16-07-2004, 09:48 PM
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE
La 5e Réincarnation : 6e Récit (bis)
Mois du Chien et du Sanglier
DEUX CONTES D'AUTOMNE
VOLUME II
LES VOLEURS D'ENFANTS
LES TRAITRES DE LA GRENOUILLE RICHE
Le lendemain de son arrivée à la Grenouille Riche, Riobe estima qu'il avait terminé sa mission auprès des Licornes, et par conséquent auprès des Dragons. Il avait fait ce que l'honneur lui avait dicté dans le conflit d'Inchu. Hanteï savait combien cela lui avait coûté de retrouver cette région, et plusieurs de ses habitants. Il pensait qu'il aurait même pu rencontrer le gouverneur, Matsu Matasaka. Le duel aurait été inévitable...
Le rônin estima que le temps était venu de recevoir une paye bien gagnée.
Poliment, il se présenta à Mirumoto Ryu, toussota d'un air de sous-entendu, en frottant visiblement son pouce et son index. D'un air détaché et parfaitement innocent, mais assez définitif, Ryu-san lui déclara alors :
- Mais voyons Riobe, c'est Taro-san qui t'a engagé...
Le pauvre rônin crut sentir sa mâchoire se décrocher. En d'autres termes, s'il interprêtait correctement les paroles de la bushi, il ne lui restait plus qu'à remonter à Heibetsu, à des jours de là, sans parler de l'ascension et du passage du col...
Riobe avala sa salive et sourit poliment, quoi qu'il lui en coûta : en d'autres lieux, d'autres temps, l'un des deux serait mort de honte...
Inutile d'ajouter qu'il ne s'attarda pas avec la Dragonne... Il obtint toutefois d'elle la possibilité de remonter avec elle dans les montagnes. Ce qui serait bien pratique pour passer la frontière de la Libellule.
Riobe croisa sur son chemin Kohei-san. Le solide Licorne baillait à pleine gorge en cette heure matinale, en s'étirant et en gonflant sa poitrine. Il salua Riobe avec un mélange de politesse et de familiarité amicale bien propre à son clan.
Non, on en ferait jamais un courtisan.
Riobe le salua plus proprement. Kohei espérait que le rônin se présenterait à la cérémonie de la chasse, chez Egawa-sama. Hésitant, Riobe finit par accepter devant l'insistance de Kohei-san : avec Hiruya, ils avaient tous les trois ramené deux biches, un sanglier et abattu un ours noir. Le rônin n'avait pas volé sa place au repas, même en bout de table.
Tant pis pour ce que pourrait en penser Ikoma Akira, qui, après tout, venait au bois du Daim d'Argent, en vaincu, pour accepter les conditions du clan de la Licorne.
Riobe salua et partit le long du fleuve vers la Cité de la Grenouille Riche. Il entra dans la ville des rônins, noire de monde même à cette heure matinale. Les fonctionnaires et les soldats de la famille Kaeru [grenouille] dirigeaient réellement cette cité si spéciale, qui jouait le rôle de zone-tampon entre deux clans aux philosophies si différentes qu'ils ne trouvaient rien à se dire, le Dragon et la Licorne.
Notre samuraï ne tarda pas à trouver une maison de jeux. Torses nus, les tenanciers faisaient face aux client passionnés. On jouait à un jeu de dés lancés sous un cornet. Il fallait deviné si la somme des deux dés serait paire ou impaire. Riobe dépensa quelques-uns de ses derniers sous pour entrer dans le jeu, et discuter un peu avec quelques personnes.
Il cherchait du travail. On lui demanda en souriant d'un air mauvais quels types de travail il serait prêt à accepter, puis on lui donna une adresse. Il n'y avait qu'un nouveau-venu dans la Cité pour ignorer que des traîtres avaient quitté la famille Kaeru en emportant une partie du trésor avec eux. Et même parmi une bande de mercenaires aux kokus pleins les mains, on ne pouvait transiger sur l'honneur : il fallait retrouver et punir ces déserteurs.
Riobe alla à l'endroit indiqué et fut reçu, après une longue attente, par un important chef rônin. Ce dernier avait un peu entendu parler de Riobe... ce rônin qui s'est frotté aux troubles d'Inchu... Le chef lui dit que ceux qui venaient lui demander du travail savaient pourquoi ils venaient... Les traîtres de la Cité étaient des canailles qui, pour aggraver leur cas, s'étaient alliés avec plusieurs de ces comploteurs d'Inchu. Et le chef Kaeru manquait un peu de ces rônins qui n'ont pas froid aux yeux pour des missions risquées. Il poussa vers Riobe un parchemin qui indiquait le nom des plus dangereux de ces fuyards. Il y avait trop peu de gens qui osaient se lancer à leur poursuite.
- Quel est le premier nom sur la liste principale ? demanda Riobe.
Le chef sourit : ce rônin allait lui plaire. Il acceptait de s'occuper d'un des plus gros gibiers... La parole de Riobe suffirait : qu'il revienne à la Grenouille Riche en jurant que sa cible ne représentait plus de danger pour personne... Celui que notre rônin allait pourchasser se nommait Hiro.
DEPART DES TERRES DE LA LICORNE
Deux jours plus tard, Ryu et Riobe retrouvaient Ayame, Ikky, Kohei et Hiruya chez Shinjo Egawa, daïmyo de la cité du Daim d'Argent, pour la cérémonie de commémoration de la chasse. Shinjo Bunjiro et Iuchi Kumanosuke se trouvaient également là, de même qu'Ikoma Akira.
Dans la grande salle du palais, rude, étrange, fait de solides pierres et de décorations aux motifs surprenants, tous les hôtes purent admirer les trophées de chasse, notamment les deux biches, le sanglier et l'ours ramenés par nos héros. On épargna poliment aux invités du clan de la Licorne l'obligation de manger de la viande rouge... Toutefois, les samuraï Licorne ne se privèrent pas de déguster cette bonne chair, qui dégoûtait tant les frères des autres clans.
Devant tous, Shinjo Egawa félicita les chasseurs d'avoir honoré le bois en ramenant de si belles proies. Il fut dit à Kakita Hiruya que le clan de la Grue restait l'ami du clan de la Licorne et que tous s'en réjouissaient.
Tout le monde mangea avec appétit. A la fin du repas, Ikoma Akira se leva, se pencha en avant humblement et reconnut, au nom de Matsu Matasaka, seigneur d'Inchu, que les Licornes étaient venus à point nommé en aide au clan du Lion, et que le nouveau tracé des frontières était le plus convenable qui soit. De fait, le Lion cédait de nombreux arpents de terre sur leur côté du fleuve d'Inchu.
C'était une belle reconnaissance accordée à nos héros, et personne ne retint ses félicitations pour leur bravoure.
Mais c'était une victoire personnelle pour Kumanosuke-sama. Beaucoup y songeait, sans que personne n'ose le dire.
Après la fin des festivités de la chasse, tous les invités s'en retournèrent chez eux. Au palais de la Grenouille Riche, Kohei-san dit au revoir à ses amis, qui repartaient en direction du grand Océan. Le Licorne restait sur les terres de son clan, et espérait revoir bientôt ses compagnons de voyage.
Les deux Phénix, le Grue, la Dragon et le rônin voyagèrent ensemble jusqu'au château de Tonbo Toryu. Puis les deux Phénix partirent seuls vers leurs terres, pendant que Hiruya, Ryu et Riobe, avec l'autorisation de Toryu-sama, commençait l'ascension des hautes montagnes du Dragon...
LES CRIMINELS D'HEIBETSU
L'ascension des hautes montagnes prit plusieurs jours. Nos marchèrent dans leurs pas en arrivant vers le col. Ils retrouvèrent l'étroit vallée encaissée, aride et nue, où ils avaient secouru une caravane, à la fin de l'été, puis le col et le village où les Centauminotaures avaient attaqué à leur départ, au milieu de l'automne.
Ils arrivèrent dans la riante vallée d'Heibetsu, pays natal de Ryu-san, sorte de havre tranquille de verdure et de champs, protégé du reste du monde par les hautes montagnes solitaires, orgueilleuses et dépouillées.
Hiruya-san salua son senseï, le noble Yobe-sama, qui continuait d'enseigner les vertus de l'école du sabre à de jeunes Dragons, et à démontrer la supériorité de la technique Kakita sur l'art du Nitten. Ce n'était pas une sinécure...
Ryu-san et Riobe ne tardèrent pas à rendre visite au capitaine Taro, chef de la garde d'Akuma-san. Après tout, c'était bien Taro, aux dires de Ryu, qui avait engagé Riobe.
D'un ton franc et direct, comme l'apprécie peu la politesse rokugani généralement, Ryu déclara que Riobe avait bien travaillé et qu'il méritait d'être payé. Taro-san était bien surpris de revoir le rônin ici. Il commençait à comprendre...
Taro hocha la tête, en souriant d'un air entendu et discret à Riobe, comme pour dire que, question étiquette, on obtiendrait jamais rien de Ryu-san... Taro venait de comprendre que Riobe avait dû remonter toutes les montagnes pour venir se faire payer.
Il paya donc ce qui était dû à Riobe [quelle somme déjà ?
], puis demanda à Ryu de raconter brièvement leur périple sur les terres de la Licorne, et comment s'était passé leur mission.
- Ca va, ça va, répondit placidement Ryu-san.
Pour la briéveté, Taro pouvait s'avouer satisfait.
Riobe fit signe discrêtement qu'il allait s'éclipser. Taro-san le retint, voulant savoir ce que le rônin allait faire maintenant.
Poliment, Riobe expliqua en détail la mission qui lui avait été confiée à la Grenouille Riche.
Ainsi donc, le rônin recherchait ce Hiro, chef criminel... Le capitaine, connaissant la valeur du rônin, lui proposa de travailler avec les Dragons.
Depuis quelques temps, de nouvelles menaces sévissaient sur Heibetsu. Selon ses informations, et des enquêtes de la famille Kitsuki, des bandits remontés du sud, des terres d'Inchu en particulier, se seraient alliés à plusieurs criminels qui avaient sévi pendant les fêtes des vendanges. L'ennemi groupait une seconde fois ses forces pour frapper le clan du Dragon.
Cette fois-ci, les malfaiteurs enlevaient des enfants et demandaient d'importantes rançons. En entendant cela, Ryu frémit de terreur pour sa fille.
Le capitaine Taro organiserait sous peu une battue pour châtier les criminels.
D'un air inquisiteur, à brûle-pourpoint, Ryu-san demanda carrément :
- Taro-san, ne me cacherais-tu pas quelque chose ?
Riobe baissait la tête de honte. Encore une gaffe d'étiquette ! Taro-san ne broncha pas. Sans doute avait-il reçu des instructions pour ne pas relever les paroles hasardeuses de la jeune bushi.
- Je comprends ton inquiétude, Ryu. Rassure-toi, ta mère et ta fille sont en bonne santé. Ta mère a requis les services d’un honorable bushi Mirumoto pour protéger sa famille.
Une chasse serait organisée dès le lendemain. Le criminel Hiro en ferait sûrement partie. Que Riobe se joigne aux équipes : il mettrait la main sur sa proie et rendrait service au clan du Dragon.
Le rônin accepta de se présenter le lendemain à la première heure. Il salua les deux Mirumoto, puis partit en ville, retrouver la fameuse Auberge du Bon Rônin
, centre névralgique des lieux pour les samuraï sans clan. Plusieurs mercenaires engagés par le capitaine Taro logeaient à cette enseigne. Au cours de parties de dés au cornet, les langues se délièrent, et on parla d'honneur et d'argent, des missions et des emplois qu'acceptaient ou non les samuraï errants.
- Soit on perd la vie dans l'honneur, soit on en revient et on y gagne de l'argent.
C'est ainsi que Riobe choisissait de vivre, et d'accorder ses standards moraux aux réalités de la vie de rônin.
Dans la même journée, Ryu-san retourna évidemment voir sa famille, dans leur maison à la sortie de la ville. Une discussion tout sucre tout miel s'en suivit entre les trois femmes, la mère de Ryu prenant longuement des nouvelles de sa fille chérie, lui répétant combien elle avait été inquiète, et combien elle avait prié les fortunes de la protéger, et comment elle se faisait un sang d'encre à l'imaginer sur les routes, exposée à tous les périls, et risquant sa vie si loin de la propre petite fille adorée etc.
Consciente des dangers qui pesaient sur la cité d'Heibetsu, la sage Mirumoto Katsumi avait contracté, au nom de Ryu, une dette envers un honorable bushi de la famille, pour que ce dernier protège la petite Mirumoto Akiko des bandits.
Ryu-san rencontra ce jeune et droit bushi, honorée de servir le clan en protégeant cette petite fille. Il était posté près de la maison, à surveiller déjà les lieux contre d'éventuels malandrins. [Dois-je prendre un nom dans le Name Generator© ?]- C’est un honneur immense de vous voir, Ryu-san. Je veille sur votre maison mais je suis loin d’avoir tous vos talents.
- Mais non, moi au contraire, je ne saurais jamais comment vous remercier.
- Je crains de ne pas être à la hauteur pour défendre votre famille, Ryu-san.
- Je ne doute pas que vous y arriviez.
- C’est par honneur que je le fais.
Ryu-san trouva tout à fait correct ce samuraï, flattée qu'il ait reconnu en elle une valeureuse bushi.
Le lendemain, au palais, Taro-san formait les groupes qui partiraient traquer les criminels dans les montagnes alentours. Chaque groupe serait constitué de deux samuraï de clan et d'un rônin. Riobe se joindrait au groupe de Hiruya-san et Ryu-san. Ses bonnes capacités de chasseur seraient bien utiles pour retrouver la piste d'enfants disparus.
Tous les samuraï s'inclinèrent devant Taro-san et partirent revêtir leurs armures. Riobe discuta avec Hiruya : aujourd'hui serait une dure journée. Beaucoup de Mirumoto quitteraient la ville, la laissant avec peu de surveillance. N'était-ce pas ce que cherchait les bandits, peut-être pour attaquer directement Heibetsu en dispersant ses défenseurs ?
Pendant ce temps, Ryu-san inspecta rapidement une maison qui lui paraissait louche. Mais elle n'y trouva pas de traces des kidnappeurs.
Alors que tous les samuraï, fin prêts, en armure, se réunissaient dans la cour du palais, Akuma-sama se posta devant eux, et les exhorta, de sa célèbre voix où entrer toujours, à des degrés plus ou moins fort, une colère contenue, à purifier la région des criminels qui l'infestaient. En choeur, les samuraï le jurèrent, et partirent aussitôt.
Yobe-sama vint parler à Hiruya : ce dernier, avec Ryu et Riobe, puisqu'ils connaissent la région et sont reconnus pour leurs qualités de combattants, auraient le secteur le plus dangereux. Ils avaient instruction de mener à bien leur mission, et de juger s'il s'avérait nécessaire de prévenir d'autres groupes, pendant la journée, pour leur demander de l'aide. Leur discernement prévaudrait face au danger.
Autant dire que le groupe de nos trois héros serait seul face aux criminels et n'avait le droit que de revenir vainqueur...
A suivre...
La 5e Réincarnation : 6e Récit (bis)
Mois du Chien et du Sanglier
DEUX CONTES D'AUTOMNE
VOLUME II
LES VOLEURS D'ENFANTS
LES TRAITRES DE LA GRENOUILLE RICHE
Le lendemain de son arrivée à la Grenouille Riche, Riobe estima qu'il avait terminé sa mission auprès des Licornes, et par conséquent auprès des Dragons. Il avait fait ce que l'honneur lui avait dicté dans le conflit d'Inchu. Hanteï savait combien cela lui avait coûté de retrouver cette région, et plusieurs de ses habitants. Il pensait qu'il aurait même pu rencontrer le gouverneur, Matsu Matasaka. Le duel aurait été inévitable...
Le rônin estima que le temps était venu de recevoir une paye bien gagnée.
Poliment, il se présenta à Mirumoto Ryu, toussota d'un air de sous-entendu, en frottant visiblement son pouce et son index. D'un air détaché et parfaitement innocent, mais assez définitif, Ryu-san lui déclara alors :
- Mais voyons Riobe, c'est Taro-san qui t'a engagé...
Le pauvre rônin crut sentir sa mâchoire se décrocher. En d'autres termes, s'il interprêtait correctement les paroles de la bushi, il ne lui restait plus qu'à remonter à Heibetsu, à des jours de là, sans parler de l'ascension et du passage du col...

Inutile d'ajouter qu'il ne s'attarda pas avec la Dragonne... Il obtint toutefois d'elle la possibilité de remonter avec elle dans les montagnes. Ce qui serait bien pratique pour passer la frontière de la Libellule.
Riobe croisa sur son chemin Kohei-san. Le solide Licorne baillait à pleine gorge en cette heure matinale, en s'étirant et en gonflant sa poitrine. Il salua Riobe avec un mélange de politesse et de familiarité amicale bien propre à son clan.
Non, on en ferait jamais un courtisan.

Tant pis pour ce que pourrait en penser Ikoma Akira, qui, après tout, venait au bois du Daim d'Argent, en vaincu, pour accepter les conditions du clan de la Licorne.
Riobe salua et partit le long du fleuve vers la Cité de la Grenouille Riche. Il entra dans la ville des rônins, noire de monde même à cette heure matinale. Les fonctionnaires et les soldats de la famille Kaeru [grenouille] dirigeaient réellement cette cité si spéciale, qui jouait le rôle de zone-tampon entre deux clans aux philosophies si différentes qu'ils ne trouvaient rien à se dire, le Dragon et la Licorne.
Notre samuraï ne tarda pas à trouver une maison de jeux. Torses nus, les tenanciers faisaient face aux client passionnés. On jouait à un jeu de dés lancés sous un cornet. Il fallait deviné si la somme des deux dés serait paire ou impaire. Riobe dépensa quelques-uns de ses derniers sous pour entrer dans le jeu, et discuter un peu avec quelques personnes.
Il cherchait du travail. On lui demanda en souriant d'un air mauvais quels types de travail il serait prêt à accepter, puis on lui donna une adresse. Il n'y avait qu'un nouveau-venu dans la Cité pour ignorer que des traîtres avaient quitté la famille Kaeru en emportant une partie du trésor avec eux. Et même parmi une bande de mercenaires aux kokus pleins les mains, on ne pouvait transiger sur l'honneur : il fallait retrouver et punir ces déserteurs.
Riobe alla à l'endroit indiqué et fut reçu, après une longue attente, par un important chef rônin. Ce dernier avait un peu entendu parler de Riobe... ce rônin qui s'est frotté aux troubles d'Inchu... Le chef lui dit que ceux qui venaient lui demander du travail savaient pourquoi ils venaient... Les traîtres de la Cité étaient des canailles qui, pour aggraver leur cas, s'étaient alliés avec plusieurs de ces comploteurs d'Inchu. Et le chef Kaeru manquait un peu de ces rônins qui n'ont pas froid aux yeux pour des missions risquées. Il poussa vers Riobe un parchemin qui indiquait le nom des plus dangereux de ces fuyards. Il y avait trop peu de gens qui osaient se lancer à leur poursuite.
- Quel est le premier nom sur la liste principale ? demanda Riobe.
Le chef sourit : ce rônin allait lui plaire. Il acceptait de s'occuper d'un des plus gros gibiers... La parole de Riobe suffirait : qu'il revienne à la Grenouille Riche en jurant que sa cible ne représentait plus de danger pour personne... Celui que notre rônin allait pourchasser se nommait Hiro.
DEPART DES TERRES DE LA LICORNE
Deux jours plus tard, Ryu et Riobe retrouvaient Ayame, Ikky, Kohei et Hiruya chez Shinjo Egawa, daïmyo de la cité du Daim d'Argent, pour la cérémonie de commémoration de la chasse. Shinjo Bunjiro et Iuchi Kumanosuke se trouvaient également là, de même qu'Ikoma Akira.
Dans la grande salle du palais, rude, étrange, fait de solides pierres et de décorations aux motifs surprenants, tous les hôtes purent admirer les trophées de chasse, notamment les deux biches, le sanglier et l'ours ramenés par nos héros. On épargna poliment aux invités du clan de la Licorne l'obligation de manger de la viande rouge... Toutefois, les samuraï Licorne ne se privèrent pas de déguster cette bonne chair, qui dégoûtait tant les frères des autres clans.
Devant tous, Shinjo Egawa félicita les chasseurs d'avoir honoré le bois en ramenant de si belles proies. Il fut dit à Kakita Hiruya que le clan de la Grue restait l'ami du clan de la Licorne et que tous s'en réjouissaient.
Tout le monde mangea avec appétit. A la fin du repas, Ikoma Akira se leva, se pencha en avant humblement et reconnut, au nom de Matsu Matasaka, seigneur d'Inchu, que les Licornes étaient venus à point nommé en aide au clan du Lion, et que le nouveau tracé des frontières était le plus convenable qui soit. De fait, le Lion cédait de nombreux arpents de terre sur leur côté du fleuve d'Inchu.
C'était une belle reconnaissance accordée à nos héros, et personne ne retint ses félicitations pour leur bravoure.
Mais c'était une victoire personnelle pour Kumanosuke-sama. Beaucoup y songeait, sans que personne n'ose le dire.
Après la fin des festivités de la chasse, tous les invités s'en retournèrent chez eux. Au palais de la Grenouille Riche, Kohei-san dit au revoir à ses amis, qui repartaient en direction du grand Océan. Le Licorne restait sur les terres de son clan, et espérait revoir bientôt ses compagnons de voyage.
Les deux Phénix, le Grue, la Dragon et le rônin voyagèrent ensemble jusqu'au château de Tonbo Toryu. Puis les deux Phénix partirent seuls vers leurs terres, pendant que Hiruya, Ryu et Riobe, avec l'autorisation de Toryu-sama, commençait l'ascension des hautes montagnes du Dragon...
LES CRIMINELS D'HEIBETSU
L'ascension des hautes montagnes prit plusieurs jours. Nos marchèrent dans leurs pas en arrivant vers le col. Ils retrouvèrent l'étroit vallée encaissée, aride et nue, où ils avaient secouru une caravane, à la fin de l'été, puis le col et le village où les Centauminotaures avaient attaqué à leur départ, au milieu de l'automne.
Ils arrivèrent dans la riante vallée d'Heibetsu, pays natal de Ryu-san, sorte de havre tranquille de verdure et de champs, protégé du reste du monde par les hautes montagnes solitaires, orgueilleuses et dépouillées.
Hiruya-san salua son senseï, le noble Yobe-sama, qui continuait d'enseigner les vertus de l'école du sabre à de jeunes Dragons, et à démontrer la supériorité de la technique Kakita sur l'art du Nitten. Ce n'était pas une sinécure...
Ryu-san et Riobe ne tardèrent pas à rendre visite au capitaine Taro, chef de la garde d'Akuma-san. Après tout, c'était bien Taro, aux dires de Ryu, qui avait engagé Riobe.
D'un ton franc et direct, comme l'apprécie peu la politesse rokugani généralement, Ryu déclara que Riobe avait bien travaillé et qu'il méritait d'être payé. Taro-san était bien surpris de revoir le rônin ici. Il commençait à comprendre...
Taro hocha la tête, en souriant d'un air entendu et discret à Riobe, comme pour dire que, question étiquette, on obtiendrait jamais rien de Ryu-san... Taro venait de comprendre que Riobe avait dû remonter toutes les montagnes pour venir se faire payer.
Il paya donc ce qui était dû à Riobe [quelle somme déjà ?
![[Image: icon9.gif]](http://forum.mamarland.info/style_images/set_Invi-516/icon9.gif)
- Ca va, ça va, répondit placidement Ryu-san.
Pour la briéveté, Taro pouvait s'avouer satisfait.

Riobe fit signe discrêtement qu'il allait s'éclipser. Taro-san le retint, voulant savoir ce que le rônin allait faire maintenant.
Poliment, Riobe expliqua en détail la mission qui lui avait été confiée à la Grenouille Riche.
Ainsi donc, le rônin recherchait ce Hiro, chef criminel... Le capitaine, connaissant la valeur du rônin, lui proposa de travailler avec les Dragons.
Depuis quelques temps, de nouvelles menaces sévissaient sur Heibetsu. Selon ses informations, et des enquêtes de la famille Kitsuki, des bandits remontés du sud, des terres d'Inchu en particulier, se seraient alliés à plusieurs criminels qui avaient sévi pendant les fêtes des vendanges. L'ennemi groupait une seconde fois ses forces pour frapper le clan du Dragon.
Cette fois-ci, les malfaiteurs enlevaient des enfants et demandaient d'importantes rançons. En entendant cela, Ryu frémit de terreur pour sa fille.
Le capitaine Taro organiserait sous peu une battue pour châtier les criminels.
D'un air inquisiteur, à brûle-pourpoint, Ryu-san demanda carrément :
- Taro-san, ne me cacherais-tu pas quelque chose ?
Riobe baissait la tête de honte. Encore une gaffe d'étiquette ! Taro-san ne broncha pas. Sans doute avait-il reçu des instructions pour ne pas relever les paroles hasardeuses de la jeune bushi.
- Je comprends ton inquiétude, Ryu. Rassure-toi, ta mère et ta fille sont en bonne santé. Ta mère a requis les services d’un honorable bushi Mirumoto pour protéger sa famille.
Une chasse serait organisée dès le lendemain. Le criminel Hiro en ferait sûrement partie. Que Riobe se joigne aux équipes : il mettrait la main sur sa proie et rendrait service au clan du Dragon.
Le rônin accepta de se présenter le lendemain à la première heure. Il salua les deux Mirumoto, puis partit en ville, retrouver la fameuse Auberge du Bon Rônin

- Soit on perd la vie dans l'honneur, soit on en revient et on y gagne de l'argent.
C'est ainsi que Riobe choisissait de vivre, et d'accorder ses standards moraux aux réalités de la vie de rônin.
Dans la même journée, Ryu-san retourna évidemment voir sa famille, dans leur maison à la sortie de la ville. Une discussion tout sucre tout miel s'en suivit entre les trois femmes, la mère de Ryu prenant longuement des nouvelles de sa fille chérie, lui répétant combien elle avait été inquiète, et combien elle avait prié les fortunes de la protéger, et comment elle se faisait un sang d'encre à l'imaginer sur les routes, exposée à tous les périls, et risquant sa vie si loin de la propre petite fille adorée etc.
Consciente des dangers qui pesaient sur la cité d'Heibetsu, la sage Mirumoto Katsumi avait contracté, au nom de Ryu, une dette envers un honorable bushi de la famille, pour que ce dernier protège la petite Mirumoto Akiko des bandits.
Ryu-san rencontra ce jeune et droit bushi, honorée de servir le clan en protégeant cette petite fille. Il était posté près de la maison, à surveiller déjà les lieux contre d'éventuels malandrins. [Dois-je prendre un nom dans le Name Generator© ?]- C’est un honneur immense de vous voir, Ryu-san. Je veille sur votre maison mais je suis loin d’avoir tous vos talents.
- Mais non, moi au contraire, je ne saurais jamais comment vous remercier.
- Je crains de ne pas être à la hauteur pour défendre votre famille, Ryu-san.
- Je ne doute pas que vous y arriviez.
- C’est par honneur que je le fais.
Ryu-san trouva tout à fait correct ce samuraï, flattée qu'il ait reconnu en elle une valeureuse bushi.

Le lendemain, au palais, Taro-san formait les groupes qui partiraient traquer les criminels dans les montagnes alentours. Chaque groupe serait constitué de deux samuraï de clan et d'un rônin. Riobe se joindrait au groupe de Hiruya-san et Ryu-san. Ses bonnes capacités de chasseur seraient bien utiles pour retrouver la piste d'enfants disparus.
Tous les samuraï s'inclinèrent devant Taro-san et partirent revêtir leurs armures. Riobe discuta avec Hiruya : aujourd'hui serait une dure journée. Beaucoup de Mirumoto quitteraient la ville, la laissant avec peu de surveillance. N'était-ce pas ce que cherchait les bandits, peut-être pour attaquer directement Heibetsu en dispersant ses défenseurs ?
Pendant ce temps, Ryu-san inspecta rapidement une maison qui lui paraissait louche. Mais elle n'y trouva pas de traces des kidnappeurs.
Alors que tous les samuraï, fin prêts, en armure, se réunissaient dans la cour du palais, Akuma-sama se posta devant eux, et les exhorta, de sa célèbre voix où entrer toujours, à des degrés plus ou moins fort, une colère contenue, à purifier la région des criminels qui l'infestaient. En choeur, les samuraï le jurèrent, et partirent aussitôt.
Yobe-sama vint parler à Hiruya : ce dernier, avec Ryu et Riobe, puisqu'ils connaissent la région et sont reconnus pour leurs qualités de combattants, auraient le secteur le plus dangereux. Ils avaient instruction de mener à bien leur mission, et de juger s'il s'avérait nécessaire de prévenir d'autres groupes, pendant la journée, pour leur demander de l'aide. Leur discernement prévaudrait face au danger.
Autant dire que le groupe de nos trois héros serait seul face aux criminels et n'avait le droit que de revenir vainqueur...
A suivre...
