12-08-2005, 02:32 PM
(This post was last modified: 12-08-2005, 02:34 PM by Darth Nico.)
Résumé : Après un périlleux voyage, la caravane menée par le seigneur Shinjo Zenzabûro et ses trois fils est arrivée à Medinat Al'Salaam, immense capitale du Sultanat des Sables Brûlants, en même temps que l'armée du terrible Moto Kagatai Khan, seigneur nomade du désert, à la tête de son armée barbare. Hébergés au caravansérail de Shinjo Tchen-Qin, les Licornes apprennent la trahison et la fuite d'un dignitaire de la ville, le seigneur Al-Hazaar, accusé d'avoir comploté contre le Sultan.
Plus d'un an et demi après son début, voici enfin la fin de ce récit.
XV : Le chant du désert
Kohei parcourait le village de tente, au pied de la merveilleuse et labyrinthique cité. Le ciel étoilé infini invitait au rêve. Le feu crépitait dans les campements et les hommes riaient autour du feu. Fébrile, Kohei cherchait la tente de celle qu'il avait aimé, une nuit seulement, mais il ne trouvait personne. Il n'avait pourtant pas rêvé et il avait l'âme fendue d'avoir perdu tout souvenir précis de cette nuit. Les hommes du Khan regardaient passer ce jeune fou qui allait et venait en tous sens : il interrogeait les serviteurs qui, héberlués, déclaraient n'avoir jamais entendu parler du vieil homme et de la femme. Immanquablement, on le renvoyait vers le coin discret du campement, parmi les femmes de mauvaise vie... Kohei enrageait, impuissant. Ses deux frères continuaient à se moquer de lui. Elle était bien loin, sa femme, la douce et belle Iuchi Shizuka !
De la ville venaient des rumeurs et des lumières. De plus loin encore venait, par bourrasques inquiétantes, un vent froid, dont on disait qu'il était le plus grand de tous les voyageurs. Le froid venu des pays du bout du monde, loin encore après les Sâbles Brûlants : des pays glacés peuplés de gigantesques barbares à la force surhumaine, vivant dans d'imprenables forteresses des montagnes, au pied d'un immense arbre soutenant la voûte céleste.
Kohei n'aurait jamais pu penser que ce voyage l'emmenerait si loin, à la rencontre de peuples inconnus, étranges et hostiles.
Des cris de rage arrivèrent au campement, portés par l'air calme de la nuit. Une des grandes portes venait de s'ouvrir, pour laisser passer le Kagatai Khan et sa garde personnelle.
Kohei était revenu s'asseoir avec sa famille, autour du feu. On entendait le Khan insulter et hurler comme un dément.
- Mauvaise chose, fit Zenzabûro-san. Cela signifie que le Sultan a bien expulsé Kagatai-san. J'ai entendu que tous les étrangers étaient suspectés d'être complices de ce Al-Hazaar. Nous allons nous aussi devoir partir.
- Rentrer à Rokugan, déjà ?
Une expression de surprise se peignit sur le visage des trois fils. Il s'y mêlait à cela la joie de rentrer au pays.
- Oui, nous ne pourrons pas rester plus longtemps. Shinjo Tchen-Qin est en houleuses négociations avec ses amis à la cour, pour pouvoir garder son caravansérail. Mais on m'a dit que plusieurs émissaires de l'Empire Senpet avaient été renvoyés chez eux. Et la soldatesque parcourt la ville pour chasser nombre de sectes religieuses et de sociétés secrêtes. Il y en a des centaines dans la ville.
Alors que les homme et les bêtes s'endormaient peu à peu, le détachement du Khan fit une entrée fracassante dans le campement. Gesticulant, hurlant sur sa monture, il la faisait cabrer, et tout le monde se mit à genoux, par crainte de voir retomber sur lui la colère du seigneur de guerre.
- Je suis le dernier fils des Ujik-hai ! le daimyo de ces Sables ! l'Empereur Moto ! je suis l’enfant du désert, et les étoiles brillent pour moi… La tête de ce Sultan roulera dans la poussière… J’ai un empire d’airain à bâtir sur ces terres poussiéreuses… Ceux qui s’opposent à moi… meurent !… Je construirai l'éternelle Shangri-La et toute la cour du Sultan deviendra la cour de mes domestiques !
Il ruait, brandissait le poing, et tout le monde reprenait en choeur des chants guerriers et des malédictions abominables contre le Sultan. Soudain, comme l'orage retombe, ayant électrisé tout le ciel et la terre, le Khan, las, descendit de sa monture et se retira dans sa tête, comme Osano-Wo retourne s'envelopper dans de frais nuages.
On entendait encore la mélopée d'une vieille conteuse qui avait connu le grand-père du seigneur Kagatai. Elle chantait la petite ritournelle du coeur vagabond.
J’ai perdu mon cœur
Dans le silence de ce monde
J’ai traversé d’âpres déserts
Et j’ai trouvé l’or le plus précieux
Celui du cœur vagabond
Car j’ai beaucoup souffert en ce monde
Mais jamais je n’ai souffert en vain
Grâce au trésor de mon cœur vagabond.
Riez pour moi, peuples sauvages
Car j’ai su me rire de vous
Et de moi, et de mes folies, dans vos bras enlacée
Un rien me fait rire car je n’ai plus besoin du monde
Je veux juste déclamer pour lui mon chant
Je veux juste le rassasier de paroles
Je veux juste lui montrer ma joie
Viennent à moi les périples et les jours incertains
J’ai poli enfin le joyau de mon cœur
Il attire à moi les faveurs du soleil
Et des grands vents
Je le nomme
Le cœur vagabond
Kenzan, le second fils, l'écouta attentivement, puis alla se promener ailleurs dans le campement, pendant que son père, Kohei et Iwazuni faisaient préparer leurs couches pour la nuit. Il avait fait part à son père de sa résolution : il ne voulait pas rentrer à Rokugan. Il voulait servir Shinjo Tchen-Qin, devenir un marchand nomade et connaître d'autres peuples. Il voulait galoper plus vite que le soleil et connaître mille mondes inconnus. Il partait, sachant qu'au retour, son père aurait annoncé la nouvelle à ses deux frères.
Il entendit un des sages conseillers du Khan, qui parlait à de jeunes apprentis : ils étaient comme les shugenja au sein de cette armée. L'instructeur était torse et récitait un poème de voyage qu'il s'était fait tatouer dans le dos.
L'existence est un jeu divin. Ce que nous avons reçu en partage devient libre lorsque nous nous identifions au Grand Joueur qui nous a créés. Alors le moi se dissout pour faire place au Grand Soi sous la tente cosmique reliée à l'étoile polaire.
:licorne:
Kenzan serrait une rose des sables que lui avait donné Megumi, la fille de Shinjo Tchen-Qin : était-il plus amoureux d'elle ou de ce pays ? Il ne savait plus...
Les peuples des Sables Brûlants remballaient leurs paquets, eux aussi, et commençaient déjà à se souvenir du passage des Rokugani. Une légende de plus s’écrivait dans les pas des montures du désert… Kenzan serrait très fort la rose, et abandonnait aux sables tout son cœur.
Autour du feu, les deux frères avaient écouté la nouvelle. L'aîné, Iwazuni, n'avait pas fléchi. Il n'avoua pas à son père qu'il avait deviné déjà la décision de son cadet. Mais Kohei baissa la tête, attristé d'apprendre qu'il allait dire au revoir à son frère, et qu'il ne le reverrait peut-être jamais.
Une ombre légère passa non loin : un cavalier attardé qui rejoignait la cité. Le galop des sabots feutrés de sa monture disparut bientôt.
Zenzabûro-san prit son fils à part, pendant qu'Iwazuni rejoignait la tête. Les deux hommes, sous les étoiles, se promenèrent en bordure du campement, à la lisière d'un désert dont la solitude n'a pas de témoin. Zenzabûro parla à son fils autant comme un père que comme un vétéran à un jeune soldat.
- Il n’est plus temps de rêver, Kohei. La nostalgie ne vaut rien à nous autres Shinjo. Tu as contemplé le pays de tes ancêtres. Que voulais-tu de plus ? Ton honneur, ta vie sont à Rokugan maintenant, pas dans ces cités que tu crois à tort mirifiques… Ton frère a fait son choix : mais il ne reste pas pour ces barbares, mais pour servir Shinjo Tchen-Qin et épouser sa fille. Medinat Al-Salaam n’est qu’un leurre. Nous repartons à Rokugan, servir notre famille, notre daïmyo, notre clan et l’Empire. C’est sur nous samouraï que repose l’équilibre du monde, nous en sommes les piliers… C’est à nous de transmettre la force cosmique que nous prête Dame Amaterasu. Nous écoutons le vent de nos plaines, près du village du lac aux rives blanches. Lui seul chante à nos oreilles. Ici, nul esprit ne nous parle. Que t’ont dit les Ujik-hai et les autres barbares à qui tu as pu parler ?
- Pas grand’chose… Je crois qu’ils étaient curieux de savoir si nous autres Rokugani avons encore quelque chose à voir avec les samouraï qui suivirent Shinjo.
- Ils n'ont plus rien à t'apprendre, ni à te dire. Pour nous, ils ne sont pas vraiment des hommes. Notre fidélité est à la lignée des Hantei. Tout le monde révère le dieu vivant qui gouverne l'Empire d'Emeraude. Ainsi l’a voulue la sagesse de Shinjo. Et le sang de Shinjo court dans nos veines…
- … comme nous courrons à bride abattues sur nos destriers.
- Exactement.
- Compris, père.
- Nous rentrons à Rokugan, qui est le pays de tes ancêtres et sera celui de tes enfants.
- Oui, père.
- Tu n’auras aucun regret quant au pays des Sables Brûlants. Nous n’en faisons pas partie. Ton frère vivra quand même chez nous, car il est dans un caravansérail défendu par un membre de notre clan. Et il épousera une Licorne.
- Oui, père.
- Et Moto Chagatai finira un jour vaincu par sa démesure. Seule la mort l’attend au bout de son chemin. Il ne survivra pas à la folie qui le brûle. Espérons seulement qu’il meure honorablement. Il ne se conduit pas comme un samuraï.
- Non, père.
- Grâce à Ali Ben-Qrotal, nous ne repartons pas les mains vides. :yo: Il a pu négocier ce que nous étions venus chercher, malgré la colère du Sultan. Nous aurons les armes et les produits de la cité pour notre daimyo
- Oui, père.
- L’Ordre Céleste est ta seule maison. Ni les étoiles filantes ni les esprits sauvages ne peuvent te guider. Ils peuvent seulement te perdre. Si tu t'aventures trop loin, tu deviendras leur jouet, tu deviendras fou et tu seras perdu à jamais.
- Oui, père.
- Rentrons à présent. Le village des Rives Blanches attend notre retour.
Et tandis que les Licornes repartaient vers Rokugan, le vent semblait se perdre dans ses propres pensées, dans le silence du cœur et des pays lointains, et dans une solitude qui n’a pas de témoin.

FIN
Plus d'un an et demi après son début, voici enfin la fin de ce récit.

XV : Le chant du désert
Led Zeppelin, Kashmir Wrote:Oh let the sun beat down upon my face, stars to fill my dream
I am a traveler of both time and space, to be where I have been
To sit with elders of the gentle race, this world has seldom seen
They talk of days for which they sit and wait and all will be revealed
[...]
Oh, pilot of the storm who leaves no trace, like thoughts inside a dream
Heed the path that led me to that place, yellow desert stream
My Shangri-La beneath the summer moon, I will return again
Sure as the dust that floats high in June, when movin' through Kashmir.
Oh, father of the four winds, fill my sails, across the sea of years
With no provision but an open face, along the straits of fear
Kohei parcourait le village de tente, au pied de la merveilleuse et labyrinthique cité. Le ciel étoilé infini invitait au rêve. Le feu crépitait dans les campements et les hommes riaient autour du feu. Fébrile, Kohei cherchait la tente de celle qu'il avait aimé, une nuit seulement, mais il ne trouvait personne. Il n'avait pourtant pas rêvé et il avait l'âme fendue d'avoir perdu tout souvenir précis de cette nuit. Les hommes du Khan regardaient passer ce jeune fou qui allait et venait en tous sens : il interrogeait les serviteurs qui, héberlués, déclaraient n'avoir jamais entendu parler du vieil homme et de la femme. Immanquablement, on le renvoyait vers le coin discret du campement, parmi les femmes de mauvaise vie... Kohei enrageait, impuissant. Ses deux frères continuaient à se moquer de lui. Elle était bien loin, sa femme, la douce et belle Iuchi Shizuka !
De la ville venaient des rumeurs et des lumières. De plus loin encore venait, par bourrasques inquiétantes, un vent froid, dont on disait qu'il était le plus grand de tous les voyageurs. Le froid venu des pays du bout du monde, loin encore après les Sâbles Brûlants : des pays glacés peuplés de gigantesques barbares à la force surhumaine, vivant dans d'imprenables forteresses des montagnes, au pied d'un immense arbre soutenant la voûte céleste.
Kohei n'aurait jamais pu penser que ce voyage l'emmenerait si loin, à la rencontre de peuples inconnus, étranges et hostiles.
Des cris de rage arrivèrent au campement, portés par l'air calme de la nuit. Une des grandes portes venait de s'ouvrir, pour laisser passer le Kagatai Khan et sa garde personnelle.
Kohei était revenu s'asseoir avec sa famille, autour du feu. On entendait le Khan insulter et hurler comme un dément.
- Mauvaise chose, fit Zenzabûro-san. Cela signifie que le Sultan a bien expulsé Kagatai-san. J'ai entendu que tous les étrangers étaient suspectés d'être complices de ce Al-Hazaar. Nous allons nous aussi devoir partir.
- Rentrer à Rokugan, déjà ?
Une expression de surprise se peignit sur le visage des trois fils. Il s'y mêlait à cela la joie de rentrer au pays.
- Oui, nous ne pourrons pas rester plus longtemps. Shinjo Tchen-Qin est en houleuses négociations avec ses amis à la cour, pour pouvoir garder son caravansérail. Mais on m'a dit que plusieurs émissaires de l'Empire Senpet avaient été renvoyés chez eux. Et la soldatesque parcourt la ville pour chasser nombre de sectes religieuses et de sociétés secrêtes. Il y en a des centaines dans la ville.
Alors que les homme et les bêtes s'endormaient peu à peu, le détachement du Khan fit une entrée fracassante dans le campement. Gesticulant, hurlant sur sa monture, il la faisait cabrer, et tout le monde se mit à genoux, par crainte de voir retomber sur lui la colère du seigneur de guerre.
- Je suis le dernier fils des Ujik-hai ! le daimyo de ces Sables ! l'Empereur Moto ! je suis l’enfant du désert, et les étoiles brillent pour moi… La tête de ce Sultan roulera dans la poussière… J’ai un empire d’airain à bâtir sur ces terres poussiéreuses… Ceux qui s’opposent à moi… meurent !… Je construirai l'éternelle Shangri-La et toute la cour du Sultan deviendra la cour de mes domestiques !
Il ruait, brandissait le poing, et tout le monde reprenait en choeur des chants guerriers et des malédictions abominables contre le Sultan. Soudain, comme l'orage retombe, ayant électrisé tout le ciel et la terre, le Khan, las, descendit de sa monture et se retira dans sa tête, comme Osano-Wo retourne s'envelopper dans de frais nuages.
On entendait encore la mélopée d'une vieille conteuse qui avait connu le grand-père du seigneur Kagatai. Elle chantait la petite ritournelle du coeur vagabond.
J’ai perdu mon cœur
Dans le silence de ce monde
J’ai traversé d’âpres déserts
Et j’ai trouvé l’or le plus précieux
Celui du cœur vagabond
Car j’ai beaucoup souffert en ce monde
Mais jamais je n’ai souffert en vain
Grâce au trésor de mon cœur vagabond.
Riez pour moi, peuples sauvages
Car j’ai su me rire de vous
Et de moi, et de mes folies, dans vos bras enlacée
Un rien me fait rire car je n’ai plus besoin du monde
Je veux juste déclamer pour lui mon chant
Je veux juste le rassasier de paroles
Je veux juste lui montrer ma joie
Viennent à moi les périples et les jours incertains
J’ai poli enfin le joyau de mon cœur
Il attire à moi les faveurs du soleil
Et des grands vents
Je le nomme
Le cœur vagabond
Kenzan, le second fils, l'écouta attentivement, puis alla se promener ailleurs dans le campement, pendant que son père, Kohei et Iwazuni faisaient préparer leurs couches pour la nuit. Il avait fait part à son père de sa résolution : il ne voulait pas rentrer à Rokugan. Il voulait servir Shinjo Tchen-Qin, devenir un marchand nomade et connaître d'autres peuples. Il voulait galoper plus vite que le soleil et connaître mille mondes inconnus. Il partait, sachant qu'au retour, son père aurait annoncé la nouvelle à ses deux frères.
Il entendit un des sages conseillers du Khan, qui parlait à de jeunes apprentis : ils étaient comme les shugenja au sein de cette armée. L'instructeur était torse et récitait un poème de voyage qu'il s'était fait tatouer dans le dos.
L'existence est un jeu divin. Ce que nous avons reçu en partage devient libre lorsque nous nous identifions au Grand Joueur qui nous a créés. Alors le moi se dissout pour faire place au Grand Soi sous la tente cosmique reliée à l'étoile polaire.
:licorne:
Kenzan serrait une rose des sables que lui avait donné Megumi, la fille de Shinjo Tchen-Qin : était-il plus amoureux d'elle ou de ce pays ? Il ne savait plus...
Les peuples des Sables Brûlants remballaient leurs paquets, eux aussi, et commençaient déjà à se souvenir du passage des Rokugani. Une légende de plus s’écrivait dans les pas des montures du désert… Kenzan serrait très fort la rose, et abandonnait aux sables tout son cœur.
Autour du feu, les deux frères avaient écouté la nouvelle. L'aîné, Iwazuni, n'avait pas fléchi. Il n'avoua pas à son père qu'il avait deviné déjà la décision de son cadet. Mais Kohei baissa la tête, attristé d'apprendre qu'il allait dire au revoir à son frère, et qu'il ne le reverrait peut-être jamais.
Une ombre légère passa non loin : un cavalier attardé qui rejoignait la cité. Le galop des sabots feutrés de sa monture disparut bientôt.
Zenzabûro-san prit son fils à part, pendant qu'Iwazuni rejoignait la tête. Les deux hommes, sous les étoiles, se promenèrent en bordure du campement, à la lisière d'un désert dont la solitude n'a pas de témoin. Zenzabûro parla à son fils autant comme un père que comme un vétéran à un jeune soldat.
- Il n’est plus temps de rêver, Kohei. La nostalgie ne vaut rien à nous autres Shinjo. Tu as contemplé le pays de tes ancêtres. Que voulais-tu de plus ? Ton honneur, ta vie sont à Rokugan maintenant, pas dans ces cités que tu crois à tort mirifiques… Ton frère a fait son choix : mais il ne reste pas pour ces barbares, mais pour servir Shinjo Tchen-Qin et épouser sa fille. Medinat Al-Salaam n’est qu’un leurre. Nous repartons à Rokugan, servir notre famille, notre daïmyo, notre clan et l’Empire. C’est sur nous samouraï que repose l’équilibre du monde, nous en sommes les piliers… C’est à nous de transmettre la force cosmique que nous prête Dame Amaterasu. Nous écoutons le vent de nos plaines, près du village du lac aux rives blanches. Lui seul chante à nos oreilles. Ici, nul esprit ne nous parle. Que t’ont dit les Ujik-hai et les autres barbares à qui tu as pu parler ?
- Pas grand’chose… Je crois qu’ils étaient curieux de savoir si nous autres Rokugani avons encore quelque chose à voir avec les samouraï qui suivirent Shinjo.
- Ils n'ont plus rien à t'apprendre, ni à te dire. Pour nous, ils ne sont pas vraiment des hommes. Notre fidélité est à la lignée des Hantei. Tout le monde révère le dieu vivant qui gouverne l'Empire d'Emeraude. Ainsi l’a voulue la sagesse de Shinjo. Et le sang de Shinjo court dans nos veines…
- … comme nous courrons à bride abattues sur nos destriers.
- Exactement.
- Compris, père.
- Nous rentrons à Rokugan, qui est le pays de tes ancêtres et sera celui de tes enfants.
- Oui, père.
- Tu n’auras aucun regret quant au pays des Sables Brûlants. Nous n’en faisons pas partie. Ton frère vivra quand même chez nous, car il est dans un caravansérail défendu par un membre de notre clan. Et il épousera une Licorne.
- Oui, père.
- Et Moto Chagatai finira un jour vaincu par sa démesure. Seule la mort l’attend au bout de son chemin. Il ne survivra pas à la folie qui le brûle. Espérons seulement qu’il meure honorablement. Il ne se conduit pas comme un samuraï.
- Non, père.
- Grâce à Ali Ben-Qrotal, nous ne repartons pas les mains vides. :yo: Il a pu négocier ce que nous étions venus chercher, malgré la colère du Sultan. Nous aurons les armes et les produits de la cité pour notre daimyo
- Oui, père.
- L’Ordre Céleste est ta seule maison. Ni les étoiles filantes ni les esprits sauvages ne peuvent te guider. Ils peuvent seulement te perdre. Si tu t'aventures trop loin, tu deviendras leur jouet, tu deviendras fou et tu seras perdu à jamais.
- Oui, père.
- Rentrons à présent. Le village des Rives Blanches attend notre retour.
Et tandis que les Licornes repartaient vers Rokugan, le vent semblait se perdre dans ses propres pensées, dans le silence du cœur et des pays lointains, et dans une solitude qui n’a pas de témoin.

FIN