Yojiro présenta Mamoru.
- Tu m'as tiré d'un mauvais pas, Yojiro. Heureusement que tu étais là.
- Ce n'était rien, voyons.
Ils eurent le temps de descendre quelques bouteilles avant la fin de la réunion au sommet. A la fin, l'ambiance était des plus joyeuses. Les Crabes se tapaient sur les cuisses et même Manji, pourtant le plus modéré de la bande, avait le rouge aux joues.
Le rideau se rouvrit : Horiu et Rintaro sortirent et se saluèrent.
- C'est entendu ainsi. Je suis sûr que cet accord sera mutuellement profitable.
Rintaro se frottait les mains en repartant :
- Cette fripouille de Horiu a encore essayé de m'amadouer, mais ça ne prend pas ! Quel culot monstre, aussi, de se servir de mes entrepôts pour y stocker ses saloperies ! Qu'il se les garde !
Manji et Katon étaient rassurés de voir que Rintaro se refusait à donner dans le trafic de l'opium. Ils en concevaient du coup une estime plus grande pour leur chef.
- J'ai obtenu un accord très avantageux... C'était bien le moins qu'il puisse accepter pour se faire pardonner !
A la taverne, Horiu n'était pas mécontent non plus.
- Cette crapule de Rintaro s'est laisser faire, une fois de plus. Il était en mesure de me demander bien plus comme dédommagement et il s'est contenté de trois grains de riz... Décidément, il ne changera jamais. Avec son petit cœur tendre, il n'a pas la carrure pour mener des affaires sérieuses.
Horiu but son verre et dit aux rônins qu'ils allaient devoir sérieusement se mettre au travail pour lui, s'ils voulaient faire oublier leurs erreurs !
Yojiro promit qu'ils feraient de leur mieux.
- N'essayez pas, faites-le, un point c'est tout.

Le lendemain, de bon matin, Manji, Maya et Katon étaient au port du sud de la ville. Celui qui était envahi par les brumes à la nuit et qui, ce matin, resplendissait sous le beau soleil d'automne. Des pécheurs réparaient leurs filets. La vente à la criée se terminait déjà. Une patrouille du Gouverneur buvait un verre à la taverne du port. Des gouttes blanches brillaient au loin sur l'eau cristalline.
Nos samuraï entrèrent dans la taverne Les dents de la mer et y rencontrèrent, au fond de la salle, un épais marin, qui respirait très fort et avait déjà entamé une bouteille de saké, de bon matin. C'était le contact que Rintaro les envoyait rencontrer : le capitaine Vert.
- Nous venons vous voir de la part de Patron-san, dit Katon, en faisant signe au tavernier de resservir une bouteille.
C'était le saké du port, le saké des marins, âpre et rugueux.
- Nous avons appris que vous convoyez des plantes médicinales, depuis le sud.
Vert fit un petit signe d'assentiment grognon.
- Nous serions intéressé par l'achat d'une partie de votre cargaison.
Le capitaine grogna que ces plantes étaient pour les moines :
- Plantes médicinales... soignent la douleur... décoctions...
- Rintaro est prêt à y mettre le prix.
Manji n'aimait pas trop ce commerce : Patron-san avait juré ne pas mettre les mains dans le trafic d'opium, contrairement à Horiu. Il voulait pourtant acheter des "plantes médicinales".
- Elle vienne d'où, ces plantes ?
- Ryoko Owari...
De mieux en mieux ! La Cité des Mensonges ! Le meilleur nid de l'Empire pour les criminels de la pire espèce !
Pas le genre d'endroit où Manji aurait envie de mettre les pieds.
Katon négocia un tarif acceptable et resservit une tournée au capitaine, qui finirait seul d'attendre les brumes du soir en contemplant le fond de sa bouteille.
A la sortie de la taverne, nos héros croisèrent l'indic de Patron-san.
- Ah, vous tombez bien...
Et voilà le groupe parti dans la taverne d'à côté, Le miroir de la mer, pour discuter le coup.
- Alors ? demanda Katon.
- J'avais du nouveau pour votre chef... Comme vous êtes là, je vais vous le dire...
- Tiens, patron, une bouteille de prune...
- C'est pas de refus, ma foi...
Katon était bien à l'aise pour faire parler comme ça les gens du demi-peuple. Manji voyait cela avec un mélange d'étonnement et de consternation. Si jeune, prendre de telles habitudes de parler à la canaille... Maya semblait ailleurs, l'esprit navigant sur son petit nuage doré.
- Alors voilà l'affaire... Il paraîtrait que le Gouverneur s'est lourdement endetté auprès des Scorpions... Pourquoi ? Parce que la famille Bayushi lui a rappelé un devoir qu'il avait envers les Ancêtres...
- Venant de la famille Bayushi, dit Manji, il faut s'attendre au pire.
- Ils ont dit au seigneur Mondô qu'il avait l'obligation de bâtir un temple pour un Ancêtre ayant remporté une bataille dans le coin, voici trois générations... Quelque chose comme ça... La construction du temple va coûter des milliers de kokus au Gouverneur... Bien sûr, le clan du Scorpion s'est aussitôt montré disponible pour prêter l'argent...
- Ils ne leur ont pas emprunté quand même !
- Hé si... Le Gouverneur avait peur de perdre la face devant sa famille, son clan... Donc il a négocié en sous-main avec les Scorpions... Il leur a emprunté l'argent ; à un taux soi-disant très avantageux... Tu parles !
- Il a mis la main dans le nid de vipères, dit Manji.
- Bref, maintenant, il s'apprête à recevoir les kokus... Il a préféré attendre que le shinsen-gumi ait quitté la ville pour cette transaction.
- Oui, c'est plus prudent.
- Donc il va recevoir l'argent... Hmm, pas mauvaise cette prune... L'argent, dans un vase précieux, vraisemblablement... Un pot contenant plus d'un millier de kokus... Nul doute que si quelqu'un met la main dessus...
- Attendez, qui va oser voler les biens du Gouverneur ?
- Il y en a bien eu pour voler des kokus impériaux, fit l'indic.
- C'est vrai...
- Je voulais juste vous prévenir. Que Rintaro sache qu'un tel vase est sur le point d'arriver en ville.
- Bon, merci. On lui dira.
L'indic reprit un verre et s'en alla, titubant, sous le beau ciel bleu, déambuler dans les rues qui sentaient le poisson.
De l'autre côté du bassin du port, Mamoru et Yojiro sortaient d'une taverne, Les travailleurs de la mer, où ils avaient pris des renseignements sur l'acheminement des plantes médicinales depuis les villes du sud. Ils rentrèrent voir Horiu :
- Alors, ces plantes ?
- Nous avons parlé à un capitaine qui transporte ces marchandises, dit Yojiro. Il est d'accord pour nous laisser une partie de la cargaison. Mais si j'ai bien compris, ce ne sera pas donné.
- Je peux payer, ce n'est pas le problème, dit Horiu.
- Entendu.
- Bon, puisque la journée commence sous de bons augures, vous allez retourner en ville. J'ai entendu parler de vases précieux, ces temps-ci...
Il toussota, remit ses manches et reprit :
- Enfin, bref, je désire acquérir des vases précieux... Voilà, c'est tout. Rien de bien compliqué... Trouvez-moi des marchands en possédant. Renseignez-vous sur les prix.
- Bien, patron.

Les deux Crabes se séparèrent pour mener les recherches. Ils prirent l'après-midi pour se renseigner sur les vases. Mamoru trouva un informateur, en la personne d'un pilier de comptoir et joueur de go, dans une taverne cachée au fond d'une ruelle du quartier des potiers. Mamoru joua avec lui, le temps d'apprendre quelques bonnes adresses dans le coin. L'ancien Crabe perdit la partie et paya à boire. Il retrouva Yojiro, qui avait visité quelques boutiques, sans y trouver d'objets luxueux.
- Allons voir l'endroit qu'on t'a indiqué.
Les deux Crabes visitèrent une grande boutique, tenue par un petit homme inquiet des désirs du client, obséquieux dans ses petits gestes. Rien qui atteignait les deux masses musculaires armées, qui étaient aussi fins connaisseurs en poterie qu'un bœuf en origami.
Ils revinrent, les bras ballants, chez Horiu :
- On a quelques adresses. Des potiers... Il y en a un qui a des marchandises intéressantes...
- Bien, bien, dit Horiu. Écoutez, je vais vous laisser libres pour ce soir. Demain, vous surveillerez la maison. Demain soir, vous irez voir mes entrepôts.
- Vous attendez de la visite là-bas ?
- Peut-être bien...
- Les gens de Rintaro qui viendraient se venger ?
- Non, Rintaro est trop gentil pour ça... Je pensais au gang du requin. Ceux-là sont de sacrés rancuniers. Et j'ai en ce moment des marchandises précieuses stockées là-bas.
- On veillera dessus, patron, pas d'inquiétude.
Les deux Crabes sortirent boire un verre.
- J'espère qu'on aura de la visite aux entrepôts, dit Yojiro en s'étirant. Je commence à me rouiller !
Yojiro rentra chez lui : grâce à la protection de Horiu, il avait une servante qui venait s'occuper de son abri. Elle avait préparé la soupe quand il arriva. Mamoru dormait dans une bicoque juste à côté, qui était aussi la propriété de Horiu. Ce n'était pas encore le confort fourni par un clan de samuraï mais nos deux Crabes n'étaient pas trop à plaindre.
A suivre...
