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Prologue : Les samuraï qui défièrent l'Empereur
#21
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE

Nos héros trouvèrent à bord du navire des provisions en quantité suffisante pour une longue traversée. Les pillards n’avaient pas pris le temps de détruire les réserves ; c’était heureux, mais l’assurance d’avoir le ventre plein ne cachait pas une autre difficulté : on n’était que quatre à bord pour manœuvrer le navire. Et nos samuraï n’avaient jamais pensé devoir manœuvrer un navire !
Outre qu’il fallut tout apprendre sur le tas, il n’était pas question de dormir, ou presque pas. Le navire pirate mettait le cap plein sud. On naviguerait au large des côtes, en suivant à peu près leur tracé. Yojiro disposait de quelques cartes :
Nous allons passer au niveau des terres impériales, dit le Crabe, après une journée de navigation, et si nous continuons ainsi, nous irons dans les eaux des terres de la Grue. Et ensuite, les Fortunes seules savent où !

Le lendemain, le vent tomba complètement ; c’en devint désespérant car la Muraille n’avançait presque plus. Tout ce temps, le navire ennemi restait en vue, très loin, toujours sur le fil de passer l’horizon, et lui non plus était presque figé sur les vagues. Il se mit à tomber une pluie incessante, monotone. L’océan était couleur d’acier, le ciel gris ; c’était une poursuite immobile. Les deux navires dérivaient sur l’eau, arrosés sans fin par les eaux maussades. Nulle terre en vue, rien que les étendues houleuses ; sur les vagues, quelques paquets d’algues et parfois de grands geysers d’eau, soufflés par des créatures monstrueuses évoluant dans ces parages.
Perchée en haut du mât, à la vigie, Maya n’apercevait que ce décor en plus grand. La pluie gouttait fort sur les planches de bois du navire et les voiles s’alourdissaient du ruissellement incessant. Plusieurs tonneaux de riz, attaqués par le moisi, durent être vidés à la mer. Des rats grignotaient dans les cales.
La Muraille allait-elle rejoindre, dans les légendes de la Mante, la longue suite de ces navires qui ne revinrent jamais ? Même pas, car nul ne savait où, à l’heure actuelle, se trouvait le navire avec nos héros !
Peut-être le Gouverneur de Morikage Toshi avait-il enfin envoyé une autre troupe sur l’île sous le vent ? Dans ce cas, ne croirait-on pas que nos héros avaient bel et bien disparu ? Comprendrait-on jamais le drame qui s’était déroulé là-bas, en trouvant les corps dans le sable ?

Après une journée interminable, le vent revint peu à peu, la pluie fut chassée vers la côte et le navire fut comme revigoré. Les voiles se tendirent et la proue perça de nouveau les vagues. Un timide soleil perçait les nuages.
Rien n’est perdu, disait le Crabe, nos ennemis sont toujours en vue !... Si par malheur, ils parvenaient à nous prendre de vitesse, nous pourrions revenir vers les terres et organiser une expédition pour les retrouver. Car ils n’iront pas loin sur leur coque de noix !
Mais Yojiro évitait soigneusement de mentionner les terribles tempêtes qui pouvaient se déchaîner en mer, et auxquels les marins de la Mante aussi bien que du Crabe avaient donné des noms, à la hauteur de leur violence. Entre autres, le Crabe craignait de voir déferler sur la Muraille le typhon Osano-Wo, du nom de la Fortune des bushis, énorme trombe chargée d’éclairs et qui avait déjà réduit des « tortues de fer » en misérables débris ; les monstres ne manquaient pas, sur l’océan. Les autres samuraï songeaient-ils que peut-être, jamais ils ne reverraient Rokugan ?
Ils s’étaient embarqués sur ce navire, croyant à une petite excursion plaisante, et voilà qu’ils étaient embarqués dans une croisière à l’issue incertaine. On évitait d’évoquer ce genre de malheurs, mais chacun devait y penser. A chaque décision prise de continuer, d’explorer les îles, de traquer ses habitants inconnus, ils avaient fait un pas en avant vers leur destin.

A la fin du troisième jour, alors qu’il semblait s’être déroulée une éternité depuis la dernière fois qu’on avait vu la terre, le navire ennemi changea son cap.
- Il vire en direction de l’est, dit Yojiro. Soit il est se sent prêt à affronter les horreurs au-delà des mers connues, pour nous échapper, mais alors il va à sa perte, et nous aussi si nous le suivons ; soit il y a une terre non loin d’ici.
- Il ne peut s’agir que de cela, dit Mitsurugi.
- Je veux le croire, dit Yojiro, mais nous sommes encore loin des archipels du clan de la Mante.
- Peut-être, mais il peut y avoir d’autres îles. Il y a quelques jours, j’ignorais encore qu’il y avait des terres au large du pays du Phénix, Yojiro-san.
- Il faut être insensé, dit le Crabe, pour quitter la terre de ses Ancêtres et chercher l’aventure sur ce pays d’eau, où il n’y a rien de bon à trouver.

Au milieu du quatrième jour, alors que nos héros avaient résolument suivi le navire, et redoutait avec effroi d’apercevoir, à tout instant, le bord du monde, les vagues se soulevèrent, retombèrent, et on aperçut enfin un bout de terre.
Un fort brouillard s’était levé. Le vent était à nouveau retombé. Des morceaux de troncs flottaient sur l’eau, des paquets d’algues encore. Le brouillard étouffait les sons ; on n’entendait plus, sous le ciel opaque, que le navire qui grinçait en permanence sur les flots huileux.
Le navire ennemi s’était transformé en une silhouette noire ; il approchait de la côte.
Yojiro fit descendre les voiles. La Muraille s’arrêta, au beau milieu de la nappe de brume épaisse. On se réunit dans la cabine :
- Voilà la situation, dit le Crabe. Nous savons que nos ennemis vont trouver refuge sur cette île. Nous ignorons combien ils sont là-bas. Nul ne sait où nous nous trouvons. Nous ne pouvons compter sur aucun secours. Si nous ne revenons pas, nos familles nous croiront disparus, emportés par quelque démon des mers.
Etait-ce si loin de la vérité ?
- Il faut y aller, dit Sasuke. Nous n’avons pas fait ce chemin pour rien. Des samuraï de l’invincible Empire d’Emeraude ne reculent pas devant quelques pillards. Où qu’il aille, un samuraï avance franchement, sans un pas en arrière.
- Je suis d’accord, dit Mitsurugi. Les assassins des hommes de notre clan doivent être punis.
- Je vous suivrai, dit Maya.
- Entendu, dit Yojiro. Alors mettons la barque à la mer.

- Nous ne pouvons tous y aller, dit Sasuke. Ce navire est notre seul moyen de repartir. Il faut qu’au moins l’un d’entre nous reste à bord.
- C’est juste, dit Mitsurugi.
- Ce sera donc moi, dit Yojiro. Je suis le seul à pouvoir manœuvrer ce navire, pour préparer le départ.
- C’est indispensable, dit Sasuke.
- Nous irons à terre, dit Mitsurugi, et tu te tiendras prêt pour quand nous reviendrons, avec ou sans nos compagnons, mais avec la tête de ces ordures, c’est certain !
- Alors hajime, samuraï !

Nos héros avalèrent un solide repas ; puis Mitsurugi et Sasuke attachèrent leurs armures, pendant que Maya récitait une prière aux Fortunes. Yojiro les aida à descendre dans la barque, qui semblait posée à même la brume.
Mitsurugi donna un premier coup de rame ; Yojiro alluma une pipe, et bientôt, le navire disparaissait dans le flou. Le Crabe entendit encore quelques coups de rame, puis plus rien. Il était seul sur la mer brumeuse.

A suivre...Samurai
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#22
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE

Les deux samuraï et l’Ize-Zumi ne virent rien pendant longtemps ; ce ne fut que lorsqu’ils aperçurent la silhouette fantômatique de la plage qu’ils découvrirent le mur de végétation qui se dressait : l’entrée d’une épaisse forêt. Elle était bien plus dense que celles des deux autres îles. Malgré le brouillard, il faisait très chaud ; les armures pesaient lourd. Sasuke mit pied à terre le premier. Il serrait contre lui le sac où il transportait ses parchemins. L’un à côté de l’autre, les deux samuraï se mirent en marche, résolus, implacables. Rien n’arrêterait leur marche, sinon la fin de tous leurs ennemis ou leur propre mort.
Ils entrèrent dans la forêt qui sembla s’ouvrit sur eux comme une gueule et se refermer quand ils eurent fait quelques pas. Maya restait en arrière et observait. On rencontra bientôt une pente raide, glissante, qu’il fallut gravir, en s’accrochant aux racines et aux branches, presque à plat ventre. Rien qui pût décourager les deux samuraï, animés d’une volonté inébranlable.
Enfin on atteignit un plat, où clapotait une petite mare, pleine de gros moustiques. Sasuke avait dû finir la montée à genoux, en se hissant grâce aux lianes solides qui pendaient. Il releva la tête et vit alors un pied qui pendait devant lui. Il recula d’un pas et se mit debout : un pendu !
Il avait été mis à nu, écorché sur une partie du torse. Mitsurugi reconnut un des travailleurs. On continua et bientôt, d’autres pendus apparurent, au milieu des branchages. Ils avaient subi le même traitement : torturés puis pendus, comme des voleurs de poules.
- « Ils » les ont mis là pour nous, dit Mitsurugi, de derrière son masque.

Face à ce spectacle, les deux samuraï se sentirent prîs d’une torpeur implacable. Perdus dans cette forêt, observés par les yeux exorbités des pendus et les mille créatures tapis autour d’eux, ils avançaient au ralenti, de plus en plus lourds, impotents, dans ce monde étrange, qui révélait pas après pas ces recoins intestinaux.
Après avoir passé la mare et les arbres aux pendus, Mitsurugi découvrit un spectacle encore pire, si répugnant qu’il se demanda s’ils n’étaient pas arrivés dans la demeure d’un démon. Les soldats de l’équipage étaient là, empalés sur d’autres arbres. Les pieux affûtés leur avaient brisé la poitrine. Ils étaient défigurés, brûlés et entaillés.
La colère et le dégoût, brûlants, envahirent les deux samuraï, tandis que Maya, impassible en apparence, priait ses Ancêtres de l’aider à sortir de cet enfer.

Samurai

Du moins étaient-ils sur la bonne piste. Les pendus montraient le chemin. Après avoir écarté de grandes fougères pleines de pucerons, Sasuke vit une bâtisse, après la forêt. Les trois explorateurs s’accroupirent pour l’observer. Un avant-poste fortifié, avec des fondations en pierre et des palissades de bois. Deux tours d’observation. Sasuke sortit ses parchemins de sort les plus destructeurs et les glissa dans sa manche, à portée de main.
- Combien peuvent-ils être là-dedans ?
- Une dizaine, peut-être plus, murmura Mitsurugi. Et nous ne sommes que trois.
- Les kamis du Feu peuvent nous venir en aide. Une fois qu’ils seront invoqués sur ce bâtiment, nous pouvons l’investir et semer la mort en un rien de temps.
- Oui, nous n’avons rien à craindre à y mettre le feu, dit le bushi. Maintenant qu’ils ont tué tout l’équipage… L’honneur exige quand même que nous leur disions qui nous sommes…
- Je te suis. A ton signal, je déchaînerai les enfers.
- Hajime !

Les deux Phénix se relevèrent et sortirent de la forêt. Ils se trouvaient sur une pente gris noir, de pierre épaisse. Une puante fumée transpirait du sol –à croire qu’un kansen avait pondu ses œufs dans le sous-sol !
- Sortez de là ! cria Mitsurugi.

Pas de réponse. Il y avait des cendres dans l’air, qui retombaient lentement.
- Sortez, hurla encore le Phénix.

Au sommet du fort apparut un homme en armure d’ashigaru, un mempo grimaçant sur le visage.
- Partez d’ici !
- Mon nom est Shiba Mitsurugi !... J’étais à la tête de cet équipage !
- Nous les avions emmenés, samuraï ! Ils étaient nos prisonniers !
- Maudits ! Vous les avez tués comme des chiens !
- Ils n’étaient pas assez loquaces à notre goût ! Maintenant, partez ou vous subirez le même sort !
- Venez vous battre ! Appelez votre seigneur ! Vous m’entendez !... Appelez-le ! Je le défie en duel sur le champ !
- Pauvre fou ! Tu ne mesures pas la portée de tes paroles ! Pars d’ici tant que tu as encore ta vie !
- Je ne partirai pas sans vos têtes !... Sasuke !
Le shugenja déplia son parchemin et courut vers le fort. Soudain, des archers surgirent en haut des remparts et lancèrent une volée de flèches. Mitsurugi se précipita : il arriva à la hauteur du shugenja, qui avait évité les traits meurtriers ; il commença la lecture de son parchemin. Les archers rencochèrent et visèrent. Mitsurugi se jeta devant Sasuke et reçut à sa place une flèche, qui se ficha en sifflant dans sa poitrine. Le bushi tomba à terre. Maya courut vers lui.
- Terminez-en, ordonna Mitsurugi, en crachant du sang.

Sasuke, fermement, lut jusqu’au bout le rituel et quatre météores crépitants partirent vers le fort, comme catapultés de la main du shugenja. Ils atterrirent et explosèrent de l’autre côté de la palissade. On entendit des hommes hurler ; deux tombèrent hors du fort, tandis que les rondins s’embrasaient.
- Allez-y, gémit Mitsurugi.

Sasuke rangea son parchemin et invoqua son katana enflammé, et courut à la porte. Maya l’enfonça d’un coup de pied et le shugenja se lança à l’intérieur, cerné d’une aura de flammes. Ce fut la curée. Les occupants du fort, la moitié d’entre eux réduits à l’état de torches humaines, couraient en hurlant pour échapper aux assaillants. Sasuke trancha à vif ceux qui passaient, tandis que sa lame brûlait tout ce qu’elle touchait ; les hurlements des bandits se joignaient au ronflement du braiser. Maya reçut un mauvais coup de lame et recula, pendant que Sasuke achevait le travail en jetant une dernière boule de feu, dont l’explosion fit craquer la palissade arrière, qui s’effondra sur les fuyards. Puis il sortit de cet enfer ; dans son dos, les flammes prenaient partout et atteignaient une taille gigantesque.
Appuyé sur l’épaule de Maya, Mitsurugi redescendait la pente. Ce fut ensuite Sasuke qui le porta jusqu’à l’entrée de la forêt. L’air, plus humide, était aussi plus respirable, tandis que sur la pente, on sentait l’œuf pourri et la chair grillée…
On allongea le bushi à terre : la flèche, ralentie par l’armure, ne s’était pas enfoncée trop profondément dans la poitrine. Maya, qui avait appris l’art médical dans son temple, put extraire la pointe. Mitsurugi recracha, mais parvint à se remettre debout, aidé par le shugenja.
- Ils sont presque tous morts, dit Sasuke ; quelques-uns ont pu s’enfuir. Deux ou trois, pas plus…
- L’essentiel est fait, dit le bushi. Nos camarades sont vengés…
- Et nous ne savons même pas qui ils sont, dit Maya.

La descente fut pénible. Maya avait l’épaule douloureuse. Chaque pas coûtait à Mitsurugi, mais avec de fréquentes étapes, on put rejoindre la plage. En chemin, on nettoya la blessure du bushi et on but dans un bassin d’eau claire.
Sur la plage battue par le vent, nos héros retrouvèrent la barque. Sasuke la poussa à l’eau, tandis que Maya aidait Mitsurugi à s’y allonger. Du brouillard surgit la Muraille : Yojiro l’avait amené aussi près que possible des côtes. A la barre, il manoeuvra pour aider à l’approche de la barque. On hissa lentement Mitsurugi à bord grâce à trois solides cordes. Il poussa un cri de soulagement en arrivant à bord.
Sur l’île, les flammes s’élevaient de plus en plus haut. On entendait le craquement sinistre du fort. Au loin, un navire prenait la mer.
- Malédiction, dit Yojiro, ils sont parvenus à prendre la mer…
- Nous ne sommes plus en état de les poursuivre, cela nous emmènerait trop loin, dit Sasuke.
- Oui, rentrons vite, dit le Crabe.

Yojiro dégagea le navire des dangereux parages des récifs et mit le cap plein ouest.
- J’ignore où exactement nous arriverons, mais dans cette direction, nous ne pourrons qu’arriver vite !

Samurai

On installa Mitsurugi dans la cabine la plus confortable. Maya recousut comme elle put la blessure. Yojiro apporta au blessé la réserve d’urgence de saké ; abruti par la boisson, Mitsurugi sombra dans le sommeil. Le jour d’après, il en eut de la fièvre à délirer ; mais Maya assura que ce feu du corps était nécessaire pour chasser les démons.
- Si tu le dis, grogna le Crabe.

L’Ize-Zumi se remettait doucement de sa blessure. Elle avait une vilaine entaille, qu’elle referma elle-même. La Muraille profita des vents qui soufflaient vers Rokugan pour rentrer. Mais il y eut encore une journée d’attente, monotone, interminable. Le soleil était revenu, mais il était accablant de puissance. La mer était devenu miroir, éblouissante, et la force insupportable de cette lumière terrassait qui l’observait.
- Nous avons dérivé, dit Yojiro, c’est évident, car nous devrions déjà voir la terre…
Il craignit un moment d’être le jouet de quelque démon, qui aurait emmené, par un sortilège puissant, la Muraille dans un voyage sans retour. On racontait ainsi des histoires, d’équipages navigant jusqu’à la mort, tournant en rond sur le grand océan.
- Non, regarde, s’écria Sasuke, terre !
Oui, c’était bien les côtes !
- C’est trop grand pour être une de ces maudites îles, hurla le Crabe. Nous revoilà chez nous !
Le navire avança et on discernait de mieux en mieux la côte : de riches cités, et de grands navires, luxueux, flottant paresseusement. De grands drapeaux claquant, glorieux, aux vents marins. Les terres du clan de la Grue.
- Allons, nous n’avons pas tant dévié que ça ! dit Sasuke.
Yojiro s’alluma une pipe, goguenard :
- Il va falloir demander l’hospitalité à ces efféminés du clan de la Grue !
- Je le crains, sourit Sasuke.
- Comment va Mitsurugi ?
- Mieux, il se repose. La fièvre est retombée. La plaie n’a pas pris une vilaine tournure.

Un bâtiment des garde-côtes s’approcha du navire pour les identifier.
- Vas-y, dit Yojiro, car si c’est moi qui leur parle, ça va mal se passer !
Les Crabes et les Grues étaient en effet en guerre depuis plusieurs années ; la famille marchande des Yasuki avait quitté le clan du bras droit de l’Empereur pour rejoindre les défenseurs de la Muraille. Depuis, les relations s’envenimaient et les batailles faisaient rage dans le sud de l’Empire.
C’est donc Isawa Sasuke qui expliqua la situation aux douaniers de la Grue.
- Nous allons vous accompagner, dirent-ils.

Nos samuraï furent cordialement accueillis en terre Asahina. Mais de mémoire de samuraï, on n’avait jamais vu ensemble deux Phénix, un Ize-Zumi et un ingénieur Crabe sur un bateau. Cela ressemblait au début d’une plaisanterie…
Les soigneurs Asahina procurèrent des soins magiques à Mitsurugi, dont la blessure se referma. Sa douleur même disparue, et il en ressentit un immense bien être. Mais on fit poliment comprendre à nos héros qu’ils ne pouvaient séjourner trop longtemps. Leur histoire sentait le roussi, et les pacifiques Asahina souhaitaient moins que tout des ennuis. Ils étaient trop honorés, bien sûr, d’aider leurs amis Phénix et leurs invités mais…

- Mais vous nous aimez mieux loin de chez vous, hein, bande d’hypocrites, maugréa Yojiro, alors que la Muraille reprenait la mer.
- Allons, nous rentrons à la Cité, dit Mitsurugi, le pire est derrière nous.
En quoi il se trompait…
Les Asahina avaient prêté un équipage pour le navire. Yojiro fixa un cap sûr, le long des côtes.
- Ça prendra le temps que ça prendra, dit-il, mais au moins, comme ça, on sait où on va !

A suivre...Samurai
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#23
De ces hauts faits nous pouvons en tirer la conclusion suivante : tout est de la faute du Craberedaface2

Mais que c'est agréable à liresmile
Reply
#24
maudit vrabeOuimaisnon
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#25
Contresens sur le texte.Ouimaisnon
Reply
#26
CHRONIQUES DE L'EMPIRE D'EMERAUDE

La Muraille mit quatre bonnes journées à remonter jusqu’aux terres du Phénix. Ils allaient en avoir des choses à raconter au Gouverneur ! Mitsurugi s’inquiétait d’abord de ce qu’on croyait d’eux : les pensaient-on morts ?
Quand ils arrivèrent en vue du port de la Cité de la Forêt des Ombres, ils constatèrent qu’il y avait un nombre anormal de navires en rade.
- Zakennayo, grogna Yojiro, qu’est-ce que cela veut dire ?

La Muraille approcha. On discernait les pavillons des navires. De grands bâtiments.
- L’un d’eux appartient au clan… du Scorpion, annonça Sasuke, de plus en plus inquiet. Et le second arbore un pavillon de famille impériale !
- J’espère qu’ils ne sont quand même pas venus exprès nous accueillir, dit Mitsurugi.
En quoi il espérait mal.
Sur la plage, une forte troupe de bushi Phénix s’étaient réunis. A leur tête, le gunso Shiba Satoru.
- Konnichi-wa, tenta, faussement joyeux, Mitsurugi, content de revoir son camarade.
- Konnichi-wa, fit Satoru, martial. Veuillez me suivre, samuraï.
On ne dit plus un mot. Satoru était venu avec une dizaine d’hommes. Il emmena les rescapés chez le Gouverneur. Dans la cour du noble palais se tenaient quatre Scorpions, dans leurs armures rouge et noir, qui fixèrent en ricanant les arrivants. Mitsurugi et Sasuke les défièrent du regard, mais les Scorpions ne baissèrent pas les yeux.
En entrant dans la salle du conseil, nos héros surent que le pire était au rendez-vous. Très pâle sur son trône, le Gouverneur Shiba Otondo accueillit Shiba Satoru. Et aux côtés du Gouverneur, un seigneur Bayushi richement vêtu. Et un dignitaire impérial de la famille Otomo.
- A genoux, dit le Gouverneur, autoritaire.
Shiba Satoru s’agenouilla le premier, sans hésitation. Surpris, nos héros firent bientôt de même.
- Samuraï, voici le juge Otomo Kempô, venu spécialement pour vous !
Et il s’adressait bel et bien à nos quatre héros.
Le juge s’avança et cria :
- Est-ce bien vrai, samuraï, que vous étiez à bord du navire la Muraille ?
- Oui, répondirent-ils en chœur !
- Qui commandait cette expédition ?
- C’est moi, dit Shiba Mitsurugi. En ma qualité de gunso, j’étais le plus gradé à bord.
- Vous êtes-vous bien rendus sur les îles sous le vent, y prendre du bois ?
- Oui, seigneur.
- Avez-vous ramené ce bois ?
- Non, cria Mitsurugi, la tête inclinée, humilié.
- Pourquoi ?
- Nous avons été attaqués !
- Par qui ?
- Je l’ignore ! Des pillards des mers !
- Allons donc ! Etes-vous restés sur l’île où vous alliez ?
- Non, nous sommes allés voir l’île voisine.
Le juge laissa un temps. Le dignitaire Scorpion, silencieux, hocha la tête, satisfait.
- Bien, et ensuite, que s’est-il passé ?
- Nos hommes ont été tués ou capturés par un navire de ces pillards, répondit Mitsurugi. Alors nous l’avons suivi pour retrouver nos hommes !
- Où êtes-vous allés ?
- Nous avons suivi le navire jusqu’à une autre île !
- Une autre île, tiens donc !
- Oui…
- Et alors ?
- Alors nous avons débarqué ! Nous avons retrouvé nos hommes pendus ou empalés !
Le dignitaire Scorpion hocha la tête, en émettant un petit rire, mi-choqué, mi-amusé, signifiant qu’il ne fallait rien croire de ces élucubrations.
- Et ensuite, dit le juge, nous savons ce que vous avez fait ! Vous avez pris d’assaut un fortin ! Et vous l’avez réduit en cendres, après avoir massacré ses occupants !
- Nous voulions venger nos compagnons, hurla Mitsurugi.
- Savez-vous où vous vous trouviez au moins ?
- Non !
- Et pourtant, toi, gunso Mitsurugi, tu as défié en duel le chef de ces hommes, c’est bien cela ?
- Oui.
- Malheureux, savais-tu à qui tu t’adressais ? Ces gens étaient des hommes du clan de la Tortue !
- Je l’ignorais.
- Toi, Isawa Sasuke, as-tu suivi volontairement Shiba Mitsurugi ?
- Oui.
- Toi, Togashi Maya ?
- Oui aussi.
- Et toi, ingénieur Hiruma Yojiro ? Etais-tu sur cette île ?
- Tout comme, car je gardais le navire.
- Alors quand Mitsurugi parlait, c’était au nom de vous tous ! Pauvres fous !... Mitsurugi a défié le chef des hommes du clan de la Tortue ! Et ces samuraï recevaient à ce moment d’honorables membres du clan du Scorpion ! Vous les avez tous tués ! Sans en avoir reçu l’ordre, comme de vulgaires pillards !
- Ils ont tué nos hommes, seigneur !
Le Scorpion s’avança alors et pointa un terrible doigt accusateur sur les samuraï. D’une voix glaçante, il dit :
- Ces hommes se sont aventurés sur nos terres, sans y être autorisés. Nous recevions l’aide de nos amis de la Tortue et mes hommes ont dû vouloir éloigner ces samuraï trop curieux ; au lieu de s’en aller, ils ont persisté et déclenché un massacre.

Mitsurugi, Sasuke et Maya revoyaient les corps décharnés, écorchés, pendus… Mensonges, mensonges de Scorpion !
- Vous avez compris, samuraï ? dit alors le Gouverneur.
D’entendre cette voix, c’en était presque rassurant.
- Oui, j’ai compris, dit Mitsurugi. Et je ne faillirai pas.
Il se redressa et enleva son armure. Puis il défit ses vêtements et se mit torse-nu. Et posa son wakizashi devant lui. Sasuke fit de même, imité par Yojiro. Le Gouverneur devenait de plus en plus blanc.
- Je ne faillirai pas, fit Mitsurugi.
- Ce comportement vous ferait presque honneur, dit le juge, s’il n’y avait le plus abominable… Fous, pauvres fous… Lorsque vous avez, par la bouche de Mitsurugi, défié le chef des Tortues, vous avez défié le daimyo de ce clan… Et ce daimyo, samuraï, c’est le divin fils du Ciel, l’Empereur lui-même !

Abasourdis, nos héros plaquèrent le front à terre en entendant ce nom. Ils ne connaissaient les Tortues que de nom, et jamais n’auraient imaginé que ce fût l’Empereur à sa tête !
- Vous avez défié l’Empereur, tonna le juge. Défié le divin Hanteï en personne !

Il aurait fallu une immense salle pour profiter pleinement de l’effet. Le Gouverneur se cramponnait au bras de son trône.
Mitsurugi releva la tête un instant : il croisa alors le regard effrayé de Shiba Satoru… Shiba Satoru !
- Aussi, reprit le Juge, le sacrifice de votre vie est inutile ! Dérisoire ! En comparaison du crime que vous avez commis !... Ah, vous avez voulu défier l’Empereur ! Merveilleux !...
- Pourquoi alors, cria Maya, le clan du Scorpion se fait-il aider par des crapules de la Tortue !
- Silence, fit, solennel, le dignitaire Scorpion. Dénies-tu au divin Empereur le droit d’aider l’un de ses clans !
Maya revoyait la poudre noire, les caisses pleines de poudre…
- Allons, finissons-en vite, dit le Juge, car cela devient peu ragoûtant à voir !
Nos héros prirent une inspiration, prêts pour accomplir l’acte du sacrifice.
- Inutile de vous ouvrir le ventre, samuraï ! Relevez-vous !
Etonnés, nos héros relevèrent la tête.
- Oui, relevez-vous… et partez !... Partez comme vous êtes ! C'est-à-dire plus rien ! Aujourd’hui, vous n’êtes plus rien ! Oui, laissez vos armures, laissez votre passé, votre honneur, vos terres, votre nom ! Quittez les terres du Phénix au plus vite ! Partez sur les routes, et puissiez-vous y trouver une mort rapide ! Cela serait votre châtiment le plus doux !

Sasuke releva la tête. Il fixa le Gouverneur, qui soutint son regard, mais comme un parent jette un dernier regard à un mourant. Sasuke regarda de nouveau à terre. Il avait ce qu’il voulait. Il sentait que Shiba Otondo désapprouvait ce simulacre de justice.

Shiba Satoru n’osait plus regarder.
Il y eut un long moment de silence. Plus personne ne parlait.
Alors, lentement, le premier, assumant jusqu’au bout l’infamie, Mitsurugi se leva. Il faillit être secoué par un sanglot, mais il se retint. Il se leva, torse nu, et remit son daisho à sa ceinture. Il ramassa ses quelques habits et partit, pas après pas, se sentant mourir un peu plus à chacun d’eux.
Yojiro se releva lui aussi, puis Sasuke et Maya.
Tous les quatre, ils quittèrent le palais. Plus personne ne parlait.

Dans ce silence de mort, les trois samurai et l’Ize-Zumi traversèrent le palais. Le temps et la vie étaient suspendus à leurs pas.
La porte du palais se referma sur eux, et, comme des cadavres animés, ils continuèrent à marcher.

Seuls ! Seuls…

Ils quittèrent la ville, sans se retourner, sans parler, en respirant à peine. Ce n’est que longtemps après leur départ qu’on se remit à vivre dans la Cité. Rapidement, le dignitaire Scorpion retourna sur son navire, de même que le Juge.
Blanc comme un linge le Gouverneur les raccompagna et les salua. De retour dans son palais, avec Shiba Satoru à ses côtés, il se prit la tête dans les mains et pleura comme un enfant. Satoru s’agenouilla devant lui et ne dit rien.
- Des rônins, murmura le Gouverneur, ils les ont réduits à l’état de rônins… Et ils s’en vont ainsi, sans rien ajouter…
- Des rônins, répéta Satoru, la voix blanche, des rônins…

Samurai

Le soir, nos héros trouvèrent refuge dans une misérable cabane, à la lisière des bois. Ils allumèrent un feu, et mangèrent un lièvre qu’ils avaient attrapé. Devant les flammes crépitantes, ils restèrent sans rien dire. Dans ces flammes, il y avait les flammes du navire, et du fortin. Et leur passé qui partait en cendres.

- Où irons-nous ? dit seulement Yojiro.
- Nous avons reçu l’ordre de quitter les terres du Phénix, dit Mitsurugi. Nous devons partir vers le sud. Là-bas, ce sont les terres du Lion. Si nous nous mettons à leur service, si nous sommes prêts à mourir pour eux, ils peuvent nous accepter…
- Oui, c’est vrai, dit Sasuke. Les Lions apprécient les combattants…
- Tu as bien de l’assurance, dit Yojiro.
- Il faut aller de l’avant, dit Sasuke, ne pas se désespérer.
- Mais nous avons tout perdu, dit le Crabe… Déjà, moi, j’avais perdu toute ma famille et le château de mes Ancêtres… Le château des Hiruma, détruit par un monstrueux oni… On m’avait confié une lame ancestrale de notre famille… Je suis l’un des seuls à pouvoir rouvrir le dojo de mon clan… J’étais !... J’étais l’un des derniers de notre dojo ! Maintenant je ne suis plus rien, rien…
- Il ne faut pas se désespérer, répéta Sasuke, emporté par son ardeur juvénile.
- Moi, je ne suis pas une rônin, dit Maya, car je n’étais pas samuraï, je ne suis qu’un moine après tout.
- Cela revient au même, dit Mitsurugi. Tu n’as plus de famille, plus le droit de retourner sur tes terres !
- Toi qui voulais voir du pays, ricana Yojiro.

On écouta le feu crépiter.

- On nous a chassés, reprit Mitsurugi, on a détruit notre nom de samuraï, mais pas notre honneur. Cela je le jure ! Là où nous irons, nous ne nous laisserons pas abattre comme des chiens ! Il faudra se battre pour en finir avec nous !
- Je suis d’accord, dit Sasuke. Nous sommes encore en état de nous battre, et capables de le prouver… D’ailleurs, nous ne sommes pas seuls dans notre cas. D’autres samuraï ont été déchus… Peut-être certains se sont-ils réunis… Dans ce cas, il faudra les retrouver…
- Alors nous avons du chemin, ricana Yojiro.
- Moi je ne suis pas rônin, répéta Maya.
- Nous ne nous laisserons pas faire, affirma Mitsurugi.

Samurai

Le lendemain matin, les gardes Shiba qui veillaient sur la frontière sud-ouest des terres du Phénix virent arriver trois samuraï sans armure et une femme tatouée. Les trois hommes étaient mal rasés, et tous marchaient la tête basse, l’air sombre, comme des spectres affaiblis par l’éclat de la lumière de midi. Des ombres errant dans la campagne.

Nos héros craignirent un moment qu’on ne leur fasse des difficultés, mais quand ils approchèrent pour passer la frontière, les gardes Shiba leur tournèrent ostensiblement le dos et du manche de leur naginata, frappèrent par terre trois coups, comme pour conjurer ces mauvais esprits.



Samurai<span style="color:green">FORCE ET HONNEUR, SAMURAI !<!--sizec--></span><!--/sizec-->Samurai
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#27
Applause

Tu peux rajouter à la fiche de Otomo Kempô et du Bayushi :
Désavantage:
- nemesis : les PJ coût : 10 PPsmile
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#28
Je plussoies, je dirai même que tu peux préciser :

- Nemesis : Sasuke et Mitsurugi coût : 10 PPbiggrin
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#29
Lolilolbiggrin
Après vous avoir bannis, ils ont gagné d'un coup 10PP, tombés du ciel.biggrinIls ont cru que c'était pour avoir bien jugé, mais ils ne savent pas ce qui les attend.biggrin
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#30
Ils s'en rendront compte trop tard, lorsque les katanas et les flammes les auront envoyés vers leur prochaine réincarnation en carfardfurieux
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