11-05-2010, 06:51 AM
(This post was last modified: 11-05-2010, 06:53 AM by Darth Nico.)
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'ÉMERAUDE
Sasuke arriva deux jours plus tard et ce fut l’occasion d’une réception organisée par les Lions. Mitsurugi avait pris ses aises dans le palais réservé à son clan, et rien de tel pour se sentir chez soi que d’inviter ses amis !
- Nous avons également besoin de nous changer les idées, dit Sasuke.
Ils n’oubliaient pas la menace que Lotus faisait peser sur eux. Akodo le Borgne avait dit : couche-toi pour être en forme quand un assassin viendra chez toi au milieu de la nuit. Mais la philosophie de nos héros étaient davantage de profiter de la vie avant la confrontation avec ledit assassin !
Mitsurugi invita sa belle-famille, les amis Hida ; Sasuke invita ses deux amis tensaï, Isawa Mizu et Isawa Nobuyoshi. Ce fut une belle soirée, bien arrosée comme les côtes sud de l’Empire après un tsunami ! Un tsunami de saké ! Des typhons de rire grâce aux blagues les plus grasses des Crabes ! Le capitaine Kaiu Koga n’était jamais à court d’anecdotes paillardes et d’histoires dignes de celles du Bouffon impérial. Isawa Nobuyoshi, derrière ses airs sévères prit part au banquet et fut en quelque sorte en première sur le front de la boisson et de la nourriture. Qui aurait cru que ce samuraï grand et sec comme une brindille pouvait autant avaler ?
Doji Ikue dut annoncer, après que son père et son frère lui eurent forcé la main, qu’elle allait préparer le concours d’origami, l’un des plus prestigieux. Sifflets admiratifs des Crabes, qui portèrent un toast à l’artiste. Mitsurugi avait la poitrine gonflée d’orgueil et déclara qu’elle gagnerait sans difficulté. Ikue dit qu’elle participait seulement pour recevoir des leçons des grands maîtres –et que c’était déjà bien orgueilleux de sa part !
Mitsurugi avait pris soin de mettre sa belle-famille un peu à l’écart, comme il les aurait mis en réserve pour la bataille. Doji Suzume n’était pas très à l’aise avec les rustauds de la Muraille, qui le firent boire pour qu’il se comporte en homme ! Grisé, Suzume commença à s’intéresser à sa voisine de table, la tensaï de l’eau, Isaza Mizu, ce qui lui attira quelques sifflets moqueurs de l’entourage du capitaine Koga. Au milieu de cette assemblée, Doji Onegano restait à la fois enjoué en réservé.
En vieux routard de la vie mondaine, il ne craignait personne et n’avait plus besoin de faire ses preuves. Sasuke, content de jouer les marieuses, présenta plus officiellement Suzume à Mizu, pendant que Mitsurugi s’éloignait avec la tendre Ikue.
En fin de soirée, Koga gueula sur ses hommes avachis pour signaler le départ et les Crabes partirent en titubant comme des bœufs avinés ; Sasuke ne fut pas mécontent de refermer la porte sur eux. Ils firent du raffut dans le quartier et trouvèrent après bien des efforts leur caserne. Les trois tensaï burent encore un verre ensemble puis Sasuke les raccompagna sous la fine neige.
Nobuyoshi le remercia pour cette excellente soirée et ajouta, quand ils arrivaient devant le palais des Phénix :
- Maître Masaakira aimerait nous réunir, Sasuke. Tous les quatre. Il veut profiter de ce début d’hiver pour que nous partions en retraite. Il faut que tu te joignes à nous.
- C’est une invitation intéressante, dit Sasuke, je vais y réflechir.
Sous la lumière vacillante du porche, Nobuyoshi le regarda d’un air de reproche, comme si Sasuke, parce qu’il avait changé de clan, pouvait refuser ! Il était tensaï et il le serait jusqu’à son dernier souffle.
- Maître Masaakira veut reprendre ton entraînement. Au printemps, ce ne sera plus possible. Tu ne peux pas décemment dire non.
Sasuke remercia et souhaita bonne nuit à ses invités. Il revint au palais et monta dans sa chambre, pressé d’aller dormir. Il entendit la respiration régulière de Mitsurugi dans la pièce d’à côté, bâilla et se laissa tomber sur son futon. Il sentait que le réveil du lendemain serait difficile ; il se mettait à rêver rapidement et coulait dans ces rêves comme dans un lac. Il partait dans des visions agitées quand il entendit distinctement du bruit dans sa chambre. Il lui fallut un temps pour parvenir à ouvrir les yeux. Il était prêt pour invoquer un katana de feu et sauter sur l’intrus. Il se contenta pour l’instant de rallumer les cendres de sa cheminée. Il vit une silhouette de vieille femme aux regard blanc et fou, tapie dans un coin. Elle avait reculé quand les flammes avaient jailli.
- Qui es-tu ?...
- Une vieille femme fragile, dit-elle, grelottante.
- Le feu n’a pas l’air de te réchauffer…
- Aucune flamme ne le pourrait, joli samuraï. D’où je viens, il n’y a plus de feu depuis longtemps. Il y a bien ces coulées de lave dehors, dans cet archipel sur la mer noire…
Sasuke fit apparaître le sabre de feu dans sa main.
- Petite Vérité, c’est toi…
- Tu es venu me déranger dans ma demeure avec tes amis. Je viens te rendre la pareille…
- Tu n’étais plus dans ton temple. Tu en as été chassée par un démon, que j’ai moi-même précipité dans le volcan…
- Ni lui ni toi et tes amis n’aviez à venir nous déranger alors que nous expions pour notre vie misérable. Pourquoi venir dans les limbes où il n’y a que malheurs et désespoir ?
- Et toi, que viens-tu faire ici ?
- Reprendre mon bien, mes parchemins…
Sasuke remarqua qu’elle avait une bouche féroce, avec bien trop de temps et qu’elle contenait difficilement sa rage.
- Je veux bien te les rendre puisque je les ai pris, mais à une condition…
- Tais-toi, gémit-elle, je déteste votre manie, à vous les humains, de traiter, marchander ; de faire des compromis et des échanges…
- C’est comme cela que ça se passe chez nous…
- Rends-les-moi !
- Ecoute ma proposition. Tu es chez moi, tu n’as pas le choix…
- Que veux-tu ?
Elle souffrait de plus en plus violemment. Elle se tordait de douleur comme les flammes derrière elle.
- Je veux des informations sur un autre habitant de l’île des Limbes…
- Quoi ? Sur l’armée de gaijins ? Sur le capitaine et son équipage difforme ?
- Non, évidemment… Ceux-là ne sont pas bien mystérieux…
- Qui alors ?
- Yogo.
- Non !
- Tu en tellement sur lui !
- Je n’ai rien à dire ! Mes parchemins !
- Je peux les brûler d’un geste !
- Qui est Yogo ? Qu’a-t-il fait lors de son voyage dans les Sables Brûlants !... J’en sais plus que tu ne crois…
Sasuke sortit les parchemins qu’il n’avait jamais quitté depuis son retour des Limbes. Il les prit en mains et fit chauffer sa paume. Le papier se mettait à fumer.
- J’ai lu des choses sur toi, Petite Vérité ! Les bibliothèques sont très bavardes quand on sait les faire parler… Et faire parler, c’est un de mes talents… C’est à toi qu’est dédiée l’œuvre de Bayushi Tangen, premier du nom, Les petites vérités, son recueil de pensées sur la traîtrise et le mensonge. Pourquoi portes-tu ce nom ? Parce que tu as été la fidèle servante de Yogo, alias Isawa Yogo, puissant shugenja, marqué du sceau d’une malédiction que je ne connais pas, mais qui peut affecter les membres de la famille qu’il a fondée.
La vieille fantôme se recroquevillait dans un coin, accablée.
- Tu sais tout sur ton ancien maître, emprisonné avec toi aux Limbes, vieille femme. Je te rends tes parchemins si tu me dis ce que tu sais sur lui...
Petite Vérité saignait du nez un sang incolore et se ridait encore plus.
- Il est parti… dans le désert… chercher la magie des ombres… Il a trouvé ce pouvoir… Il a… fondé une forteresse gigantesque grâce à l’ombre… Et il a été répudié par les dieux pour ces crimes…
Elle tomba sur les genoux, haletante.
Sasuke lui tendit ses papiers :
- Tu en as encore plein dans ton sac, je le sens, mais nous allons nous arrêter là pour cette fois.
Le spectre agrippa le rouleau de ses doigts à cinq ou six articulations, les serra contre elle comme si on venait de lui rendre son enfant et elle s’enfuit en courant, en poussant de petits gémissements.
Mitsurugi, qui passait par un sommeil agité après cette soirée d’excès, finit par se réveiller et cogna au mur, exaspéré par ces petits cris féminins :
- Sasuke, ça suffit ! Il y a des maisons pour ça !
A suivre...
