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Dossier #20 : Chimères
#7
DOSSIER #20

Cette fois, ils prirent le funiculaire. L'homme ne desserrait pas les dents. Maréchal causait à voix basse à Faivre.
- C'est un imbécile, mais il est quand même assermenté à mon avis. Donc ne le brusquons pas trop. Jonson sera déjà fâché contre lui qu'il se soit faire prendre comme un débutant.
- Compris, patron. Mais moi, tout ça me paraît bien facile.
- Ne jamais sous-estimer l'inexpérience des stagiaires d'OBSIDIENNE, ni la bêtise de leurs supérieurs.
- Je vous entends, vous savez.
Il restait assis sur son siège, pas fier de lui mais pas tellement inquiet. Plutôt honteux.
- Et ça ne t'incite pas à nous parler ? dit Maréchal. Tu as un mandat, une autorisation, pour espionner les gens ? Si j'étais procédurier, je vous amènerais devant le juge pour violation de mon intimité !
- Ne me faites pas rire.
- Allez, debout, on est arrivés !
La rame s'immobilisait à hauteur du quai.
- Avance, et ne fais pas le mariole. Sinon, on termine la nuit à la "Maison".
Résigné, l'homme marcha, les mains dans les poches. Maréchal et Faivre le suivirent comme son ombre, leurs armes dans la poche. Ils saluèrent les braves plantons dans leur corps de garde à l'entrée de la vaste cour de la PJ.
Ils entrèrent dans le passage Gourdi, dans le petit café de la veille, minuscule derrière ses vitres dépolies. Il y avait trois tables. On s'installa à celle juste derrière la porte d'entrée quand elle s'ouvrait.
Une fille en tenue de cabaret écrasait une cigarette. Faivre lui fit un clin d'oeil. Elle ne dit rien, remit ses cheveux, prit sa veste au portemanteau et partit. Le patron lisait le journal derrière le comptoir, pas décidé à servir les clients.
Maréchal et Faivre se mirent à l'aise.
- Vous n'auriez pas dû venir avec moi, dit le jeune.
Il n'était pas effrayé, c'était juste un constat.
Maréchal aurait donné un mois de prime pour savoir qui allait arriver. Le patron se décida à plier son journal. Il se contenta de faire passer trois verres et une bouteille d'alcool à la table. Faivre remplit les verres. Maréchal avait roulé une cigarette et la tapait nerveusement sur la table. Le jeune s'en roula une aussi.
Maréchal lui donna du feu.
- Tu n'as rien à nous dire ?
On entendait des pas dehors.
- Rien...

La porte s'ouvrit en tintinnabulant. Maréchal se leva à peine :
- Entrez, inspecteur, nous vous attendions.
C'était Petitdieu, de la Crim'. Il fut juste surpris ; pas effrayé, mais finalement embêté. Il s'assit à table docilement.
- Un autre verre, patron, dit Faivre.
- Alors, Petitdieu, on vient prendre l'air avant le service de nuit ?
- Faites les malins, tiens...
Petitdieu était dans la force de l'âge. C'était une éminence grise du commissaire Ménard depuis longtemps. Il vouait une sincère admiration à son chef ; on disait qu'il était un peu son âme damnée.
- Pourquoi vous nous surveillez ? Vous trouvez qu'on n'avance pas assez vite ?... C'est Jonson qui vous a demandé de faire ça ? Je pourrais vous excuser dans ce cas... Lehors est au courant ? Allez Petitdieu, quoi, sois plus loquace. Bois un verre, raconte-nous, entre amis, là...
- Non merci...
Faivre cogna le cul de la bouteille sur la table :
- Tu prends un verre avec nous. On a toute la nuit pour comprendre.
- Repartez à Névise, franchement...
Petitdieu but. Il avait confiance en sa résistance à l'alcool.
- Tu as joué, tu as perdu. Pourquoi nous surveiller ? Qui c'est lui ?...
- Ecoute, Maréchal...
- Rien du tout. Je n'apprécie pas ces méthodes. Je vous rappelle que c'est vous qui êtes venus nous chercher. C'est Lehors d'ailleurs. On bosse pour Ménard, on travaille à infiltrer les Vicari, on prépare un beau cadeau de départ à la retraite pour ton chef, le cul de Fabio Vicari sur sa commode, et voilà vos manières... Et ton silence ne fait qu'aggraver la situation... Dis-moi juste que c'est Jonson qui t'a ordonné de le faire, et j'irai lui demander des explications.
- Honnêtement, je voudrais bien t'aider Maréchal, mais là...
- Reprends un verre, dit Faivre. Si, allez...Toi aussi...
Petitdieu l'avala sans sourciller mais le jeune cracha et eut les larmes aux yeux.
- Pas encore bon pour le service ! s'exclama Faivre en lui tapant dans le dos.
Maréchal regardait Petitdieu avec une hostilité de plus en plus grande. Il sentait un sale secret derrière cela. Si c'était OBSIDIENNE, il aurait déjà craché le morceau.
- Qui l'a envoyé, Petitdieu ? C'est toi ?
- Pars, Maréchal, pars...
C'était visible, maintenant, l'homme de Ménard avait peur. Mais pas pour lui, peur pour ses deux collègues de Névise.
- Tu as les foies, Petitdieu ?... Toi, le bras droit du "patron" ?
- Casse-toi, c'est tout ce que je peux te dire... Je te jure que cet idiot ne reviendra plus vous embêter...
- Vous en trouverez un autre, un qui sait éteindre la lumière et boire à la bouteille ?


¤


Maréchal ne savait pas quoi dire pour briser la glace. Même, à la limite, Petitdieu commençait à lui faire pitié. C'était lui qui avait besoin d'aide, mais il avait sa fierté...
- Ecoute, entre collègues, on peut s'entraider, mais il faut que tu me dises...
- Laisse tomber, ça n'en vaut pas la peine...
Comme le triste policier finissait sa phrase, une grenade passa à travers la vitre. Elle projeta un nuage lacrymogène. Les trois policiers et le jeune espion sortirent en courant dans le passage, où ils furent cueillis comme des lapins à la sortie du bois. Un déluge de coups de matraques s'abattit sur eux. Des masques à gaz apparaissaient dans le nuage étouffant, de grosses mains qui saisissaient nos héros, des godillots qui partaient en courant, des gabardines sinistres qui surgissaient hors du passage et enfournaient les quatre victimes dans une voiture à cheval. Une autre arrivait au galop et embarquait les ravisseurs.
Maréchal avait le crâne qui lui sonnait comme une cymbale, les yeux qui pleuraient sans arrêt. On l'avait bâillonné et rapidement ligoté. Faivre se débattait comme un diable. D'un coup de tête, il écarta le rideau et voulut se jeter par la fenêtre. Maréchal gémit tant qu'il put pour le décourager. Faivre se tordit le cou et vit, à côté du conducteur, un homme armé d'un gros pistolet qui lui intimait de rentrer la tête.
Petitdieu et son homme n'avaient pas repris connaissance.

La voiture tressautait sur le pavé cahoteux. Nos héros furent cognés plusieurs fois, contre les banquettes. La course folle continua pendant une petite demi-heure. Quand les chevaux s'immobilisèrent, les passagers soupirèrent de soulagement. Ils avaient l'impression de sortir du pressoir.
La pause fut de courte durée. Les gabardines et les gros gants surgirent, les attrapèrent et les emportèrent comme des saucissons. Faivre aurait voulu mordre, taper, cogner. Maréchal savait qu'il se fatiguerait à résister et se débattre. C'était des professionnels, et aussi des armoires à glace.

On les posa à terre et on leur dit de marcher, sous la menace de fusils. Étourdis, les prisonniers n'eurent pas le choix. Petitdieu tenait mal debout. Ils entrèrent dans un grand hangar. Il faisait sombre. De la lumière bleutée de Forge perçait par les trous dans les grandes vitres dépolis, dans la charpente en bois, dans la toiture en zinc ondulé.

Maréchal était abasourdi par toute cette violence. Il n'aurait pas cru cela possible de la part d'OBSIDIENNE !
On les fit asseoir sur des chaises, dans une petite pièce qui aurait pu être le bureau du contremaître.

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Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 14-12-2011, 05:31 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 15-12-2011, 10:29 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by sdm - 17-12-2011, 08:26 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 24-12-2011, 04:03 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 26-12-2011, 01:42 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 28-12-2011, 03:34 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 28-12-2011, 10:25 PM
RE: Dossier #20 : Chimères - by sdm - 02-01-2012, 02:45 AM
RE: Dossier #20 : Chimères - by Darth Nico - 06-01-2012, 05:38 PM

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