30-12-2009, 05:52 PM
(This post was last modified: 17-01-2010, 03:29 PM by Darth Nico.)
COPS - Saison 2, Épisode 1
Borderline
- Asseyez-vous donc...
C'est le plus âgé des deux types en costard qui accueille avec complaisance les flics dans le bureau de Skripnik.
- Alors, il paraît qu'on s'intéresse à l'Amérique du Sud ?...
Il le dit comme un prof d'histoire qui va donner un exposé à faire à sa classe. Les COPS n'ont d'autre choix que de s'assoir et d'écouter la leçon. L'autre type en costard allume un écran mural et affiche une carte du nord de l'Amérique latine. Jade et les autres se présentent, et la Chinoise essaie de demander au type en costard comment il se nomme, mais elle se fait gentiment rembarrer, comme une petite fille qui a dit une bêtise mais qui ne pouvait en avoir conscience...
- Bien, passons aux choses sérieuses. Géopolitique de la drogue en Colombie... Je pense qu'un petit rappel sera utile à tout le monde...
Il regarde les COPS comme de grands enfants, comme des agents de la circulation un peu améliorés.
Zoom de la carte sur la Colombie :
- Le cartel Ciudad a été créé il y a une petite trentaine d'années, par cet homme, Juan Vargas Ciudad. La photo que vous voyez date d'il y a cinq ans.
On voit un papy bronzé, la peau liftée, en costume blanc, un cigare à la bouche, descendre de voiture, aidé par deux hommes.
- Le vieux patriarche a régné sur son cartel de drogue, de prostitution et d'armes, mais aujourd'hui, il sait qu'il doit passer la main...
Le type en costume parle presque de Juan avec affection, comme d'un vieux copain de régiment.
- Si ça se trouve, le vieux Juan est mort à l'heure actuelle... Et la succession, quoi qu'il en soit, va se décider entre ses deux fils : Carlos ou Felipe. En fait, le cours des choses s'est accéléré : Felipe a pris les devants et a fait appel à l'armée de l'Union. Il a attaqué l'une des bases du Cartel, dans l'espoir de ramasser toute la mise. Il a réussi à s'emparer d'un peu plus de la moitié de Ciudad, en fait, en comptant les hommes, le matériel, les réseaux etc. L'autre moitié, fidèle au vieux Juan, est passée sous les ordres de Carlos.
"Par-dessus cela, se rajoute un autre problème, plus urgent. Ce sont les accointances du cartel Ciudad avec une organisation terroriste, les Serpents-Jumeaux. Ces derniers ont fait appel à Ciudad pour se procurer une bombe non-conventionnelle, qui va être acheminée en plusieurs fois sur notre sol, assemblée en ville, où il sera facile de la dissimuler. Cette bombe n'est pas radioactive, ne dégage pas de chaleur. Elle est au contraire à contenir dans un caisson réfrigéré. Et vous avez eu démonstration, en miniature, des dégâts qu'elle peut causer...
"Depuis la scission à l'intérieur de Ciudad, nous ignorons avec qui les SJ continuent de traiter. Carlos ou Felipe ? Le fils fidèle ou le fils indigne ?...
" Il y a une troisième chose, mais pour cela, je laisse la parole au capitaine Bronstein.
- Merci monsieur, dit le chef du SAD. Ce qui vient en plus, vous le savez pertinemment, c'est la défection d'un des vôtres...
Bronstein n'a pas le ton de mépris condescendant de l'autre. Il joue bien plus la solidarité avec les COPS : bien qu'il soit le chef de leurs supérieurs, de la police des polices, il ne joue pas l'autoritarisme inutilement.
- Cet homme, c'est l'agent William Costigan, dit Alecto. Les preuves de son ralliement au cartel Ciudad ne sont plus à fournir. Nous savons que Costigan a pris contact avec Ciudad à Los Angeles ; et comme cadeau de remerciement, il a tué l'agent Carl Forrest, de la NADIV, qui était de mèche avec Ciudad mais avait été découvert. Or, après plusieurs semaines de silence radio, nous venons de retrouver la trace de Costigan...
Bronstein se tourne vers un autre membre du SAD, la trentaine, portant beau, le sourire carnassier de celui qui pense à sa carrière en se rasant le matin :
- Lieutenant John Spears, je vous laisse la parole.
- Bien, merci capitaine. Lieutenant John Spears. Je reviens de la frontière mexicaine, où j'ai été envoyé il y a 36 heures, quand on nous a signalés la présence de William Costigan sur les bords du Rio Grande.
Où va le monde, songe Jade, si les gens du SAD, commencent à se rendre sur le terrain ?
- J'avais avec moi une taskforce de l'antigang pour l'intercepter.
Ah oui, se dit Jade, c'est les gens du CRASH qui se payaient un petite excursion à Tijuana...
- Mais non seulement Costigan n'a pas répondu aux injonctions de reddition, mais il a ouvert le feu sur les hommes dont j'avais la charge. Ils étaient dissimulés près de la frontière, et nous ont cerné... Résultat : un carnage. J'ai perdu huit hommes et Costigan s'est échappé.
Les photos des membres du CRASH défilent à l'écran. Un lourd silence s'installe dans la salle.
- Vous comprendrez que j'ai à cœur de retrouver cette ordure au plus vite.
Reito a vraiment mal en entendant cela. Lui qui jusqu'au bout voulait croire en son ancien partenaire, il voit ses dernières illusions s'effondrer.
- Que vient faire Costigan dans notre affaire ? demande Jade, toujours assez sèche.
- Voyez ces images, dit John Spears, et vous allez comprendre.
On voit Costigan, en images jaune-vert à la frontière mexicaine, portant une grosse valise, blindée, fermée hermétiquement.
- Nos experts sont formels, dit Spears. C'est dans cette valise qu'est transporté le composant essentiel à la bombe froide des Serpents-Jumeaux. Les autres composants, qui vont arriver sur notre sol ou s'y trouvent déjà, ne sont pas repérables séparément. Seul cette partie de la bombe est dors et déjà dangereuse. Et c'est Costigan le convoyeur. Costigan qui va arriver, ou qui est peut-être déjà de retour chez nous...
- La question est donc de savoir, dit l'homme en costume, comment vous vous comporterez si vous êtes en situation de l'arrêter...
- Nous l'arrêterons, affirme Jade, mais vous me semblez bien presser de le retirer de la circulation. Moi je voudrais bien savoir ce qui lui est arrivé, pourquoi il a viré sa cuti si vite...
Jade n'avait auparavant ni antipathie ni sympathie particulière pour Alecto, mais d'une, c'était un collègue et de deux, elle connaissait son efficacité et ce n'était pas un pervers, un manipulateur, un calculateur. C'était juste un bon flic qui essaie de faire son boulot. Et trois, elle veut faire ravaler leur arrogance à John Spears et au mec en costard. Et surtout à ce dernier.
- Si on doit l'arrêter, on l'arrêtera, dit Black Dog, ça ne me gêne pas. C'est un tueur de flic, point. Il a trahi, c'est son problème, nous on est là pour l'arrêter.
- A partir de maintenant, je prends la tête de cette opération, annonce John Spears. Je piloterai moi-même vos interventions, et je m'assurerai que nous arrêtions Costigan et la bombe avant quarante-huit heures.
Jade se tourne vers Skripnik, le fixe du regard. Elle a déjà connu le capitaine du COPS plus vaillant.
- Nous devons apprendre à coordonner nos services, car nous sommes dans une situation de crise exceptionnelle, dit le capitaine.
Belle langue de bois. Jade se jure qu'ils ne l'emporteront pas au paradis, les crânes d'œuf du SAD et d'on ne sait trop quel service secret dont fait partie l'autre type en costume...
- Et pour commencer, dit Spears, on va reprendre l'interrogatoire du type que vous venez d'arrêter, ce... Maldonado, c'est ça ? Et croyez-moi, il va cracher les informations qu'il sait.
Il y a dans l'air un fort relent de régime d'exception et de mesures spéciales, le parfum écœurant des abus de pouvoir.
- Vu la tournure que cela prend, dit Jade, cet interrogatoire se fera sans moi.
Reito et Black Dog ont moins de scrupule et vont accompagner Spears. La Chinoise retourne à son bureau, froide et la tête haute, suivie de près par Akechi, qui va aller se tourner les pouces. Elle n'a pas pris le temps de serrer la main de ses supérieurs.
"Bercés par le ronron de l'air conditionné..."
La nuit a été courte pour ceux qui ont voulu s'assoupir, elle a été longue pour ceux qui ont voulu résister au sommeil. Le petit matin est gris pour tout le monde. L'air est tiède et humide. Il est huit heures quand les COPS arrivent à l'aéroport de LAX.
L'interrogatoire de Maldonado le bagagiste a donné quelques informations aux COPS : il a bien été contacté par des gens qui ne demandaient qu'à l'aider, lui et sa famille. En échange de quelques versements mensuels, il a fourni des horaires, des indications sur la surveillance d'aéroport. Et pour le lendemain, Maldonado doit opérer une substitution de bagages pour le premier vol en provenance de Quito, Équateur. Une valise qui sera acheminée par Maldonado depuis un des terminaux sera prise par un autre bagagiste. Maldonado n'aura qu'à s'arrêter un instant, près des locaux techniques du Terminal, dans un endroit peu surveillé, et laisser l'autre employé prendre une grosse valise rouge souple.
Après réflexion, il a été décidé qu'on garderait Maldonado au frais et que c'est Charlie Swagger, alias Reito, qui allait prendre sa place. Le chef du personnel de frêt a été averti qu'il aurait aujourd'hui un nouvel employé, qui remplacera Maldonado, qui a mangé un truc pas frais la veille. Reito est sur le pied de guerre à huit heures. Il est accueilli fraîchement par le reste du personnel, qui tient à sa routine et n'aime pas les nouvelles têtes. Les tournées de bagages commencent, et Reito sent l'hostilité de la part du personnel. La journée commence dans les vestiaires lugubres de LAX, dans les souterrains où grondent les chaufferies et les circuits de climatisation. On continue entre les locaux noirs, dans le matin bientôt chaud, au pied des Boeing. Reito a deux heures à passer sur sa voiturette, avant l'arrivée du vol de Quito, à 10h10.
Jade et Akechi sont au PC Sécurité, pour visionner l'aéroport. De leur côté, Black Dog et l'agent John Spears du SAD sont dans une camionnette, pour la coordination des équipes, du drone de surveillance et des forces en ville. La mâtinée se passe à boire du café brûlant, dans des lieux clos, climatisés, loin du beau temps de ce début du mois de juin. Les traits des flics sont tirés, l'aéroport, immense, grouille de vie comme une métropole, des machines et des hommes travaillent déjà à leurs boulots routiniers.
Il est 9h45 quand les panneaux d'affichage annoncent que l'Ecuador Lineas en provenance de Quito aura une demi-heure de retard.
- Comptez une heure, corrige le chef du PC Sécurité, pas moins.
Jade, qui commençait à sentir la pression monter, se rassoit, fatigué. On informe Reito qu'il aura le temps de décharger un autre appareil. Il a encore le temps de visiter le terminal international TomBradley.
Jade, qui n'y tient plus, dit qu'elle va aller boire un verre au Starbuck's Coffee à côté. Akechi la suit, et les deux femmes se retrouvent accoudées au comptoir, entre les passagers pressés qui boivent un coup sur le pouce. Une foule se presse au départ de Hawaï. Des clients se plaignent, une dame hurle sur une hôtesse et s'arrache les cheveux, des familles courent alors qu'on annonce le dernier appel pour le Japon, des vigiles ceinturent un grand Hindou enturbanné...
Jade consulte sa montre, lassée : bientôt onze heures. Le vol de Quito est enfin annoncé. Il faut s'y remettre, malgré la fatigue qui pèse. Il fait froid, dans ces locaux en béton, en plastique et en métal. A force, l'air brassé devient saoulant.
Alors que l'appareil venu d'Équateur touche la piste, Jade et Akechi sont de retour au PC-Sécurité. Reito est en bout de piste, Spears et Black Dog écrasent leur cigarette et rentrent dans la camionnette.
Reito va prendre les bagages sur sa voiturette, surveillé par son équipe et le drone dans les airs. Il emmène le chargement vers le terminal Bradley et, au croisement prévu, croise l'autre bagagiste. Les deux voiturettes s'approchent l'une de l'autre, et Reito passe la valise rouge souple comme prévu. Puis il repart, passe à son vestiaire et se change. Maintenant, Jade et Akechi partent arrêter le bagagiste, tandis que le reste de l'équipe suit la valise rouge.
Le bagagiste est emmené au commissariat de l'aéroport. Aau téléphone, avec quelques tractations, Jade parvient à s'informer sur le nom du propriétaire de la valise rouge (elle se heurte à la réticence de la compagnie aérienne, qui cède quand Jade reçoit sur un mandat du juge). C'est un certain Pedro Macheco, nom très commun en Amérique latine. La valise est en transit par Los Angeles vers l'Union. Bref, rien à espérer pour retrouver ce Pedro Macheco, qui risque de ne pas revoir sa valise...
Celle-ci arrive une demi-heure après sur le tapis roulant qui serpente dans la salle où les voyageurs se précipitent. Des agents de sécurité gardent un œil sur la valise, de même que les COPS par les caméras. Les familles récupèrent peu à peu leurs affaires, les bagages disparaissent. Au moment où un groupe d'une trentaine de Latinos arrive, un homme de type Caucasien, cheveux peroxydés, blouson en cuir, arrive, prend la valise et s'en va.
- Ne l'arrêtez pas, lance Spears à tout le monde, on le suit. Je répète : on le suit !
A nouveau, le branle-bas de combat ! L'homme à la valise part aux parkings, niveau -3. C'est Black Dog qui le prend en filature. Du côté du bagagiste, on aura pas le temps de s'en occuper, donc on le laisse aux flics de l'aéroport, qui lui feront cracher ce qu'il sait.
Black Dog descend par l'escalier, et continue à suivre le type, qui a une grosse berline argent. Il claque sa portière et démarre doucement. Black Dog passe près de lui, l'air de rien. Il aperçoit un type, affairé, qui essaie de caler des valises dans le coffre de sa Range Rover. Notre policier s'approche de lui, montre sa plaque et lui annonce qu'il réquisitionne sa voiture.
Il suit doucement la berline à travers les immenses étages des parkings souterrains, dans les rues du centre commercial construit sous l'aéroport. Les deux véhicules ressortent à l'autre bout du complexe, suivis par le drone. Dans sa camionette, Spears entame la poursuite. Jade et Colombo prennent montent dans une patrouilleuse, et tout ce petit monde s'engage sur la voie expresse.
Les deux femmes repensent à la Bible trouvée chez Swaim, avec le passage de Saint-Luc 4, 1-13 surligné.
- Je suis persuadé que c'est Las Vegas, dit Akechi. La tentation dans le désert, ça ne peut être que ça...
- Ce qui est sûr, dit Jade, c'est que le type en berline va vers l'est. Mais rien ne dit qu'il part à Vegas, surtout que c'est pas non plus la porte à côté.
Pourtant, le véhicule passe par Downtown, puis poursuit vers l'est, par la route qui mène à la Cité du Vice. Mais il prend une bretelle peu avant la sortie de la ville, et descend dans un petit quartier commerçant, avec des galeries bondées de monde. Il s'arrête sur un trottoir, gare rapidement sa voiture, en laissant les clefs sur le contact.
Black Dog s'est arrêté à proximité. La tension monte encore d'un cran dans l'équipe. Black Dog sort et suit le type aux cheveux péroxydés. Jade et Akechi ne sont pas loin, et continuent de surveiller la voiture.
- Je fais quoi ? demande Black Dog, bousculé par la foule du centre commercial, qui suit l'homme à une distance peu prudente pour ne pas le perdre.
- Les clefs sont sur le contact, dit Jade. Quelqu'un d'autre va venir...
- On attend, on attend, confirme Spears.
Akechi a les mains moites sur le volant. Jade sent qu'il va se passer des choses désagréables. Elle repense à l'enfer, dont lui parlait le dingue des Serpents Jumeaux.
Black Dog est prêt à intercepter le conducteur. Il n'attend plus qu'une confirmation. Spears s'apprête à lui dire de l'arrêter, quand quelqu'un arrive près de la berline argenté, ouvre la porte et se met au volant.
Jade ferme un instant les yeux, et serre les dents. Elle fait une courte prière, comme par réflexe. Celui qui vient de reprendre le véhicule, et qui le démarre, c'est Costigan.
Borderline
- Asseyez-vous donc...
C'est le plus âgé des deux types en costard qui accueille avec complaisance les flics dans le bureau de Skripnik.
- Alors, il paraît qu'on s'intéresse à l'Amérique du Sud ?...
Il le dit comme un prof d'histoire qui va donner un exposé à faire à sa classe. Les COPS n'ont d'autre choix que de s'assoir et d'écouter la leçon. L'autre type en costard allume un écran mural et affiche une carte du nord de l'Amérique latine. Jade et les autres se présentent, et la Chinoise essaie de demander au type en costard comment il se nomme, mais elle se fait gentiment rembarrer, comme une petite fille qui a dit une bêtise mais qui ne pouvait en avoir conscience...
- Bien, passons aux choses sérieuses. Géopolitique de la drogue en Colombie... Je pense qu'un petit rappel sera utile à tout le monde...
Il regarde les COPS comme de grands enfants, comme des agents de la circulation un peu améliorés.
Zoom de la carte sur la Colombie :
- Le cartel Ciudad a été créé il y a une petite trentaine d'années, par cet homme, Juan Vargas Ciudad. La photo que vous voyez date d'il y a cinq ans.
On voit un papy bronzé, la peau liftée, en costume blanc, un cigare à la bouche, descendre de voiture, aidé par deux hommes.
- Le vieux patriarche a régné sur son cartel de drogue, de prostitution et d'armes, mais aujourd'hui, il sait qu'il doit passer la main...
Le type en costume parle presque de Juan avec affection, comme d'un vieux copain de régiment.
- Si ça se trouve, le vieux Juan est mort à l'heure actuelle... Et la succession, quoi qu'il en soit, va se décider entre ses deux fils : Carlos ou Felipe. En fait, le cours des choses s'est accéléré : Felipe a pris les devants et a fait appel à l'armée de l'Union. Il a attaqué l'une des bases du Cartel, dans l'espoir de ramasser toute la mise. Il a réussi à s'emparer d'un peu plus de la moitié de Ciudad, en fait, en comptant les hommes, le matériel, les réseaux etc. L'autre moitié, fidèle au vieux Juan, est passée sous les ordres de Carlos.
"Par-dessus cela, se rajoute un autre problème, plus urgent. Ce sont les accointances du cartel Ciudad avec une organisation terroriste, les Serpents-Jumeaux. Ces derniers ont fait appel à Ciudad pour se procurer une bombe non-conventionnelle, qui va être acheminée en plusieurs fois sur notre sol, assemblée en ville, où il sera facile de la dissimuler. Cette bombe n'est pas radioactive, ne dégage pas de chaleur. Elle est au contraire à contenir dans un caisson réfrigéré. Et vous avez eu démonstration, en miniature, des dégâts qu'elle peut causer...
"Depuis la scission à l'intérieur de Ciudad, nous ignorons avec qui les SJ continuent de traiter. Carlos ou Felipe ? Le fils fidèle ou le fils indigne ?...
" Il y a une troisième chose, mais pour cela, je laisse la parole au capitaine Bronstein.
- Merci monsieur, dit le chef du SAD. Ce qui vient en plus, vous le savez pertinemment, c'est la défection d'un des vôtres...
Bronstein n'a pas le ton de mépris condescendant de l'autre. Il joue bien plus la solidarité avec les COPS : bien qu'il soit le chef de leurs supérieurs, de la police des polices, il ne joue pas l'autoritarisme inutilement.
- Cet homme, c'est l'agent William Costigan, dit Alecto. Les preuves de son ralliement au cartel Ciudad ne sont plus à fournir. Nous savons que Costigan a pris contact avec Ciudad à Los Angeles ; et comme cadeau de remerciement, il a tué l'agent Carl Forrest, de la NADIV, qui était de mèche avec Ciudad mais avait été découvert. Or, après plusieurs semaines de silence radio, nous venons de retrouver la trace de Costigan...
Bronstein se tourne vers un autre membre du SAD, la trentaine, portant beau, le sourire carnassier de celui qui pense à sa carrière en se rasant le matin :
- Lieutenant John Spears, je vous laisse la parole.
- Bien, merci capitaine. Lieutenant John Spears. Je reviens de la frontière mexicaine, où j'ai été envoyé il y a 36 heures, quand on nous a signalés la présence de William Costigan sur les bords du Rio Grande.
Où va le monde, songe Jade, si les gens du SAD, commencent à se rendre sur le terrain ?
- J'avais avec moi une taskforce de l'antigang pour l'intercepter.
Ah oui, se dit Jade, c'est les gens du CRASH qui se payaient un petite excursion à Tijuana...
- Mais non seulement Costigan n'a pas répondu aux injonctions de reddition, mais il a ouvert le feu sur les hommes dont j'avais la charge. Ils étaient dissimulés près de la frontière, et nous ont cerné... Résultat : un carnage. J'ai perdu huit hommes et Costigan s'est échappé.
Les photos des membres du CRASH défilent à l'écran. Un lourd silence s'installe dans la salle.
- Vous comprendrez que j'ai à cœur de retrouver cette ordure au plus vite.
Reito a vraiment mal en entendant cela. Lui qui jusqu'au bout voulait croire en son ancien partenaire, il voit ses dernières illusions s'effondrer.
- Que vient faire Costigan dans notre affaire ? demande Jade, toujours assez sèche.
- Voyez ces images, dit John Spears, et vous allez comprendre.
On voit Costigan, en images jaune-vert à la frontière mexicaine, portant une grosse valise, blindée, fermée hermétiquement.
- Nos experts sont formels, dit Spears. C'est dans cette valise qu'est transporté le composant essentiel à la bombe froide des Serpents-Jumeaux. Les autres composants, qui vont arriver sur notre sol ou s'y trouvent déjà, ne sont pas repérables séparément. Seul cette partie de la bombe est dors et déjà dangereuse. Et c'est Costigan le convoyeur. Costigan qui va arriver, ou qui est peut-être déjà de retour chez nous...
- La question est donc de savoir, dit l'homme en costume, comment vous vous comporterez si vous êtes en situation de l'arrêter...
- Nous l'arrêterons, affirme Jade, mais vous me semblez bien presser de le retirer de la circulation. Moi je voudrais bien savoir ce qui lui est arrivé, pourquoi il a viré sa cuti si vite...
Jade n'avait auparavant ni antipathie ni sympathie particulière pour Alecto, mais d'une, c'était un collègue et de deux, elle connaissait son efficacité et ce n'était pas un pervers, un manipulateur, un calculateur. C'était juste un bon flic qui essaie de faire son boulot. Et trois, elle veut faire ravaler leur arrogance à John Spears et au mec en costard. Et surtout à ce dernier.
- Si on doit l'arrêter, on l'arrêtera, dit Black Dog, ça ne me gêne pas. C'est un tueur de flic, point. Il a trahi, c'est son problème, nous on est là pour l'arrêter.
- A partir de maintenant, je prends la tête de cette opération, annonce John Spears. Je piloterai moi-même vos interventions, et je m'assurerai que nous arrêtions Costigan et la bombe avant quarante-huit heures.
Jade se tourne vers Skripnik, le fixe du regard. Elle a déjà connu le capitaine du COPS plus vaillant.
- Nous devons apprendre à coordonner nos services, car nous sommes dans une situation de crise exceptionnelle, dit le capitaine.
Belle langue de bois. Jade se jure qu'ils ne l'emporteront pas au paradis, les crânes d'œuf du SAD et d'on ne sait trop quel service secret dont fait partie l'autre type en costume...
- Et pour commencer, dit Spears, on va reprendre l'interrogatoire du type que vous venez d'arrêter, ce... Maldonado, c'est ça ? Et croyez-moi, il va cracher les informations qu'il sait.
Il y a dans l'air un fort relent de régime d'exception et de mesures spéciales, le parfum écœurant des abus de pouvoir.
- Vu la tournure que cela prend, dit Jade, cet interrogatoire se fera sans moi.
Reito et Black Dog ont moins de scrupule et vont accompagner Spears. La Chinoise retourne à son bureau, froide et la tête haute, suivie de près par Akechi, qui va aller se tourner les pouces. Elle n'a pas pris le temps de serrer la main de ses supérieurs.
"Bercés par le ronron de l'air conditionné..."
La nuit a été courte pour ceux qui ont voulu s'assoupir, elle a été longue pour ceux qui ont voulu résister au sommeil. Le petit matin est gris pour tout le monde. L'air est tiède et humide. Il est huit heures quand les COPS arrivent à l'aéroport de LAX.
L'interrogatoire de Maldonado le bagagiste a donné quelques informations aux COPS : il a bien été contacté par des gens qui ne demandaient qu'à l'aider, lui et sa famille. En échange de quelques versements mensuels, il a fourni des horaires, des indications sur la surveillance d'aéroport. Et pour le lendemain, Maldonado doit opérer une substitution de bagages pour le premier vol en provenance de Quito, Équateur. Une valise qui sera acheminée par Maldonado depuis un des terminaux sera prise par un autre bagagiste. Maldonado n'aura qu'à s'arrêter un instant, près des locaux techniques du Terminal, dans un endroit peu surveillé, et laisser l'autre employé prendre une grosse valise rouge souple.
Après réflexion, il a été décidé qu'on garderait Maldonado au frais et que c'est Charlie Swagger, alias Reito, qui allait prendre sa place. Le chef du personnel de frêt a été averti qu'il aurait aujourd'hui un nouvel employé, qui remplacera Maldonado, qui a mangé un truc pas frais la veille. Reito est sur le pied de guerre à huit heures. Il est accueilli fraîchement par le reste du personnel, qui tient à sa routine et n'aime pas les nouvelles têtes. Les tournées de bagages commencent, et Reito sent l'hostilité de la part du personnel. La journée commence dans les vestiaires lugubres de LAX, dans les souterrains où grondent les chaufferies et les circuits de climatisation. On continue entre les locaux noirs, dans le matin bientôt chaud, au pied des Boeing. Reito a deux heures à passer sur sa voiturette, avant l'arrivée du vol de Quito, à 10h10.
Jade et Akechi sont au PC Sécurité, pour visionner l'aéroport. De leur côté, Black Dog et l'agent John Spears du SAD sont dans une camionnette, pour la coordination des équipes, du drone de surveillance et des forces en ville. La mâtinée se passe à boire du café brûlant, dans des lieux clos, climatisés, loin du beau temps de ce début du mois de juin. Les traits des flics sont tirés, l'aéroport, immense, grouille de vie comme une métropole, des machines et des hommes travaillent déjà à leurs boulots routiniers.
Il est 9h45 quand les panneaux d'affichage annoncent que l'Ecuador Lineas en provenance de Quito aura une demi-heure de retard.
- Comptez une heure, corrige le chef du PC Sécurité, pas moins.
Jade, qui commençait à sentir la pression monter, se rassoit, fatigué. On informe Reito qu'il aura le temps de décharger un autre appareil. Il a encore le temps de visiter le terminal international TomBradley.
![[Image: terminal_map.gif]](http://www.airport-la.com/img/terminal_map.gif)
Jade, qui n'y tient plus, dit qu'elle va aller boire un verre au Starbuck's Coffee à côté. Akechi la suit, et les deux femmes se retrouvent accoudées au comptoir, entre les passagers pressés qui boivent un coup sur le pouce. Une foule se presse au départ de Hawaï. Des clients se plaignent, une dame hurle sur une hôtesse et s'arrache les cheveux, des familles courent alors qu'on annonce le dernier appel pour le Japon, des vigiles ceinturent un grand Hindou enturbanné...
Jade consulte sa montre, lassée : bientôt onze heures. Le vol de Quito est enfin annoncé. Il faut s'y remettre, malgré la fatigue qui pèse. Il fait froid, dans ces locaux en béton, en plastique et en métal. A force, l'air brassé devient saoulant.
Alors que l'appareil venu d'Équateur touche la piste, Jade et Akechi sont de retour au PC-Sécurité. Reito est en bout de piste, Spears et Black Dog écrasent leur cigarette et rentrent dans la camionnette.
Reito va prendre les bagages sur sa voiturette, surveillé par son équipe et le drone dans les airs. Il emmène le chargement vers le terminal Bradley et, au croisement prévu, croise l'autre bagagiste. Les deux voiturettes s'approchent l'une de l'autre, et Reito passe la valise rouge souple comme prévu. Puis il repart, passe à son vestiaire et se change. Maintenant, Jade et Akechi partent arrêter le bagagiste, tandis que le reste de l'équipe suit la valise rouge.
Le bagagiste est emmené au commissariat de l'aéroport. Aau téléphone, avec quelques tractations, Jade parvient à s'informer sur le nom du propriétaire de la valise rouge (elle se heurte à la réticence de la compagnie aérienne, qui cède quand Jade reçoit sur un mandat du juge). C'est un certain Pedro Macheco, nom très commun en Amérique latine. La valise est en transit par Los Angeles vers l'Union. Bref, rien à espérer pour retrouver ce Pedro Macheco, qui risque de ne pas revoir sa valise...
Celle-ci arrive une demi-heure après sur le tapis roulant qui serpente dans la salle où les voyageurs se précipitent. Des agents de sécurité gardent un œil sur la valise, de même que les COPS par les caméras. Les familles récupèrent peu à peu leurs affaires, les bagages disparaissent. Au moment où un groupe d'une trentaine de Latinos arrive, un homme de type Caucasien, cheveux peroxydés, blouson en cuir, arrive, prend la valise et s'en va.
- Ne l'arrêtez pas, lance Spears à tout le monde, on le suit. Je répète : on le suit !
A nouveau, le branle-bas de combat ! L'homme à la valise part aux parkings, niveau -3. C'est Black Dog qui le prend en filature. Du côté du bagagiste, on aura pas le temps de s'en occuper, donc on le laisse aux flics de l'aéroport, qui lui feront cracher ce qu'il sait.
Black Dog descend par l'escalier, et continue à suivre le type, qui a une grosse berline argent. Il claque sa portière et démarre doucement. Black Dog passe près de lui, l'air de rien. Il aperçoit un type, affairé, qui essaie de caler des valises dans le coffre de sa Range Rover. Notre policier s'approche de lui, montre sa plaque et lui annonce qu'il réquisitionne sa voiture.
Il suit doucement la berline à travers les immenses étages des parkings souterrains, dans les rues du centre commercial construit sous l'aéroport. Les deux véhicules ressortent à l'autre bout du complexe, suivis par le drone. Dans sa camionette, Spears entame la poursuite. Jade et Colombo prennent montent dans une patrouilleuse, et tout ce petit monde s'engage sur la voie expresse.
Les deux femmes repensent à la Bible trouvée chez Swaim, avec le passage de Saint-Luc 4, 1-13 surligné.
- Je suis persuadé que c'est Las Vegas, dit Akechi. La tentation dans le désert, ça ne peut être que ça...
- Ce qui est sûr, dit Jade, c'est que le type en berline va vers l'est. Mais rien ne dit qu'il part à Vegas, surtout que c'est pas non plus la porte à côté.
Pourtant, le véhicule passe par Downtown, puis poursuit vers l'est, par la route qui mène à la Cité du Vice. Mais il prend une bretelle peu avant la sortie de la ville, et descend dans un petit quartier commerçant, avec des galeries bondées de monde. Il s'arrête sur un trottoir, gare rapidement sa voiture, en laissant les clefs sur le contact.
Black Dog s'est arrêté à proximité. La tension monte encore d'un cran dans l'équipe. Black Dog sort et suit le type aux cheveux péroxydés. Jade et Akechi ne sont pas loin, et continuent de surveiller la voiture.
- Je fais quoi ? demande Black Dog, bousculé par la foule du centre commercial, qui suit l'homme à une distance peu prudente pour ne pas le perdre.
- Les clefs sont sur le contact, dit Jade. Quelqu'un d'autre va venir...
- On attend, on attend, confirme Spears.
Akechi a les mains moites sur le volant. Jade sent qu'il va se passer des choses désagréables. Elle repense à l'enfer, dont lui parlait le dingue des Serpents Jumeaux.
Black Dog est prêt à intercepter le conducteur. Il n'attend plus qu'une confirmation. Spears s'apprête à lui dire de l'arrêter, quand quelqu'un arrive près de la berline argenté, ouvre la porte et se met au volant.
Jade ferme un instant les yeux, et serre les dents. Elle fait une courte prière, comme par réflexe. Celui qui vient de reprendre le véhicule, et qui le démarre, c'est Costigan.