Quote:Définitivement je ne serais jamais qu'un gros scientifique ballot...moi avec un tel sujet j'aurais bêtement répondu :
"Biologiquement oui!"
Tu aurais alors saisi la moitié de l'étendue de la question... car la dimension scientifique du pb est évidente. :LeMarkSunstorm:
Le scientifique étudiera l'acte de penser comme un ensemble d'évènements cérébraux localisés dans les aires du cerveau, c'est à dire un ensemble d'activités neuronales.
Cependant, qu'en est-il de la validité des phénomènes mentaux, tels que la douleur, le plaisir, le goût, l'appétit etc. ?
La question serait alors : "Tout évènement cérébral a t-il pour répondant un évènement mental ? et réciproquement ?"
En étudiant l'état d'activité cérébrale d'un patient, puis-je y "lire" son état mental ?
Si oui, alors je dois dire que l'un des types d'état détermine l'autre, car je peux passer de l'un à l'autre de façon cohérente : du mental au cérébral, du cérébral au mental.
Perspective séduisante de connaitre parfaitement la manière dont pense qq1 à partir de l'observation de son activité neuronale.
Cependant, pour le moment, tous les chercheurs admettent que nos connaissances sont trop rudimentaires pour permettre de réduire entièrement le mental au cérébral.
La question qui intéresse la philosophie de l'esprit est de savoir si c'est seulement possible, et de proposer des arguments dans un sens ou l'autre. Réduira t-on à terme le mental au cérébral ?
Les phénomènes mentaux sont-ils donc réductibles à des excitations neuronales ?
On est tenté, pour jouer au matérialiste radical, de répondre : Oui !
De fait,
Paul Churchland a projeté de prouver que les théories mentalistes de l'esprit sont fausses : elles attribuent des états mentaux (untel désire, untel a l'intention, untel veut...) à des personnes, comme on attribue de la vitesse ou une masse à un objet (ce rocher pèse tant ; la vitesse de ce mobile est de tant...)
Mais cette théorie mentaliste est parfaitement fausse selon Churchland, fausse comme l'alchimie.
Il faut alors complétement oublier de parler en termes mentalistes. En conséquence de quoi, le vocabulaire des sciences neurologiques doit éliminer et remplacer peu à peu notre manière quotidienne de parler. On appelle cela le matérialisme éliminativisme.
Inutile de dire que cette position est loin de remporter tous les suffrages. Certains ont critiqué l'idée qu'on puisse élever la manière commune de parler (la "psychologie populaire" dixit Churchland) au rang d'une théorie, pour ensuite en prouver la fausseté.
L'argument de
Davidson est de dire que nous n'avons pas une vraie causalité à l'oeuvre dans le discours mentaliste, contrairement au discours sur le cérébral. C'est pourquoi on ne peut réduire le discours mentaliste à un discours scientifique. Davidson refuse d'une part le dualisme du corps et de l'esprit, mais dit qu'on ne peut éliminer les propriétés mentales. Sa position est celle du
monisme anomal : une seule substance (monade) et deux discours, mais pas de loi (nomos) de correspondance réelle entre les deux. Et seul le discours cérébral a valeur scientifique.
Cette théorie est bien plus largement acceptée que celle de Churchland.
A partir de là, vous voyez comment interroger le requérir du corps de la part du penser. Ya t-il une loi de ce requérir, ou bien faut-il le constater seulement sans l'expliquer causalement ?
Et s'il y a une indétermination dans le rapport du penser au corps (penser ne requiert que partiellement le corps), on peut maintenir une autonomie partielle des deux domaines.
Vous pouvez d'ailleurs facilement constater que vous n'avez pas besoin de solliciter tout votre corps pour penser ; réciproquement, l'action corporelle ne mobilise pas le tout de la pensée. Il y a un domaine propre du corporel, un domaine propre du mental, et le cérébral est à l'intersection des deux.
Disons alors que penser requiert le corps (pas d'acte de penser sans acte du corps) mais ne s'y réduit pas (autonomie relative de chacun).